BGer 2A.103/2006 | |||
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BGer 2A.103/2006 vom 01.06.2006 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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2A.103/2006
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Arrêt du 1er juin 2006
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IIe Cour de droit public
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Composition
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MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
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Wurzburger et Yersin.
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Greffière: Mme Mabillard.
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Parties
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AA.________,
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E.________,
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F.________, recourantes,
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toutes les trois représentées par Me Jean-Pierre Bloch, avocat,
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contre
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Département fédéral de justice et police, 3003 Berne.
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Objet
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Exception aux mesures de limitation,
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recours de droit administratif contre la décision
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du Département fédéral de justice et police
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du 18 janvier 2006.
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Faits:
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A.
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AA.________, ressortissante chilienne née en 1955, a épousé en 1977 au Chili son compatriote BA.________. Le couple A.________ est venu pour la première fois en Suisse le 1er juin 1981 avec ses deux enfants C.________ (née en 1978) et D.________ (né en 1979). Le 10 février 1993, AA.________ a donné naissance à des jumelles, E.________ et F.________. Tous les membres de la famille ont obtenu une autorisation d'établissement. Le 7 décembre 1994, la famille A.________ a quitté la Suisse pour retourner au Chili, à l'exception de la fille aînée, C.________, qui est restée à X.________.
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D.________ est revenu en Suisse le 30 novembre 1995 et a été à nouveau mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Le 19 août 1996, BA.________ est également revenu en Suisse, suivi le 18 octobre 1996 par son épouse et les jumelles. Ils ont tous pu réintégrer leur autorisation d'établissement. AA.________, accompagnée de son époux et de ses deux filles jumelles, a quitté une nouvelle fois la Suisse le 29 juin 1999 pour le Chili. Elle y a exercé une activité indépendante avec son mari.
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Le 6 décembre 2003, AA.________ et ses deux filles E.________ et F.________ sont à nouveau revenues en Suisse, sans être alors munies d'un visa. Le 4 janvier 2004, elles ont déposé une demande d'autorisation d'établissement, voire de séjour, auprès du Service du contrôle des habitants de la Ville de X.________.
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Les autorisations demandées ont été refusées le 15 avril 2004 par le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal), autorité compétente en la matière.
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Les intéressées ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif), qui a accordé l'effet suspensif au recours.
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B.
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Le 16 juillet 2004, le Service cantonal a transmis le dossier des intéressées à l'Office fédéral de l'immigration, de l'intégration et de l'émigration, actuellement l'Office fédéral des migrations, (ci-après: l'Office fédéral) afin qu'il examine une éventuelle application de l'art. 13 lettre f de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21) en leur faveur. Le 23 juillet 2004, l'Office fédéral a refusé d'exempter les intéressées des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE.
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C.
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Par recours au Département fédéral de justice et police (ci-après: le Département fédéral), AA.________ et ses filles E.________ et F.________ ont demandé l'annulation de la décision de l'Office fédéral du 23 juillet 2004.
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Le 18 janvier 2006, le Département fédéral a rejeté le recours et confirmé que AA.________ et ses filles E.________ et F.________ demeuraient assujetties aux mesures de limitation. Il a relevé que, bien que AA.________ ait vécu au total environ seize ans en Suisse, elle avait quitté volontairement le territoire helvétique en 1999 avec sa famille, ce qui démontrait que sa relation avec la Suisse n'était pas si étroite, à ce moment-là, qu'un renvoi aurait constitué une rigueur excessive. Le Département fédéral a par ailleurs observé que AA.________ avait attendu jusqu'au mois de décembre 2003 avant de revenir sur le territoire helvétique. Une rupture aussi longue s'opposait à ce que l'intéressée puisse rentrer à sa guise, après quatre ans et demi d'absence, ce d'autant qu'aucune circonstance exceptionnelle n'avait conduit AA.________ à quitter la Suisse pour retourner vivre et travailler au Chili. Quant à ses filles jumelles, E.________ et F.________, elles avaient d'abord vécu en Suisse jusqu'à moins de deux ans, puis de trois ans et demi à six ans et demi. Elles avaient passé les quatre années suivantes au Chili où elles avaient suivi les premières années de scolarité obligatoire. Compte tenu de leur jeune âge, un éventuel départ de Suisse ne pouvait entraîner pour elles des difficultés d'adaptation impossibles à surmonter dans le pays qui avait vu naître et grandir leurs parents.
