BGer 1B_112/2008 | |||
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BGer 1B_112/2008 vom 29.05.2008 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1B_112/2008/col
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Arrêt du 29 mai 2008
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Féraud, Président, Aemisegger et Fonjallaz.
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Greffier: M. Jomini.
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Parties
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A.________, B.________ et C.________, recourants,
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tous trois représentés par Me Alexandre Guyaz, avocat,
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contre
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Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.
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Objet
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procédure pénale,
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recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 8 février 2008.
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Considérant en fait et en droit:
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1.
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Une enquête a été ouverte par le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne à la suite du décès le 15 mai 2006 de D.________, technicien de maintenance sur ascenseurs employé par E.________ SA (enquête PE06.014823). Le décès semble dû à une asphyxie par compression de la cage thoracique, le défunt s'étant retrouvé coincé sous un contrepoids lors de la réparation d'un ascenseur de l'hôtel Alpha-Palmiers, à Lausanne.
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Le Juge d'instruction a rendu le 11 septembre 2007 une ordonnance de non-lieu. Il a examiné la situation de F.________, collègue de travail de la victime qu'il accompagnait le jour de l'accident, et il a considéré qu'aucune faute ne pouvait lui être reprochée. Le Juge d'instruction a également considéré, en se référant à l'époque de la construction ou de la conception de l'ascenseur, que l'action pénale serait prescrite pour les faits survenus à ce moment-là. Le Juge d'instruction a en outre rejeté des réquisitions, relatives à la procédure probatoire, présentées par la partie civile A.________, agissant en son nom propre et au nom de ses fils B.________ et C.________. La première nommée était la concubine du défunt, lequel était le père des deux enfants.
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2.
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A.________ et ses deux enfants ont recouru contre l'ordonnance de non-lieu auprès du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Ce tribunal a statué dans sa séance du 8 février 2008 par un arrêt dont le dispositif est le suivant:
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I. Admet le recours.
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II. Annule l'ordonnance.
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III. Renvoie le dossier de la cause au Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne pour qu'il procède à un complément d'enquête dans le sens des considérants, puis rende une nouvelle décision.
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IV.-V. [Frais et caractère exécutoire de l'arrêt].
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Dans les motifs de son arrêt, notifié le 14 mars 2008, le Tribunal d'accusation a considéré que l'on pouvait "s'interroger [...] sur la responsabilité de l'exploitant, soit le propriétaire de l'hôtel, ou de celui qui se charge de l'entretien, soit vraisemblablement la maison E.________", que dans ce contexte "la question de la date de délivrance du permis de construire définitif et valide [devait] être éclaircie", et que l'expert déjà mis en oeuvre devait être interpellé à ce sujet. Un complément d'instruction, dans ce sens, était donc prescrit (p. 4 de l'arrêt).
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En outre, selon l'arrêt attaqué, le recours des parties civiles tendait également à ce que F.________ ne bénéficiât pas d'un non-lieu, mais qu'il fût inculpé d'homicide par négligence, subsidiairement d'omission de prêter secours. Le Tribunal d'accusation a considéré, en substance, qu'on ne pouvait pas reprocher à F.________ d'avoir omis de prendre les mesures de sécurité commandées par les circonstances pour empêcher l'accident, et que ce dernier avait contesté s'être rendu compte du danger que courait la victime, sans que l'on ait pu établir qu'il avait dû au contraire percevoir ce danger. Les indices étaient donc, d'après l'arrêt du Tribunal d'accusation, insuffisants pour inculper F.________ d'homicide par négligence, et l'infraction de l'art. 128 CP ne saurait être retenue (p. 6 de l'arrêt).
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Enfin, le Tribunal d'accusation a refusé d'ordonner un complément d'enquête, requis par les parties civiles, tendant à ce que l'instruction porte sur les conditions de travail dans l'entreprise E.________ (p. 6-7 de l'arrêt).
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3.
