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Informationen zum Dokument  BGer 4A_553/2009  Materielle Begründung
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BGer 4A_553/2009 vom 13.01.2010
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4A_553/2009
 
Arrêt du 13 janvier 2010
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss.
 
Greffier: M. Ramelet.
 
Parties
 
1. H.X.________,
 
2. F.X.________,
 
recourants,
 
tous deux représentés par Me Mauro Poggia,
 
contre
 
Société Y.________, intimée,
 
représentée par Me Jacques Berta.
 
Objet
 
évacuation immédiate,
 
recours contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève du 5 octobre 2009.
 
Faits:
 
A.
 
A.a Les époux H.X.________ et F.X.________ ont souscrit et libéré des parts sociales de la Société Y.________ (ci-après: la coopérative) à concurrence de 2'200 fr. Selon ses statuts, cette société a "pour but de procurer à ses membres des logements familiaux salubres, agréables et à bon marché dans des quartiers urbains" (art. 2); les appartements sont destinés à être loués en priorité aux membres de la coopérative (art. 3); un membre de la coopérative peut en être exclu lorsqu'il agit intentionnellement en contradiction avec les statuts ou avec les décisions obligatoires des organes compétents de la société ou pour d'autres justes motifs (art. 10 al. 1 let. b et c).
 
A la suite de l'acquisition de ces parts sociales, la coopérative a remis à bail aux époux H.X.________ et F.X.________ (ci-après: les locataires) un appartement de trois pièces et deux chambrettes au 3e étage de l'immeuble dont elle est propriétaire à la rue ..., à Genève. Le bail était conclu pour la période du 1er novembre 2000 au 31 octobre 2001 et se renouvelait ensuite tacitement d'année en année; en dernier lieu, le loyer annuel s'élevait à 8'736 fr., sans les charges. Parallèlement, un autre contrat a été conclu entre les parties portant sur la location d'une place de stationnement.
 
A.b Le 27 mars 2002, la coopérative a informé les locataires qu'elle avait reçu des plaintes de leurs voisins, dérangés notamment par des cris, des éclats de voix, ainsi que par leur attitude agressive, et les a mis en demeure de mettre un terme à leur comportement, sous menace de résiliation du bail pour justes motifs.
 
Par deux fois, les 21 mai 2003 et 1er septembre 2003, la coopérative a interpellé les locataires au sujet d'objets personnels qu'ils avaient entreposés dans le garage à vélos commun.
 
Le 16 février 2004, plusieurs locataires ont adressé au gérant de l'immeuble une pétition pour se plaindre du comportement adopté par la famille X.________ à l'égard du responsable du service d'immeuble.
 
Par lettre recommandée du 26 février 2004, la coopérative a invité les époux X.________ à prendre contact avec son président; il leur était reproché le dépôt d'objets personnels sur le palier et dans les locaux communs au sous-sol, leur vulgarité et agressivité verbale, en particulier à l'encontre de la concierge de l'immeuble, ainsi que des cris provenant de leur appartement qui perturbaient la tranquillité des voisins.
 
Les époux X.________ n'ont pas répondu à l'invitation et la coopérative leur a adressé un nouveau courrier recommandé, le 16 avril 2004, les mettant en garde que le conseil d'administration de la coopérative avait pris la décision irrévocable de résilier le bail si leur comportement suscitait de nouvelles plaintes; il leur était à nouveau reproché leur comportement vis-à-vis du voisinage en général, singulièrement à l'égard de la concierge, le bruit provenant de leur logement, ainsi que leur sans-gêne dans l'utilisation de la buanderie, le linge restant fréquemment 24 heures dans la machine avant d'être sorti et suspendu plusieurs jours sur l'étendage.
 
Au début de l'année 2006, des locataires se sont plaints une nouvelle fois auprès des membres du conseil d'administration de la coopérative du comportement bruyant adopté par les époux X.________.
 
Le 15 février 2006, le conseil d'administration a pris la décision de charger le gérant de l'immeuble de résilier, pour justes motifs et pour la prochaine échéance légale, le bail de la famille X.________. En revanche, le conseil d'administration n'a pas prononcé l'exclusion des coopérateurs de la société.
 
Le 7 mars 2006, des avis de résiliation du bail ont été adressés tant à H.X.________ qu'à F.X.________ aussi bien pour l'appartement (à l'échéance du 31 octobre 2006) que pour la place de stationnement (à l'échéance du 15 novembre 2006). La résiliation était fondée sur les nuisances au voisinage (bruit, encombrement du palier, non-respect des règles d'utilisation des parties communes) et se référait aux mises en demeure des 26 février et 16 avril 2004.
 
