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Informationen zum Dokument  BGer 5C.92/2006  Materielle Begründung
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BGer 5C.92/2006 vom 16.06.2006
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
5C.92/2006 /frs
 
Arrêt du 16 juin 2006
 
IIe Cour civile
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
 
Hohl et Marazzi.
 
Greffier: M. Fellay.
 
Parties
 
X.________ SA,
 
défenderesse et recourante, représentée par Me Jean-Marie Faivre, avocat,
 
contre
 
Y.________ SA,
 
demanderesse et intimée, représentée par Me Bruno Mégevand, avocat,
 
Objet
 
frais et charges communs d'une PPE,
 
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 17 février 2006.
 
Faits:
 
A.
 
A.a L'immeuble feuillet 1, droit distinct et permanent inscrit sur la parcelle 2 de la commune de A.________, était propriété de B.________. Depuis 1986, X.________ SA louait des locaux (au 1er étage, au rez-de-chaussée et au sous-sol) dans le bâtiment sis sur cet immeuble; B.________ en a été l'administrateur unique de 1986 jusqu'en mars 2000.
 
L'immeuble était géré par Y.________ SA. X.________ SA versait à celle-ci des acomptes annuels de 9'000 fr., puis de 11'040 fr. dès 1997, pour les charges relatives à tous les locaux loués.
 
A.b Dès 1995, ensuite de poursuites intentées par le Crédit Suisse, créancier gagiste, l'immeuble a été saisi et placé sous gérance légale, laquelle a été confiée à Y.________ SA.
 
En septembre 2000, l'immeuble a été constitué en propriété par étages (PPE), composée des lots 1 à 6. Le 26 juin 2001, X.________ SA en a acquis les parts d'étages qu'elle occupait, soit les lots 1 à 3, avec entrée en jouissance au 1er avril 2001. Un an plus tard, le 28 juin 2002, elle en a acquis les parts restantes, soit les lots 4 à 6.
 
X.________ SA ayant donc acquis toutes les parts de la PPE, l'Office des poursuites a demandé à Y.________ SA d'établir un décompte au 29 mai 2002 pour la gérance légale et de lui verser les loyers encaissés.
 
A.c Le 7 mars 2002, Y.________ SA a adressé à X.________ SA un premier décompte d'un montant de 12'289 fr. 09 correspondant à sa participation aux frais et charges communs de la PPE en tant que propriétaire des lots 1 à 3 pour la période du 1er juin au 31 décembre 2001. Le 24 septembre 2002, elle lui fait parvenir un nouveau décompte, arrêté à 43'766 fr. 69, représentant sa part aux frais et charges communs pour la période du 1er juin 2001 au 31 mai 2002 en relation avec sa propriété sur les lots 1 à 3, sa part aux frais et charges communs du 1er juin 2002 au 30 septembre 2002 pour la totalité des lots, ainsi que les frais de gestion concernant les lots 1 à 3 du 1er juin 2001 au 31 mai 2002 et pour l'entier de la PPE du 1er juin 2002 au 30 septembre 2002.
 
-:-
 
X.________ SA n'a donné aucune suite aux demandes de paiement de Y.________ SA.
 
B.
 
Le 25 juin 2003, Y.________ SA a ouvert action contre X.________ SA en paiement du montant de 43'766 fr. 70 avec intérêts à 5% dès le 1er septembre 2002, se prévalant de l'exécution régulière, au 16 septembre 2002, du mandat de gérance d'immeuble.
 
Par jugement du 19 mai 2005, le Tribunal de première instance du canton de Genève a condamné la défenderesse à payer à la demanderesse le montant de 37'604 fr. 25 avec intérêts à 5% dès le 1er septembre 2002.
 
Statuant le 17 février 2006, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours interjeté par la défenderesse et a confirmé le jugement entrepris.
 
C.
 
Contre cet arrêt, qui lui a été notifié le 22 février 2006, la défenderesse a interjeté un recours en réforme au Tribunal fédéral par acte du 24 mars 2006. Elle conclut principalement à ce que la demanderesse soit déboutée de toutes ses conclusions, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au juge cantonal pour nouveau jugement au sens des considérants. Elle invoque la violation des règles de l'ORFI et de l'art. 8 CC.
 
Une réponse n'a pas été requise.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Interjeté en temps utile contre une décision finale rendue dans une contestation civile par l'autorité suprême du canton, le recours est recevable sous l'angle des art. 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ. Il l'est aussi au regard de l'art. 46 OJ, la valeur litigieuse étant supérieure à 8'000 fr.
 
2.
 
