BGer 1B_145/2017 | |||
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BGer 1B_145/2017 vom 04.05.2017 | |
{T 0/2}
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1B_145/2017
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Arrêt du 4 mai 2017 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
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Eusebio et Chaix.
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Greffière : Mme Kropf.
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Participants à la procédure | |
recourant,
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contre
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Ministère public de la République et canton du Jura, Le Château, 2900 Porrentruy.
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Objet
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Détention provisoire,
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recours contre la décision de la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura du 9 mars 2017.
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Faits : | |
A. Une instruction pénale contre A.________ a été ouverte le 28 septembre 2015 pour infractions à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121). Le 4 mai 2016, le prévenu et un comparse ont été interpellés, chacun au volant d'un véhicule, par le corps des gardes-frontière. Environ seize kg d'amphétamines et de produits de coupage - soit 1'399 g d'amphétamines pures - se trouvaient dans la voiture du second. A.________ a en substance admis avoir acheté cette drogue et espérait en tirer un bénéfice d'environ 16'000 francs. Dans le cadre d'une procédure bernoise, l'ADN de ce dernier a également été identifié sur un sachet contenant une certaine quantité de cannabis.
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B. Le 9 mars 2017, la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura a rejeté le recours intenté par A.________ contre cette décision. Cette autorité a tout d'abord considéré que la surveillance secrète mise en oeuvre sur le téléphone portable que s'était procuré le prévenu en prison auprès de tiers n'était pas le résultat d'une tromperie des autorités, les écoutes pouvant dès lors être exploitées. Se référant en particulier au rapport de police du 28 septembre 2015 et aux déclarations des deux prévenus, la cour cantonale a ensuite rappelé l'existence de présomptions suffisantes de la participation de A.________ à un trafic de produits stupéfiants (cannabis, cocaïne et ecstasy). La juridiction précédente a retenu l'existence de risques de fuite et de récidive qu'aucune mesure de substitution ne permettait de pallier. Elle a encore estimé que la détention ne violait pas le principe de proportionnalité quant à sa durée; il se justifiait de plus de prolonger cette mesure pour six mois, au vu de l'ampleur des actes d'investigation en cours.
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C. Par acte du 11 avril 2017, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à sa libération immédiate et, à titre de mesures de substitution, à l'obligation de déposer ses papiers d'identité, ainsi qu'à celle de se rendre à un poste de gendarmerie à raison d'une fois par semaine. A titre subsidiaire, il demande à ce que la prolongation de sa détention n'excède pas trois mois. Le recourant sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
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Invités à se déterminer, l'autorité précédente et le Ministère public ont conclu au rejet du recours; le Procureur a en particulier précisé que le recourant avait contesté, devant la Chambre pénale des recours, la licéité de la surveillance secrète portant sur le téléphone portable utilisé en détention. Le 2 mai 2017, le recourant a persisté dans ses conclusions.
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Considérant en droit : | |
1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire au sens des art. 212 ss CPP. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le prévenu détenu a qualité pour recourir. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
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2. Dans un premier grief, le recourant soutient que la surveillance secrète téléphonique mise en oeuvre à son encontre sur son téléphone portable pendant la détention serait illicite; l'autorité cantonale ne saurait dès lors utiliser les éléments en découlant pour motiver son maintien en détention.
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Il n'appartient cependant pas au juge de la détention d'exclure un moyen de preuve du dossier sous réserve de ceux d'emblée inexploitables, soit en particulier ceux violant l'art. 140 CPP (ATF 141 IV 284 consid. 2.3 p. 287). Tel n'est cependant pas le cas en l'espèce dès lors que le recourant ne prétend pas que les autorités lui auraient remis directement le téléphone portable en cause dans le but de l'inciter à continuer ses activités illicites antérieures. Il ne soutient pas non plus avoir été officiellement autorisé à s'en servir. Au contraire, le recourant semble reconnaître qu'il se l'est procuré lui-même auprès de tiers (cf. ad art. 3 p. 5 du recours), tout en ayant connaissance de l'interdiction d'utilisation de ce type d'appareil en prison (cf. en particulier ad art. 4 p. 7 de son mémoire et p. 2 de ses observations du 2 mai 2017). Le recourant se prévaut encore du droit de se taire en se référant à l'arrêt 1B_117/2016 du 21 mars 2017. Mis à part le fait qu'il n'indique pas précisément quand il aurait invoqué ce droit, il y a lieu de différencier une mesure d'investigation secrète de l'écoute téléphonique effectuée en l'espèce; dans la seconde, il n'y a pas d'agent infiltré susceptible d'orienter la conversation et dès lors de piéger le recourant. La mise en oeuvre de la surveillance secrète paraissant trouver son origine dans un acte a priori illicite du recourant, un comportement trompeur inadmissible de la part des autorités n'est ainsi absolument pas manifeste.
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C'est donc à juste titre que l'autorité précédente a pris en compte, lors de son examen des conditions de la détention, les éléments ressortant de cette surveillance secrète et ce grief peut être écarté.
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3. Le recourant soutient que la surveillance secrète violerait son droit à une instruction en contradictoire (cf. art. 147 CPP).
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Ce reproche est manifestement mal fondé. En effet, le défaut de participation découle de la nature de ce type de mesure. De plus, les droits du recourant sont protégés dès lors que le Ministère public doit, au plus tard lors de la clôture de la procédure préliminaire, lui communiquer qu'il a fait l'objet d'une surveillance secrète (art. 279 al. 1 CPP). Il dispose alors d'un droit de recours contre la décision d'autorisation du Tmc (art. 279 al. 3 CPP), opportunité que semble au demeurant avoir saisie le recourant.
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4. Le recourant ne conteste plus devant le Tribunal fédéral l'existence de présomptions suffisantes de culpabilité.
