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Informationen zum Dokument  BGer 5P.434/2004  Materielle Begründung
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BGer 5P.434/2004 vom 07.03.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
5P.434/2004 /frs
 
Arrêt du 7 mars 2005
 
IIe Cour civile
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
 
Nordmann et Marazzi.
 
Greffière: Mme Mairot.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Yann P. Meyer, avocat,
 
contre
 
Dame X.________,
 
représentée par Me Claudine Nebel, avocate,
 
A.________,
 
intimées,
 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3.
 
Objet
 
Art. 9 Cst. (divorce et mesures provisoires),
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 8 octobre 2004.
 
Faits:
 
A.
 
X.________, né le 17 mai 1957, et dame X.________, née le 12 septembre 1958, se sont mariés à Genève le 10 février 1984, sans conclure de contrat de mariage. Six enfants sont issus de cette union: A.________, née le 7 avril 1986, B.________, né le 18 septembre 1988, C.________, née le 13 avril 1990, D.________, née le 25 janvier 1993 et adoptée par des tiers le 14 février 1995, E.________, née le 8 janvier 1994, et F.________, née le 25 mars 1996.
 
Les conjoints se sont séparés le 11 juin 2000.
 
Le 23 octobre 2000, l'épouse a formé une demande unilatérale en divorce avec accord partiel, assortie d'une requête de mesures provisoires.
 
Par jugement sur mesures provisoires du 26 avril 2001, le Tribunal de première instance du canton de Genève a confié la garde des enfants à la mère, sous réserve d'un large droit de visite en faveur du père, assorti d'une curatelle de surveillance, attribué la jouissance du domicile conjugal à l'épouse et condamné le mari à payer pour l'entretien de sa famille la somme de 2'691 fr. par mois dès le 1er mai 2001, allocations familiales et de logement non comprises. Ces dispositions ont été maintenues par jugements des 26 juin 2002, 23 mars 2003 et 18 septembre 2003.
 
Statuant sur le fond le 3 novembre 2003, le Tribunal de première instance a, notamment, prononcé le divorce des parties, attribué à la mère l'autorité parentale sur les cinq enfants du couple, réglementé le droit de visite du père, confirmé la curatelle de surveillance et confié au Tribunal tutélaire le soin de décharger le curateur de sa mission lorsque celle-ci serait devenue sans objet. Le mari a été condamné à verser à l'épouse, pour elle-même, la somme de 1'000 fr. par mois pendant cinq ans et, pour chacun des enfants, des contributions d'entretien mensuelles - allocations familiales en sus - de 700 fr. jusqu'à l'âge de dix ans, 800 fr. de dix à quinze ans puis 1'000 fr. de cet âge à la majorité, voire au-delà en cas de poursuite des études ou d'une formation professionnelle sérieuse.
 
B.
 
Les deux parties ont appelé de ce jugement et ont requis de nouvelles mesures provisoires.
 
A.________, devenue majeure le 7 avril 2004, a été invitée à se déterminer sur les conclusions prises par sa mère au sujet de la contribution d'entretien réclamée en son nom. Par courrier déposé le 25 mai suivant, elle s'en est rapportée à justice et a confirmé vouloir poursuivre ses études après son accouchement, prévu pour août 2004.
 
La Cour de justice du canton de Genève a statué, dans un même arrêt du 8 octobre 2004, sur les mesures provisoires et sur le fond.
 
A titre provisoire, elle a condamné le mari à contribuer à l'entretien de sa famille par le versement d'une contribution d'un montant de 5'300 fr. par mois dès le 11 février 2004.
 
Sur le fond, l'autorité cantonale a, notamment, condamné X.________ à verser à dame X.________ la somme de 1'000 fr. par mois pendant cinq ans dès l'entrée en force de son arrêt (ch. 4), et à A.________, un montant de 1'000 fr. par mois, allocations en sus, pour autant que celle-ci poursuive des études ou une formation professionnelle sérieuses et régulières (ch. 5). La Cour de justice a par ailleurs confirmé les contributions d'entretien en faveur des quatre enfants mineurs (ch. 6), mis un émolument complémentaire d'appel de 400 fr. à la charge du débirentier (ch. 9) et, enfin, compensé les dépens de première instance et d'appel (ch. 10).
 
