BGer 6B_879/2013 | |||
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BGer 6B_879/2013 vom 18.11.2013 | |
{T 0/2}
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6B_879/2013
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Arrêt du 18 novembre 2013 |
Cour de droit pénal | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Schneider,
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Juge présidant, Jacquemoud-Rossari et Denys.
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Greffière: Mme Boëton.
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Participants à la procédure | |
X.________, représenté par Me André Malek-Asghar, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
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intimé.
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Objet
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Blanchiment d'argent (art. 305 bis ch. 1 CP); arbitraire,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 19 juillet 2013.
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Faits: | |
A. Par jugement du Tribunal de police de la République et canton de Genève du 20 février 2013, statuant sur opposition à une ordonnance pénale du 5 septembre 2012, X.________ a été acquitté du chef de blanchiment d'argent. Ses conclusions en indemnisation ont été rejetées et la restitution de divers objets et valeurs saisis a été ordonnée.
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B. Saisie d'un appel du Ministère public, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a annulé ce jugement, par décision du 19 juillet 2013, déclaré X.________ coupable de blanchiment d'argent (art. 305 bis ch. 1 CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à 50 fr. avec sursis et délai d'épreuve de deux ans, sous déduction de la détention subie. Elle a confirmé le jugement de première instance pour le surplus.
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Il ressort en substance de la décision cantonale, que X.________ a dissimulé un montant de 17'000 fr. provenant d'un trafic aggravé de stupéfiants, en acceptant de le prendre en dépôt dans le bureau de change dont il était gérant, dans l'attente de changer les fonds, dont il ne pouvait ignorer l'origine criminelle.
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C. X.________ forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre ce jugement et conclut, sous suite de frais et dépens, à son acquittement du chef de blanchiment d'argent. Il requiert l'assistance judiciaire.
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Considérant en droit: | |
1. Invoquant une violation de l'art. 305 bis CP, le recourant soutient n'avoir commis aucun acte d'entrave, dans la mesure où l'argent mis en dépôt était simplement conservé dans un coffre-fort, situé dans son bureau, sans être réintroduit dans le circuit économique par une transaction financière.
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1.1. Aux termes de l'art. 305
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L'acte d'entrave doit être examiné de cas en cas, en fonction de l'ensemble des circonstances. Il doit être propre à entraver l'accès des autorités de poursuite pénales aux valeurs patrimoniales provenant d'un crime, dans les circonstances concrètes. Il n'est pas nécessaire que l'intéressé l'ait effectivement entravé, le blanchiment d'argent étant une infraction de mise en danger abstraite, punissable indépendamment de la survenance d'un résultat (ATF 136 IV 188 consid. 6.1 p. 191; ATF 128 IV 117 consid. 7a p. 131).
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Tombe sous le coup de l'art. 305 bis CP, le placement d'argent provenant d'une infraction qualifiée à la LStup, chaque fois que le mode ou la manière d'opérer ne peut être assimilé au simple versement d'argent liquide sur un compte (ATF 119 IV 242 consid. 1d p. 244 ss). Est un acte d'entrave notamment le recours au change, qu'il s'agisse de convertir les billets dans une monnaie étrangère ou d'obtenir des coupures de montants différents (ATF 136 IV 188 consid. 6.1 p. 191). En revanche, un simple versement d'argent provenant d'un trafic de drogue sur un compte bancaire personnel, ouvert au lieu de son domicile et servant aux paiements privés habituels, ne constitue pas un acte d'entrave (ATF 124 IV 274 consid. 4a p. 278 s.), pas plus que la simple possession ou garde d'argent de provenance délictueuse (ATF 128 IV 117 consid. 7a p. 131 s.). Commet toutefois un acte d'entrave, celui qui conserve de l'argent d'origine criminelle dans son appartement, lorsqu'il résulte des circonstances qu'il a mis ce lieu à disposition pour qu'il serve de cachette provisoire à l'argent (arrêts 6B_1021/2008 du 20 mai 2009 consid. 2; 6S.702/2000 du 14 août 2002 consid. 2.2).
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Le blanchiment d'argent peut aussi être réalisé par omission si l'auteur, en sa qualité d'intermédiaire financier, se trouvait dans une position de garant qui entraînait pour lui une obligation juridique d'agir (cf. art. 11 al. 1 CP; ATF 136 IV 188 consid. 6.2 p. 191 s. et références citées).
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1.2. En se fondant sur les éléments du dossier, la cour cantonale considère que le montant de 17'000 fr. mis en dépôt auprès du recourant, n'était plus entre les mains des personnes impliquées dans le trafic de stupéfiants et était de ce fait, caché dans son bureau de change dans l'attente d'une transaction. Elle retient l'existence d'un acte d'entrave en précisant que le recourant n'a pas inscrit la remise des fonds dans les livres de sa société, et ne l'a pas davantage documentée, alors même qu'il savait qu'elle dépassait le cadre de ses activités.
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Au surplus, l'autorité cantonale retient également l'existence d'un acte d'entrave par omission (art. 11et 305bis ch. 1 CP), lié à l'activité du recourant, lequel, en sa qualité d'intermédiaire financier soumis à la loi sur le blanchiment d'argent (LBA; RS 955.0) devait clarifier l'arrière-plan économique de la transaction, faute de quoi il devait refuser d'entrer en relation d'affaire ou à tout le moins avertir les autorités compétentes pour bloquer les fonds (jugement entrepris, consid. 2.2.2 p. 12 s.).