B.
 
Les locataires ont requis l'annulation du congé, tandis que la coopérative a demandé leur évacuation. Les deux causes ont été jointes devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève. Se fondant sur deux témoignages, le tribunal a retenu que les époux X.________ se disputaient fréquemment et si violemment que cela effrayait les enfants; sur la base de six témoignages, il a également constaté qu'ils s'en prenaient au concierge de l'immeuble. Par jugement du 9 mars 2009, le tribunal a déclaré valable le congé donné aux locataires et a ordonné leur évacuation, considérant qu'ils avaient manqué d'égards envers leurs voisins, en adoptant, de manière persistante, un comportement très bruyant et une attitude agressive et irrespectueuse.
 
Saisie d'un appel émanant des locataires, la Chambre d'appel en matière de baux et loyers a confirmé ce jugement par arrêt du 5 octobre 2009.
 
C.
 
H.X.________ et F.X.________ exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité. Hormis quelques critiques concernant l'établissement des faits, les recourants soutiennent principalement que la coopérative ne pouvait pas résilier le bail avant de les avoir exclus de la société coopérative. Ils concluent, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au constat que le congé est nul, subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale. Ils ont par ailleurs sollicité l'effet suspensif qui leur a été accordé par ordonnance présidentielle du 3 décembre 2009.
 
L'intimée propose le rejet du recours.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
1.1 S'agissant d'une affaire pécuniaire dans le domaine du bail à loyer, le recours en matière civile n'est en principe recevable que si la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF). En cas de contestation d'un congé, il faut additionner les loyers de la période pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement, en supposant que l'on admette la contestation, et qui s'étend jusqu'au moment pour lequel un nouveau congé aurait pu être donné ou l'a été effectivement (ATF 119 II 147 consid. 1; 111 II 384 consid. 1); lorsque la contestation émane du locataire - comme c'est le cas en l'espèce -, il faut donc au moins compter trois ans de loyer en raison de la période de protection prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO. Le loyer annuel de l'appartement s'élevant à 8'736 fr., la valeur litigieuse requise est atteinte
 
Interjeté par les parties qui ont succombé dans leurs conclusions tendant à l'annulation du congé reçu (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
 
1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 135 III 397 consid. 1.4). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine).
 
1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 135 III 127 consid. 1.5 p. 130, 397 consid. 1.5) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 et 6.2). De surcroît, une correction de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).
 
En l'espèce, les recourants font valoir que la cour cantonale a pu être influencée par une pétition des voisins du 15 décembre 2006, alors que les signataires n'ont pas assisté à l'incident qui l'a occasionnée, lequel ne serait pas établi. Il n'y a pas lieu de compléter l'état de fait sur ce point, parce que cette pétition ne joue manifestement pas un rôle décisif (art. 97 al. 1 LTF). Les recourants ne contestent pas que F.X.________ a eu des altercations avec une locataire de l'immeuble. Le congé a été validé en raison d'excès de bruit persistants, d'altercations répétées et de nombreux irrespects de l'ordre de la maison. Il s'agit donc d'un ensemble de faits, qui ne sont pas vraiment contestés dans le recours. La cour cantonale a retenu - sans que les recourants n'invoquent l'arbitraire - que des locataires se sont plaints une nouvelle fois au début de l'année 2006, ce qui a provoqué les résiliations du 7 mars 2006. On ne voit pas que cette pétition du 15 décembre 2006, qui n'est même pas mentionnée dans l'arrêt cantonal, puisse jouer un quelconque rôle pour apprécier la validité des congés intervenus plus de neuf mois auparavant. La discussion concerne donc un fait impropre à influer sur le sort de la cause.
 
Contrairement à ce que soutiennent les recourants, il n'y a rien d'arbitraire à préférer une déposition faite sous la foi du serment et sous le contrôle du juge à une déclaration écrite antérieure obtenue par une partie, tant il est notoire qu'il peut être difficile, en tête-à-tête, de refuser de signer un document.
 
