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Informationen zum Dokument  BGer 4A_214/2015  Materielle Begründung
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BGer 4A_214/2015 vom 08.09.2015
 
{T 0/2}
 
4A_214/2015
 
 
Arrêt du 8 septembre 2015
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes les Juges fédérales Kiss, Présidente, Klett et Hohl.
 
Greffier : M. Piaget.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________, représenté par
 
Me Jean-Luc Addor,
 
recourant,
 
contre
 
1. B.________, représenté par
 
Me Stéphane Coudray,
 
2. C.________ & Cie, représentée par Me Philippe Pont,
 
intimés.
 
Objet
 
responsabilité des administrateurs et de l'organe
 
de révision, preuve du dommage (art. 8 CC et
 
art. 42 al. 2 CO).
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour civile II, du 27 février 2015.
 
 
Faits :
 
A. La société F.________ SA (ci-après: F.________), inscrite au registre du commerce le 26 août 2005 et dotée initialement d'un capital-actions de 250'000 fr., avait notamment pour but social l'exploitation, la location, l'achat et la vente d'affaires commerciales ou industrielles.
1
B. A.________ a introduit une action en responsabilité le 1er juin 2011, initialement contre D.________, E.________ (remplacé en cours de procédure par ses héritiers) et B.________ (tous trois ayant été, à des périodes différentes, administrateurs de la société), ainsi que contre l'organe de révision (C.________ & Cie SA).
2
C. A.________ (ci-après: le recourant ou le demandeur) exerce un recours en matière civile contre le jugement du Tribunal cantonal valaisan. Il conclut à l'admission du recours et à ce que l'action en responsabilité soit admise, tant contre B.________ que contre l'organe de révision, et que ces deux consorts soient condamnés, avec le troisième (masse en faillite de la succession répudiée de feu E.________), à lui verser une indemnité de 200'000 fr., intérêts en sus, sous suite de frais et dépens. Il reproche à la cour cantonale d'avoir fait une application exagérément formaliste des dispositions relatives au fardeau de la preuve (art. 8 CC et art. 42 al. 2 CO).
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Considérant en droit :
 
 
Erwägung 1
 
1.1. Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 46 al. 1 let. a, 48 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
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1.2. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247). Le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'argumentation des parties (ATF 138 II 331 consid. 1.3 p. 336) et apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant d'ordinaire aux questions juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 137 III 580 consid. 1.3 p. 584).
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Erwägung 2
 
2.1. Le Juge I du district de Sion a retenu la responsabilité des administrateurs et du réviseur. Pour calculer le dommage, il s'est fondé sur le montant de la perte au 31 décembre 2006 (soit 501'381 fr.) et sur celui de la perte au 31 décembre 2008 (soit 1'603'637 fr.70). Il a considéré que la différence entre ces deux chiffres (soit 1'102'256 fr.70 fr.), résultant du bilan établi à la valeur d'exploitation, constituait le dommage subi par les créanciers sociaux et qu'il convenait de donner suite aux conclusions du demandeur, qui avait demandé le versement de 200'000 fr. en sa faveur.
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2.2. La Cour civile II du Tribunal cantonal valaisan considère, sous réserve de l'examen de l'ampleur du dommage imputé à l'administrateur et au réviseur, que les conditions de la responsabilité des deux organes (cf. art. 754 et 755 CO) sont réunies. Elle relève toutefois que la juridiction précédente, en s'appuyant sur les comptes disponibles établis aux valeurs d'exploitation (c'est-à-dire en vue de la poursuite de l'activité de la société) s'est écartée des critères posés par la jurisprudence pour déterminer le préjudice en cas de retard dans le prononcé de la faillite. Il convenait de déterminer, pour les divers postes comptables (aménagements, machines et installations des établissements publics exploités par la société, ...) les valeurs de liquidation au jour de la faillite et au moment où le conseil d'administration (cf. art. 725 al. 2 CO), respectivement l'organe de révision (cf. art. 729 al. 2 CO), auraient dû aviser le juge, puis de comparer les résultats. Le demandeur n'ayant pas apporté cette preuve, le dommage n'a pas été établi. La cour cantonale ajoute que l'on pouvait attendre du demandeur qu'il apporte la preuve (par le biais d'une expertise) et que, partant, il ne saurait en l'occurrence bénéficier d'une preuve facilitée (au sens de l'art. 42 al. 2 CO).
7
 
