BGer 1C_23/2013 | |||
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BGer 1C_23/2013 vom 27.09.2013 | |
{T 0/2}
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1C_23/2013
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Arrêt du 27 septembre 2013 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
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Merkli et Eusebio.
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Greffier: M. Kurz.
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Participants à la procédure | |
A.________ SA,
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B.________ SA,
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représentées par Me François Bellanger, avocat,
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recourantes,
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contre
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C.________,
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Association D.________,
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représentés par Me Nils De Dardel, avocat,
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intimés,
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Département de l'urbanisme de la République et canton de Genève, Office de l'urbanisme.
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Objet
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autorisation de construire, dérogation à la distance à un cours d'eau.
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 20 novembre 2012.
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Faits: | |
A. Le 29 mars 2010, A.________ SA et B.________ SA (ci-après: les constructeurs) ont présenté une demande d'autorisation de construire portant sur 20 logements et un garage souterrain sur la parcelle n° 4'466 de la Commune de Chêne-Bourg. D'une surface de 2'649 m2, la parcelle est située entre la rue du Vieux Bourg et la rivière la Seymaz, à l'ouest du vieux village de Chêne-Bourg, en zone 4B protégée. Ce projet fait suite à un permis de construire accordé en 2004; il comporte deux bâtiments disposés en L, de quatre niveaux habitables, le plus grand étant situé parallèlement au cours de la Seymaz. Le projet a été modifié à la suite de la procédure de mise à l'enquête et compte tenu des remarques exprimées par la Sous-commission d'architecture (SCA). Le parking visiteur a été déplacé en sous-sol, de sorte que la place et le chemin piétonnier le long de la Seymaz étaient libérés des véhicules. Cela nécessitait une dérogation au sens de l'art. 15 de la loi genevoise sur les eaux (LEaux, RS/GE L 2 05) afin de permettre la construction à moins de 30 m (21 m) du cours d'eau.
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B. L'autorisation de construire a été délivrée le 27 janvier 2011. Elle a fait l'objet d'un recours de l'Association D.________ (l'association), ainsi que de C.________, habitant voisin. Par jugement du 24 octobre 2011, le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève a rejeté le recours, considérant notamment que la dérogation à l'art. 15 LEaux avait été approuvée par le département compétent, la commune et la SCA.
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C. Par arrêt du 20 novembre 2012, la Chambre administrative de la Cour de justice genevoise a déclaré irrecevable le recours formé par l'association, dont la majorité des membres n'était pas concernée par le projet. Elle a en revanche admis le recours formé par C.________. Bien que présentée comme un complément au permis de construire précédent, la demande avait été traitée comme une demande nouvelle. La dérogation à l'art. 15 LEaux ne figurait pas dans la publication, mais cela n'avait pas empêché le recourant d'agir en temps utile. Les conditions d'octroi d'une dérogation n'étaient toutefois pas réunies dès lors que le projet ne portait pas sur une construction ou une installation d'intérêt général ou en relation avec le cours d'eau. En dépit des préavis favorables sur ce point, l'autorisation de construire devait être annulée.
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D. A.________ SA et B.________ SA forment un recours en matière de droit public par lequel elles demandent l'annulation de l'arrêt cantonal et le rétablissement de l'autorisation de construire.
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La cour cantonale n'a pas formulé d'observations. Le Département cantonal de l'urbanisme conclut à l'admission du recours. C.________ et l'association concluent à l'irrecevabilité du recours. Les parties ont déposé des observations complémentaires. Les intimés et le département cantonal l'ont fait à deux reprises. Tous persistent dans leurs conclusions.
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Considérant en droit: | |
1. Dirigé contre une décision rendue dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.
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1.1. L'arrêt attaqué est une décision finale au sens de l'art. 90 LTF. Les recourantes ont pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. Elles sont particulièrement touchées par l'arrêt attaqué dans la mesure où celui-ci annule l'autorisation de construire dont elles bénéficiaient. Elles peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à son annulation ou à sa modification et ont dès lors qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
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1.2. Les deux intimés ont procédé, concluant à l'irrecevabilité du recours. Il apparaît toutefois que le recours cantonal de l'association a été déclaré irrecevable faute de qualité pour agir. Ce prononcé n'ayant pas été contesté, seul l'intimé C.________ doit se voir reconnaître la qualité de partie à ce stade.
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1.3. Contrairement à ce que soutient l'intimé, la motivation du recours satisfait au demeurant aux exigences de l'art. 42 al. 1 et 2 et 106 LTF. Le grief d'arbitraire est en effet suffisamment étayé.
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2. Les recourantes se plaignent d'une application arbitraire de l'art. 15 LEaux. Elles relèvent que le projet a été modifié, après une inspection locale, pour tenir compte des exigences de la SCA dont le but était de réaménager les rives de la Seymaz en limitant l'accès aux véhicules et en créant un espace public et une promenade le long de la berge. L'implantation à 21 m de la berge (au lieu de 30 m) devait ainsi permettre la création du parking visiteurs. Le projet a reçu les préavis positifs de l'ensemble des services concernés, notamment la CMNS et la SCA. Il répondrait ainsi à un intérêt public. La cour cantonale n'aurait pas tenu compte de ces faits, et n'aurait pas expliqué en quoi les conditions de l'art. 15 al. 3 LEaux ne seraient pas réunies. Cette disposition avait été adoptée en 2002 pour préserver l'espace naturel des rives et prévenir le risque de crues. En l'occurrence, le projet permettrait la réalisation d'un aménagement ouvert à la population et sans voitures, soit une réalisation d'intérêt général. Aucun changement ne serait apporté au cours d'eau qui suit, à cet endroit, un lit artificiel. L'évolution future serait préservée, les bâtiments existants se situant tous, dans ce quartier, à l'intérieur de la limite de 30 m.