C.
 
C.a Agissant par la voie du recours de droit public pour arbitraire, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 8 octobre 2004 tant en ce qui concerne les mesures provisoires que les chiffres 4, 5, 6, 9 et 10 précités.
 
Des observations n'ont pas été requises à ce sujet.
 
C.b Le recourant a également interjeté un recours en réforme contre le même arrêt.
 
D.
 
Par ordonnance du 16 décembre 2004, le président de la cour de céans a admis la demande d'effet suspensif en ce qui concerne la contribution d'entretien due, à titre de mesure provisoire, jusqu'en octobre 2004, mais l'a rejetée pour le surplus.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Conformément à la règle générale de l'art. 57 al. 5 OJ, il y a lieu de statuer d'abord sur le recours de droit public.
 
2.
 
Formé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), le recours est en principe recevable dans la mesure où il est dirigé contre le prononcé sur le fond (art. 86 al. 1 OJ), sauf en ce qui concerne l'annulation des chiffres 9 et 10 du dispositif, le mémoire n'étant à cet égard aucunement motivé (art. 90 al. 1 let. b OJ). Le recours est aussi recevable en tant qu'il vise la décision de mesures provisionnelles (ATF 100 Ia 12 consid. 1a et b p. 14; 126 III 261 consid. 1 p. 262 et les arrêts mentionnés), celle-ci ayant été prise en dernière instance cantonale (art. 312 let. d et 320 al. 2 LPC/GE; cf. arrêt 5P.293/1992 du 1er mars 1993, consid. 1a et l'auteur cité).
 
3.
 
Le recourant reproche à l'autorité cantonale de lui avoir arbitrairement imputé un revenu hypothétique minimum de 10'000 fr. par mois, alors qu'il est établi que son revenu effectif est de 6'263 fr. en moyenne. Comme ses charges mensuelles s'élèvent à 3'900 fr., le total des contributions d'entretien ne saurait dépasser la somme de 2'363 fr.
 
3.1 Lors de la fixation des contributions d'entretien, le revenu effectif est en principe déterminant. Le débiteur peut toutefois se voir imputer un revenu hypothétique supérieur à celui qu'il obtient effectivement de son travail, pour autant qu'une augmentation de gain correspondante soit possible et qu'elle puisse être raisonnablement exigée de lui (ATF 128 III 4 consid. 4 p. 5 s. et les références citées). La première de ces conditions relève du fait et la seconde du droit (ATF 128 III 4 consid. 4c/bb p. 7; 126 III 10 consid. 2b p. 12/13). Lorsque celles-ci sont remplies, il n'est pas arbitraire d'entamer le minimum vital du débirentier (ATF 123 III 1 consid. 3e p. 7).
 
3.2 En l'espèce, la Cour de justice a considéré qu'en entreprenant des études de droit, puis un stage d'avocat, tout en exerçant parallèlement diverses activités pour entretenir sa nombreuse famille, l'intéressé avait démontré qu'il disposait d'une capacité de travail très importante. Il n'admettait toutefois qu'un revenu de 6'263 fr. par mois en 2003, affirmant avoir facturé cette année-là 138'806 fr. d'honoraires. Un tel revenu apparaissait cependant inférieur au seuil de la rémunération hypothétique d'un avocat genevois. En effet, en divisant 138'806 fr. par 220 - représentant le nombre de jours travaillés en moyenne dans l'année - le résultat obtenu était de 631 fr. par jour. Ce montant équivalait à 3 heures de travail facturées quotidiennement si l'on s'en tenait au tarif horaire minimum de 200 fr. prévu par le règlement sur l'assistance juridique, et à 2 heures seulement si l'on se fondait sur le tarif moyen de 300 fr. de l'heure pour un chef d'étude, ce qui était dérisoire.
 
