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Informationen zum Dokument  BGer 6B_810/2010  Materielle Begründung
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BGer 6B_810/2010 vom 25.05.2011
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6B_810/2010
 
Arrêt du 25 mai 2011
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
MM. les Juges Mathys, Président,
 
Schneider et Denys.
 
Greffière: Mme Paquier-Boinay.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________, représenté par Me Olivier Subilia, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1014 Lausanne,
 
intimé.
 
Objet
 
Indemnité d'avocat d'office,
 
recours contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois du 16 juin 2010.
 
Faits:
 
A.
 
Par jugement du 9 avril 2010, Le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Côte a, entre autres, alloué à X.________, avocat stagiaire commis d'office, une indemnité fondée sur une activité de 34 heures à 110 fr. par heure ainsi qu'un montant de 300 fr. au titre de débours.
 
B.
 
Dans un arrêt du 16 juin 2010, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a notamment rejeté le recours interjeté par X.________ contre ce jugement, qu'elle a confirmé, mettant par ailleurs à sa charge un tiers des frais de deuxième instance.
 
C.
 
X.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt. Invoquant une violation de son droit d'être entendu ainsi que de l'interdiction de l'arbitraire, il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que l'indemnité qui lui a été allouée est portée à 6'299 fr., TVA et débours compris, les frais de deuxième instance étant laissés à la charge du canton de Vaud. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau.
 
D.
 
Invités à présenter des observations, tant le ministère public que l'autorité cantonale ont renoncé à se déterminer.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le recourant reproche en premier lieu à l'autorité cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu. Il soutient que deux des moyens soulevés devant elle ont été purement et simplement ignorés, l'arrêt attaqué n'indiquant pas s'ils étaient écartés et le cas échéant pourquoi.
 
La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge n'est toutefois pas tenu d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties. Il peut passer sous silence ce qui, sans arbitraire, lui paraît à l'évidence non établi ou sans pertinence (ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 97 consid. p.102).
 
Le recourant estime que son droit d'être entendu a été violé s'agissant des moyens suivants développés dans son recours devant l'autorité cantonale. Le nombre d'heures de travail retenu a été le même pour les défenseurs de deux coaccusés, alors que l'un était un avocat breveté et l'autre un stagiaire. Le temps pris en compte méconnaît le fait que l'audience de jugement a débuté avec 45 minutes de retard. Il relève par ailleurs qu'il avait fait un certain nombre de développements en relation avec le tarif applicable aux déplacements.
 
S'agissant de la durée d'activité prise en compte pour fixer la rémunération du recourant, l'autorité cantonale s'est déterminée de manière détaillée sur le contenu du relevé des opérations fourni par le recourant. Elle expose les motifs pour lesquels certains points ne sont pas pris en compte. Certes, les 45 minutes évoquées par le recourant n'y figurent pas expressément. Toutefois, la cour cantonale parvient à la conclusion que le temps retenu en première instance est de près de deux heures supérieur à celui qu'elle considère comme justifié. Dans ces circonstances, il y a lieu d'admettre que la motivation de l'arrêt attaqué est suffisante pour que le recourant puisse la comprendre et attaquer la décision. Enfin, dans l'arrêt entrepris est exposée la base sur laquelle a été fixée l'indemnité pour les frais de déplacement. Sur ce point également il n'y a donc pas de violation du droit d'être entendu.
 
2.
 
Le recourant soutient que les calculs auxquels a procédé l'autorité cantonale pour justifier l'indemnité fixée par les premiers juges sont incomplets et arbitraires tant dans leur méthode que dans leur résultat.
 
La fixation de l'indemnité allouée à l'avocat d'office pour son activité devant les juridictions cantonales relève en principe du droit cantonal (voir ATF 132 I 201 consid. 7.2 et 7.3 p. 205 et 206; 110 V 360 consid. 1b p. 362). L'avocat d'office a cependant droit au remboursement intégral de ses débours ainsi qu'à une indemnité s'apparentant aux honoraires perçus par le mandataire plaidant aux frais de son client. Pour fixer cette indemnité, l'autorité doit tenir compte de la nature et de l'importance de la cause, des difficultés particulières que celle-ci peut présenter en fait et en droit, du temps que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre des conférences, audiences et instances auxquelles il a pris part, du résultat obtenu et de la responsabilité qu'il a assumée. A condition d'être équitable, il est admis que la rémunération de l'avocat d'office puisse être inférieure à celle du mandataire choisi. En principe, elle devrait couvrir les frais généraux de l'avocat, dont on estime qu'ils correspondent d'ordinaire à 40% au moins du revenu professionnel brut, voire à la moitié de ce revenu (ATF 122 I 1 consid. 3a et 3c p. 2 et 3 et les références citées; voir aussi ATF 122 I 322 consid. 3b p. 325).
 
