BGer 4A_602/2009 | |||
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BGer 4A_602/2009 vom 16.02.2010 | |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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4A_602/2009
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Arrêt du 16 février 2010
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Ire Cour de droit civil
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Composition
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Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly.
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Greffière: Mme Cornaz.
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Parties
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A.________,
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B.________,
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C.________,
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recourants, tous trois représentés par Me Guillaume Ruff,
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contre
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D.________,
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intimé, représenté par Me Gérard Montavon.
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Objet
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mandat, honoraires d'avocat,
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recours contre la décision de la Commission de taxation des honoraires d'avocat du canton de Genève du 2 novembre 2009.
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Faits:
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A.
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La banque X.________ SA a déposé plainte pénale à Genève contre l'une de ses collaboratrices, accusée d'avoir détourné une somme de l'ordre de 5'000'000 fr. Les parents de l'employée indélicate, A.________ et B.________, ainsi que son frère, l'avocat genevois C.________ (ci-après: les mandants), ont alors mandaté l'avocat vaudois D.________ (ci-après: le mandataire) pour discuter avec la banque lésée.
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Le 15 décembre 2005, le mandataire a résilié le mandat. Le même jour, il a envoyé sa note d'honoraires à ses mandants pour les activités déployées entre le 20 mai et le 15 décembre 2005, soit durant environ sept mois. Elle s'élevait à 48'527 fr. 60, correspondant à cent douze heures et quarante-cinq minutes de travail facturées au tarif horaire de 400 fr., plus TVA. Les mandants ont contesté ladite note d'honoraires.
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B.
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Le 9 mai 2007, le mandataire a saisi la Commission de taxation des honoraires d'avocat du canton de Genève (ci-après: la Commission [de taxation]), dont il a requis qu'elle confirme sa note d'honoraires.
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Les mandants ont contesté la compétence à raison du lieu de l'autorité genevoise. Sur le fond, ils ont critiqué la bonne exécution du mandat, invoqué la compensation et contesté le temps que le mandant indiquait avoir consacré à la défense de leurs intérêts ainsi que le tarif horaire facturé, reconnaissant devoir un montant de 7'500 fr. HT, soit 8'070 fr. TTC, pour trente heures de travail au tarif horaire de 250 francs.
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Par décision du 4 avril 2008, la Commission de taxation a arrêté la note d'honoraires à 48'527 fr. 60, TVA comprise. Elle a d'abord admis sa compétence à raison du lieu. Sur le fond, elle a refusé d'entrer en matière sur les griefs relatifs à la bonne ou mauvaise exécution du mandat ainsi que sur la compensation invoquée, au motif que ces questions pouvaient uniquement être examinées dans le cadre d'une procédure civile devant le juge ordinaire. Elle a enfin jugé que le nombre d'heures facturé et le tarif horaire appliqué étaient justifiés.
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Par arrêt (4A_212/2008) du 15 juillet 2008, le Tribunal fédéral a partiellement admis un recours interjeté par les mandants, annulé la décision du 4 avril 2008 et renvoyé la cause à la Commission de taxation afin qu'elle examine la réalité des heures d'avocat facturées.
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La Commission de taxation a instruit la cause et rendu une nouvelle décision le 2 novembre 2009. Retenant que le décompte détaillé des activités du mandataire était exact et que les activités en question correspondaient à la réalité, elle a arrêtée la note d'honoraires au montant de 48'527 fr. 60, soit celui facturé par le mandataire.
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C.
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Les mandants (les recourants) interjettent derechef un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Ils concluent à ce que celui-ci annule la nouvelle décision du 2 novembre 2009, dise que le mandataire a consacré environ trente heures au maximum à la défense de leurs intérêts et réserve l'exception de compensation soulevée à divers titres. La mandataire (l'intimé) propose le rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Pour sa part, la Commission de taxation se réfère aux considérants de sa décision.
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Considérant en droit:
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1.
