BGer 1P.413/2004 | |||
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BGer 1P.413/2004 vom 24.08.2004 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1P.413/2004 /col
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Arrêt du 24 août 2004
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Fonjallaz.
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Greffier: M. Thélin.
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Parties
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X.________,
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recourante, représentée par son curateur Nicolas Perret, avocat,
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contre
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Y.________,
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intimé, représenté par Me Pierre-Xavier Luciani,
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avocat,
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Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
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Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, route du Signal 8, 1014 Lausanne.
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Objet
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appréciation des preuves
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recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal du 14 avril 2004.
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Faits:
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A.
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X.________ est une écolière née en 1990. Selon les propos de l'une de ses camarades de classe, à qui elle avait parlé en confidence, elle subissait des attouchements impudiques lors de ses séjours au domicile d'une parente, du fait de Y.________, le mari de cette dernière. Ce récit fut successivement rapporté à diverses personnes et autorités, jusqu'au Juge d'instruction cantonal du canton de Vaud qui ordonna l'ouverture d'une enquête. Celle-ci aboutit au renvoi de Y.________, accusé d'actes d'ordre sexuel sur des enfants, devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne. L'accusé contestait entièrement le comportement qui lui était imputé.
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B.
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A l'audience du 19 février 2003, le Tribunal correctionnel a interrogé la victime présumée, hors la présence de l'accusé. L'enfant a alors confirmé ses déclarations antérieures concernant des attouchements sur tout le corps, notamment sur la poitrine et l'entre-jambes, par dessus les vêtements; elle a en outre déclaré, pour la première fois, que l'accusé avait exprimé l'intention de la filmer nue alors qu'elle prendrait une douche. Le tribunal a d'ailleurs constaté que la victime n'avait pas été interrogée dans le cadre de l'enquête judiciaire; on disposait seulement de l'enregistrement vidéo d'une audition faite, de sa propre initiative, par le service de protection de la jeunesse de son canton de domicile. Le Tribunal correctionnel a ordonné le renvoi des débats jusqu'à l'exécution d'un complément d'enquête; celui-ci consisterait dans une nouvelle audition de la victime par la police judiciaire, audition qui serait enregistrée de la même manière. Les parties eurent l'occasion d'indiquer les questions qu'elles souhaitaient faire poser à la victime.
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Le Tribunal correctionnel s'est prononcé le 11 décembre 2003, après ce complément d'enquête et à l'issue d'une nouvelle audience. Il a libéré Y.________ de l'accusation élevée contre lui. Les juges ne pouvaient pas se convaincre de sa culpabilité car l'enfant n'avait jamais montré aucune réticence à se rendre chez lui; elle a au contraire insisté pour prolonger l'un de ses derniers séjours dans sa famille. Ils ne comprenaient pas non plus pourquoi l'enfant n'avait parlé qu'à l'audience précédente des intentions de l'accusé concernant la douche, alors qu'auparavant, on lui avait demandé sans résultat si ce dernier n'avait pas "fait autre chose". La camarade d'école avait rapporté les propos concernés au moment où une autre élève avait fait état d'actes semblables commis à son préjudice; le tribunal jugeait que dans ce contexte, les deux fillettes avaient pu céder à un "excès d'imagination", sans pouvoir ou savoir revenir sur leurs dires au moment de l'intervention des adultes. Enfin, l'accusé avait fait preuve de franchise en admettant d'emblée qu'il s'était parfois trouvé seul avec l'enfant, alors qu'il connaissait déjà la nature des reproches dirigés contre lui.
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C.
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Sans succès, représentée par son curateur, X.________ a déféré ce jugement à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal, qui a rejeté son recours le 14 avril 2004.
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D.
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Agissant par la voie du recours de droit public avec le même représentant légal, cette mineure requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal. Elle se réfère à l'art. 9 Cst. et soutient que l'acquittement de Y.________ repose sur une appréciation arbitraire des preuves.
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Une demande d'assistance judiciaire est jointe au recours.