L'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans l'application des normes cantonales relatives à l'indemnisation de l'avocat d'office. Le Tribunal fédéral n'intervient que si elle a abusé de son pouvoir d'appréciation ou si elle l'a excédé. Il en est ainsi lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances, qu'elle est inconciliable avec les règles du droit et de l'équité, qu'elle omet de tenir compte de tous les éléments de fait propres à la fonder, ou encore lorsqu'elle prend au contraire en considération des éléments qui ne sont pas pertinents (ATF 125 V 408 consid. 3a; 122 I 1 consid. 3a p. 2 et les arrêts cités). Par ailleurs, il ne suffit pas que l'autorité ait apprécié de manière erronée un poste de l'état des frais ou qu'elle se soit fondée sur un argument déraisonnable. Il faut encore que le montant global alloué à titre d'indemnité se révèle arbitraire (ATF 109 la 107 consid. 3d p. 112), au sens défini par la jurisprudence constante (ATF 134 I 140 consid. 5.4 p. 148 et les arrêts cités). Enfin, s'agissant d'une violation de droits fondamentaux, le recourant doit, sous peine d'irrecevabilité, montrer par une motivation satisfaisant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, ce qui suppose que les moyens soient expressément soulevés et exposés de manière claire dans le mémoire, que tel est bien le cas.
 
2.1 Le recourant évoque plusieurs points sur lesquels il estime que l'activité consacrée à la défense de son client a été appréciée arbitrairement. Ainsi, il soutient que c'est de manière insoutenable que l'autorité cantonale a exclu les deux heures qu'il a consacrées à la rédaction de deux requêtes de jonction. Celle-ci a motivé sa décision par le fait qu'il s'agissait de points relevant de la compétence du juge, que le magistrat saisi examine d'office. Comme le relève le recourant, suivre ce raisonnement conduirait à exclure la rémunération de l'avocat d'office dans tous les domaines dans lesquels l'autorité applique le principe "iura novit curia", ce qui est de toute évidence inconcevable notamment dans les cas où la défense est obligatoire.
 
2.2 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir purement et simplement supprimé le temps consacré aux vacations au Tribunal d'arrondissement de la Côte. A ce propos, l'arrêt attaqué admet qu'il s'agit de vacations nécessaires mais considère qu'elles ne sauraient être facturées au même tarif que les prestations intellectuelles relevant de l'exercice du mandat stricto sensu. Dans le même arrêt, statuant sur le recours formé par le mandataire d'un coaccusé, l'autorité cantonale a réduit à une heure et 10 minutes la durée admise pour les mêmes vacations. Si l'on peut concevoir que de telles prestations ne soient pas taxées de la même manière que le temps consacré à l'étude du dossier, il est insoutenable de les ignorer purement et simplement dans un cas alors qu'elles sont honorées dans l'autre, de surcroît sans indiquer de motifs qui pourraient éventuellement justifier cette différence d'appréciation.
 
2.3 Le recourant se plaint également de la réduction du montant sollicité au titre de frais de transport. Il se prévaut de l'art. 9 du Tarif des honoraires d'avocat dus à titre de dépens du 17 juin 1986, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010 (TAv).
 
Ce tarif, adopté notamment sur la base de l'art. 93 al. 2 CPC/VD, concerne exclusivement l'activité des avocats dans le cadre de causes civiles et ne trouve pas application en matière pénale. Il n'est donc pas pertinent en l'espèce. Comme le relève par ailleurs le recourant, c'est l'arrêté sur les déplacements en matière judiciaire du 6 décembre 1958 (ADJ) qui devait être appliqué et on ne comprend pas pour quel motif la cour cantonale ne fonde pas sa décision sur cette réglementation, en vertu de laquelle les défenseurs d'office en matière pénale reçoivent pour tout déplacement nécessaire hors du chef-lieu du district dans lequel ils pratiquent habituellement, une indemnité de transport de 40 centimes par kilomètre, dès leur lieu de travail habituel (art. 23 al. 1 ADJ). Conformément à l'al. 2 de cet article, ils reçoivent en outre, pour les audiences, une indemnité de déplacement de 24 francs par jour ou 10 francs par demi-journée. Or, comme le montre le recourant, calculée sur la base de cette disposition, l'indemnité pour frais de transport est de toute évidence supérieure au montant qui lui a été alloué par l'autorité cantonale.
 