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Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ et ses deux fils demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal d'accusation et de renvoyer la cause à cette juridiction pour inculpation de F.________ et complément d'enquête dans le sens des considérants, lequel complément devant être effectué par un nouveau juge d'instruction. Les recourants se plaignent d'une violation du droit d'être entendu, d'une appréciation arbitraire des faits ainsi que de violations du droit pénal fédéral.
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Il n'a pas été demandé de réponses au recours. Le Tribunal d'accusation a produit le dossier de la cause.
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4.
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La voie du recours en matière pénale (art. 78 ss LTF) est ouverte contre la décision attaquée. Lorsqu'elle a pris part à la procédure devant l'autorité précédente, la victime a qualité pour recourir, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 5 LTF).
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L'arrêt du Tribunal d'accusation est une décision incidente, qui ne met pas fin à la procédure pénale. Il ne s'agit pas d'une décision séparée portant sur la compétence ou sur une demande de récusation; l'art. 92 LTF n'est donc pas applicable. Contre la présente décision incidente, le recours en matière pénale n'est recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 LTF. Il faut donc qu'elle puisse causer un préjudice irréparable au recourant, conformément à l'art. 93 al. 1 let. a LTF; la seconde hypothèse, énoncée à l'art. 93 al. 1 let. b LTF, n'entre en effet manifestement pas en considération en l'espèce (cf. ATF 133 IV 288 consid. 3.2 p. 292). Dans la procédure de recours en matière pénale, la notion de préjudice irréparable se rapporte à un dommage de nature juridique, qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure: en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif.
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Dans le cas particulier, l'ordonnance de non-lieu a été annulée par le Tribunal d'accusation, qui a renvoyé l'affaire au Juge d'instruction. En vertu du dispositif de l'arrêt attaqué, il n'existe plus en l'état, au niveau cantonal, de décision mettant fin à l'action pénale. Il n'y a pas non plus de décision du Tribunal d'accusation statuant sur la situation juridique des personnes visées par l'enquête, et les circonstances sont donc différentes de celles de l'affaire, invoquée par les recourants, qui a donné lieu à l'arrêt publié aux ATF 121 IV 45 (à propos d'un recours dirigé contre une ordonnance rendue en dernière instance cantonale qui confirmait un refus d'inculper, préalable à la décision de classement). D'un point de vue formel, la décision attaquée n'est pas une décision finale partielle mais une simple décision de renvoi à l'autorité inférieure. Si, sur la base de l'enquête, après les compléments prescrits par le Tribunal d'accusation, et des considérants de l'arrêt attaqué, le Juge d'instruction rend une nouvelle ordonnance de non-lieu concernant F.________ - l'arrêt attaqué imposant au premier juge de prendre une nouvelle décision formelle sur ce point -, cette ordonnance pourra faire l'objet d'un recours au niveau cantonal. La décision finale du Tribunal d'accusation, le cas échéant, pourra quant à elle être attaquée devant le Tribunal fédéral; conformément à l'art. 93 al. 3 LTF, les décisions préjudicielles et incidentes rendues dans le cadre de cette procédure pourront elles aussi être attaquées à cette occasion, dans la mesure où elles influent sur le contenu de la décision finale. En définitive, la décision de renvoi au Juge d'instruction ne cause pas aux recourants de préjudice irréparable au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus. Le recours est donc irrecevable en vertu de l'art. 93 al. 1 LTF.
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5.
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Les recourants demandent l'assistance judiciaire. Il résulte du dossier que les conditions de l'art. 64 al. 1 et 2 LTF sont remplies. Cette requête doit donc être admise. En conséquence, il n'est pas perçu de frais judiciaires et Me Guyaz doit être désigné comme avocat d'office des recourants, pour la présente procédure de recours. Une indemnité appropriée lui sera versée par la caisse du Tribunal fédéral.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est irrecevable.
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2.
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La demande d'assistance judiciaire est admise.
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3.
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Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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4.
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Me Alexandre Guyaz, avocat à Lausanne, est désigné en tant qu'avocat d'office des recourants et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, supportée par la caisse du Tribunal fédéral.
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5.
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Le présent arrêt est communiqué à l'avocat des recourants, au Procureur général et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 29 mai 2008
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Féraud Jomini
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