Erwägung 3
 
3.1. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir fait une application exagérément formaliste des dispositions relatives au fardeau de la preuve (art. 8 CC et art. 42 al. 2 CO). Il considère qu'il a prouvé le dommage causé par les omissions des organes (administrateurs et réviseur) de la société. Il reconnaît que les valeurs de liquidation et leur comparaison aux moments déterminants ne résultent pas de l'état de fait dressé par l'autorité cantonale, mais il estime que le dommage qu'il fait valoir en justice est très inférieur au dommage intégral (subi par la société) dont la cour cantonale a admis le principe, quelles que soient les valeurs retenues.
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3.2. Dans la détermination du dommage causé à la société par les administrateurs et/ou les réviseurs en raison d'un avis tardif au juge (cf. art. 725 al. 2 et 729c CO), la théorie de la différence commande de comparer le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine si l'événement dommageable ne s'était pas produit.
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3.2.1. Le dommage de la société consiste ainsi dans l'augmentation du découvert entre le moment où la faillite aurait été prononcée si le défendeur n'avait pas manqué à ses devoirs et le moment (impliquant une perte supérieure) où la faillite a effectivement été prononcée. On parle de " dommage de poursuite d'exploitation " ( 
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3.2.2. Dans le calcul du dommage, seule la valeur de liquidation des biens entre en ligne de compte, puisque l'ouverture de la faillite entraîne la dissolution de la société (art. 736 ch. 3 CO) et sa liquidation en conformité des règles de la faillite (art. 740 al. 5 CO). La valeur de liquidation est déterminante non seulement pour fixer le montant du découvert à la date où la faillite a effectivement été prononcée, mais également pour fixer le montant du découvert à la date où la faillite aurait été prononcée si le défendeur n'avait pas manqué à ses devoirs. En effet, dans les deux cas, la valeur d'exploitation n'a plus aucune pertinence dans l'optique de la liquidation de la société (ATF 136 III 322 consid. 3.2.1 p. 325 s.; arrêt 4C.58/2007 déjà cité consid. 2.5).
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La détermination de la valeur de liquidation permettra de faire émerger d'éventuelles réserves latentes, lesquelles ne sont pas prises en compte dans le calcul de la valeur d'exploitation (Peter/Cavadini, in Commentaire romand, Code des obligations II, 2008, no 38 ad art. 725 CO; Peter Böckli, Schweizer Aktienrecht, 4e éd. 2009, no 771 ad § 13).
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3.2.3. Concrètement, le dommage peut être établi en comparant le dividende de faillite effectif avec celui qui aurait pu être obtenu en avisant le juge à temps (cf. Böckli, op. cit., no 369a ad § 18 et les arrêts cités). Dans la plupart des cas, les demandeurs sollicitent toutefois des tribunaux de mandater un expert qui aura pour tâche d'établir les valeurs de liquidation aux deux moments déterminants (Thierry Luterbacher, Die Schadenminderungspflicht: unter besonderer Berücksichtigung der aktienrechtlichen Verantwortlichkeit, 2005, p. 112; Böckli, op. cit., no 369a ad § 18).
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3.3. Le demandeur qui exerce l'action sociale en réparation du dommage causé à la société elle-même (quand bien même il a choisi de se limiter au montant de son propre découvert) a la charge de démontrer l'aggravation de la situation financière de la société, soit d'établir, à la valeur de liquidation, l'état du patrimoine de cette société aux deux dates déterminantes.
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Erwägung 3.4
 
3.4.1. En l'espèce, force est de constater que les valeurs de liquidation et leur comparaison aux deux moments déterminants ne résultent pas de l'arrêt cantonal et que le demandeur (se limitant à soutenir que le dommage est réalisé " quelles que soient les valeurs retenues ") n'a fourni aucune allégation précise en ce sens, ce que le recourant concède lui-même (mémoire de recours p. 5). Le cas d'espèce diffère donc de celui examiné à l'ATF 136 III 322 puisque, dans ce précédent, le "dommage de poursuite d'exploitation " avait été allégué par le demandeur.
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3.4.2. Qu'une expertise n'ait pas été ordonnée ne serait toutefois, de l'avis du demandeur, pas décisif. L'exigence d'une telle preuve se révélerait, selon lui, totalement disproportionnée et arbitraire puisqu'il suffit d'observer le mouvement des liquidités entre 2006 et 2008, ainsi que l'aggravation de la dette durant cette même période, pour constater que le dommage causé par les administrateurs est largement supérieur au montant de 200'000 fr. qui fait l'objet de ses conclusions.
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3.4.3. Le demandeur fait grief aux juges cantonaux d'avoir fait preuve de formalisme excessif en exigeant encore une expertise. On est, selon lui, en droit d'attendre que les magistrats soient en mesure d'apprécier les éléments d'un dossier, même s'il s'agit de documents et de pièces comptables.
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3.4.4. Le recourant considère qu'il " serait singulièrement contraire aux exigences les plus élémentaires de justice et d'équité " qu'il ne puisse pas obtenir l'indemnité réduite qu'il réclame alors que le préposé à l'Office des faillites a même envisagé le dépôt d'une dénonciation pénale contre les auteurs du (prétendu) dommage.
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4. Le recours formé contre les deux défendeurs doit être rejeté.
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 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3. Le recourant versera à chacun des intimés le montant de 8'000 fr. à titre de dépens.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour civile II.
 
Lausanne, le 8 septembre 2015
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente : Kiss
 
Le Greffier : Piaget
 
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