BGer 1A.304/2004 | |||
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BGer 1A.304/2004 vom 02.03.2005 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1A.304/2004 /col
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Arrêt du 2 mars 2005
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Féraud, Président,
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Aemisegger et Fonjallaz.
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Greffier: M. Zimmermann.
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Parties
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la société A.________,
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recourante, représentée par Me Lucien Feniello, avocat,
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contre
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Juge d'instruction du canton de Genève,
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case postale 3344, 1211 Genève 3,
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Cour de justice du canton de Genève, Chambre d'accusation, case postale 3108, 1211 Genève 3.
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Objet
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Entraide judiciaire internationale en matière pénale avec la Belgique,
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recours de droit administratif contre l'ordonnance de la Cour de justice du canton de Genève du 22 novembre 2004.
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Faits:
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A.
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Le 8 janvier 2004, le Ministère de la justice du Royaume de Belgique a adressé à l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) une demande d'entraide judiciaire fondée sur la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, entrée en vigueur le 1er mai 1998 pour la Belgique et le 11 septembre 1993 pour la Suisse (CBl; RS 0.311.53). La demande était présentée pour les besoins de la procédure conduite par le Juge d'instruction Van Hoeylandt, du Tribunal de première instance d'Anvers, contre X.________ et son épouse Y.________. Ceux-ci sont prévenus de recel et de blanchiment d'argent, en relation avec une fraude à la TVA (selon le mécanisme dit du "carrousel"). La demande tendait à la saisie de comptes ouverts auprès de la Banque B.________ à Genève, au nom de X.________, alias Z.________, et Y.________, ainsi que de diverses sociétés.
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Le 28 janvier 2004, l'Office fédéral a délégué l'exécution de cette demande au Juge d'instruction du canton de Genève.
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Le 3 février 2004, l'autorité requérante a complété la demande par un exposé des faits. X.________ était soupçonné d'avoir acquis des téléphones portables en grandes quantités, à un prix inférieur à celui du marché. Puis il vendait ces appareils fictivement à plusieurs sociétés à l'étranger qu'il dominait. Sur la base de fausses factures, il avait obtenu frauduleusement le remboursement de la TVA, pour un montant total de 24'061'814,10 euros.
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Le 3 février 2004, le Juge d'instruction genevois a ordonné, au titre des mesures provisoires, la saisie de tous les comptes détenus auprès de la banque B.________ par les personnes et sociétés désignées dans la demande. Il a confirmé cette mesure dans deux ordonnances d'entrée en matière des 6 février et 30 mars 2004.
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Le 5 juillet 2004, le Juge d'instruction a rendu une décision de clôture de la procédure. Il a maintenu la saisie des comptes suivants:
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- n°1, ouvert auprès de la banque B.________;
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- n°2, ouvert auprès de la banque C.________;
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- n°3, ouvert auprès de la banque D.________;
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- n°4, ouvert auprès de la banque F.________.
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Le Juge a en outre ordonné la saisie des avoirs détenus par l'avocat E.________ pour le compte de X.________, ainsi que la remise de la documentation relative aux comptes saisis.
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Le 22 novembre 2004, la Chambre d'accusation du canton de Genève a déclaré irrecevable le recours formé par la société A.________, titulaire des comptes saisis, contre les décisions d'entrée en matière; elle l'a admis partiellement en tant qu'il était dirigé contre la décision de clôture, qu'elle a annulée en renvoyant la cause au Juge d'instruction pour nouvelle décision au sens des considérants. La Chambre d'accusation a considéré que le droit de la recourante de consulter le dossier et de participer au tri des pièces avait été violé. Elle a rejeté le recours pour le surplus.
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B.
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Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler les décisions des 5 juillet et 22 novembre 2004, et de rejeter la demande. Elle allègue que la condition de la double incrimination ne serait pas remplie et le principe de la proportionnalité violé. La demande serait en outre abusive.
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La Chambre d'accusation et le Juge d'instruction se réfèrent à la décision attaquée. L'Office fédéral a renoncé à se déterminer.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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La Confédération suisse et le Royaume de Belgique sont tous deux parties à la Convention européenne d'entraide judiciaire, entrée en vigueur le 11 novembre 1975 pour la Belgique et le 20 mars 1967 pour la Suisse (CEEJ; RS 0.351.1). Les dispositions de ce traité, ainsi que celles de la CBl, l'emportent sur le droit autonome qui régit la matière, soit la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1) et son ordonnance d'exécution (OEIMP; RS 351.11). Celles-ci sont applicables aux questions non réglées, explicitement ou implicitement, par le droit conventionnel, et lorsque le droit interne est plus favorable à l'entraide que le traité (ATF 123 II 134 consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142; 120 Ib 120 consid. 1a p. 122/123, et les arrêts cités). Le respect des droits fondamentaux est réservé (ATF 123 II 595 consid. 7c p. 617).
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2.