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Au vu de la décision précitée du Département fédéral, le Tribunal administratif a constaté, le 25 janvier 2006, que le recours pendant devant lui - dont il avait suspendu l'instruction - n'avait plus d'objet et il a informé les parties que, sauf objection motivée dans un délai échéant le 9 février 2006, cette cause serait rayée du rôle.
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D.
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Par recours de droit administratif au Tribunal fédéral, AA.________ et ses filles E.________ et F.________ ont attaqué la décision du Département fédéral du 18 janvier 2006, concluant, sous suite de dépens, à ce qu'elle soit "rapportée". En substance, les recourantes estiment que la décision attaquée est erronée, du fait que leurs relations avec la Suisse sont si étroites qu'on ne saurait exiger leur départ de ce pays. De même, le Département fédéral n'aurait pas pris suffisamment en considération l'extrême gravité des conséquences d'un éventuel retour au Chili.
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Le Département fédéral conclut au rejet du recours. Le 31 mars 2006, le Service cantonal a produit son dossier.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1 p. 60).
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La voie du recours de droit administratif étant en principe ouverte contre les décisions relatives à l'assujettissement aux mesures de limitation prévues par l'ordonnance limitant le nombre des étrangers (ATF 122 II 403 consid. 1 p. 404/405) et les autres conditions formelles des art. 97 ss OJ étant remplies, le présent recours est recevable.
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2.
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Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'abus ou l'excès du pouvoir d'appréciation (art. 104 lettre a OJ). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral, sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). Lorsque, comme en l'espèce, le recours n'est pas dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral peut également revoir d'office les constatations de fait (art. 104 lettre b et 105 al. 1 OJ). En revanche, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen dans ce domaine (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).
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Par ailleurs, en matière de police des étrangers, lorsque la décision attaquée n'émane pas d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral fonde en principe ses jugements, formellement et matériellement, sur l'état de fait et de droit existant au moment de sa propre décision (ATF 124 II 361 consid. 2a p. 365; 122 II 1 consid. 1b p. 4). Dans ces conditions, rien ne s'oppose à la prise en considération du document annexé par les recourantes à leur mémoire de recours (ATF 115 II 213 consid. 2 p. 215/216; 113 Ib 327 consid. 2b p. 331 et la jurisprudence citée; Alfred Kölz/Isabelle Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd., Zurich 1998, n. 940/941 p. 333).
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3.
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Les mesures de limitation visent, en premier lieu, à assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population suisse et celui de la population étrangère résidante, ainsi qu'à améliorer la structure du marché du travail et à assurer un équilibre optimal en matière d'emploi (art. 1er lettres a et c OLE). L'art. 13 lettre f OLE soustrait aux mesures de limitation "les étrangers qui obtiennent une autorisation de séjour dans un cas personnel d'extrême gravité ou en raison de considérations de politique générale". Cette disposition a pour but de faciliter la présence en Suisse d'étrangers qui, en principe, seraient comptés dans les nombres maximums fixés par le Conseil fédéral, mais pour lesquels cet assujettissement paraîtrait trop rigoureux par rapport aux circonstances particulières de leur cas ou pas souhaitable du point de vue politique.
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II découle de la formulation de l'art. 13 lettre f OLE que cette disposition dérogatoire présente un caractère exceptionnel et que les conditions auxquelles la reconnaissance d'un cas de rigueur est soumise doivent être appréciées restrictivement. II est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé aux restrictions des nombres maximums comporte pour lui de graves conséquences. Lors de l'appréciation d'un cas personnel d'extrême gravité, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré, socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas personnel d'extrême gravité; il faut encore que la relation du requérant avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse pas exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que le requérant a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exemption des mesures de limitation du nombre des étrangers (ATF 130 II 39 consid. 3 p. 41/42 et la jurisprudence citée).
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Lorsqu'une famille demande de pouvoir être exemptée des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément mais en relation avec le contexte familial global. En effet, le sort de la famille formera en général un tout; il serait difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d'ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille (durée du séjour, intégration professionnelle pour les parents et scolaire pour les enfants, notamment; cf. ATF 123 II 125 consid. 4a p. 129).
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Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu'il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d'origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socio-culturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour au pays d'origine constitue un déracinement complet. Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Il convient dans cette perspective de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencées en Suisse. Un retour au pays d'origine peut en particulier représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence est en effet une période essentielle du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant une intégration accrue dans un milieu déterminé (cf. ATF 123 II 125 consid. 4 p. 128 ss; Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF 1997 I 267 ss, p. 297/298).