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Il reproche en revanche à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'il existerait des risques de fuite et de récidive qui justifieraient son maintien en détention.
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4.1. Selon l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ne peuvent être ordonnées que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a notamment sérieusement lieu de craindre qu'il se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite.
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Selon la jurisprudence, le risque de fuite au sens de la disposition susmentionnée doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui le font apparaître non seulement possible, mais également probable (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70). Les circonstances particulières de chaque cas d'espèce doivent être prises en compte (arrêt 1B_393/2015 du 9 décembre 2015 consid. 2.2). La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62).
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4.2. Pour retenir l'existence d'un risque de fuite, la Chambre pénale des recours a fait état de l'origine marocaine du recourant, ainsi que du permis B dont il bénéficie. Elle a indiqué que cette autorisation serait certainement révoquée en cas de condamnation (cf. art. 62 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers [LEtr; RS 142.20]), respectivement que le recourant pourrait faire l'objet d'une expulsion obligatoire (cf. art. 66a al. 1 let. o CP). La cour cantonale a aussi relevé qu'à l'exception de sa femme et de sa fille, la famille du recourant résidait en France et au Maroc. Se référant ensuite aux écoutes téléphoniques, les juges cantonaux ont fait mention de la maison construite par le recourant à l'étranger, ainsi que des échanges du couple lors desquels le recourant a notamment dit à son épouse espérer sortir au plus vite et pouvoir ensuite "se barrer ensemble".
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4.3. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et le recourant ne développe aucune argumentation propre à le remettre en cause. En particulier, contrairement à ce qu'il soutient, l'appréciation de l'autorité précédente ne repose pas uniquement sur les écoutes téléphoniques dont il conteste la licéité, mais aussi sur les éventuelles conséquences importantes que pourrait avoir pour lui une condamnation pénale (révocation de son permis B, expulsion du territoire suisse), ainsi que sur son peu d'attaches avec la Suisse (famille résidant en France ou au Maroc à l'exception de sa femme et sa fille). A cet égard, il y a lieu d'ailleurs de préciser que les propos tenus au cours de la surveillance secrète ont confirmé la faiblesse de ce lien, puisque le recourant ne semble pas organiser uniquement sa propre fuite, mais aussi celle de son épouse et de sa fille. Il ne soulève au demeurant aucun argument tendant à expliquer les propos relatifs à un possible départ commun "vers le bled". Il s'ensuit également que les mesures de substitution préconisées par le recourant pour pallier ce danger (dépôt des papiers d'identité et obligation de se présenter une fois par semaine à un poste de police; art. 237 CPP) n'offrent aucune garantie dans la mesure où il est aisé de se rendre, en particulier en France, sans document d'identité.
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Partant, la Chambre pénale des recours n'a pas violé le droit fédéral en retenant l'existence d'un risque de fuite et le défaut de mesures de substitution permettant d'y remédier.
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4.4. L'existence du danger susmentionné dispense d'examiner ce qu'il en est du risque de réitération également retenu par l'autorité précédente pour prolonger la détention provisoire du recourant.
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4.5. La durée de la détention provisoire doit encore être conforme au principe de proportionnalité (art. 36 al. 1 Cst. et 212 al. 3 CPP). La cour cantonale a considéré que tel était le cas vu la peine encourue en cas d'application de l'art. 19 al. 2 LStup, l'éventuelle application de circonstances aggravantes (métier et bande) et l'importance des quantités de stupéfiants en jeu, constatations que ne remet pas en cause le recourant.
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La prolongation pour six mois de cette mesure en application de l'art. 227 al. 7 in fine CPP est également justifiée en l'occurrence eu égard à la complexité entourant l'enquête qui porte sur un trafic de différents stupéfiants; cela vaut d'ailleurs d'autant plus puisque celle-ci a un caractère international et que des commissions rogatoires concernant pas moins de quatre pays sont en cours (Belgique, France, Hollande et Maroc; arrêts 1B_261/2013 du 11 septembre 2013 consid. 4.2 et 4.3; 1B_249/2013 du 12 août 2013 consid. 8; 1B_394/2012 du 20 juillet 2012 consid. 5.2; 1B_126/2011 du 6 avril 2011 consid. 4.2.1 publié in JdT 2011 IV 325; HUG/SCHEIDEGGER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER (édit.), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 2e éd. 2014, n° 15 ad art. 227 CPP). Il n'était ainsi pas contraire au droit fédéral de considérer comme prévisible que le motif de détention retenu n'aurait pas disparu trois mois après le prononcé du Tmc (cf. le Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, [FF 2006 1057, p. 1214]). Cela étant, lors du prochain contrôle des conditions de la détention, cette justification ne saurait être reprise sans explication complémentaire; le cas échéant, il appartiendra donc à l'autorité de poursuite de démontrer son actualité, notamment en se référant à l'avancement de l'instruction.
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4.6. Au regard des considérations précédentes, la prolongation de la détention provisoire du recourant peut être confirmée pour une durée de six mois depuis le prononcé du Tmc du 10 février 2017, à savoir jusqu'au 4 août 2017.
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5. Il s'ensuit que le recours est rejeté.
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Le recourant a demandé l'assistance judiciaire. Vu en particulier la question relative à la durée de la prolongation de la détention (cf. art. 227 al. 7 CPP), son recours n'était pas d'emblée dénué de chances succès (art. 64 al. 1 LTF) et cette requête doit donc être admise. Il y a lieu de désigner Me Charles Poupon comme avocat d'office et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui sera supportée par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 et 2 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté.
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2. La requête d'assistance judiciaire est admise. Me Charles Poupon est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton du Jura et à la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura.
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Lausanne, le 4 mai 2017
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Merkli
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La Greffière : Kropf
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