VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 8C_670/2012  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 8C_670/2012 vom 26.02.2013
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
8C_670/2012
 
Arrêt du 26 février 2013
 
Ire Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Ursprung, Juge présidant, Frésard et Maillard.
 
Greffier: M. Beauverd.
 
 
Participants à la procédure
 
Familienausgleichskasse Arbeitgeber Basel, Viaduktstrasse 42, 4051 Bâle,
 
recourante,
 
contre
 
A.________, représenté par Angestellte Schweiz, Rigiplatz 1, 8006 Zürich,
 
intimé.
 
Objet
 
Allocation familiale (enfants du conjoint, versement à l'étranger),
 
recours contre le jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal valaisan, du 6 juillet 2012.
 
Faits:
 
A.
 
A.________, de nationalité française, travaille au service de la société X.________ SA depuis le 1er novembre 1990. Il est domicilié à O.________. Le 2 juillet 2011, il a épousé à Y.________ (F) B.________. Celle-ci est mère de deux enfants nés d'un précédent mariage avec C.________, soit D.________, née en 1992, et E.________, née en 1996. L'autorité parentale a été attribuée conjointement aux deux parents et la garde des enfants à la mère. L'épouse vit en France avec ses deux enfants. D.________ est étudiante à l'Université de F.________ et E.________ lycéenne à Y.________.
 
Le 12 octobre 2011, A.________ a présenté à la Caisse de compensation pour les allocations familiales employeurs Bâle (ci-après : la caisse de compensation) une demande d'allocations familiales pour les deux filles de son épouse à partir du 1er juillet 2011. Cette dernière avait reçu auparavant et jusqu'au 1er octobre 2010 des allocations pour ses filles de la Caisse d'allocations familiales de Z.________, à G.________ (F), en sa qualité de salariée de l'Education nationale française.
 
Par décision du 15 novembre 2011, la caisse de compensation a refusé d'allouer les allocations prétendues au motif que les enfants de l'épouse ne vivaient pas sous le même toit que le requérant et que celui-ci n'en assumait pas de manière prépondérante l'entretien. A.________ a formé une opposition que la caisse a rejetée par une nouvelle décision du 13 janvier 2012.
 
B.
 
A.________ a recouru contre la décision sur opposition. Statuant le 6 juillet 2012, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal valaisan a admis le recours; il a annulé la décision attaquée et renvoyé la cause à la caisse de compensation pour nouvelle décision au sens des motifs.
 
C.
 
La caisse de compensation exerce un recours en matière de droit public dans lequel elle conclut à l'annulation du jugement attaqué.
 
A.________ n'a pas répondu au recours. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
1.1 En tant qu'il renvoie la cause à l'administration, le jugement entrepris doit être qualifié de décision incidente, qui ne peut être déférée immédiatement au Tribunal fédéral que si la condition du préjudice irréparable est réalisée ou pour des motifs d'économie de la procédure (art. 93 al. 1 LTF). Lorsqu'une administration ou un assureur social sont contraints par le jugement incident à rendre une décision qu'ils estiment contraire au droit et qu'ils ne pourront eux-mêmes pas attaquer, un tel jugement incident peut être déféré au Tribunal fédéral sans attendre le prononcé du jugement final (ATF 133 V 477 consid. 5.2 p. 483).
 
1.2 Cette éventualité est en l'espèce réalisée, car l'arrêt attaqué a un effet contraignant pour la caisse recourante en ce sens que celle-ci devra statuer à nouveau en tenant compte que l'intimé est seul en mesure d'entretenir le groupe familial qu'il forme avec son épouse et les enfants de celle-ci et qu'il assume donc de manière prépondérante l'entretien des enfants. En conséquence, selon les premiers juges, il a droit aux allocations familiales pour les enfants de son épouse dès la date de leur mariage.
 
2.
 
2.1 L'allocation familiale comprend l'allocation pour enfant et l'allocation de formation professionnelle qui est octroyée au plus tard, en cas de formation, jusqu'à l'âge de 25 ans (art. 3 al. 1 de la loi fédérale sur les allocations familiales [LAFam] du 24 mars 2006 [RS 836.2]).
 
