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Informationen zum Dokument  BGer 1C_427/2011  Materielle Begründung
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BGer 1C_427/2011 vom 11.01.2012
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1C_427/2011
 
Arrêt du 11 janvier 2012
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Fonjallaz, Président,
 
Aemisegger et Merkli.
 
Greffière: Mme Mabillard.
 
 
Participants à la procédure
 
Société X.________ composée de:
 
Y.________ SA,
 
Z.________ SA,
 
toutes les trois représentées par Me François Bellanger, avocat,
 
recourantes,
 
contre
 
A.________,
 
B.________,
 
C.________,
 
D.________,
 
E.________,
 
tous représentés par Me Jean-Pierre Carera, avocat,
 
F. et G.________,
 
H.________,
 
tous les trois représentés par Me Jean-Marie Faivre,
 
intimés,
 
Département des constructions et des technologies de l'information du canton de Genève, case postale 3880, 1211 Genève 3.
 
Objet
 
Autorisation de construire,
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 30 août 2011.
 
Faits:
 
A.
 
Y.________ SA et Z.________ SA, formant ensemble la société X.________, sont copropriétaires de la parcelle 6707, feuille 10, à l'adresse route de K.________ sur la commune de L.________.
 
Cette parcelle, en zone de développement 4A, est incluse dans le périmètre du plan localisé de quartier n° 28295-541 (ci-après: le PLQ) adopté par le Conseil d'Etat le 26 juin 1991, qui y prévoit la construction de quatre immeubles administratifs.
 
Le plan directeur communal, adopté le 28 février 2007, prévoit des activités secondaires et tertiaires dans le périmètre de la parcelle en cause.
 
Le 17 juillet 2002, le Département cantonal de l'aménagement, de l'équipement et du logement, devenu entre temps le Département des constructions et des technologies de l'information (ci-après: le DCTI), a délivré aux propriétaires de la parcelle précitée une autorisation de construire quatre immeubles administratifs et un garage souterrain de 278 places réparties sur deux niveaux. Cette autorisation a été prolongée à plusieurs reprises, la dernière fois jusqu'au 23 novembre 2009.
 
B.
 
Le 17 octobre 2005, le Conseiller d'Etat en charge du département a informé le conseil administratif de la commune de L.________ que les constructeurs envisageaient de remplacer les quatre bâtiments administratifs prévus par des immeubles de logements. Une telle modification nécessitant une révision du PLQ, il souhaitait connaître sa position avant d'entreprendre la procédure ad hoc. La commune, regrettant que des places de travail ne puissent pas être créées, a donné son accord de principe à un changement d'affectation le 31 octobre 2005.
 
Le 20 janvier 2006, la direction de l'aménagement du territoire a invité les propriétaires à déposer une demande de renseignements en vue de l'élaboration d'une modification partielle du PLQ en vigueur.
 
Ceux-ci ont indiqué à la commune le 16 août 2006 que, dans la mesure où les bâtiments de logements restaient à l'intérieur du gabarit prévu par le PLQ et compte tenu de l'appui de la commune et l'accord du président du département, les services de ce dernier considéraient la modification du PLQ comme mineure. La commune a répondu le 4 septembre 2006 qu'elle doutait qu'une telle modification du PLQ puisse être qualifiée de mineure. Un abondant échange de correspondance s'en est suivi entre les propriétaires de la parcelle en cause, la commune et le DCTI.
 
C.
 
Le 5 octobre 2007, Y.________ SA et Z.________ SA ont déposé une demande complémentaire d'autorisation de construire portant sur la construction de quatre immeubles de logements sur la parcelle 6707. Le nouveau projet différait de celui initialement autorisé sur les points suivants: changement d'affectation d'immeubles administratifs en immeubles de logements, modification de l'implantation, suppression d'un niveau de sous-sol et diminution des places de stationnement ainsi que modification des façades comportant notamment la création de balcons sur les façades est.
 
Faisant suite au dépôt de cette demande complémentaire, les préavis suivants ont été formulés:
 
Le 15 novembre 2007, la commune a émis un préavis défavorable, soulignant que le projet ne correspondait ni à l'affectation de la zone, ni à l'implantation prévue par le PLQ et qu'il était incompréhensible que la demande d'autorisation de construire n'ait pas été précédée par la procédure de mise à l'enquête publique d'une modification du PLQ.
 
Le 28 novembre 2007, le service de la planification des eaux a émis un préavis favorable sous conditions.
 
Le 11 décembre 2007, le service cantonal de l'énergie a émis un préavis favorable.
 
Le 13 février 2008, la direction de l'aménagement du territoire a émis un préavis défavorable au motif que la requête n'était conforme ni à la zone de développement 4A destinée à des activités commerciales et administratives adoptée par le Grand Conseil le 16 décembre 1988, ni aux dispositions fixées dans le PLQ en vigueur. De plus, le plan directeur communal approuvé par le Conseil d'Etat le 28 février 2007 prévoyait des activités secondaires et tertiaires sur ces terrains.
 
