BGer 5C.282/2006 | |||
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BGer 5C.282/2006 vom 02.07.2007 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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5C.282/2006 /frs
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Arrêt du 2 juillet 2007
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IIe Cour de droit civil
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Composition
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MM. et Mme les Juges Raselli, Président, Meyer et Hohl.
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Greffier: M. Fellay.
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Parties
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A.________,
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B.________
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C.________,
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D.________,
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défendeurs et recourants,
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tous quatre représentés par Me Philippe Rossy, avocat,
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contre
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dame X.________,
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F.________,
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demanderesses et intimées,
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toutes deux représentées par Me Denis Sulliger, avocat,
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Objet
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annulation d'un testament,
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recours en réforme [OJ] contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 15 décembre 2005.
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Faits :
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A.
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Par testament authentique du 2 mai 1990, instrumenté par le notaire G.________ à Rotterdam (Pays-Bas), H.________, citoyen hollandais né le 16 mai 1912 et vivant à E.________, a:
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- légué à dame X.________ ou, en cas de pré-décès de celle-ci, à son mari X.________ tous ses biens immobiliers sis dans les communes de E.________ et de Y.________, son argent liquide et tous ses biens mobiliers se trouvant à cet endroit, sous réserve de divers biens précisément désignés,
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- institué héritiers: - F.________ pour la moitié de la succession,
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- A.________, B.________,
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C.________ et D.________,
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chacun pour 1/8 de la succession.
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Le 11 juin 1994, le testateur a conclu avec les époux X.________ un contrat de bail à loyer gratuit, portant sur sa villa de E.________.
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Le 23 août 1994, le testateur a fait instrumenter par le même notaire un testament authentique qui révoquait toutes ses dernières volontés antérieures et instituait héritiers A.________, B.________, C.________ et D.________, chacun pour 1/4 de la succession.
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Le testateur est décédé le 6 avril 1998 à Aigle.
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B.
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B.a Par requête de conciliation du 15 septembre 1999 adressée au Juge de paix du cercle de Villeneuve, puis par demande du 23 juin 2000 adressée à la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, dame X.________ a conclu à l'annulation des dispositions testamentaires du 23 août 1994.
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F.________ en a fait de même par requête du 14 juin 2000 adressée au Tribunal de Grande Instance de Rotterdam, puis par demande d'intervention dans le procès ouvert devant la Cour civile, demande d'intervention qui a été admise par jugement incident du 18 octobre 2000.
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B.b Il est ressorti de l'instruction de la cause par la Cour civile les éléments essentiels suivants:
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- selon le témoin I.________, le défunt était bien jusqu'en 1992; cette année-là, celui-ci n'avait plus pu conduire et avait commencé à décliner; il avait des comportements bizarres, lui arrivant de remonter sans arrêt sa montre, de lire son journal à l'envers ou de faire la vaisselle dans la cuvette des toilettes; dès 1994/1995 environ, il peinait à se souvenir de certaines choses;
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- selon le témoin J.________, préposé au contrôle des habitants et des étrangers, dès 1993/1994, le défunt ne le reconnaissait pas, ne savait plus qui il était et n'était plus en état physique de se rendre aux bureaux communaux, de sorte que le témoin devait se déplacer chez lui;
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- selon les témoins K.________, qui s'était occupé pendant de nombreuses années des déclarations fiscales du défunt, L.________, infirmière de santé publique à la retraite, et M.________, Consul honoraire, c'est après son accident cérébral de 1992 que le défunt, qui était un "grand homme" plein d'allure, avait commencé à diminuer tant physiquement qu'intellectuellement, perdant peu à peu l'usage du français, s'exprimant plutôt en hollandais et ne sachant plus rentrer chez lui lorsqu'il allait se promener;
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- selon le témoin N.________, médecin ayant suivi le défunt de 1990 à 1992, ce dernier avait connu un déclin marqué de ses facultés physiques et intellectuelles; il avait dû être hospitalisé en avril 1992 à sa demande à cause de chutes multiples; il souffrait d'importantes pertes de mémoire; il était difficile de converser avec lui; il négligeait son traitement médical contre l'hypertension, mais aussi la prévention des attaques cérébrales, qui se sont produites en 1980, en novembre 1991 et en avril 1992; en juin 1992 déjà, le défunt ne disposait plus de facultés intellectuelles suffisantes et n'était donc pas à même d'estimer correctement les intérêts entrant en jeu pour la rédaction de son testament;
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- selon le notaire G.________, le défunt vieillissait certes, mais avait toute sa tête; il était bien situé dans le temps et dans l'espace; s'il avait parfois des oublis, il savait cependant exactement ce qu'il voulait en ce qui concerne ses testaments; il pouvait expliquer pourquoi il modifiait certaines dispositions testamentaires; à chaque fois que le défunt changeait son testament, il exprimait sa propre volonté, de manière claire et pertinente; le témoin a ajouté qu'il n'avait jamais eu de doute quant à la capacité du défunt à passer un testament et que s'il en avait eu un, il n'aurait pas instrumenté l'acte;
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- les témoins J.________ (déjà cité) et O.________, juge de paix, s'étaient demandé s'il fallait mettre le défunt sous tutelle ou curatelle, mais y avaient renoncé du fait que la demanderesse X.________ s'occupait de lui.