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Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 135 III 329 consid. 1).
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1.1 La Commission de taxation, prévue par la loi genevoise du 26 avril 2002 sur la profession d'avocat (LPAv; E 6 10), statue en cas de contestation relative au montant des honoraires et des débours d'un avocat en matière judiciaire ou extrajudiciaire (art. 36 al. 1 LPAv). La maxime d'office est applicable; la Commission peut exceptionnellement ordonner des mesures probatoires (art. 37 al. 3 LPAv). Elle se borne à fixer le montant des honoraires et débours. Les questions relatives à l'existence et au montant de la créance, notamment celles qui ont trait à l'exécution du mandat ou au règlement des comptes entre les parties, sont du ressort du juge ordinaire (art. 39 al. 1 LPAv). La Commission de taxation n'a donc pas à examiner les griefs d'ordre matériel portant sur la manière dont l'avocat a rempli son mandat, mais doit uniquement décider si les honoraires réclamés sont proportionnés aux services rendus et conformes au tarif. Sa décision ne constitue pas un titre exécutoire, mais elle lie le juge civil (cf. arrêt P.23/1981 du 11 novembre 1981 consid. 4b, in SJ 1982 p. 452). La décision de la Commission ne peut être frappée de recours (art. 38 al. 2 LPAv).
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La décision de la Commission de taxation est ainsi rendue en dernière instance cantonale, et elle termine la procédure pour ce qui concerne la fixation du nombre d'heures de travail et du tarif horaire. Le mandant garde toutefois la possibilité d'en appeler au juge civil pour fixer le montant finalement dû à l'avocat. La Commission ne tranche donc en réalité qu'une question préjudicielle pour la fixation des honoraires; une telle décision préjudicielle ne serait pas susceptible de recours immédiat si elle était rendue par l'autorité compétente pour statuer sur les prétentions du mandataire (cf. art. 93 LTF). Or, le fait que le droit genevois répartisse la fixation des honoraires sur deux instances ne change pas le caractère de la décision sur le nombre d'heures de travail et le tarif horaire applicable. On peut dès lors se demander si les décisions de la Commission de taxation peuvent être portées immédiatement devant le Tribunal fédéral, obligeant ce dernier à devoir le cas échéant se pencher deux fois sur la même créance d'honoraires. La question peut rester indécise en l'espèce; par le passé, la recevabilité du recours a été admise et les recourants pouvaient de bonne foi se fonder sur cette pratique. Pour le surplus, l'exigence légale selon laquelle la dernière instance cantonale statue sur recours n'est pas encore en vigueur (cf. art. 75 al. 2 et art. 130 al. 2 LTF); le fait que la Commission statue en instance unique n'exclut pas le recours. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
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1.2 Un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral lie tant l'autorité cantonale à laquelle la cause est renvoyée que le Tribunal fédéral ultérieurement saisi d'un recours contre la nouvelle décision de l'autorité cantonale (ATF 135 III 334 consid. 2). Il en résulte que suite à l'arrêt de la Cour de céans du 15 juillet 2008, la seule question litigieuse se rapportait au nombre d'heures de travail fournies par l'intimé. La Commission de taxation est restée dans ce cadre, qui vaut aussi pour la présente procédure de recours. Dans la mesure où les recourants soulèvent d'autres points, leur recours n'est pas recevable; cela s'applique en particulier au grief relatif au résultat obtenu, qui est de la compétence du juge ordinaire.
