BGer 6S.195/2006 | |||
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BGer 6S.195/2006 vom 16.06.2006 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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6S.195/2006 /svc
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Arrêt du 16 juin 2006
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Cour de cassation pénale
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Composition
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MM. les Juges Schneider, Président,
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Kolly et Karlen.
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Greffière: Mme Bendani.
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Parties
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Procureur général du canton de Genève,
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1211 Genève 3,
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recourant,
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contre
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X.________,
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intimée.
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Objet
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Rupture de ban (art. 291 CP),
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pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Chambre pénale
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de la Cour de justice du canton de Genève
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du 27 mars 2006.
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Faits:
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A.
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En juillet 2002, X.________ a été interpellée par la police pour infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et exercice illicite de la prostitution. A cette occasion, elle s'est présentée sous l'identité de Xa.________, ressortissante française, avant d'admettre être la dénommée Xb.________, ressortissante de Guinée Equatoriale, dépourvue de papier d'identité.
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Devant le Juge d'instruction, elle a admis être Xc.________, née le 15 août 1975 au Cameroun, d'où elle était originaire. Elle a encore indiqué être fiancée à Y.________ et avoir été contrainte de se prostituer pour payer la pension de ses deux enfants restés en France. Le 31 juillet 2002, à l'issue d'une seconde audition, le Juge l'a condamnée à un mois d'emprisonnement avec sursis durant deux ans et expulsée du territoire suisse pour une durée de trois ans.
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B.
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Dans la nuit du 27 au 28 septembre 2004, la prétendue Za.________, ressortissante suisse, a été interpellée pour exercice illégal de la prostitution. Elle a rapidement admis être Z.________, ressortissante camerounaise. Elle a indiqué être venue en Suisse pour y retrouver sa soeur, X.________, qui lui avait procuré la carte d'identité suisse, avec laquelle elle s'était légitimée.
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X.________ a reconnu avoir acquis cette carte d'identité pour la somme de 500 fr. et l'avoir remise à sa soeur pour lui éviter des ennuis avec la police. Elle a admis être au courant de la mesure d'expulsion dont elle faisait l'objet et être demeurée en Suisse depuis lors, notamment en compagnie de Y.________, qui l'a épousée en février 2004. Elle a encore exposé qu'en 2003, elle avait voulu se rendre au Cameroun, mais qu'elle avait été refoulée en Suisse à l'aéroport de Zurich, dès lors qu'elle n'était pas en possession de papier d'identité lui permettant de retourner dans son pays.
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C.
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Par jugement du 21 novembre 2005, le Tribunal de police du canton de Genève a condamné X.________, pour infraction à l'art. 23 al. 1 LSEE et rupture de ban au sens de l'art. 291 CP, à 45 jours d'emprisonnement et a renoncé à révoquer le sursis octroyé le 31 juillet 2002.
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D.
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Par arrêt du 27 mars 2006, la Chambre pénale de la Cour de justice genevoise a admis le recours de X.________, en ce sens qu'elle l'a acquittée du chef d'infraction à l'art. 291 CP et l'a condamnée à 15 jours d'emprisonnement avec sursis durant deux ans pour infraction à l'art. 23 al. 1 LSEE.
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L'autorité cantonale a relevé que, suite à l'ordonnance de condamnation du 31 juillet 2002, X.________ avait été remise en liberté sans autre contrôle ni remise à la police et qu'elle avait voulu, à une reprise, se rendre dans son pays sans y parvenir à défaut de disposer des papiers d'identité nécessaires. Dans ces circonstances, elle a considéré que les conditions de l'art. 291 CP n'étaient pas réalisées, à défaut d'être réalistes et a donc acquitté l'appelante de ce chef d'infraction, précisant encore qu'elle disposait désormais d'un permis de séjour suite à son mariage célébré en février 2004 avec un ressortissant suisse.
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E.
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Le Procureur général de la République et canton de Genève dépose un pourvoi en nullité et conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal. Il conteste l'acquittement de X.________ du chef d'infraction à l'art. 291 CP.
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Cette dernière n'a pas donné suite à l'invitation à déposer une réponse qui lui a été adressée.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 291 CP.
