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Informationen zum Dokument  BGer 4P.113/2004  Materielle Begründung
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BGer 4P.113/2004 vom 07.07.2004
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4P.113/2004 /svc
 
Arrêt du 7 juillet 2004
 
Ire Cour civile
 
Composition
 
Mme et MM. les Juges Corboz, président,
 
Rottenberg Liatowitsch et Favre.
 
Greffière: Mme Aubry Girardin.
 
Parties
 
A.________,
 
recourant, représenté par Me Jacques Bercher
 
et par Me Pierre de Preux, avocats,
 
contre
 
la Présidente de la Cour de justice genevoise (Chambre civile), case postale 3108, 1211 Genève 3.
 
Objet
 
art. 9 et 29 al. 3 Cst.; assistance judiciaire
 
(recours de droit public contre la décision de la Présidente de la Cour de justice genevoise
 
- Chambre civile - du 23 mars 2004).
 
Faits:
 
A.
 
Né en 1934, A.________ est un avocat à la retraite partielle, qui administre plusieurs sociétés, dont trois sont domiciliées à Genève, une à Vaduz et quatre au Panama.
 
Il fait l'objet de poursuites intentées par la Banque O.________ (ci-après: O.________) pour deux créances portant respectivement sur 500'000 fr. et sur 800'000 fr. plus intérêts, qu'il conteste. Il doit également se défendre dans les actions en responsabilité intentées contre lui par P.________ SA en faillite et par C.________ SA.
 
Le 3 décembre 2003, deux jugements de mainlevée provisoire ont été rendus dans le cadre des poursuites intentées par O.________. Ces décisions ont confirmé de précédents jugements rendus par défaut.
 
Le 15 décembre 2003, A.________ a déposé des actions en libération de dette, en invoquant d'une part la prescription de la créance de 500'000 fr. et, d'autre part, l'invalidité du billet à ordre qu'il avait signé pour 800'000 fr. Il a été retenu que le poursuivi avait déjà agi en libération de dette pour ce billet à ordre en 1994 et que la procédure avait été suspendue d'entente entre les parties sans être reprise depuis lors.
 
B.
 
Le 19 septembre 2003, A.________ a sollicité l'assistance juridique civile complète pour déposer les actions en libération de dette dans le cadre des poursuites intentées par O.________ et pour sa défense dans les actions en responsabilité dirigées contre lui.
 
Il a notamment produit une liste dactylographiée indiquant, pour chaque société qu'il administre, les honoraires perçus annuellement, ainsi qu'un décompte de ses frais, sans justificatifs.
 
Le 12 novembre 2003, sa requête a été refusée par la Présidente du Tribunal de première instance du canton de Genève, qui a considéré qu'il n'avait pas fourni les renseignements et pièces nécessaires à l'appréciation de sa situation financière réelle. Il a notamment été retenu qu'il n'avait pas établi de manière satisfaisante ses allégués relatifs aux honoraires qu'il percevait en qualité d'administrateur de diverses sociétés.
 
Le 15 décembre 2003, A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Cour de justice. En ce qui concerne ses honoraires d'administrateur, il a déclaré être disposé à fournir les attestations des organes de contrôle des sociétés suisses, panaméennes ou lichtensteinoises. Son conseil s'est, pour sa part, déclaré prêt à le défendre gratuitement.
 
Par décision du 23 mars 2004, la Présidente de la Cour de justice genevoise (Chambre civile) a rejeté le recours de A.________ et confirmé la décision du 12 novembre 2003, au motif d'une part que la condition de l'indigence n'était pas réalisée et, d'autre part, que l'on pouvait douter des chances de succès des actions en libération de dette.
 
C.
 
Contre la décision du 23 mars 2004, A.________ interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral, en concluant à l'annulation de la décision attaquée. Il requiert par ailleurs l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure devant le Tribunal fédéral, en se référant aux arguments présentés dans son recours de droit public.
 
Invitée à répondre, la Présidente de la Cour de justice a renvoyé aux considérants de sa décision.
 
Par ordonnance présidentielle du 18 juin 2004, la requête d'effet suspensif présentée par A.________ a été admise.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours de droit public qui lui sont soumis (ATF 129 I 302 consid. 1).
 
Le refus de l'assistance judiciaire est une décision incidente qui cause un dommage irréparable, de sorte qu'elle peut être attaquée immédiatement par la voie d'un recours de droit public au Tribunal fédéral (art. 87 al. 2 OJ; ATF 126 I 207 consid. 2a; 125 I 161 consid. 1). Comme la décision entreprise n'est en outre susceptible d'aucun autre recours sur le plan fédéral ou cantonal, la règle de la subsidiarité du recours de droit public est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ).
 