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En se bornant à contester l'existence d'un acte d'entrave au vu de la simple conservation des fonds dans un coffre-fort, le recourant laisse ainsi subsister la seconde motivation de l'autorité cantonale, indépendante de la première, et suffisante à elle seule à fonder la décision attaquée, ce qui conduit à l'irrecevabilité du moyen en son entier (ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s.).
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Au demeurant, compte tenu de la jurisprudence précitée, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en retenant que le recourant avait adopté un comportement propre à entraver la découverte par les autorités de poursuite pénales du montant de 17'000 fr. en le dissimulant dans son bureau de change, lequel servait de cachette dans l'attente de la transaction de change proprement dite. Le recourant ne peut rien déduire en sa faveur, dans ce contexte, de la jurisprudence cantonale à laquelle il se réfère (cf. jugement du Tribunal cantonal bâlois du 24 septembre 1996, BJM 1998 p. 223), du reste déjà ancienne et antérieure à la jurisprudence fédérale topique.
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2. Le recourant conteste la réalisation des aspects subjectifs de l'infraction de blanchiment d'argent et nie avoir agi intentionnellement, en l'occurrence par dol éventuel.
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2.1. L'infraction de blanchiment est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant. L'auteur doit vouloir ou accepter que le comportement qu'il choisit d'adopter soit propre à provoquer l'entrave prohibée. Au moment d'agir, il doit s'accommoder d'une réalisation possible des éléments constitutifs de l'infraction. L'auteur doit également savoir ou présumer que la valeur patrimoniale provenait d'un crime. A cet égard, il suffit qu'il ait connaissance de circonstances faisant naître le soupçon pressant de faits constituant légalement un crime et qu'il s'accommode de l'éventualité que ces faits se soient produits (ATF 122 IV 211 consid. 2e p. 217; ATF 119 IV 242 consid. 2b p. 247).
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Il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas où il se produirait (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 4). Parmi les éléments extérieurs permettant de conclure que l'auteur s'est accommodé du résultat dommageable pour le cas où il se produirait, figurent notamment la probabilité (connue par l'auteur) de la réalisation du risque et l'importance de la violation du devoir de prudence. Plus celles-ci sont grandes, plus sera fondée la conclusion que l'auteur, malgré d'éventuelles dénégations, avait accepté l'éventualité de la réalisation du résultat dommageable (ATF 133 IV 222 consid. 5.3 p. 226; ATF 130 IV 58 consid. 8.4 p. 62). Peuvent également constituer des éléments extérieurs révélateurs, les mobiles de l'auteur et la manière dont il a agi (ATF 135 IV 12 consid. 2.3.3 p. 18).
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Déterminer ce qu'une personne a su, voulu, envisagé ou accepté relève des constatations de faits, qui lient le Tribunal fédéral, à moins que celles-ci n'aient été établies de façon manifestement inexacte. Est une question de droit, celle de savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de la notion d'intention, notamment de dol éventuel, et si elle l'a correctement appliquée sur la base des faits retenus et des éléments à prendre en considération (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 4).
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2.2. Sans discuter l'origine criminelle des fonds, le recourant conteste toutefois avoir eu les moyens de la connaître. Il soutient qu'il pensait que l'argent confié provenait uniquement des économies de son interlocuteur qui lui avait déclaré travailler à l'aéroport.
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Ce faisant, le recourant se limite à opposer sa propre appréciation des faits sans apporter de critique relative au jugement cantonal, dont l'état de fait lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) faute de grief d'arbitraire soulevé sur ce point. A cet égard, c'est à juste titre que la cour cantonale a écarté la thèse du recourant dès lors qu'il avait personnellement travaillé à l'aéroport et savait d'une part que le salaire n'y était pas versé en espèces et d'autre part qu'un montant de 17'000 fr. dépassait largement les potentielles économies réalisables avec un salaire mensuel de 3'000 francs.
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Pour arriver à la conclusion que le recourant avait à tout le moins envisagé que la somme gardée en dépôt était d'origine criminelle et s'était accommodé d'une réalisation possible des éléments constitutifs objectifs de l'infraction de blanchiment, la cour cantonale s'est fondée sur plusieurs indices pertinents. Les circonstances de remise des fonds (en plusieurs fois, par des tiers dont il ignorait l'identité), les explications peu crédibles y relatives, le montant inhabituellement élevé, l'absence de lien d'amitié avec le déposant, les termes vagues et imprécis employés au téléphone s'agissant de cette opération, et la connaissance par le recourant du milieu des stupéfiants, sont autant d'éléments qui suffisent à faire naître un soupçon marqué de faits constituant un crime. On ne voit pas ici de violation de la notion d'intention ou de dol éventuel.
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2.3. Le recourant reproche enfin à la cour cantonale d'avoir arbitrairement retenu qu'il avait accepté de changer l'argent confié ou qu'il avait à tout le moins connaissance du fait que ces fonds seraient changés. Ce faisant, le recourant se méprend sur l'acte qui lui est reproché, relatif à la dissimulation des fonds et non à leur change. Ce grief, en tant qu'il porte sur l'intention de commettre un acte d'entrave au sens de l'art. 305bis CP, suit le sort du premier grief (cf. consid. 1.2), vu leur connexité immédiate, et est partant irrecevable.
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3. Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Il était d'emblée dénué de chances de succès. L'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant supporte les frais de la cause, qui seront fixés en tenant compte de sa situation économique, qui n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: | |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1600 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
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Lausanne, le 18 novembre 2013
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant: Schneider
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La Greffière: Boëton
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