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1.1 Cette disposition punit de l'emprisonnement celui qui aura contrevenu à une décision d'expulsion du territoire de la Confédération ou d'un canton prononcée par une autorité compétente. Cette infraction suppose la réunion de trois conditions: une décision d'expulsion, la transgression de celle-ci et l'intention.
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L'expulsion est l'ordre donné, par une autorité compétente judiciaire ou administrative, à l'étranger de quitter le territoire suisse, lié à l'interdiction d'y entrer à nouveau pendant la durée de l'expulsion. Il ne peut y avoir rupture de ban si l'autorité qui a prononcé l'expulsion était incompétente (cf. ATF 98 IV 106 consid. 3 p. 108 ss; S. Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2ème éd, ad art. 291 n° 2; B. Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, ad art. 291 n° 4 à 7). La décision doit être exécutoire (ATF 71 IV 219), ce qui n'est notamment pas le cas si elle a été prononcée avec sursis (art. 41 CP) ou si son exécution a été différée à titre d'essai (art. 55 al. 2 CP). Contrairement à l'art. 292 CP relatif à l'insoumission à une décision de l'autorité, l'art. 291 CP ne prévoit pas que la décision avise le destinataire des conséquences pénales d'une transgression (G. Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, BT II, 1995, § 50 n°18; S. Trechsel, op cit, ad art. 291 n° 2).
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L'infraction est consommée si l'auteur reste en Suisse après l'entrée en force de la décision, alors qu'il a le devoir de partir ou s'il y entre pendant la durée de validité de l'expulsion (ATF 70 IV 174). Cette jurisprudence, rendue dans un cas de bannissement intercantonal, lequel n'est plus possible depuis 1975, vaut en revanche toujours pour les étrangers, quelle que soit leur nationalité (T. Freytag, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, ad art. 291, n° 7; G. Stratenwerth, op. cit., BT II, §50 n° 14). Lorsque l'auteur se trouve en Suisse, le délit est continu et donc commis tant que dure le séjour (ATF 104 IV 186 consid. 1b p. 188).
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Sur le plan subjectif, l'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant toutefois suffisant. Il faut non seulement que l'auteur entre ou reste en Suisse volontairement, mais encore qu'il sache qu'il est expulsé ou accepte cette éventualité.
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1.2 S'agissant de l'aspect objectif de l'infraction, il ressort de l'arrêt attaqué que, le 31 juillet 2002, le juge d'instruction, qui est une autorité cantonale compétente en la matière (art. 218 CPP/GE), a notifié à l'intimée une ordonnance prononçant son expulsion du territoire suisse pour une durée de trois ans, que l'intéressée a lu et signé ladite décision et qu'elle n'a pourtant jamais quitté le pays depuis lors. Au regard de ces éléments, les conditions objectives de l'art. 291 CP, telles qu'exposées au considérant précédant, sont réalisées. Certes, la Chambre pénale relève que, suite au prononcé de son expulsion, l'intimée a été remise en liberté sans autre formalité. Cette constatation est toutefois sans pertinence, une ordonnance de condamnation devenant exécutoire à défaut d'opposition (art. 218B al. 2 CPP/GE), aucune autre formalité n'étant requise.
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S'agissant de l'aspect subjectif de l'infraction, il ressort de l'arrêt attaqué que l'intimée était au courant de la mesure d'expulsion prononcée à son encontre et qu'elle a voulu, à une reprise, se rendre dans son pays sans y parvenir, à défaut de disposer des papiers d'identité nécessaires. Ces constatations cantonales sont toutefois insuffisantes pour trancher la question de l'intention. En effet, elles ne permettent pas de déterminer si l'intimée est restée volontairement en Suisse ou si, au contraire, elle a voulu quitter le pays pour se conformer à la décision d'expulsion, sans toutefois le pouvoir. Faute d'éléments suffisants sur ce point, le pourvoi doit être admis en application de l'art. 277 PPF, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
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2.
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Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité à l'accusateur public qui obtient gain de cause (art. 278 al. 3 PPF). L'arrêt sera rendu sans frais.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le pourvoi est admis en application de l'art. 277 PPF, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouveau jugement.
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2.
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Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué d'indemnité.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre pénale de la Cour de justice du canton de Genève.
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Lausanne, le 16 juin 2006
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Au nom de la Cour de cassation pénale
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: La greffière:
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