2.2 Selon l'art. 4 al. 1 LAFam, donnent droit aux allocations, notamment, les enfants du conjoint de l'ayant droit (let. b). Le Conseil fédéral règle les modalités (art. 4 al. 2 LAFam). Se fondant sur cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a adopté l'art. 4 de l'Ordonnance sur les allocations familiales (OAFam) du 31 octobre 2007 (RS 836.21), dont l'alinéa 1 prévoit ceci:
 
"Les enfants du conjoint de l'ayant droit donnent droit aux allocations familiales s'ils vivent la plupart du temps dans le foyer de l'ayant droit ou y ont vécu jusqu'à leur majorité".
 
Dans le cas particulier, il est constant que les enfants du conjoint de l'intimé ne vivent pas dans son foyer. Au regard du seul droit interne, l'intimé ne peut donc prétendre les allocations qu'il demande.
 
3.
 
Il convient donc d'examiner si, comme l'ont admis les premiers juges, l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681), ainsi que les règlements auxquels il est fait référence, font obstacle à l'application de cette disposition de l'ordonnance. Jusqu'au 31 mars 2012, les parties contractantes appliquaient entre elles le Règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté (ci-après: règlement n° 1408/71).
 
3.1 Une décision n° 1/2012 du Comité mixte du 31 mars 2012 (RO 2012 2345) a actualisé le contenu de l'annexe II à l'ALCP avec effet au 1er avril 2012 en prévoyant, en particulier, que les Parties appliqueraient désormais entre elles le Règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, modifié par le Règlement (CE) n° 988/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009. Le règlement n° 883/2004 (RS 0.831.109.268.1) - qui a donc remplacé le règlement n° 1408/71 - n'ouvre toutefois aucun droit pour la période antérieure à la date de son application (ATF 138 V 392 consid. 4.1.3 p. 396). Il n'y a donc pas lieu d'examiner à ce stade la situation juridique qui prévaudrait à l'égard de l'intimé à partir du 1er avril 2012. Le litige doit donc être examiné au regard du règlement n° 1408/71 alors applicable.
 
3.2
 
3.2.1 Le recourant, ressortissant d'un Etat Partie à l'ALCP et qui exerce une activité salariée en Suisse, entre à l'évidence dans le champ d'application personnel du règlement n° 1408/71 (voir l'art. 2 par. 1 de ce règlement).
 
3.2.2 Le champ d'application matériel du règlement n° 1408/71 est déterminé à l'art. 4 dudit règlement. D'après son art. 4 par. 1 let. h, le règlement s'applique aux prestations familiales. D'après l'art. 1 let. u point i) du règlement, le terme "prestations familiales" désigne toutes les prestations en nature ou en espèces destinées à compenser les charges de famille dans le cadre d'une législation prévue à l'art. 4 par. 1 let. h. Il ne fait pas de doute, en l'espèce, que les prétentions litigieuses constituent des allocations familiales qui entrent dans le champ d'application matériel du règlement n° 1408/71.
 
3.3 Sous le titre "Travailleurs salariés ou non salariés dont les membres de la famille résident dans un Etat membre autre que l'Etat compétent", l'art. 73 du règlement n° 1408/71 est ainsi libellé:
 
"Le travailleur salarié ou non salarié soumis à la législation d'un Etat membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre Etat membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier Etat, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci, sous réserve des dispositions de l'annexe VI" (dispositions non pertinentes en l'espèce).
 
Cette disposition vise à empêcher qu'un Etat membre puisse faire dépendre l'octroi d'une prestation familiale de la résidence des membres de la famille du travailleur dans l'Etat membre prestataire, afin de ne pas dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation (voir p. ex. l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 juin 1997, Merino Garcia, C-266/95, rec. I-3279 point 28).
 
3.4 Si les législations nationales ne considèrent comme membre de la famille ou du ménage qu'une personne vivant sous le toit du travailleur salarié ou non salarié ou de l'étudiant, cette condition est réputée remplie lorsque la personne en cause est principalement à la charge de ce dernier (art. 1 let. f point i) du règlement n° 1408/71). La législation suisse contient précisément cette restriction (art. 4 al. 1 OAFam; supra consid. 2.2). Autrement dit, dans les cas où - comme ici - l'ALCP est applicable, la condition d'une vie commune n'est pas exigée, il faut que le travailleur concerné assume l'entretien de manière prépondérante de l'enfant de son conjoint (dans le même sens: Directives pour l'application de la loi fédérale sur les allocations familiales LAFam (DAFam) valables dès le 1er janvier 2009 ch. 232).
 