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Selon le docteur P.________, auquel une expertise a été confiée en cours d'instance, un diagnostic précis ne pouvait être posé a posteriori; il était cependant hautement probable que le défunt souffrait d'un "syndrome démentiel mixte, avec une composante vasculaire certaine et probablement dégénérative, d'une évolution lentement progressive, au vu des témoignages [ci-dessus]; il s'agissait probablement d'une encéphalopathie sous-corticale vasculaire, associée à une démence à infarctus multiples"; le 23 août 1994, la capacité de tester, en particulier le discernement, du testateur étaient fortement atteints, mais il n'était pas possible d'affirmer que cette atteinte était complète; en d'autres termes, si la capacité de discernement, par rapport aux notions exigées pour la rédaction d'un testament, était encore suffisante au moment de la rédaction du premier testament, tel n'était pas le cas au moment de la rédaction du deuxième testament.
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B.c Par jugement du 15 décembre 2005, la Cour civile a admis l'action des demanderesses et annulé le testament du 23 août 1994. En substance, elle a retenu que le disposant n'était, de manière générale, plus capable de discernement après 1991/1992 et ne pouvait plus s'engager juridiquement dans des affaires relativement compliquées comme celle de la rédaction d'un testament; par ailleurs, les défendeurs n'avaient pas rapporté la contre-preuve que le testateur, en dépit de ce défaut général de capacité de discernement, avait exceptionnellement disposé de cette capacité au moment déterminant.
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C.
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Contre le jugement précité, qui leur a été communiqué le 31 mai 2006, les défendeurs ont recouru en réforme auprès du Tribunal fédéral le 30 juin 2006, concluant au rejet de la demande et donc à la validation du testament du 23 août 1994.
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Par arrêt du 29 septembre 2006, le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable faute de paiement de l'avance de frais en temps utile. Les recourants ont demandé la révision de cet arrêt. Ils ont allégué et établi que leur mandataire avait requis une prolongation du délai de paiement de l'avance de frais par courrier posté en temps utile, mais sous pli simple, lequel avait pu s'égarer soit lors de son acheminement à la poste, soit lors de sa réception par le Tribunal fédéral. Par décision du 4 avril 2007, celui-ci a admis la demande de révision sur la base de l'art. 137 let. b OJ et prononcé la reprise de l'instruction du recours en réforme.
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Le dépôt d'une réponse au fond n'a pas été requis.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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1.1 La décision attaquée ayant été rendue avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007, de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) est applicable à la présente cause (art. 132 al. 1 LTF).
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1.2 La valeur litigieuse n'est pas formellement constatée (art. 51 al. 1 let. a OJ). Toutefois, la succession en cause comprenant plusieurs immeubles et de nombreux biens mobiliers, ceux-ci étant à eux seuls estimés à 10'000 fr., l'exigence posée par l'art. 46 OJ est manifestement respectée.