La Cour de justice a retenu en substance que les dépenses litigieuses étaient des frais et charges communs de la PPE au sens de l'art. 712h al. 2 CC; la défenderesse était devenue propriétaire d'étages avec effet au 1er avril 2001 lorsqu'elle avait acquis les lots 1 à 3; elle ne pouvait pas prétendre ignorer que l'immeuble était sous le régime de la PPE, ce que l'acte de vente stipulait clairement; le fait qu'elle était en pourparlers pour l'acquisition des lots 4 à 6 ne changeait rien au fait qu'elle était copropriétaire d'étages pour les lots 1 à 3; elle devait donc participer aux frais et charges proportionnellement à sa quote-part (517 millièmes) pour la période du 1er avril jusqu'à fin mai 2002 (art. 712h al. 1 CC), aucune règle de répartition spécifique n'ayant été adoptée.
 
Toujours selon la juridiction cantonale, à partir de fin mai 2002, bien que la défenderesse fût devenue propriétaire de toutes les parts d'étages, la PPE avait subsisté, en tout cas pour le laps de temps durant lequel la demanderesse avait continué d'administrer les parties communes de la PPE, soit jusqu'à fin septembre 2002; la défenderesse n'avait d'ailleurs pas établi qu'une radiation de la PPE aurait été inscrite au registre foncier dès fin mai 2002; pour la période en question, les frais et charges communs de la PPE lui incombaient donc en totalité et c'était à juste titre que le premier juge n'avait pas appliqué l'art. 712h al. 3 CC, soit une autre clé de répartition.
 
La Cour de justice a par ailleurs qualifié de gestion d'affaires parfaite et régulière les relations entre les parties; la demanderesse était en effet consciente qu'elle administrait sans mandat les parties communes de l'immeuble dont la défenderesse était copropriétaire, puis propriétaire à part entière, et celle-ci n'avait à aucun moment remis en cause les activités qu'elle avait déployées dans la gestion et l'administration des parties communes, ni celles générées par les engagements contractuels, notamment les contrats de service et de maintenance assumés depuis 1986 sur la base d'un mandat de gérance ordinaire, puis depuis 1995 dans le cadre de la gérance légale; après le 1er avril 2001, la défenderesse n'avait formulé aucune interdiction ou opposition, en avançant par exemple que les dépenses engagées auraient été contraires à ses intérêts ou inutiles, et cela même lorsqu'elle avait reçu le premier décompte de frais et charges en mars 2002; une modification de la répartition de ceux-ci après qu'elle eut acquis les lots 1 à 3 n'avait pas été adoptée; la demanderesse pouvait donc raisonnablement, de bonne foi, considérer que l'administration des parties communes de la PPE était commandée par les intérêts de la défenderesse jusqu'à fin septembre 2002, date à laquelle elle avait interrompu sa gestion, son second décompte de frais et charges demeurant impayé; sa gestion étant justifiée, la demanderesse avait droit au remboursement des dépenses pour la période où la défenderesse était propriétaire des lots 1 à 3 et pour la période où elle était propriétaire de tous les lots, et ce jusqu'au 30 septembre 2002. La défenderesse ne pouvait se contenter d'alléguer, rétroactivement, qu'elle avait administré elle-même sa propriété dès fin mai 2002.
 
3.
 
La défenderesse soutient tout d'abord que la gérance légale des art. 16 al. 3 et 94 al. 2 ORFI ne peut pas être assimilée à un mandat ou à un contrat sui generis soumis aux règles du mandat conformément à l'art. 394 al. 2 CO, ladite gérance étant régie exclusivement par les règles du droit public de la LP, à l'exclusion du droit privé. La demanderesse devait donc faire fixer sa rémunération par l'autorité cantonale de surveillance de la LP et n'avait pas le droit de contourner cette obligation en réclamant au nouveau propriétaire des prestations contestées tant dans leur principe que dans leur quotité. La Cour de justice aurait donc violé le droit fédéral en méconnaissant totalement les spécificités de la gérance légale.
 
Ce grief est manifestement infondé. En effet, les frais de gestion litigieux de la demanderesse concernent, d'une part, les lots 1 à 3 du 1er avril 2001 au 31 mai 2002, soit une période durant laquelle la défenderesse était propriétaire de ces parts d'étages et où la gérance légale instituée dans le cadre de la poursuite avait donc cessé pour ces parts; ils concernent, d'autre part, l'ensemble des lots 1 à 6 du 1er juin 2002 au 30 septembre 2002, soit une période où la défenderesse était propriétaire de toutes les parts d'étages et où la gérance légale avait donc pris fin.
 
