BGer 1B_71/2010 | |||
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BGer 1B_71/2010 vom 10.05.2010 | |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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1B_71/2010
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Arrêt du 10 mai 2010
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Féraud, Président, Aemisegger et Eusebio.
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Greffier: M. Rittener.
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Participants à la procédure | |
A.________, représenté par Me Jean-Luc Maradan,
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recourant,
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contre
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Ministère public du canton de Fribourg, rue de Zaehringen 1, 1700 Fribourg,
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Juge d'instruction du canton de Fribourg, case postale 156, 1702 Fribourg.
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Objet
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procédure pénale, séquestre,
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recours contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 5 février 2010.
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Faits:
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A.
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Depuis l'automne 2005, la Juge d'instruction du canton de Fribourg (ci-après: la juge d'instruction) dirige une enquête pénale contre A.________, prévenu notamment d'encouragement à la prostitution et d'usure pour des activités déployées de 2003 à 2006 en qualité d'administrateur de cabarets. Par courrier du 2 décembre 2009 adressé à l'assureur X.________, la juge d'instruction a ordonné le séquestre intégral des sommes dues pour la couverture d'un vol par effraction et d'un incendie survenus dans des locaux gérés par la société Y.________, administrée par A.________. Cette lettre sommaire mentionnait que le séquestre était ordonné pour garantir la créance compensatrice de l'Etat en vertu de l'art. 71 CP et de l'art. 122 du Code de procédure pénale fribourgeois du 14 novembre 1996 (CPP/FR; RSF 32.1).
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Par recours du 14 décembre 2009, A.________ a contesté cette décision auprès de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal). Invitée à se déterminer sur le recours, la juge d'instruction a déposé une écriture de cinq pages datée du 29 décembre 2009, dans laquelle elle détaille les motifs du séquestre. Le Ministère public du canton de Fribourg (ci-après: le Ministère public) a conclu au rejet du recours en se fondant sur les observations de la juge d'instruction. Le recourant n'a pas été invité à se déterminer sur les observations de la juge d'instruction et du Ministère public. Par arrêt du 5 février 2010, le Tribunal cantonal a rejeté le recours. Se fondant notamment sur les observations de la juge d'instruction, il a considéré en substance que l'existence de présomptions concrètes de culpabilité n'avait pas été sérieusement mise en doute, que le séquestre reposait sur une base légale valable, qu'il était motivé par un intérêt public et qu'il était proportionné au produit supposé des infractions reprochées au recourant.
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B.
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Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, subsidiairement de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision. Il se plaint d'arbitraire (art. 9 Cst.) et d'une violation des art. 26, 27, 29 et 32 Cst. Il requiert en outre l'octroi de l'assistance judiciaire. Le Tribunal cantonal, la juge d'instruction et le Ministère public du canton de Fribourg ont renoncé à se déterminer.
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Considérant en droit:
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1.
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Les décisions relatives aux séquestres ordonnés au cours d'une procédure pénale sont des décisions en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF. La décision par laquelle le juge prononce, maintient ou refuse un séquestre pénal constitue une décision incidente, qui ne met pas fin à la procédure (ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 126 I 97 consid. 1b p. 100 et les références). Conformément à l'art. 93 al. 1 let. a LTF, une telle décision ne peut faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral que si elle peut causer un préjudice irréparable. Selon la jurisprudence relative à l'art. 87 al. 2 OJ, et reprise dans le cadre de l'art. 93 LTF (ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141 et les références), le séquestre de valeurs patrimoniales cause en principe un dommage irréparable, dans la mesure où le détenteur se trouve privé temporairement de la libre disposition des valeurs saisies (ATF 126 I 97 consid. 1b p. 101; voir également ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 89 I 185 consid. 4 p. 187 et les références). En l'occurrence, l'ordonnance de séquestre attaquée vise des sommes qui seraient dues par une assurance à une société gérée par le recourant. Dans la mesure où sa situation financière semble à première vue critique et dès lors que la décision litigieuse pourrait le priver de liquidités qui lui seraient utiles, on peut admettre que le recourant subit un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Pour le surplus, interjeté en temps utile et dans les formes requises contre une décision rendue en dernière instance cantonale, le recours est recevable au regard des art. 42, 80 al. 1 et 100 al. 1 LTF.