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1.3 En vertu de l'art. 55 al. 1 let. c OJ, l'acte de recours doit indiquer quelles sont les règles de droit fédéral violées et en quoi consiste cette violation. Une motivation limitée à un simple renvoi aux écritures produites devant les instances cantonales est insuffisante, partant irrecevable; le recourant doit formuler ses griefs à nouveau (ATF 110 II 74 consid. 1 p. 78; J.-F. Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, Berne 1990, n. 1.5.2.4. ad art. 55 OJ). Le renvoi que les recourants font au mémoire de leur conseil déposé le 14 juillet 2005 est donc inadmissible.
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1.4 Le Tribunal fédéral est en principe lié par les faits constatés dans la décision attaquée (art. 63 al. 2 OJ).
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Sont dès lors irrecevables, parce que ne faisant pas l'objet de telles constatations, les allégués concernant les qualités professionnelles du notaire attestées par son associé Q.________.
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Il en va de même des circonstances du déplacement du testateur en Hollande aux fins de modification de son testament, en particulier de l'état d'esprit dans lequel il a effectué ce voyage. Le Tribunal fédéral s'en tient, sur ce point, à la constatation du jugement attaqué (p. 12, let. c) selon laquelle les déplacements en Hollande exigeaient une aide substantielle de la demanderesse X.________, qui accompagnait l'intéressé jusqu'à Bâle en train pour le confier à des voyageurs hollandais jusqu'à Z.________ où la famille A.________ l'accueillait.
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Est tout aussi irrecevable l'allégation selon laquelle le testateur n'était pas sous l'influence des intimés à l'époque décisive, quand bien même la Cour cantonale n'a pas non plus prétendu le contraire.
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1.5 En considérant qu'au jour de la signature du testament litigieux, à savoir le 23 août 1994, le testateur était âgé de 84 ans (consid. IVb, p. 24), alors qu'elle avait préalablement retenu en fait qu'il était né le 16 mai 1912 (ch. 1, p. 2) et qu'à la date précitée il était âgé de plus de 82 ans (ch. 5, p. 5), la Cour cantonale a commis une inadvertance manifeste qu'il y a lieu, conformément à l'art. 63 al. 2 OJ, de rectifier d'office en ce sens que le testateur était, au moment déterminant, âgé de plus de 82 ans.
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2.
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Pour être valable, un testament ne peut être rédigé que par une personne capable de discernement (art. 467 CC), c'est-à-dire par une personne qui n'est pas privée de la faculté d'agir raisonnablement par suite, notamment, de maladie mentale ou de faiblesse d'esprit (art. 16 CC).
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2.1 La capacité de discernement ne doit pas être appréciée abstraitement mais en rapport avec un acte déterminé, selon la difficulté et la portée de cet acte. On peut donc imaginer qu'une personne dont la capacité de discernement est généralement réduite puisse tout de même exercer certaines tâches quotidiennes et soit capable de discernement pour les actes qui s'y rapportent; pour des affaires plus complexes, en revanche, on pourra dénier sa capacité de discernement. Contrairement aux petits achats et aux affaires quotidiennes, la rédaction d'un testament compte parmi les actes les plus exigeants, surtout s'il s'agit de dispositions compliquées (ATF 124 III 5 consid. 1a et les références).
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2.2 La capacité de discernement est la règle; elle est présumée d'après l'expérience générale de la vie, de sorte qu'il incombe à celui qui prétend qu'elle fait défaut de le prouver. Cette preuve n'est toutefois soumise à aucune prescription particulière; une vraisemblance prépondérante ("überwiegende Wahrscheinlichkeit") excluant tout doute sérieux suffit, notamment quand il s'agit de l'état mental d'une personne décédée, car la nature même des choses rend alors impossible une preuve absolue (ATF 130 III 321 consid. 3.3; 117 II 231 consid. 2b p. 234 et les arrêts cités). Lorsque l'expérience générale de la vie amène, dans le cas par exemple d'une personne atteinte de faiblesse d'esprit due à l'âge, à présumer l'inverse, c'est-à-dire l'absence de discernement, la présomption de la capacité de discernement est renversée; c'est alors à celui qui se prévaut de la validité du testament qu'il appartient d'établir que la personne concernée a accompli l'acte litigieux dans un moment de lucidité (ATF 124 III 5 consid. 1b et les références).