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4.
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4.1 En l'espèce, AA.________ a vécu au total plus de dix-huit ans en Suisse depuis 1981. Son premier séjour a duré treize ans et demi, période durant laquelle elle s'est bien intégrée socialement et professionnellement. Son retour volontaire au Chili en 1994 démontre qu'elle n'avait pas des liens exceptionnellement étroits avec la Suisse, quand bien même elle y laissait sa fille C.________. Lors de son retour en Suisse en 1996, AA.________ a pu réintégrer son autorisation d'établissement. Cela ne l'a cependant pas empêchée de quitter la Suisse quelque trois ans plus tard en y laissant son fils D.________ et sa fille aînée, C.________, qui avait pourtant souffert d'une grave dépression du fait de la première séparation. Cette deuxième interruption de séjour a duré quatre ans et demi, ce qui constitue une longue absence et semble confirmer que les attaches de AA.________ avec la Suisse n'étaient pas très étroites.
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Ces deux interruptions de séjour importantes s'opposent à ce que AA.________ puisse maintenant rentrer en Suisse à sa guise. En effet, la jurisprudence ne confère aucun "droit au retour en Suisse" à ceux qui, après y avoir résidé de nombreuses années, décident de quitter le pays pour s'installer à l'étranger, sans que des circonstances exceptionnelles les aient amenés à ce départ (ATF 117 Ib 317 consid. 4b p. 322). Certes, sous l'angle de l'octroi d'une exception aux mesures de limitation, ces étrangers ne peuvent être considérés comme des immigrants ordinaires et l'on ne peut faire totalement abstraction des années qu'ils ont passées dans ce pays avant leur départ, mais, dans l'appréciation d'ensemble de leur situation, ces années ne pèsent pas aussi lourd que s'ils n'avaient jamais quitté la Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2A.300/2002 du 20 juin 2002, consid. 2.1, et 2A.429/1998 du 5 mars 1999, consid. 3a).
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En l'occurrence, aucune circonstance exceptionnelle n'a conduit AA.________ à quitter la Suisse à deux reprises. Le 18 février 2004, AA.________ a indiqué qu'elle avait ressenti, à ce moment-là, un profond désir de vivre dans son pays avec ses enfants ainsi que le besoin de "revivre les repères connus" durant son enfance et de les partager avec sa famille. Par la suite, dans son recours au Département fédéral (p. 2), elle a dit qu'elle avait essayé de retourner dans son pays d'origine, mais n'avait manifestement pas été à même de s'y réadapter compte tenu de la longueur de son séjour en Suisse, ce qui sous-entend du reste que son départ n'était pas imposé par des motifs contraignants. Puis, le 22 novembre 2004, AA.________ a fait état de problèmes avec son frère et la famille de ce dernier et laissé entendre que ce conflit familial avait contraint la famille A.________ à retourner au Chili. Enfin, dans le présent recours, AA.________ précise que ce conflit familial a sa source dans la liaison adultère qu'aurait entretenue son époux avec sa belle-soeur, soit l'épouse de son frère, et qu'ainsi c'était pour sauver son ménage qu'elle avait dû quitter la région lausannoise à destination du Chili. Même si les conflits familiaux et conjugaux, ainsi que la tension subie de ce fait par AA.________, l'ont fortement incitée à quitter la Suisse en 1999, il ne serait pas possible de parler de contrainte, ni de circonstances extraordinaires, s'agissant d'un motif que AA.________ n'a invoqué que devant les instances de recours, une fois assistée d'un mandataire.
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Au demeurant, AA.________ a donné des indications contradictoires aux autorités sur les raisons de son départ de Suisse, puis sur sa situation conjugale. Le 4 janvier 2004, puis le 18 février 2004, elle a informé le Service du contrôle des habitants de la Ville de X.________ que son mari devait la rejoindre le plus rapidement possible en Suisse. Quelques mois plus tard, dans son recours au Département fédéral, elle a mentionné qu'une des raisons qui l'avait incitée à revenir en Suisse était la rupture du lien avec son époux (p. 3). Elle n'a par ailleurs pas fait preuve d'une intégration professionnelle ou sociale hors du commun. En particulier, elle n'a pas acquis des connaissances ou des qualifications dont elle ne pourrait pas faire usage dans sa patrie.