Le recourant, qui a vu sa demande d'assistance judiciaire rejetée, est personnellement touché par la décision attaquée. Il a donc qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ.
 
Interjeté en temps utile (art. 32, 34 al. 1 let. a et 89 al. 1 OJ; art. 1 de la loi fédérale du 21 juin 1963 sur la supputation des délais comprenant un samedi), dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), le recours est en principe recevable.
 
2.
 
La Présidente a confirmé le refus de l'octroi de l'assistance judiciaire sur la base d'une double motivation: elle a considéré que tant la condition de l'indigence que celle liée aux chances de succès de l'action au fond faisaient défaut.
 
Lorsque la décision attaquée se fonde, comme en l'espèce, sur plusieurs motivations indépendantes et alternatives, suffisant chacune à la motiver, le recourant doit, à peine d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'entre elles viole ses droits constitutionnels (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 119 Ia 13 consid. 2 et l'arrêt cité). Le recourant respectant cette exigence, il convient d'entrer en matière.
 
La question de l'indigence sera examinée en premier lieu.
 
3.
 
Le recourant soutient qu'en refusant de reconnaître qu'il était indigent, la Présidente a violé l'article 29 al. 3 Cst. et constaté les faits de manière arbitraire, contrairement à l'art. 9 Cst.
 
3.1 Le principe, l'étendue et les limites du droit à l'assistance judiciaire gratuite sont déterminés en premier lieu par les prescriptions du droit cantonal, dont l'application ne peut être contrôlée par le Tribunal fédéral que sous l'angle restreint de l'arbitraire. L'art. 29 al. 3 Cst. offre une garantie minimale, dont le Tribunal fédéral examine librement le respect (ATF 127 I 202 consid. 3a). En l'espèce, le recourant fonde son recours uniquement sur la violation de la Constitution fédérale et ne prétend pas que les dispositions cantonales relatives à l'assistance judiciaire auraient une portée plus étendue que l'art. 29 al. 3 Cst. La Cour de céans limitera donc son examen à la compatibilité de la décision attaquée avec les garanties issues de la Constitution fédérale, étant précisé que l'art. 29 al. 3 Cst. n'a fait que codifier les règles déduites jusque-là de l'art. 4 aCst. (ATF 126 I 194 consid. 3a in fine p. 196)
 
3.2 Selon l'art. 29 al. 3 1ère phrase Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Pour prétendre à l'assistance judiciaire, il faut ainsi notamment que le requérant soit indigent, c'est-à-dire qu'il ne puisse pas assumer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille. Le Tribunal fédéral vérifie librement si les critères utilisés pour définir l'indigence au sens de cette disposition constitutionnelle ont été judicieusement choisis (ATF 120 Ia 179 consid. 3a; 119 Ia 11 consid. 3a), en se fondant sur les faits constatés dans la décision attaquée, à moins que le recourant ne démontre que la cour cantonale a retenu ou omis certaines circonstances déterminantes de manière arbitraire (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 118 Ia 20 consid. 5a). Il appartient à celui qui demande le bénéfice de l'assistance judiciaire de présenter, de manière complète, ses revenus et l'état de sa fortune en produisant, pour autant que cela soit possible, les pièces justificatives. Plus les éléments sont complexes, plus il peut être exigé du requérant qu'il expose d'une façon claire et approfondie l'ensemble de sa situation financière actuelle. Si le requérant refuse de présenter les pièces et les justificatifs qui sont nécessaires à l'évaluation de sa situation économique générale, alors son indigence pourra être niée, sans violation de la Constitution (ATF 120 Ia 179 consid. 3a p. 181 s., confirmé notamment in arrêt du Tribunal fédéral 1P.389/2002 du 7 novembre 2002 publié in Pra 2003 n° 63 p. 311, consid. 2.1).
 