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2.3 Le fait que le testament rédigé en la forme publique fasse foi, en tant que titre authentique, des faits qu'il constate et dont l'inexactitude n'est pas prouvée (art. 9 CC) ne change rien à la preuve de la capacité de discernement puisque, comme on vient de le relever, celle-ci doit de toute manière être présumée d'après l'expérience générale de la vie. D'ailleurs, le titre authentique fait foi uniquement dans la mesure où la forme publique est requise pour les faits qu'il constate. Or, dans le cas du testament public, l'attestation de deux témoins par laquelle ceux-ci certifient que le testateur a fait sa déclaration en paraissant capable de disposer (art. 501 al. 2 CC) ne fait pas partie du contenu du titre au sens étroit; l'attestation constitue simplement un indice en faveur de la capacité de discernement. Le juge n'est lié ni par l'attestation des témoins se rapportant à la capacité de discernement ni par les déclarations du fonctionnaire instrumentant l'acte. Il existe des maladies mentales qui ne se manifestent pas de manière aiguë, mais consistent en une diminution générale des facultés de l'esprit; ces maladies ne sont pas décelables pour une personne non avertie, si bien que ce n'est souvent qu'à l'aide d'une expertise que l'on peut les mettre en lumière avec leurs symptômes (ATF 124 III 5 consid. 1c).
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2.4 C'est une question de droit que de savoir si l'on peut tirer des constatations de fait, telles que l'état de santé mentale et les troubles qui lui sont liés, ou la capacité de s'opposer à des tentatives d'influence, la conclusion que le testateur était capable de discernement (art. 43 al. 4 OJ). Le Tribunal fédéral peut revoir cette conclusion dans la mesure où elle dépend de la notion même de capacité de discernement, de l'expérience générale de la vie et du degré de vraisemblance exigé pour exclure cette capacité (ATF 124 III 5 consid. 4 p. 13; 117 II 231 consid. 2c). Il en va de même du constat d'un intervalle de lucidité, qui n'est rien d'autre qu'une récupération momentanée de capacité de discernement perdue.
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3.
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3.1 En l'espèce, la Cour cantonale a retenu, en se fondant sur l'âge avancé du de cujus au moment de la signature du testament litigieux ainsi que sur les déclarations des témoins, que le testateur paraissait, à ce moment-là, généralement diminué dans ses facultés mentales, selon l'expérience générale de la vie, et qu'il y avait donc lieu de présumer qu'il n'était plus capable de discernement, partant de tester valablement. Elle a dès lors examiné si les défendeurs avaient rapporté la contre-preuve qu'au moment de la signature de l'acte notarié le de cujus avait sa capacité de discernement nonobstant son affection psychique généralisée attestée. Sur ce point, elle ne s'est pas sentie liée par les témoignages du notaire ayant instrumenté l'acte litigieux et de sa collaboratrice ayant assisté à la lecture du testament, dès lors que le notaire, à qui il incombait de se faire une idée exacte de la capacité de discernement du disposant au moment de l'instrumentation et de la signature de l'acte, ne pouvait a posteriori que difficilement admettre que son client avait, au moment des faits, des absences, des oublis et, de façon générale, lui donnait le sentiment qu'il était diminué dans ses facultés intellectuelles. Par ailleurs, il n'y avait pas lieu d'attacher une importance décisive au contenu du testament, dont les dispositions étaient simples, d'une portée facile à saisir et ne laissaient en rien apparaître les troubles du de cujus, dès lors que le testament avait été établi par un notaire. S'agissant du contrat de bail à loyer gratuit conclu par le de cujus avec les époux X.________ deux mois avant la signature du testament litigieux, la Cour a considéré que la proximité temporelle des deux actes pouvait effectivement justifier la révocation des dispositions prises antérieurement en faveur de la demanderesse X.________, mais alors il était difficile de comprendre pourquoi le legs prévu en faveur de la demanderesse F.________ avait été également révoqué; elle a dénié toute valeur probante aux explications fournies sur ce point par le notaire, à savoir que le défunt, ne côtoyant plus la demanderesse F.________, aurait tracé la disposition testamentaire en faveur de celle-ci sur l'exemplaire d'une lettre du 14 août 1992 - rédigée par le notaire et annotée par le défunt - qui avait servi de projet au nouvel acte notarié.