Que différents voisins n'aient pas assisté aux altercations entre F.X.________ et une locataire tierce ne permet pas de déduire que ces altercations n'ont pas eu lieu, ce d'autant plus que les recourants eux-mêmes admettent un certain nombre de disputes. L'argumentation présentée ne permet pas d'établir que l'état de fait a été dressé de manière arbitraire par la cour cantonale. Les recourants tentent seulement, de manière appellatoire, d'extraire certains éléments du dossier dans l'espoir de minimiser les reproches qui leur sont adressés. Il n'y a rien là qui permette de conclure à l'arbitraire, si bien que le raisonnement juridique doit être conduit sur la base de l'état de fait retenu par la Chambre d'appel.
 
1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).
 
2.
 
2.1 Les recourants soutiennent que leur bail ne pouvait pas être résilié avant qu'ils n'aient été exclus de la société coopérative.
 
La cour cantonale a estimé au contraire que les deux rapports juridiques étaient en l'espèce indépendants et qu'il ne s'agissait pas d'un contrat mixte. Elle en a déduit que l'interférence résultant de leur finalité était respectée, étant donné que les motifs de résiliation du bail permettaient aussi l'exclusion de la société coopérative.
 
2.2 Le coopérateur-locataire et la coopérative d'habitation sont liés par deux rapports de droit: un rapport corporatif, de caractère social, qui se crée entre la société coopérative et son nouveau membre lors de l'acquisition de la qualité d'associé (art. 839 ss CO), d'une part, et un rapport d'obligation, de caractère individuel, qui résulte de la conclusion du contrat de bail à loyer par la société coopérative avec ce nouveau membre (art. 253 ss CO), d'autre part (ATF 134 III 159 consid. 5.2.3 p. 163).
 
2.3 Ces deux rapports juridiques, fondés l'un et l'autre sur un accord des volontés, génèrent certaines interférences, essentiellement au stade de la résiliation, en raison de la convergence des buts. En effet, celui qui adhère à une coopérative d'habitation agit pour obtenir ainsi l'usage d'un logement et la société coopérative a elle-même pour but de procurer des logements à ses membres. Par le contrat de bail, la société coopérative cède l'usage d'un logement déterminé, moyennant l'engagement du locataire de payer le loyer. Dès lors qu'il a acquis des parts sociales (et effectué normalement pour cela une mise de fonds), le coopérateur-locataire se retrouve membre de la société qui est propriétaire de l'immeuble. La résiliation unilatérale du bail par la coopérative d'habitation a pour effet de priver le coopérateur-locataire contre sa volonté de l'usage du logement et de faire disparaître ainsi au moins l'essentiel de son intérêt à être membre de la société coopérative. Pour tenir compte de cette interférence entre les deux rapports juridiques, la jurisprudence a admis, sous réserve de dispositions particulières dans le contrat de bail, que la résiliation du bail ne pouvait intervenir que pour un motif qui permettrait également l'exclusion de la société coopérative pour un juste motif ou pour un autre motif statutaire; dans le système de la coopérative d'habitation, la possibilité de résilier librement le bail en respectant le terme et l'échéance convenus est donc supprimée (ATF 134 III 159 consid. 5.2.3 p. 163 s.; 118 II 168 consid. 3b/aa p. 171).
 
2.4 La jurisprudence citée se prononce sur les motifs qui permettent de résilier le bail, mais elle ne traite en rien la manière de procéder pour retirer au coopérateur-locataire l'usage du logement loué.
 
Dans le seul cas qui portait sur une résiliation (ATF 118 II 168), la coopérative avait choisi de prononcer simultanément l'exclusion de la coopérative et de résilier le bail. La doctrine considère qu'il est souhaitable, en cas de justes motifs, de procéder de cette façon (Barbara Truog, Zur Kündigung genossenschaftlicher Mietverhältnisse am Beispiel des Urteils des Genfer Appellationsgerichtes vom 3. Juni 1991, Mietrechtspraxis 1/1992, p. 40), tout en admettant qu'il n'est pas exclu que les deux actes juridiques n'interviennent pas simultanément et donnent lieu à deux procédures séparées (Truog, op. cit., p. 39).
 
Dans le cas examiné par la jurisprudence (ATF 118 II 168), la question de l'exclusion de la société coopérative avait été tranchée en premier lieu par l'autorité cantonale (ATF 118 II 168 consid. 3b/bb p. 172). Se basant apparemment sur ce précédent, la doctrine en déduit que l'exclusion de la société coopérative doit toujours être tranchée avant la question de la résiliation du bail (David Lachat, Le bail à loyer, 2008, n° 3.6, p. 91 et n° 5.2, p. 635 s.; Anita Thanei, Ausgewählte Entscheide zum Kündigungsschutz, Fachreihe Mietrecht n° 4, 1996, p. 5; Urs Engler, Zur Kündigung genossenschaftlicher Mietverträge, Mietrechtspraxis 2/2000, p. 57).
 