En prenant en compte une moyenne de 5 heures de travail facturées quotidiennement au tarif minimal de 200 fr., pendant 220 jours, on obtenait 220'000 fr. d'honoraires au moins, dont à déduire les 70'888 fr. de charges d'exploitation alléguées par le débirentier, soit un bénéfice annuel net de 149'112 fr. ou 12'426 fr. par mois. Il convenait d'y ajouter la rémunération qu'il percevait des prud'hommes, à savoir 596 fr. par mois. Son revenu mensuel net pouvait ainsi être estimé à 13'022 fr. ou, en arrondissant, à 13'000 fr. au minimum. Ce montant se justifiait pleinement au regard de la capacité de travail de l'intéressé, de l'étendue de ses connaissances juridiques et des langues qu'il pratiquait. De plus, celui-ci n'avait pas allégué avoir rencontré de difficultés à se constituer une clientèle ni à obtenir le paiement de ses honoraires. Cette estimation était du reste corroborée par l'examen des dépenses privées et professionnelles du débirentier du 1er janvier au 27 juillet 2002, qui étaient de l'ordre de 9'903 fr. par mois. Celui-ci soutenait dès lors en vain que sa capacité financière mensuelle était inférieure à 10'000 fr.
 
3.3 Ces considérations n'apparaissent pas arbitraires (cf. ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 et les arrêts cités); du moins, le recourant n'établit pas que tel serait le cas (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 129 I 113 consid. 2.1 p. 120; 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les références).
 
Il prétend d'abord qu'il ne lui est pas possible de facturer autant, dès lors qu'il ne s'est installé comme avocat qu'à partir du 1er août 2001, à la suite d'un licenciement abrupt suivi d'un procès particulièrement médiatisé qui ont, de façon notoire, porté une atteinte grave à son avenir professionnel. Ce faisant, il se contente d'opposer son opinion à celle de l'autorité cantonale, ce qui n'est pas suffisant au regard des exigences de motivation du recours de droit public. De plus, contrairement à ce qu'il affirme, la Cour de justice ne lui a pas imputé les revenus d'un chef d'étude installé depuis plusieurs années, puisqu'après avoir estimé qu'il pouvait facturer 5 heures de travail par jour au tarif horaire minimum de 200 fr., elle n'a finalement retenu qu'un revenu de 10'000 fr. par mois. On ne voit dès lors pas non plus en quoi le principe d'égalité de traitement aurait été violé.
 
Le recourant expose ensuite que, même en admettant qu'il puisse facturer 5 heures par jour au coût de 200 fr., il lui serait impossible de réaliser un bénéfice mensuel net de 10'000 fr., car celui-ci serait absorbé par les frais généraux qui, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, correspondent d'ordinaire à au moins 40% du revenu professionnel brut, voire à la moitié de celui-ci. Ce moyen n'apparaît pas fondé. Contrairement à ce que soutient le recourant, si l'on s'en tenait à un pourcentage de 40%, ses frais généraux n'atteindraient pas 176'000 fr., mais 88'000 fr., dès lors qu'il y aurait lieu de prendre en considération le montant de 200 fr. retenu par la cour cantonale (40% de 200 fr. [soit 80 fr.] x 1'110 [5 x 220] heures = 88'000 fr.) et non, comme il le fait, un tarif horaire de 400 fr. (40% de 400 fr. [soit 160 fr.] x 1'100 heures = 176'000 fr.). En l'occurrence, la Cour de justice a pris en compte la somme de 70'888 fr. alléguée par le débirentier. Toutefois, même en admettant un montant de 88'000 fr., correspondant au 40% du chiffre d'affaires du recourant, son bénéfice net serait de 132'000 fr. par an (220'000 fr. - 88'000 fr.), soit 11'000 fr. par mois. L'autorité cantonale ne saurait dès lors se voir reprocher d'avoir retenu que sa capacité contributive n'était pas inférieure à 10'000 fr. Au demeurant, la jurisprudence qu'il cite (notamment: ATF 109 Ia 107) pose des principes généraux et concerne l'indemnisation du défenseur d'office: elle ne peut donc être transposée directement ici. Il convient encore de relever que, selon l'arrêt attaqué, le recourant sous-loue un bureau dans une étude d'avocats. Des frais généraux représentant, comme il le prétend, le 80% de son chiffre d'affaires (100: 220'000 x 176'000), apparaissent par conséquent exagérés.
 