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3.2 Les défendeurs qualifient simplement de "limite", mais ne contestent pas vraiment l'appréciation de la Cour cantonale selon laquelle le testateur, âgé de plus de 82 ans à l'époque de la rédaction du testament litigieux, paraissait généralement diminué dans ses facultés mentales selon l'expérience générale de la vie. La présomption de la capacité de discernement étant ainsi renversée, il leur incombait de rapporter la contre-preuve que le testateur avait, malgré la diminution générale de ses facultés mentales, agi dans un moment de lucidité lorsqu'il avait signé ledit testament. Les défendeurs restreignent d'ailleurs expressément leur recours à cette question. A cet égard, ils se prévalent en substance de ce que le notaire et deux témoins ont attesté de la capacité de discernement du testateur, de ce que les mesures prises dans le testament litigieux étaient simples et logiques, de ce que le testateur s'est accordé un long temps de réflexion, s'est rendu seul en Hollande aux fins de modifier son testament, n'a pas subi d'influence des défendeurs et a encore vécu 4 ans après la signature du testament litigieux sans y apporter de modifications, alors que par le passé il avait très souvent modifié ses intentions testamentaires.
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3.3 C'est à bon droit que la Cour cantonale a retenu, sur la base de ses constatations de fait, que le testateur ne disposait pas exceptionnellement, au moment critique, de la capacité de discernement.
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3.3.1 Les déclarations du notaire et des deux témoins constituaient certes un indice, mais n'avaient guère de poids face aux conclusions de l'expertise ordonnée en l'espèce (cf. supra consid. 2.3 in fine; ATF 124 III 5 consid. 1c p. 9).
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Les défendeurs ne s'en prennent pas, au demeurant, à l'argument de la Cour cantonale selon lequel le notaire, à qui il incombait de se faire une idée exacte de la capacité de discernement du disposant au moment de l'instrumentation et de la signature de l'acte, ne pouvait a posteriori que difficilement admettre que son client avait eu, au moment des faits, des absences, des oublis et, de façon générale, lui avait donné le sentiment qu'il était diminué dans ses facultés intellectuelles.
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3.3.2 Le fait que le testateur avait, entre 1992 et 1994, discuté de différents testaments et de leurs modifications, s'était rendu en Hollande à cet effet et avait fait établir un testament notarié le 27 août 1992 qu'il avait partiellement modifié le 6 juillet 1993, indiquaient peut-être que le testateur n'avait à l'époque pas complètement perdu sa capacité de discernement. Toutefois, outre que le jugement attaqué ne fait pas un tel constat, les événements en question n'autorisaient aucune conclusion fiable quant à la capacité de discernement du testateur au moment déterminant: en effet, ni les circonstances précises des démarches faites alors par le testateur, ni le contenu des testaments discutés, respectivement de leurs modifications, ne font l'objet de constatations de la Cour cantonale. Au demeurant, une activité testamentaire fébrile ne parle pas forcément en faveur de l'existence d'intervalles de lucidité.
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3.3.3 Les défendeurs ne peuvent rien déduire en leur faveur de l'argument tiré de la simplicité de contenu du testament en cause. Certes, en droit suisse, la capacité de discernement doit être comprise de manière relative; l'on admet ainsi qu'une personne dont la capacité de discernement est généralement réduite puisse tout de même exercer certaines tâches quotidiennes, alors que pour des affaires plus complexes elle devra se voir dénier sa capacité de discernement (ATF 124 III 5 consid. 1a p. 8). Si la rédaction d'un testament compte parmi les actes les plus exigeants, ce n'est pas fondamentalement à cause de la complexité éventuelle de ses dispositions, mais parce qu'elle présuppose la capacité d'agir de façon cohérente; en d'autres termes, tester n'est pas seulement affaire de sympathie et de persistance d'un tel sentiment, c'est aussi exercer un choix dans son réseau de relations humaines et accomplir un acte concret de disposition sur des valeurs (Jean Nicolas Druey, in: PJA 6/98, p. 735 ch. 5).