Le 14 février 2008, la police du feu a émis un préavis favorable.
 
Le 24 juin 2008, la commission d'architecture a émis un préavis défavorable relevant que l'image du PLQ à l'origine du projet n'était pas appropriée à la construction de logements, notamment du fait qu'il y avait plusieurs bâtiments d'angle dont deux mal implantés qui généraient une habitabilité médiocre. De plus, il y avait des situations de proximité entre les bâtiments susceptibles de provoquer des conflits de voisinage. Elle n'était pas opposée au principe d'implanter du logement à cet endroit; toutefois, pour tenir compte des particularités du lieu et notamment de la situation très exposée aux nuisances sonores dues à la proximité de la route de Suisse et du lac ainsi que des dégagements visuels possibles, elle préconisait de jouer sur la mixité des affectations.
 
Le 21 juillet 2008, la direction du logement a émis un préavis favorable sous réserve.
 
D.
 
Le 14 octobre 2008, le DCTI a délivré l'autorisation sollicitée, admettant ainsi le changement d'affectation d'immeubles administratifs en immeubles de logements, la suppression d'un sous-sol et la diminution du nombre de places de stationnement au sous-sol.
 
A.________ et consorts ainsi que que F. et G.________ et H.________ ont recouru contre cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative, devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance, qui, par jugement du 28 janvier 2011, a admis les recours; malgré l'intérêt public à la construction de logements sur le canton de Genève, le DCTI ne pouvait, en se prévalant de cet intérêt, autoriser un projet de construction consacrant une modification essentielle du PLQ.
 
Y.________ SA et Z.________ SA ont interjeté recours devant la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Chambre administrative). Par arrêt du 30 août 2011, la Chambre administrative a rejeté le recours, considérant en substance que le changement de destination des bâtiments constituait un changement fondamental du PLQ. Les constructions projetées ne pouvaient ainsi être autorisées qu'après une modification du PLQ.
 
E.
 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Y.________ SA et Z.________ SA demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 30 août 2011 de la Chambre administrative et de rétablir l'autorisation de construire du 14 octobre 2008. Les sociétés recourantes se plaignent pour l'essentiel d'une application arbitraire du droit cantonal.
 
La Chambre administrative s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le DCTI considère qu'il y a lieu de donner suite aux conclusions des recourantes, l'arrêt de la Chambre administrative ayant, à son avis, manifestement abouti à un résultat arbitraire. Les intimés concluent au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt entrepris. Les recourantes ont répliqué le 30 novembre 2011; elles n'ont pas d'observations additionnelles à déposer. Le DCTI a indiqué, le 30 novembre 2011, qu'il persistait dans ses conclusions.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourantes, qui ont pris part à la procédure devant la Chambre administrative, ont manifestement qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF contre l'arrêt attaqué qui annule l'autorisation de construire qui leur avait été délivrée.
 
2.
 
Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain, ce qu'il appartient au recourant de démontrer par une argumentation qui réponde aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF (cf. ATF 134 II 349 consid. 3 p. 351 s.; 133 II 249 consid de 1.4.2 p. 254 et les références). Le recourant doit ainsi indiquer précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation. En outre, si l'interprétation défendue par la cour cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17).
 
3.
 
Les recourantes reprochent à la Chambre administrative d'avoir procédé à une application arbitraire de l'art. 3 al. 4 de la loi générale du 29 juin 1957 sur les zones de développement (ci-après: la LGZD).
 
3.1 En vertu de cette disposition, les projets de construction établis selon les normes d'une zone de développement doivent être conformes aux plans localisés de quartier en vigueur. Toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le plan localisé de quartier, le DCTI peut admettre que le projet s'écarte du plan dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d'intérêt général le justifie.
 
Les recourantes estiment que la modification législative intervenue en 2004 a changé le sens de l'art. 3 al. 4 LGZD pour permettre un régime plus souple, avec des dérogations importantes aux PLQ. L'interprétation de la Chambre administrative, qui soutient le contraire, serait arbitraire et conduirait à un résultat insoutenable. A leur avis, la transformation d'un bâtiment commercial en un bâtiment de logements devrait par ailleurs pouvoir être autorisée en vertu de l'art. 3 al. 4 LGZD car il s'agirait d'un changement mineur.
 
3.2 La Chambre administrative a rappelé que, sous l'empire du droit antérieur au 29 mai 2004, un projet litigieux ne pouvait s'écarter que "légèrement" du PLQ. La teneur actuelle de l'art. 3 al. 4 LGZD ne modifiait pas fondamentalement la marge d'appréciation laissée au DCTI. Comme cela avait été relevé dans les travaux préparatoires relatifs à la modification législative précitée, seules des modifications peu importantes pouvaient être autorisées. Ainsi que la Chambre administrative l'avait déjà jugé à plusieurs reprises, l'art. 3 al. 4 LGZD dans sa teneur actuelle devait s'interpréter de façon à ne pas vider le PLQ de sa substance. En effet, en acceptant par le biais d'une autorisation de construire une modification importante du PLQ, la procédure d'adoption des plans d'affectation telle que prévue par le droit fédéral de l'aménagement du territoire ne serait pas respectée.
 