2.4 Enfin, le recourant soutient que la rémunération horaire de 110 fr. octroyée aux stagiaires est insuffisante et que la cour cantonale n'a pas tenu compte qu'il travaillait avec un rendement moindre qu'un avocat breveté.
 
Pour l'indemnisation des avocats d'office, la jurisprudence part d'un tarif horaire de l'ordre de 180 fr. comme règle de base (ATF 132 I 201 consid. 8.7 p. 217 s.) et admet par ailleurs que l'autorité applique aux avocats stagiaires un tarif horaire plus bas qu'aux avocats brevetés à la tête d'une étude, au motif que les premiers n'assument pas les mêmes charges que les seconds, étant précisé qu'elle doit en revanche prendre en considération, dans l'appréciation du nombre d'heures consacrées à la consultation du dossier et à la préparation de l'audience, le fait qu'un stagiaire investit en principe plus de temps qu'un avocat patenté à l'exercice de son mandat d'office (ATF 109 Ia 107 consid. 3e p. 113).
 
En l'espèce, la cour cantonale a adopté pour la rémunération du recourant un tarif horaire de 110 fr., applicable aux avocats stagiaires. Au vu de la jurisprudence précitée, le tarif horaire retenu ne prête pas le flanc à la critique. Il ne ressort toutefois pas de l'arrêt attaqué que la cour cantonale aurait pris en considération le surcroît de temps nécessaire à un stagiaire. En effet, la seule allusion faite par l'autorité cantonale à la durée consacrée à l'étude du dossier figure dans la partie de l'arrêt consacrée au recours de l'avocat d'un coaccusé. Dans ce cadre, il est mentionné que "on peut admettre que deux heures supplémentaires ont été nécessaires à l'étude des faits, s'agissant d'une cause de moindre ampleur que celle impliquant l'accusé Y.________", savoir le client du recourant. La cour cantonale a ainsi admis 22 heures au total pour le conseil, breveté, du coaccusé. Cette comparaison ne permet pas de déterminer avec certitude quelle différence de temps consacré à la préparation de la défense a été admise pour les deux mandataires ni si celle-ci n'a été justifiée que par l'ampleur des causes respectives. En l'absence de tout autre élément de motivation, il n'est pas possible à l'autorité de céans de vérifier que le fait que le recourant ait été un avocat stagiaire a été dûment pris en considération pour déterminer l'ampleur du travail requis. Pour ce motif aussi, l'arrêt attaqué doit être annulé.
 
2.5 En ce qui concerne les autres points soulevés, savoir l'appréciation du temps consacré à l'ouverture du dossier et aux courriers qu'il a rédigés ainsi que la détermination du montant relatif aux frais de photocopies, la motivation du recourant n'est pas suffisante pour montrer, d'une manière satisfaisant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, que l'autorité cantonale aurait abusé du large pouvoir d'appréciation qui lui est reconnu dans ce domaine.
 
3.
 
Le recourant se plaint, enfin, de ce que la part des frais de seconde instance mis à sa charge serait arbitraire.
 
Suite à l'admission du recours dans le sens du considérant 2 ci-dessus, l'autorité précédente, à laquelle la cause doit être retournée pour qu'elle rende une nouvelle décision, aura de toute manière à réexaminer la question des frais, de sorte que ce grief est devenu sans objet.
 
4.
 
Vu l'issue de la procédure, il n'y a pas lieu de prélever des frais (art. 66 al. 1 LTF) et le recourant, qui obtient partiellement gain de cause, peut prétendre à des dépens à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est partiellement admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais.
 
3.
 
Le canton de Vaud versera au recourant une indemnité de 2000 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois.
 
Lausanne, le 25 mai 2011
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: La Greffière:
 
Mathys Paquier-Boinay
 
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