BGer 4A_60/2014 | |||
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BGer 4A_60/2014 vom 22.07.2014 | |
{T 0/2}
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4A_60/2014
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Arrêt du 22 juillet 2014 |
Ire Cour de droit civil | |
Composition
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Mmes les Juges fédérales Klett, Présidente, Hohl et Kiss.
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Greffier : M. Piaget.
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Participants à la procédure | |
A.________, représenté par Me Thierry Sticher,
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recourant,
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contre
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B.________ Sàrl, représentée par Me Pierre Rüttimann,
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intimée.
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Objet
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contrat de travail, résiliation immédiate, justes motifs,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton
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de Genève, Chambre des prud'hommes, du
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18 décembre 2013.
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Faits : |
A. | |
A.a. Par contrat de travail non daté, B.________ Sàrl (ci-après: l'employeur), société avec siège à Genève et exploitant notamment l'établissement à l'enseigne " C.________ ", a engagé A.________ (ci-après: l'employé ou le travailleur), né en 1956, en qualité de serveur à partir du 1er juin 2008. Le contrat, conclu pour une durée indéterminée, prévoit un salaire mensuel brut de 5'000 fr., versé treize fois l'an, et un droit aux vacances de quatre semaines par année.
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A.b. Le 7 juillet 2011 dans la matinée, A.D.________ a remis en mains de l'employé un courrier lui interdisant de prendre ses vacances à partir du 9 juillet 2011. Celui-ci soutient en avoir pourtant déjà parlé à A.D.________ (en décembre 2010), puis à son épouse; A.D.________ affirme n'en avoir eu connaissance que le 6 juillet 2011.
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A.c. Par courrier recommandé du 8 juillet 2011, se référant aux événements s'étant déroulés le jour précédent, l'employeur a confirmé à l'employé son licenciement immédiat notifié oralement la veille.
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B. Le 2 février 2012, l'employé a déposé en conciliation une demande en paiement concluant à ce que l'employeur soit condamné à lui payer, avec intérêts, 9'081 fr.55 (à titre de dommage au sens de l'art. 337c al. 1 CO), 32'662 fr.50 (à titre d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié au sens de l'art. 337c al. 3 CO), 20'000 fr. (pour tort moral), ainsi qu'à lui remettre un certificat de travail correspondant à la version qu'il a proposée, sous suite de frais et dépens.
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C. L'employé exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt de la Cour de justice. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à son annulation et il reprend les conclusions figurant dans sa demande, fixant toutefois à 15'000 fr. (et non 20'000 fr.) le montant requis à titre de tort moral.
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Considérant en droit : |
Erwägung 1 | |
1.1. Interjeté par la partie qui a succombé partiellement dans ses conclusions en paiement et en modification de son certificat de travail (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal cantonal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire en matière de droit du travail (pour l'action en modification du certificat de travail: ATF 116 II 379 consid. 2b p. 380) dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est en principe recevable puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 48 al. 1 et 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
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1.2. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313).
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1.3. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il peut également tenir compte de ceux figurant dans la décision de l'autorité inférieure, pour autant que l'arrêt attaqué reprenne au moins implicitement cet état de fait (cf. ATF 129 IV 246 consid. 1, confirmé après l'entrée en vigueur de la LTF notamment par l'arrêt 4A_565/2009 du 21 janvier 2010 consid. 2.2.4).
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Erwägung 2 | |
2.1. Les premiers juges considèrent que les agissements de l'employé, essentiellement son agression à l'encontre de B.D.________ (femme alors âgée de 61 ans et de constitution menue), constituent des fautes graves justifiant un licenciement immédiat. Ils ajoutent que " certes, l'état de colère du demandeur était partiellement compréhensible, compte tenu (...) de l'attitude générale de A.D.________ portant régulièrement atteinte à sa personnalité " (jugement du tribunal de première instance p. 17), mais qu'en l'occurrence le recourant n'a pas établi avoir définitivement convenu la date de ses vacances (discussion à l'origine de l'altercation) avec son employeur en décembre 2010, et qu'il partage donc la responsabilité quant au refus de celles-ci.