De toute manière, il résulte de la décision cantonale que le recourant, qui est trilingue (français-anglais-allemand), a d'abord exercé le métier de journaliste avant d'entreprendre des études de droit en octobre 1994 et d'obtenir la licence en 1998, puis le brevet d'avocat en décembre 2000. Pendant ses études, il exerçait une activité de juriste comptable auprès d'une société dont il était associé gérant, dispensait des cours de comptabilité et siégeait comme juge assesseur auprès de la juridiction des prud'hommes. Avant même que son stage d'avocat ne se termine, il a été engagé, dès le 1er septembre 2000, comme juriste à mi-temps par un syndicat, où il a ensuite travaillé à plein-temps, du 1er janvier au 30 juin 2001. Lorsqu'il s'est établi comme avocat indépendant, le 1er août 2001, il a continué d'exercer certaines activités annexes. Il se dit par ailleurs spécialiste dans les domaines juridiques suivants: droit du travail, droit des affaires, droit administratif, droit fiscal, droit social, droit de la famille, droit pénal international et droits de l'homme. Consultant pour divers organismes, il est aussi l'auteur de plusieurs ouvrages juridiques, a dispensé des avis de droit et participé à des conférences internationales. Compte tenu de sa formation et de son expérience professionnelle (cf. ATF 128 III 4 consid. 4c/cc p. 8), la Cour de justice pouvait, sans arbitraire, lui imputer une capacité contributive d'au moins 10'000 fr. par mois.
 
Le grief apparaît ainsi infondé, sans qu'il soit besoin de l'examiner plus avant. Il n'y a notamment pas lieu d'entrer en matière sur les allégations du recourant relatives à son revenu réel, ni sur son moyen tiré d'une prétendue appréciation arbitraire des preuves. Au demeurant, ces critiques présentent un caractère essentiellement appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495) et sont en grande partie fondées sur des faits qui ne figurent pas dans l'arrêt attaqué: comme le recourant ne prétend pas que ceux-ci ressortiraient du dossier et que l'autorité cantonale aurait arbitrairement omis d'en tenir compte (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26), il s'agit de faits nouveaux, qui sont irrecevables dans le présent recours (ATF 129 I 74 consid. 4.6 p. 80).
 
4.
 
Dans la mesure où le recourant remet en cause le montant de la contribution d'entretien mise à sa charge à titre de mesure provisoire, en alléguant avoir démontré que son disponible n'était que de 2'363 fr. par mois, son moyen doit être également rejeté, au vu de ce qui précède.
 
5.
 
Quant au grief selon lequel l'autorité cantonale aurait fait preuve d'arbitraire en arrêtant un montant global de 5'300 fr. par mois pour la mère et les cinq enfants, alors que sa fille A.________, majeure depuis le 7 avril 2004, devrait percevoir sa contribution d'entretien directement, il n'apparaît pas non plus fondé. Comme l'intéressée a, par lettre du 25 mai 2004, déclaré qu'elle s'en rapportait à justice, il n'est pas insoutenable de considérer qu'elle a tacitement approuvé, non seulement les prétentions réclamées pour la période postérieure à sa majorité, mais aussi leur versement en mains de sa mère, chez qui elle réside. Dès lors qu'aucun élément du dossier ne laisse craindre qu'elle ne reçoive pas sa part d'entretien pendant la durée, limitée, de la procédure de divorce, l'arrêt attaqué ne saurait être qualifié d'arbitraire sur ce point.
 
6.
 
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et ne peut dès lors qu'être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant, qui succombe, supportera par conséquent les frais de la présente procédure (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens, des observations au recours n'ayant pas été requises et les intimées ne s'étant pas prononcées sur la requête d'effet suspensif.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 7 mars 2005
 
Au nom de la IIe Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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