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1.3 Le recours doit être succinctement motivé (cf. art. 42 al. 2 LTF). Cela suppose que le recourant discute au moins brièvement les considérants de l'arrêt attaqué (ATF 134 II 244 consid. 2.1 p. 245). Cette exigence est une condition de recevabilité (cf. art. 108 al. 1 let. b LTF). Le Tribunal fédéral n'examine donc en principe que les griefs invoqués et suffisamment motivés (cf. ATF 134 II 244 consid. 2.1 p. 246; 133 III 545 consid. 2.2). Les griefs constitutionnels doivent même être expressément invoqués et motivés (art. 106 al. 2 LTF). L'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits ou principes constitutionnels violés et préciser en quoi consiste la violation; le recourant doit discuter les attendus de la décision querellée et exposer de manière claire et circonstanciée en quoi consiste la violation du droit constitutionnel (cf. ATF 134 II 244 consid. 2.2; 134 V 138 consid. 2.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables, ou encore s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée (ATF 129 I 8 consid. 2.1).
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2.
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Les recourants se plaignent d'une violation des règles sur le fardeau de la preuve (art. 8 CC). Ils se fixent sur la dernière phrase de la décision entreprise, dont la teneur est la suivante: "Ainsi, à la lumière des considérants du Tribunal fédéral suscité, et sous réserve d'une démonstration inverse, il doit être considéré que le décompte détaillé des activités réalisées par (l'intimé) est exact et que les activités en question correspondent à la réalité". Or, à la lecture de la décision dans son entier, il est manifeste que la Commission de taxation a considéré que l'intimé supportait le fardeau de la preuve et qu'elle a admis, à l'issue de l'appréciation des preuves, que cette preuve avait été apportée. La "réserve" précitée doit être comprise comme une clause de style, plus malheureuse qu'utile, pour relever que les recourants n'avaient pas ébranlé sa conviction; elle ne signifie en tout cas pas que la Commission a retenu la réalité des activités facturées parce que les recourants n'en ont pas démontré la fausseté.
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Les recourants invoquent en outre une violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire (art. 9 Cst.), au motif que la Commission de taxation leur aurait reproché de ne pas avoir produit les fiches téléphoniques de l'un des leurs, avocat de profession et interlocuteur habituel de l'intimé; ils relèvent d'une part que celles-ci n'étaient pas susceptibles de prouver que les appels téléphoniques contestés n'avaient pas été faits, d'autre part qu'ils avaient proposé la production des fiches, mais que la Commission ne l'avait pas ordonnée. Ces objections ne sont en soi pas dénuées de toute pertinence. Toutefois, à la lecture de la décision attaqué, il faut constater que la Commission de taxation a simplement relevé que les fiches n'avaient pas été produites, mais sans en tirer de conséquence en défaveur des recourants; la Commission arrive d'ailleurs elle-même à la conclusion que l'éventuel défaut de certains appels sur les fiches ne serait pas significatif.
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Pour le surplus, la Commission de taxation a instruit la cause et, dans ce cadre, entendu cinq témoins. Se fondant sur les preuves administrées, elle a retenu en fait que l'intimé avait accompli les heures facturées. Son appréciation différenciée ne prête pas le flanc à la critique sous l'angle de l'arbitraire; on ne saurait retenir que le résultat auquel elle a abouti est insoutenable. Les objections des recourants n'y changent rien. Pour l'essentiel, ils donnent leur opinion; le fait que celle-ci ne puisse pas sans autre être considérée comme indéfendable ne suffit pas pour retenir que l'appréciation différente de la Commission l'est nécessairement. En tant que juge constitutionnel, le Tribunal fédéral ne revoit pas les faits comme un juge d'appel, mais examine uniquement si l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire a été violée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
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3.
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Il résulte des considérants qui précèdent que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité
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4.
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Compte tenu de l'issue du litige, les frais judiciaires et dépens de l'intimé sont mis solidairement à la charge des recourants, qui succombent (art. 66 al. 1 et 5 ainsi qu'art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants.
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3.
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Une indemnité de 3'000 fr., à payer à l'intimé à titre de dépens, est mise solidairement à la charge des recourants.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Commission de taxation des honoraires d'avocat du canton de Genève.
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Lausanne, le 16 février 2010
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La Présidente: La Greffière:
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Klett Cornaz
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