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2.
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Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.). Il reproche au Tribunal cantonal d'avoir statué sans lui donner l'occasion de se déterminer sur les observations déposées par la juge d'instruction.
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2.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 I 54 consid. 2b p. 56; 124 I 48 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités).
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Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens de l'art. 29 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, le droit d'être entendu garantit notamment le droit pour une partie à un procès de prendre connaissance de toutes pièces ou observations présentées au juge et de la discuter (arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme Ziegler c. Suisse du 21 février 2002, § 33; Lobo Machado c. Portugal du 20 février 1996, Recueil CourEDH 1996-I p. 206 § 31). L'effet réel de ces éléments sur le jugement à rendre importe peu; les parties doivent avoir la possibilité d'indiquer si elles estiment qu'un document appelle des commentaires de leur part (arrêts Ressegatti c. Suisse du 13 juillet 2006, § 32; Nideröst-Huber c. Suisse du 18 février 1997, Recueil CourEDH 1997-I p. 101 § 27). La notion de droit d'être entendu fondée sur l'art. 29 al. 2 Cst. ayant intégré ces principes, le droit de réplique fondé sur cette disposition vaut pour toutes les procédures judiciaires, y compris celles qui ne tombent pas dans le champ de protection de l'art. 6 par. 1 CEDH (ATF 133 I 98 consid. 2.1 p. 99, 100 consid. 4.3 à 4.6 p. 102 ss).
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2.2 En l'occurrence, le Tribunal cantonal a rendu l'arrêt attaqué en omettant de transmettre au recourant les déterminations déposées par la juge d'instruction et par le Ministère public. L'intéressé n'a dès lors pas eu la possibilité de prendre connaissance de ces observations et de se déterminer à leur sujet, de sorte que les exigences susmentionnées n'ont pas été respectées. Cette omission est d'autant plus regrettable en l'espèce que les observations de la juge d'instruction ont manifestement eu une incidence sur l'arrêt attaqué. En effet, la décision de séquestre du 2 décembre 2009 était très sommaire et ce n'est que dans les observations du 29 décembre 2009 que la juge d'instruction a motivé sa décision de manière détaillée. L'arrêt attaqué se fonde d'ailleurs explicitement sur ces observations, en relevant que la juge d'instruction y a "mis en évidence des éléments suffisants permettant de suspecter que des valeurs patrimoniales de plusieurs centaines de milliers de francs sont le produit des préventions d'encouragement à la prostitution et d'usure retenues notamment à la charge du recourant". Les observations en question comprennent en effet des explications circonstanciées, à l'appui desquelles sont présentés des calculs relativement détaillés. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que l'omission de les transmettre au recourant constitue une violation de son droit d'être entendu.
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3.
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Il s'ensuit que le recours doit être admis pour ce motif déjà, indépendamment des chances de succès sur le fond (cf. ATF 132 V 387 consid. 5.1 p. 390). L'arrêt attaqué est donc annulé, la cause étant renvoyée au Tribunal cantonal pour nouvelle décision. L'admission du recours pour ce motif formel n'a évidemment pas pour conséquence la levée du séquestre ordonné le 2 décembre 2009. Pour rétablir une situation conforme au droit, il appartiendra au Tribunal cantonal de rendre une nouvelle décision à bref délai, après avoir respecté le droit d'être entendu du recourant. Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). L'Etat de Fribourg versera en revanche une indemnité de dépens au recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 LTF). Vu l'issue du recours, la demande d'assistance judiciaire est sans objet.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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2.
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Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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3.
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Une indemnité de 2'000 fr. est allouée au recourant à titre de dépens, à la charge de l'Etat de Fribourg.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public, au Juge d'instruction et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg.
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Lausanne, le 10 mai 2010
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Féraud Rittener
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