Il est évident que s'il fallait faire trancher définitivement la question de l'exclusion de la société coopérative - le cas échéant en allant jusqu'au Tribunal fédéral - avant de pouvoir commencer une procédure de résiliation du bail, il en résulterait un atermoiement considérable dans la récupération du logement, qui pourrait être extrêmement préjudiciable dans des cas de suspension de paiements, de dégâts persistants causés à la chose louée ou de manques d'égards répétés et graves envers les voisins.
 
Il faut donc examiner la question, non traitée par la jurisprudence, de la relation entre l'exclusion de la société coopérative et la résiliation du bail. Cette question dépend évidemment du lien que les parties ont voulu créer entre les deux rapports juridiques qui caractérisent la situation du coopérateur-locataire.
 
2.4.1 Selon les principes généraux, les cocontractants peuvent convenir de lier entre eux deux rapports juridiques d'une manière telle que l'extinction de l'un entraîne celle de l'autre, aucun des rapports ne pouvant persister indépendamment de l'autre; on parle alors de contrats couplés, interdépendants, liés ou connexes (ATF 115 II 452 consid. 3a p. 454; Ernst Kramer, Commentaire bernois, n° 64 ad art. 19-20 CO; Amstutz/Schluep, Obligationenrecht I, 4e éd., in Commentaire bâlois, n° 10 ad Einleitung vor Art. 184 ss CO; Luc Thévenoz, in Commentaire romand, Code des obligations I, n° 14 ad Introduction art. 184-529 CO, p. 978; Ingeborg Schwenzer, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 5e éd. 2009, n° 3.17, p. 12). Un tel lien peut être prévu dans les statuts d'une coopérative d'habitation (Susy B. Moser, Wohnbaugenossenschaften, thèse Zurich 1978, p. 168). Dans un tel cas de figure, une seule manifestation de volonté suffit pour mettre fin aux deux rapports juridiques. Les parties conviennent des motifs de résiliation sous réserve de dispositions impératives. Si la résiliation émane de la société coopérative, on peut admettre que la possibilité de recourir à l'assemblée générale (art. 846 al. 3 CO) doit être ouverte avant que la résiliation ne soit considérée comme définitive sur le plan interne. En cas de contestation par la voie judiciaire, la résiliation doit être portée devant le tribunal compétent pour examiner le rapport de droit prépondérant (Lachat, op. cit., n° 3.1, p. 88), soit, dans le cas d'un coopérateur-locataire, les tribunaux compétents en matière de baux et loyers. Il n'est en effet pas douteux que le but reconnaissable du coopérateur-locataire est d'obtenir, moyennant paiement, la cession de l'usage d'un logement. Comme on le voit, il n'y a qu'une seule procédure, et non pas deux procédures successives.
 
En l'espèce, il n'apparaît nullement que les parties aient voulu lier l'appartenance à la société coopérative et la conclusion du bail d'une manière telle que l'un de ces rapports de droit ne puisse pas survivre à l'autre. Il ne ressort pas des constatations cantonales que l'acquisition des parts sociales donnait aux recourants le droit de louer un appartement déterminé. Selon les statuts, les appartements sont destinés à être loués "en priorité" aux membres de la coopérative, ce qui montre qu'il n'est pas exclu de dissocier la qualité de coopérateur et celle de locataire. Les clauses concernant l'exclusion d'un coopérateur ne traitent pas de la résiliation du bail. Il faut donc en conclure que les deux rapports juridiques n'ont pas été liés par la volonté des parties.
 