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2.2. La cour cantonale confirme la décision des premiers juges s'agissant du licenciement immédiat, soulignant que l'employé a commis une faute grave (cf. arrêt entrepris consid. 2.2 p. 16).
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3.
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3.1. Selon l'art. 337 al. 1 1ère phrase CO, l'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs. Sont notamment considérées comme de justes motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).
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3.2. Le juge apprécie librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3
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3.3. Un acte agressif - comme c'est le cas en l'espèce - ou une menace peut, selon les circonstances, justifier ou non un licenciement immédiat (sur le constat cf. aussi arrêt 4C.247/2006 déjà cité consid. 2.6).
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3.4. Parmi les circonstances à prendre en considération figure également le comportement non conforme au contrat ou à la loi de l'employeur, qui peut se révéler à l'origine de la situation de tension qui a conduit l'employé à violer gravement son devoir de fidélité. L'employeur qui laisse une situation de conflit se créer et s'envenimer supporte en effet une large part de responsabilité (cf. arrêt 4C.21/1998 du 18 mars 1998 consid. 1b qui traite d'une injure grave proférée par l'employé à l'adresse de son employeur; en ce sens: JEAN-PHILIPPE DUNAND, L'atteinte à la personnalité d'un collègue de travail comme juste motif de licenciement immédiat, RJN 2002 p. 135). S'il harcèle l'employé (ou tolère son harcèlement), il viole les devoirs imposés par l'art. 328 CO et il n'est pas admis à se prévaloir, pour justifier la résiliation, des conséquences de sa propre violation du contrat (cf. arrêt 4C.21/1998 déjà cité ibidem; sous l'angle de l'art. 336 al. 1 CO: ATF 125 III 70 consid. 2a p. 72/73; arrêt 4A_381/2011 du 24 octobre 2011 consid. 3).
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3.5. En l'espèce, la cour cantonale fonde sa décision essentiellement sur le genre et la gravité du manquement de l'employé le jour de l'altercation.
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3.6. Force est également de constater que l'autorité précédente a transgressé la règle selon laquelle l'indemnité pour tort moral visant à réparer les atteintes à la personnalité de l'employé (cf. art. 328 CO) qui découlent de la résiliation abusive du contrat n'est en principe pas octroyée en application de l'art. 49 CO, mais sur la base de l'art. 337c al. 3 CO (arrêt 4A_218/2012 du 24 juillet 2012 consid. 2.3 et les arrêts cités). Cette dernière disposition doit donc nécessairement être examinée avant la règle générale de l'art. 49 CO.
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3.7. L'autorité précédente ayant transgressé le droit, il y a lieu d'annuler l'arrêt entrepris et de le réformer en ce sens que le licenciement immédiat de l'employé n'était pas justifié.
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4. S'agissant enfin du contenu du certificat de travail, il faut constater que l'intimée n'a pas contesté le fait que, dans l'exécution de son travail, l'employé lui avait donné " pleine et entière satisfaction " (cf. jugement du Tribunal des prud'hommes p. 22), ce qui présuppose que, pour l'intimée, le recourant a fourni des prestations d'une qualité au-dessus de la moyenne (arrêt 4A_117/2007 du 13 septembre 2007 consid. 7.1 et les auteurs cités). Il résulte d'ailleurs des constatations cantonales que l'employé, même durant la période où il a été victime de mobbing, a toujours entretenu d'excellents contacts avec la clientèle qui l'appréciait particulièrement (arrêt entrepris consid. 4.1 p. 21).
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5. En conclusion, il y a lieu d'admettre le recours, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer l'affaire à l'autorité cantonale qui devra déterminer le montant dû à l'employé à titre de réparation (art. 337c al. 1 CO) et d'indemnité (art. 337c al. 3 CO) et, en fonction du résultat de cet examen, se prononcer sur la question du tort moral (sur la base de l'art. 49 CO). Il lui incombera également de remettre au travailleur un certificat de travail correspondant à la teneur de celui figurant au considérant 7 du jugement du Tribunal des prud'hommes.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.
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3. L'intimée versera au recourant le montant de 3'000 fr. à titre de dépens.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des prud'hommes.
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Lausanne, le 22 juillet 2014
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La Présidente : Le Greffier :
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Klett Piaget
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