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2.1. Appelé à revoir l'interprétation d'une norme cantonale sous l'angle restreint de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - même préférable - paraît possible (ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136 III 552 consid. 4.2 p. 560).
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2.2. L'art. 15 al. 1 à 4 LEaux a la teneur suivante:
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Art. 15 Surfaces inconstructibles
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1 Aucune construction ou installation, tant en sous-sol qu'en élévation, ne peut être édifiée à une distance de moins de 10, 30 et 50 m de la limite du cours d'eau, selon la carte des surfaces inconstructibles annexée à la présente loi (s'il existe un projet de correction du cours d'eau, cette distance est mesurée à partir de la limite future). Cette carte et ses modifications ultérieures sont établies selon la procédure prévue par la loi générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957.
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2 Au cas où l'espace minimal défini pour un cours d'eau est supérieur aux distances mentionnées à l'alinéa précédent, un plan de zone à protéger ou un plan de site fixant notamment la surface inconstructible d'un cours d'eau peut être établi selon la procédure prévue par la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987.
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3 Dans le cadre de projets de constructions, le département de l'urbanisme peut accorder des dérogations, pour autant que celles-ci ne portent atteinte aux fonctions écologiques du cours d'eau et de ses rives ou à la sécurité de personnes et des biens pour :
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a) des constructions ou installations d'intérêt général dont l'emplacement est imposé par leur destination;
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b) des constructions ou installations en relation avec le cours d'eau;
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c) la construction de piscines au bord du lac, pour autant que celles-ci ne dépassent pas le niveau moyen du terrain naturel.
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4 Ces dérogations doivent être approuvées par le département et faire l'objet d'une consultation de la commune et de la commission des monuments, de la nature et des sites.
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L'art. 15 LEaux est une disposition d'application de l'art. 21 de l'ordonnance fédérale sur l'aménagement des cours d'eau (OACE, RS 721.100.1), disposition selon laquelle les cantons déterminent l'espace minimal des cours d'eau nécessaire à la protection contre des crues et à la préservation des fonctions écologiques. Ils tiennent compte des zones dangereuses et des besoins d'espace dans leurs plans directeurs et dans leurs plans d'affectation ainsi que dans d'autres activités ayant des effets sur l'organisation du territoire.
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2.3. Comme le relèvent les recourantes, les modifications apportées au projet correspondent aux exigences formulées par la SCA dans son préavis du 4 mai 2010, de libérer les abords de la rive de tout accès automobile et de permettre la création d'une esplanade publique et d'un cheminement le long de la rivière. Cet aspect du projet présente certes un intérêt public. Toutefois, les recourantes perdent de vue que l'objet principal de l'autorisation de construire est la réalisation de deux bâtiments d'habitation. La dérogation litigieuse est requise en rapport avec l'un de ces bâtiments. Quand bien même la construction de logements et la densification des zones à bâtir répondent, à Genève, à un intérêt public important, il ne s'agit à l'évidence pas de constructions d'intérêt "général" au sens de la loi, comme le serait un bâtiment destiné à l'usage public. S'agissant de deux immeubles locatifs, la condition de l'emplacement imposé par sa destination (Standortgebundenheit) fait également défaut; le département préconise une application moins stricte de cette disposition, s'agissant d'une notion de droit cantonal applicable en zone à bâtir. Il n'en demeure pas moins que rien, dans la destination des constructions projetées, n'impose l'emplacement prévu; il n'apparaît pas en particulier que le respect de la distance réglementaire rendrait impossible toute réalisation. Les deux immeubles ne sauraient enfin être considérés comme des constructions "en relation avec le cours d'eau".
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2.4. L'aménagement prévu dans le projet apparaît certes favorable du point de vue de l'aménagement des rives, puisqu'il répond en particulier aux exigences de la SCA sur ce point, et a recueilli les préavis positifs de tous les services intéressés. Il n'en demeure pas moins que l'arrêt attaqué s'en tient à la lettre de la loi, et est conforme au but de protection poursuivi par celle-ci (art. 1 et 10 LEaux). S'il consacre une interprétation rigoureuse du droit cantonal, il ne saurait être considéré comme déraisonnable au point d'apparaître arbitraire, quand bien même l'interprétation des recourantes pourrait également se soutenir.
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3. Le recours doit par conséquent être rejeté. Conformément aux art. 66 al. 1 et 68 al. 2 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge des recourantes qui succombent, de même qu'une indemnité de dépens allouée à l'intimé C.________, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: | |
1. Le recours est rejeté.
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2. Une indemnité de dépens de 3'000 fr. est allouée à l'intimé C.________, à la charge solidaire des recourantes.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourantes.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Département de l'urbanisme de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section.
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Lausanne, le 27 septembre 2013
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Fonjallaz
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Le Greffier: Kurz
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