2.4.2 Lorsque les deux rapports juridiques n'ont pas été couplés par un accord spécifique, chacun d'eux peut prendre fin indépendamment de l'autre. Dans cette hypothèse, on peut concevoir qu'il y ait, de façon non simultanée, une décision d'exclusion de la coopérative et une résiliation du bail, chaque acte pouvant donner lieu à sa propre procédure devant l'autorité compétente (Truog, op. cit., p. 39). Il est permis aussi d'envisager qu'un rapport juridique survive à l'autre. Ainsi, un coopérateur peut être exclu de la société, mais rester néanmoins locataire sur la base du contrat de bail (Moser, op. cit., p. 167 s.). Il est aussi imaginable que, malgré la résiliation du bail, le coopérateur conserve son sociétariat (Roland Ruedin, Société coopérative d'habitation et bail à loyer, in 8e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1994, p. 27). Si la coopérative, qui a résilié le bail et récupéré le logement, ne voit pas d'intérêt à exclure son membre et que ce dernier ne voit pas d'intérêt à exercer son droit de sortie, on ne discerne pas quels principes juridiques interdiraient aux parties de maintenir ce rapport de droit, étant rappelé qu'en matière contractuelle les parties sont en principe seules juges de leur intérêt (art. 19 CO).
 
En l'occurrence, les deux rapports juridiques n'ont pas été couplés, de sorte que la société coopérative était en droit de résilier le bail sans exclure les recourants de la société. Il n'en demeure pas moins qu'en raison de l'interférence des buts, le bail ne pouvait pas être résilié pour un motif qui n'aurait pas permis l'exclusion de la coopérative (ATF 134 III 159 consid. 5.2.3 p. 164; 118 II 168 consid. 3b/aa p. 171).
 
2.5 Le manque persistant d'égards envers les voisins, lequel autorise la résiliation extraordinaire du bail en vertu de l'art. 257f al. 3 CO, constitue également, du point de vue du droit de la société coopérative, une violation du devoir de fidélité déduite de l'art. 866 CO permettant une exclusion de la coopérative pour justes motifs (art. 846 al. 2 CO; Peter Higi, Commentaire zurichois, n° 67 ad Vorbemerkungen zu Art. 266-266o CO).
 
Ainsi, au vu du motif retenu par la cour cantonale, la coopérative avait la faculté de résilier le bail, sans qu'elle soit tenue, préalablement ou simultanément, d'exclure son membre de la société. L'exclusion ou la sortie du membre sont indépendants de la résiliation du bail.
 
Les excès de bruit (arrêt 4C.79/1998 du 4 juin 1998 consid. 2, in SJ 1999 I p. 25 et Pra 1998 n° 153 p. 816) et l'irrespect des règles d'utilisation des parties communes (cf. sur le devoir de diligence du locataire: Higi, op. cit., n° 10 ad art. 257f CO) constituent, en cas de persistance malgré avertissement, des motifs typiques de congé pour manque d'égards envers les voisins.
 
Encore faut-il que les faits retenus soient d'une gravité suffisante pour qu'il soit permis d'admettre que la continuation du rapport juridique ne pouvait pas être exigée (arrêt 4C.331/2004 du 17 mars 2005 consid. 1.1.4; Higi, op. cit., n° 58 ss ad art. 257f CO). Le juge apprécie librement, selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), si la résiliation répond à un motif suffisamment grave; à cette fin, il prend en considération tous les éléments concrets du cas particulier. Le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec réserve la décision d'équité prise en dernière instance cantonale; il intervient lorsque celle-ci s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle s'appuie sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou, à l'inverse, lorsqu'elle ignore des éléments qui auraient dû être pris en considération; en outre, le Tribunal fédéral redresse les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 132 III 109 consid. 2 p. 111 s.).
 
La cour cantonale a constaté que les recourants se livraient entre eux à des disputes violentes et bruyantes qui effrayaient les enfants et qu'ils se montraient agressifs, singulièrement à l'égard de la concierge. Bien qu'ils s'efforcent de les minimiser, les recourants ne contestent pas vraiment ces faits. Il a été relevé également qu'ils ne respectaient pas les règles sur l'utilisation des locaux communs, ce qui n'est pas non plus contesté. Ils ont été dûment mis en face de leurs obligations et avertis du risque de résiliation; néanmoins, ils ont persisté dans leur attitude. Sur ce point également, les recourants ne critiquent pas les constatations cantonales. Au vu des faits établis - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) -, on ne voit pas que la cour cantonale ait violé le droit fédéral, notamment abusé de son pouvoir d'appréciation, en retenant qu'il y avait in casu de justes motifs, compatibles également avec le droit de la coopérative, permettant la résiliation du bail.
 
Partant, le recours doit être rejeté.
 
3.
 
Les frais judiciaires et les dépens sont mis solidairement à la charge des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 et 5, art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants.
 
3.
 
Les recourants verseront solidairement à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.
 
Lausanne, le 13 janvier 2010
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente: Le Greffier:
 
Klett Ramelet
 
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