4.
 
La recourante conteste uniquement le jugement attaqué en tant qu'il retient que l'intimé assume de manière prépondérante l'entretien des deux enfants de son épouse.
 
4.1 Le Tribunal fédéral fonde en principe son raisonnement juridique sur les faits retenus par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), à moins que ceux-ci n'aient été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire de l'art. 9 Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF. Si la partie recourante entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, elle doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62).
 
4.2 Selon les constatations du jugement attaqué, C.________ doit verser à B.________ une contribution à l'entretien et à l'éducation de ses enfants de 175 EUR par mois et par enfant (200 EUR dès le 1er septembre 2008) jusqu'à leur majorité ou jusqu'à la fin de leurs études. L'épouse de l'intimé est quant à elle professeure au sein de l'Education nationale française et bénéficie d'un traitement mensuel net de 1954,25 EUR. Elle ne perçoit plus aucune allocation familiale depuis le 1er octobre 2010. Ses deux enfants n'ont aucun revenu. De son côté l'intimé perçoit un salaire mensuel net de 10'405 fr. 40 (x 13) depuis le 1er janvier 2012. L'intimé peut compter sur un revenu net, après déduction des charges habituelles, de l'ordre de 7'000 fr. tandis qu'il manquerait plus de 1'600 fr. à son épouse chaque fin de mois. En outre, l'intimé assume tous les frais de loisirs et de vacances de la famille, ainsi que quelques dépenses des enfants (pour un total de 6'200 fr. environ en 2011). De plus, il a racheté l'emprunt hypothécaire concernant le logement de son épouse (plus de 15'000 fr.). Ainsi donc, toujours selon la juridiction cantonale, si l'on compare la participation de C.________ aux frais d'entretien de ses filles (son ex-épouse ne pouvant manifestement pas subvenir seule aux besoins de celles-ci), il y a lieu de constater que seul l'intimé est à même d'entretenir le groupe familial qu'il forme avec son épouse et les enfants de celle-ci et qu'il assume donc de manière prépondérante l'entretien des enfants. La juridiction cantonale en conclut qu'il a droit aux allocations familiales de la recourante pour les enfants de son épouse dès la date de leur mariage.
 
4.3 La recourante reproche une constatation arbitraire des faits pertinents par la juridiction cantonale. Selon la caisse de compensation, le caractère prépondérant de l'entretien des deux enfants par l'intimé est reconnu uniquement sur la base des allégations de l'intéressé, étant donné que celui-ci n'a produit aucun moyen de preuve établissant l'existence et le montant de contributions en faveur des enfants de son épouse. Aussi, la constatation que seul le requérant est en mesure d'entretenir le groupe familial qu'il forme avec son épouse et les enfants de celle-ci et qu'il assume donc de manière prépondérante l'entretien des enfants apparaît-elle dépourvue de tout fondement.
 
4.4 Ce grief est bien fondé. Sur le vu des pièces versées au dossier, il n'est pas possible, en effet, de connaître le montant de la contribution de l'intimé ni celui de la contribution effective du père des enfants ni même celui que la mère est en mesure de verser. C'est pourquoi le caractère prépondérant de l'entretien des deux enfants par l'intimé n'a pas été établi à satisfaction de droit par la juridiction cantonale. L'état de fait est aussi lacunaire. Le jugement attaqué doit dès lors être annulé et la cause renvoyée à la juridiction précédente pour complément d'instruction sur ce point et nouveau jugement.
 
5.
 
De ce qui précède il résulte que le recours est bien fondé. L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis en ce sens que le jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal valaisan du 6 juillet 2012 est annulé, la cause étant renvoyée à ladite juridiction pour nouveau jugement au sens des motifs.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal valaisan et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 26 février 2013
 
Au nom de la Ire Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Juge présidant: Ursprung
 
Le Greffier: Beauverd
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).