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Invités à répondre, le Ministère public cantonal et l'accusé acquitté proposent le rejet du recours; la juridiction intimée a renoncé à déposer des observations.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, celui qui se prétend lésé par une infraction n'a en principe pas qualité pour former un recours de droit public contre les ordonnances refusant d'inculper l'auteur présumé, ou prononçant un classement ou un non-lieu en sa faveur. En effet, l'action pénale appartient exclusivement à la collectivité publique et, en règle générale, le plaignant n'a qu'un simple intérêt de fait à obtenir que cette action soit effectivement mise en oeuvre. Un intérêt juridiquement protégé, propre à conférer la qualité pour recourir, est reconnu seulement à la victime d'une atteinte à l'intégrité corporelle, sexuelle ou psychique, au sens de l'art. 2 de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI), lorsque la décision de classement ou de non-lieu peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles contre le prévenu (ATF 128 I 218 consid. 1.1 p. 219; 121 IV 317 consid. 3 p. 323, 120 Ia 101 consid. 2f p. 109).
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La situation n'est pas différente lorsque le procès pénal est conduit à son terme mais aboutit à un acquittement de l'auteur présumé. En l'occurrence, la recourante procède à titre de victime d'une atteinte à l'intégrité sexuelle, de sorte qu'elle a qualité pour contester le verdict favorable à l'intimé.
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2.
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L'appréciation des preuves est arbitraire, donc contraire à l'art. 9 Cst., lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'invalide l'appréciation retenue par le juge de la cause pénale que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective ou adoptée sans motifs objectifs. Il ne suffit pas que les motifs du verdict soient insoutenables; il faut en outre que l'appréciation soit arbitraire dans son résultat. Il ne suffit pas non plus qu'une solution différente puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 58; 127 I 38 consid. 2 p. 40, 126 I 168 consid. 3a p. 170; voir aussi ATF 129 I 8 consid. 2.1 in fine p. 9).
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Le Tribunal correctionnel devait statuer sur la base des déclarations divergentes de l'accusé et de la recourante, sans disposer d'aucune autre preuve directe de ce qui a pu se produire entre eux dans les moments où ils se trouvaient seuls au domicile de celui-là. Dans son jugement, le tribunal a indiqué les circonstances et le raisonnement qui le conduisaient à mettre en doute la version de la recourante et, par conséquent, conformément à la présomption d'innocence, à préférer celle de l'accusé. Contrairement aux affirmations développées à l'intention du Tribunal fédéral, il n'apparaît pas que les éléments ainsi retenus soient étrangers à une appréciation objective des preuves ou eux-mêmes fondés sur des constatations erronées. C'est en vain que la recourante propose, au sujet desdites circonstances, une interprétation différente qui serait peut-être également défendable, car une argumentation de ce genre n'est pas suffisante à l'appui du grief d'arbitraire. Le recours pour violation de l'art. 9 Cst. se révèle donc mal fondé, ce qui entraîne son rejet.
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3.
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Selon l'art. 152 OJ, le Tribunal fédéral peut accorder l'assistance judiciaire à une partie à condition que celle-ci soit dans le besoin et que ses conclusions ne paraissent pas d'emblée vouées à l'échec.
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Les frais de représentation en justice d'une enfant mineure, telle que la recourante, incombent en principe à ses parents, et l'assistance judiciaire n'entre en considération que lorsque ces derniers ne sont pas en mesure d'y pourvoir, y compris lorsqu'ils se trouvent dans un conflit d'intérêts avec l'enfant et que l'avocat fournit ses services à titre de curateur (ATF 119 Ia 134; voir aussi ATF 127 I 202). En l'occurrence, il ne ressort pas du dossier que les père et mère de la recourante soient dans le besoin et l'acte de recours ne fournit aucun renseignement sur leur situation. Ce mémoire indique seulement que la recourante est elle-même dépourvue de ressources. Dans ces conditions, la première des exigences prévues par l'art. 152 OJ n'est pas satisfaite, ce qui conduit au rejet de la demande d'assistance judiciaire.
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En raison du contexte particulier de l'affaire et des relations existant entre les parties, le Tribunal fédéral s'abstiendra de percevoir l'émolument judiciaire et d'allouer des dépens (art. 154 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté.
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2.
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La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3.
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Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire ni alloué de dépens.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Procureur général et au Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 24 août 2004
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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