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2.1 La voie du recours de droit administratif est ouverte contre la décision de clôture confirmant la saisie de comptes bancaires et ordonnant la remise de la documentation y relative à l'Etat requérant (cf. art. 25 al. 1 EIMP). La décision attaquée présente les traits d'une décision finale partielle qui peut, sur les points qu'elle tranche définitivement, faire l'objet d'un recours direct (ATF 129 II 384). Le recours est recevable à cet égard, sauf pour ce qui concerne le grief tiré du principe de la proportionnalité. Conformément à la décision attaquée en effet, le Juge d'instruction devra statuer à nouveau sur l'étendue de l'entraide, après avoir procédé à un nouveau tri des pièces. Il est partant impossible de déterminer, en l'état, quelles pièces saisies seront transmises, et lesquelles ne le seront pas. Le grief soulevé à ce propos est ainsi prématuré.
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2.2 La recourante, titulaire des comptes visés, a qualité pour agir (ATF 130 II 162 consid. 1.1 p. 164; 127 II 198 consid. 2d p. 205; 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260, et les arrêts cités).
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2.3 Le Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour accorder l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la coopération internationale doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275). Il statue avec une cognition libre sur les griefs soulevés sans être toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56 consid. 1d p. 59).
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3.
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La recourante soutient que la condition de la double incrimination ne serait pas remplie.
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3.1 Selon l'art. 5 al. 1 let. a CEEJ, applicable en vertu de la réserve émise par la Suisse, l'exécution d'une commission rogatoire aux fins de perquisition ou de saisie d'objets est subordonnée à la condition que l'infraction poursuivie dans l'Etat requérant soit punissable selon la loi de cet Etat et de la Partie requise. L'examen de la punissabilité selon le droit suisse comprend, par analogie avec l'art. 35 al. 2 EIMP applicable en matière d'extradition, les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de l'infraction, à l'exclusion des conditions particulières du droit suisse en matière de culpabilité et de répression (ATF 124 II 184 consid. 4b p. 186-188; 122 II 422 consid. 2a p. 424; 118 Ib 448 consid. 3a p. 451, et les arrêts cités). Il n'est ainsi pas nécessaire que les faits incriminés revêtent, dans les deux législations concernées, la même qualification juridique, qu'ils soient soumis aux mêmes conditions de punissabilité ou passibles de peines équivalentes; il suffit qu'ils soient réprimés dans les deux Etats comme des délits donnant lieu ordinairement à la coopération internationale (ATF 124 II 184 consid. 4b/cc p. 188; 117 Ib 337 consid. 4a p. 342; 112 Ib 225 consid. 3c p. 230 et les arrêts cités). En règle générale, l'Etat requis ne peut se prononcer sur la réalité des faits qui y sont invoqués, mais seulement en vérifier la punissabilité. Des preuves ne sont pas nécessaires et il n'est pas toujours possible d'exiger de l'Etat requérant un exposé absolument complet des faits; la collaboration internationale de la Suisse ne peut être refusée que si la demande présente des erreurs, des lacunes ou des contradictions manifestes (ATF 126 II 495 consid. 5e/aa p. 501; 118 Ib 111 consid. 5b p. 121/122; 117 Ib 64 consid. 5c p. 88, et les arrêts cités).
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3.2 La Chambre d'accusation a estimé la condition de la double in-crimination comme remplie, parce que les faits reprochés à X.________ devaient être assimilés à une escroquerie fiscale. La recourante conteste cette appréciation, en faisant valoir que X.________ est poursuivi en Belgique uniquement des chefs de blanchiment et de recel, et non point d'escroquerie fiscale. Elle en conclut que la condition de la double incrimination ne serait pas réalisée, ni sous cet aspect, ni sous celui du blanchiment, du recel ou du faux dans les titres.
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Cette argumentation méconnaît les principes qui viennent d'être rappelés. La condition de la double incrimination n'exige pas que les faits soient réprimés dans les deux Etats par des normes identiques. L'Etat requis n'est pas lié par la qualification retenue dans l'Etat requérant. A défaut, surgirait le risque de voir la coopération rendue impossible à raison de divergences dans la désignation du délit ou sa définition, alors que les faits seraient réprimables dans l'un et l'autre Etat. En l'occurrence, il importe peu que le système d'escroquerie à la TVA ne soit poursuivi en Belgique qu'au titre du blanchiment et du recel. Il suffit que s'ils avaient été commis en Suisse, ils puissent aussi être réprimés, à un titre ou un autre.
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En l'occurrence, comme l'a retenu la Chambre d'accusation, le mécanisme dit du "carrousel à la TVA" tomberait sous le coup des dispositions punissant l'escroquerie fiscale, s'il avait été commis en Suisse (cf. l'arrêt 1A.280/2000 du 15 février 2001, cité dans la décision attaquée). La recourante ne le conteste pas, au demeurant.
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4.
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Pour la recourante, la demande serait abusive. Elle allègue que la procédure aurait été ouverte pour des motifs fallacieux, dans le seul but de mettre la main sur les fonds saisis.
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Ces allégations reposent sur de pures conjectures. Il n'y a pas lieu de douter du caractère effectif et sérieux de la procédure ouverte dans l'Etat requérant. Pour le surplus, on ne se trouve pas actuellement au stade de la remise des fonds saisis en Suisse, ce qui supposerait une nouvelle procédure.
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5.
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Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les frais en sont mis à la charge de la recourante (art. 156 OJ). L'allocation de dépens n'entre pas en ligne de compte (art. 159 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2.
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Un émolument de 5000 fr. est mis à la charge de la recourante.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au Juge d'instruction et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice (B 137 182).
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Lausanne, le 2 mars 2005
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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