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A l'appui du présent recours, AA.________ fait en outre valoir qu'elle n'a plus d'attache particulière avec le Chili et qu'elle n'y a plus, comme famille directe, que son mari dont elle va incessamment demander le divorce. La recourante n'est cependant venue en Suisse qu'à l'âge de vingt-six ans, elle a donc vécu toute sa jeunesse et une partie de sa vie d'adulte là-bas. Elle a donc bien ses racines au Chili, où elle a ressenti le besoin de retourner à deux reprises. De plus, si AA.________ retourne dans son pays, elle ne sera pas seule, mais accompagnée de ses filles jumelles. Certes, elle laissera en Suisse deux enfants adultes et un petit-enfant. Les contacts ne sont toutefois pas exclus, il lui sera toujours possible de revenir en Suisse en visite (avec un visa de tourisme) ou de recevoir la visite de ses enfants et petits-enfants au Chili. D'après le dossier, AA.________ est une femme active et entreprenante. Elle a trouvé rapidement un premier emploi à son retour en Suisse. Âgée actuellement de cinquante et un ans, elle a encore la possibilité de se réadapter dans son pays, où elle a déjà exercé une activité lucrative sous la forme d'une petite entreprise de plats à l'emporter qu'elle gérait avec son mari.
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4.2 Quant aux filles jumelles de AA.________, E.________ et F.________, âgées aujourd'hui de treize ans, elles sont nées en Suisse en 1993. Elles ont suivi leurs parents au Chili, à l'âge d'une année et demie. A leur retour en Suisse en 1996, elles avaient trois ans et demi. Elles ont à nouveau quitté la Suisse avec leurs parents en 1999, alors qu'elles avaient six ans. Les jumelles ont ainsi commencé l'école obligatoire au Chili. Elles y ont vécu quatre ans et demi lors de leur second séjour, soit jusqu'à l'âge de dix ans et demi. Les recourantes connaissent donc la vie chilienne et ses coutumes, elles parlent aussi la langue de leur pays. Certes E.________ et F.________ ont tissé des liens étroits avec la Suisse. Malgré ce fait, leur mère n'a pas hésité à retourner au Chili avec elles, estimant ainsi que ces liens ne constituaient pas un obstacle à un départ. Deux attestations scolaires démontrent que les jumelles sont bien intégrées dans leurs classes respectives à X.________. Toutefois, vu leur jeune âge, leur caractère ouvert et leur capacité d'adaptation, elles devraient pouvoir se réadapter au Chili.
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Les recourantes font valoir que, sur le plan de l'éducation, l'obligation de retourner au Chili aurait de graves conséquences pour les jumelles, du fait qu'"elles retomberaient dans un pays machiste" où l'éducation des filles suivrait des concepts arriérés (recours p. 4). Les recourantes n'allèguent pas en quoi ces principes d'éducation provoqueraient des difficultés concrètes propres à leur cas particulier, ni en quoi les conséquences seraient plus graves pour elles que pour n'importe laquelle de leurs concitoyennes. Une exception aux mesures de limitation n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd p. 133). Dans le cas d'espèce, on peut donc attendre des recourantes qu'elles supportent cette différence de mentalité.
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4.3 Il apparaît ainsi que c'est à juste titre que le Département fédéral a considéré que le séjour antérieur dans notre pays de AA.________ et le temps qu'elle y a passé depuis son retour le 6 décembre 2003, soit un peu plus de deux ans, ne suffisent pas à fonder un cas de rigueur au sens de l'art. 13 lettre f OLE, en dépit de sa bonne intégration, d'autant qu'elle ne bénéficie pas d'une autorisation de séjour, mais d'une simple tolérance en raison de la procédure qu'elle y a entamée. En quittant volontairement la Suisse pour le Chili en 1994 puis en 1999, AA.________ a fait un choix pour elle et sa famille, enfants compris. Dès lors, pour E.________ et F.________ également, les années passées en Suisse ne suffisent pas à leur octroyer une telle exception. En confirmant le refus d'exception aux mesures de limitation litigieux, le Département fédéral n'a pas constaté les faits pertinents de façon inexacte ou incomplète, ni violé le droit fédéral.
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5.
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Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. Succombant, les recourantes doivent supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'ont pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté.
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2.
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Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge des recourantes.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourantes, au Département fédéral de justice et police ainsi qu'au Service de la population du canton de Vaud.
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Lausanne, le 1er juin 2006
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: La greffière:
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