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3.3.4 Pour les défendeurs, la conclusion du contrat de bail gratuit le 11 juin 1994, soit deux mois avant le testament litigieux, plaidait en faveur de la capacité de discernement et donc de tester du de cujus au moment déterminant. Elle tendait à prouver le caractère logique et raisonnable du nouveau testament: ce dernier supprimait en effet des avantages successoraux initialement accordés à la demanderesse X.________ par le testament du 2 mai 1990, puisque celle-ci était par ailleurs favorisée par le bail gratuit; l'ancien testament, qui léguait à l'intéressée la villa du défunt en propriété, était "absurde au regard de ce bail gratuit"; le bail compensait donc dans une certaine mesure la révocation de l'ancien testament.
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Selon la jurisprudence, l'on ne peut pas tirer de conclusions générales sur la capacité de discernement d'une personne à partir du simple contenu d'un acte ou de ses effets juridiques (ATF 124 III 5 consid. 4c/cc p. 17). Les défendeurs qualifient d'ailleurs eux-mêmes d'absurde la situation résultant de la conclusion d'un contrat de bail gratuit à propos d'un immeuble légué en propriété par testament 4 ans auparavant. Si, comme le retient la Cour cantonale, le de cujus n'était plus capable de tester valablement le 23 août 1994, date de l'établissement du testament litigieux, cette incapacité pouvait bien avoir affecté aussi la conclusion du contrat de bail quelque 2 mois auparavant, ce qui pourrait expliquer l'absurdité dont font état les défendeurs. La validité du contrat de bail en question n'est certes pas en jeu ici, mais les considérations qui précèdent montrent que la conclusion de ce contrat ne constitue précisément pas un bon argument en faveur de la capacité de tester du de cujus.
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3.3.5 Les défendeurs se prévalent de ce que le de cujus a encore vécu près de 4 ans après la passation du testament litigieux, période pendant laquelle il aurait pu modifier encore une fois ses dernières volontés. Or, il ne l'a pas fait, alors qu'il l'avait fait très fréquemment jusque-là, ce qui indiquerait aussi qu'il n'était pas à l'agonie lorsqu'il a signé ledit testament.
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Cette argumentation fait tout simplement fi du fait, admis d'ailleurs par les défendeurs, que le de cujus a vu ses facultés intellectuelles décliner progressivement à partir de 1991/1992, ce qui permet d'admettre comme tout à fait plausible qu'après le testament contesté du 23 août 1994 il n'ait plus eu la capacité de se livrer à des activités relatives à sa succession, lesquelles étaient d'ailleurs toujours liées à des voyages en Hollande.
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3.3.6 Les défendeurs reprochent enfin à la Cour cantonale de n'avoir pas attribué de valeur probante à l'explication, pourtant logique, du notaire selon laquelle le de cujus avait tracé la disposition testamentaire en faveur de la demanderesse F.________ sur le projet du 14 août 1992 parce qu'il ne côtoyait plus cette personne. Ils voient une preuve de l'exactitude de l'explication du notaire dans le fait, constaté dans le jugement attaqué, que la demanderesse précitée n'a eu connaissance du décès du testateur qu'en juillet 1999.
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Cette critique est irrecevable, car elle vise à remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent, ce qui est inadmissible dans un recours en réforme (ATF 130 III 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3).
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4.
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Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
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Les défendeurs doivent assumer les frais de la procédure de révision (cf. décision du 4 avril 2007, consid. 3.3) et ceux du présent arrêt (art. 156 al. 1 OJ).
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Les demanderesses ont droit à des dépens pour la seule procédure de révision, une réponse au fond ne leur ayant pas été demandée. Le montant de ces dépens doit être fixé conformément aux art. 7 et 8 al. 2 du règlement sur les dépens du 31 mars 2006 (RS 173.110.210.3), applicable à toutes les décisions en matière de frais et dépens rendues après son entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (art. 14 et 15).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2.
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Un émolument judiciaire global de 12'000 fr., pour les procédures de révision et au fond, est mis à la charge des défendeurs, solidairement entre eux.
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3.
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Les défendeurs, solidairement entre eux, verseront aux demanderesses, solidairement entre elles, une indemnité de 200 fr. à titre de dépens pour la procédure de révision.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 2 juillet 2007
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Au nom de la IIe Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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