4.
 
La défenderesse reproche ensuite à la Cour de justice d'avoir appliqué l'art. 712h CC et d'avoir violé le droit fédéral en "étendant la portée de la gérance légale par référence aux règles propres à la PPE". Selon elle, seul l'ancien propriétaire (B.________) aurait été en droit de se prévaloir de la réglementation de la PPE jusqu'au 1er avril 2001; ensuite, du 1er avril 2001 au 31 mai 2002, ces droits se seraient partagés entre lui et elle-même.
 
A nouveau, la défenderesse méconnaît que les frais et charges communs de la PPE litigieux concernent deux périodes, la première pendant laquelle elle était propriétaire des lots 1 à 3 et la seconde pendant laquelle elle était propriétaire des lots 1 à 6. Le grief d'une "extension" de la gérance légale sur la base des règles de la propriété est donc en contradiction avec les faits.
 
5.
 
La défenderesse soutient également que "la référence subsidiaire aux règles de l'enrichissement illégitime, voire à la gestion d'affaire sans mandat, est tout aussi inacceptable" et, partant, viole le droit fédéral. Les "prestations" de la demanderesse seraient tout d'abord prescrites à teneur de l'art. 63 CO. Celle-ci ne pourrait en outre se prévaloir simultanément de l'existence d'un contrat et d'un éventuel enrichissement illégitime. Enfin, la gestion d'affaires ne saurait avoir eu lieu sans mandat puisqu'elle a été effectuée de mauvaise foi, la défenderesse ayant clairement signifié à la demanderesse qu'elle n'entendait pas lui conférer le mandat de gestion ordinaire de l'immeuble après la fin de la gérance légale.
 
La défenderesse invoque là des faits non constatés (prescription, mauvaise foi), dont elle ne prétend pas, avec indication exacte des pièces du dossier, qu'elle les aurait allégués et qu'elle aurait offert de les prouver, régulièrement et en temps utile selon les règles de la procédure cantonale; nouveaux, ils sont donc irrecevables (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 115 II 484 consid. 2a et les arrêts cités). Partant, sa critique, qui repose sur ces faits, est également irrecevable.
 
6.
 
La défenderesse reproche enfin à l'autorité cantonale d'avoir violé l'art. 8 CC. Celle-ci aurait attribué le fardeau de la preuve sur la base de dispositions inapplicables, sans prendre en considération les spécificités de la gérance légale, et ignoré que la demanderesse n'avait même pas cherché à prouver le bien-fondé de ses prétentions, se contentant de produire des décomptes obscurs et impossibles à vérifier, ne faisant citer qu'un témoin, dont la déposition ne lui aurait d'ailleurs été d'aucune utilité. La Cour cantonale aurait aussi ignoré le décompte de l'office des poursuites qui, au mieux, laissait apparaître des prétentions - d'ailleurs contestées - d'un montant de 16'528 fr. 80.
 
Tout d'abord, comme on l'a vu, c'est à tort que la défenderesse invoque les règles sur la gérance légale, puisque les montants litigieux n'ont pas été facturés par la demanderesse en tant que gérante légale. Ensuite, la défenderesse se méprend sur le sens et la portée de l'art. 8 CC. Cette disposition règle notamment, pour tout le domaine du droit civil fédéral (ATF 115 II 300 consid. 3 p. 303), la répartition du fardeau de la preuve et, partant, les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 125 III 78 consid. 3b; 122 III 219 consid. 3c p. 223). Mais il n'y a échec de la preuve que lorsque l'appréciation des preuves ne convainc pas le juge qu'un fait allégué a été établi ou réfuté. Si le juge parvient à une conviction sur ce point, il n'y a pas échec de la preuve et donc pas place pour une violation de l'art. 8 CC (ATF 128 III 22 consid. 2d p. 25; 119 II 114 consid. 4c; 118 II 142 consid. 3a p. 147). En réalité, sous couvert de violation de l'art. 8 CC et de la répartition du fardeau de la preuve, la défenderesse critique l'appréciation des preuves par la cour cantonale, qui a admis les décomptes de frais; or, une telle critique des faits et de leur appréciation est irrecevable dans le recours en réforme (art. 55 al. 1 let. c OJ).
 
7.
 
Vu le sort du recours, les frais de la procédure doivent être mis à la charge de la recourante (art. 156 al. 1 OJ). L'intimée n'ayant pas été invitée à répondre, il n'y a pas lieu de lui allouer de dépens (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la défenderesse.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 16 juin 2006
 
Au nom de la IIe Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
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