Cette interprétation de l'art. 3 al. 4 LGZD par les juges cantonaux échappe à l'arbitraire. Par ailleurs, comme les juges l'ont relevé dans leur arrêt, l'argumentation des recourantes selon laquelle la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de cette disposition ne serait plus pertinente tombe à faux, puisque seules des modifications peu importantes peuvent entrer en ligne de compte lors de l'application de l'art. 3 al. 4 LGZD, dans sa teneur actuelle également. A l'appui de leur thèse, les recourantes citent un arrêt cantonal du 6 mars 2006 où la Chambre administrative avait admis le déplacement d'un bâtiment commercial complet de plus de 100 m par rapport à ce qui était prévu par le PLQ, en raison de l'impossibilité de construire ce bâtiment à l'emplacement initialement prévu pour des motifs de sécurité. Or, il s'agissait dans ce cas de conditions très particulières, qui exigeaient le respect de la zone de sécurité autour de dépôts d'hydrocarbures, et le déplacement de l'assiette du bâtiment avait rencontré l'agrément de l'ensemble des autorités de préavis; par ailleurs, la Chambre administrative avait insisté sur le fait que seules ces caractéristiques avaient permis l'application de l'art. 3 al. 4 LGZD. Dans ces conditions et au vu de ce qui précède, l'affirmation des recourantes, selon laquelle l'art. 3 al. 4 LGZD tendrait à autoriser en principe des dérogations importantes à des PLQ, ne saurait être cautionnée.
 
3.3 Selon les recourantes, l'arrêt attaqué considère ensuite de manière insoutenable que la transformation d'un bâtiment commercial en un bâtiment de logements ne peut pas être autorisée en vertu de l'art. 3 al. 4 LGZD car il s'agirait d'un changement majeur. Elles font valoir que ces logements doivent être construits dans une zone de développement 4A "coincée" entre la zone 5 et la zone agricole; le changement de destination contesté rétablirait donc la conformité des bâtiments avec les constructions environnantes. Le changement d'affectation n'impliquerait au surplus aucune autre modification du PLQ, l'implantation des bâtiments, leur gabarit et leur dévestiture restant inchangés. Cette modification serait motivée par la volonté des promoteurs de réaliser des logements à la place des bureaux qui ne trouvent pas preneur du fait de leur mauvaise localisation au milieu d'une immense zone d'habitation, sans une desserte correcte par les transports publics. Enfin, le passage d'une affection commerciale à une destination de logements irait dans le sens d'une diminution des nuisances éventuelles en faveur des voisins et serait justifié par l'intérêt public prépondérant à la construction de logements sur le territoire du canton de Genève.
 
Ces considérations ne permettent pas de tenir pour insoutenable la motivation de l'arrêt attaqué. La Chambre administrative a en effet retenu que l'intérêt public indéniable à la création de logements ne saurait, en tant que tel, justifier un projet de construction consacrant une modification essentielle du PLQ. Au demeurant, selon la jurisprudence cantonale, le changement de la destination des immeubles prévue par un PLQ constituait une modification fondamentale. Cela était vrai même lorsque l'affectation des bâtiments prévue par le PLQ était administrative et que la demande d'autorisation de construire visait la transformation en logements. En l'espèce, cette jurisprudence était illustrée par le préavis de la commission d'architecture, qui exposait que les exigences n'étaient pas les mêmes pour des bâtiments à usage administratif ou dévolus au logement; une implantation convenant à des bureaux pourrait en effet générer une habitabilité médiocre, source de conflits entre voisins, et ne pas être adaptée aux nuisances sonores générées par la route de Suisse. Au vu de la jurisprudence cantonale et des circonstances du cas particulier, les juges cantonaux pouvaient dès lors, sans arbitraire, considérer que le changement de destination des bâtiments litigieux constituait une modification fondamentale du PLQ et ne pouvait être autorisé qu'après une adaptation de celui-ci, même si une autre solution aurait pu paraître concevable, voire préférable aux yeux des recourantes.
 
4.
 
Il résulte de ce qui précède que le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté, aux frais des recourantes qui succombent (art. 66 al. 1 et 5 LTF). En vertu de l'art. 68 al. 2 LTF, celles-ci verseront en outre une indemnité de dépens aux intimés qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, fixés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourantes, solidairement entre elles.
 
3.
 
Une indemnité de 2'000 fr. est allouée à A.________ et consorts à titre de dépens, à la charge des recourantes, solidairement entre elles.
 
Une indemnité de 2'000 fr. est allouée à F. et G.________ ainsi que H.________ à titre de dépens, à la charge des recourantes, solidairement entre elles.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative.
 
Lausanne, le 11 janvier 2012
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Fonjallaz
 
La Greffière: Mabillard
 
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