3.3 En ce qui concerne la situation financière du recourant, il ressort de la décision entreprise que cet avocat à la retraite partielle vit avec son épouse, qui ne travaille pas. Les charges admissibles du couple ont été évaluées, avec majoration, à 6'156 fr. Elles comprennent un loyer de 3'052 fr. par mois, dont le recourant admet le caractère onéreux, mais qu'il justifie en raison des clients qu'il doit être en mesure de recevoir. Quant aux revenus, ils se composent d'une rente AVS pour couple de 3'090 fr. par mois, complétée par un montant que la Présidente a estimé s'élever à 2'833 fr. par mois au minimum et qui provient des honoraires perçus par le recourant en sa qualité d'administrateur de plusieurs sociétés sises à Genève, à Vaduz et au Panama. Pour établir les revenus provenant de ses fonctions d'administrateur, le recourant a établi une liste dactylographiée en indiquant, pour chaque société qu'il administre, les honoraires perçus annuellement et un décompte de frais, sans justificatifs. Il a été constaté, ce qui n'est pas contesté dans la présente procédure, que le recourant n'avait produit aucune pièce de nature à prouver ses propres allégations. Il a seulement proposé de fournir les documents et pièces nécessaires, notamment une attestation des organes des sociétés quant aux honoraires qu'elles lui versent. Enfin, il ressort de la décision attaquée qu'en février 2004, le recourant a encaissé 22'469 fr. à titre d'honoraires, sans compter les honoraires de l'année 2003 qu'il allait percevoir prochainement, soit, selon sa note manuscrite, une somme de 19'000 fr. Dans ce contexte, la Présidente a considéré que l'on pouvait raisonnablement exiger du recourant qu'il mette une partie de ces honoraires à contribution pour payer ses frais de justice, de sorte que la condition de l'indigence n'était pas réalisée.
 
En pareilles circonstances, on ne voit pas que le refus d'admettre l'indigence du recourant viole l'art. 29 al. 3 Cst. En effet, il appartenait à celui-ci de démontrer, d'une manière complète et claire, l'étendue de ses revenus annexes, ce d'autant qu'ils provenaient de plusieurs sources. Or, le recourant s'est contenté de fournir une liste établie par ses soins mentionnant, pour les sociétés qu'il reconnaissait administrer, les honoraires annuels perçus et un décompte de frais, sans justificatifs. Un tel document constitue un simple allégué, mais pas un moyen de preuve. Le recourant, avocat de formation, ne pouvait l'ignorer. En outre, dans la décision de première instance, il lui avait déjà été reproché de ne pas avoir fourni les justificatifs concernant ses honoraires. En se bornant à proposer de remettre les preuves nécessaires, le recourant n'a ainsi pas respecté son obligation de présenter les pièces et justificatifs propres à établir l'étendue de ses revenus. La Présidente pouvait ainsi, sans violer l'art. 29 al. 3 Cst., considérer que, compte tenu des 22'469 fr. reçus en février 2004 et des 19'000 fr. qu'il devait percevoir peu après, le recourant était en mesure d'assumer ses frais de justice, composés du reste uniquement des émoluments judiciaires, puisque son avocat avait déclaré renoncer à ses honoraires.
 
3.4 Lorsque le recourant soutient que les montants touchés en février 2004 devaient servir à assurer son entretien tout au long de l'année et que, par conséquent, c'est de manière insoutenable qu'il a été constaté qu'il pouvait en disposer librement, sa critique tombe à faux. En effet, comme il n'a pas prouvé, contrairement à ses obligations, l'étendue de ses revenus annexes, l'autorité n'était pas en mesure d'établir clairement sa situation financière et pouvait donc, sans tomber dans l'arbitraire, admettre qu'en regard des sommes touchées et promises au recourant au début de l'année 2004, celui-ci pouvait assumer les frais de justice qui lui étaient demandés.
 
Le refus d'admettre l'indigence du recourant n'est donc contraire ni à l'art. 29 al. 3 ni à l'art. 9 Cst. Cette conclusion suffit à justifier la décision de refus de l'assistance judiciaire. Il n'y a ainsi pas lieu d'examiner au surplus les critiques du recourant dirigées contre la seconde motivation de l'autorité cantonale relative à l'absence de chances de succès des actions en libération de dette.
 
4.
 
En conclusion, le recours doit être rejeté. Il en découle que les conclusions du recourant étaient vouées à l'échec, de sorte que la requête d'assistance judiciaire déposée par celui-ci pour la procédure devant le Tribunal fédéral doit être refusée (art. 152 al. 1 OJ).
 
Compte tenu de l'issue du litige, un émolument judiciaire sera mis à la charge du recourant (art. 159 al. 1 OJ). Quant à l'autorité intimée, elle n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 2 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
La requête d'assistance judiciaire formée par le recourant pour la procédure devant le Tribunal fédéral est rejetée.
 
2.
 
Le recours est rejeté.
 
3.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et à la Présidente de la Cour de justice genevoise.
 
Lausanne, le 7 juillet 2004
 
Au nom de la Ire Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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