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Informationen zum Dokument  BGer 4A_77/2018  Materielle Begründung
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BGer 4A_77/2018 vom 07.05.2018
 
 
4A_77/2018
 
 
Arrêt du 7mai 2018
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes les juges Kiss, présidente, Klett et Hohl.
 
Greffier : M. Thélin.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________ SA,
 
représentée par Me François Ott,
 
demanderesse et recourante,
 
contre
 
Z.________ SA,
 
représentée par Me Jean-Marie Allimann,
 
défenderesse et intimée.
 
Objet
 
procédure civile; compétence à raison de la matière
 
recours contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2017 par la IIe Chambre civile de la Cour suprême du canton de Berne
 
(ZK 17 345).
 
 
Considérant en fait et en droit :
 
1. X.________ SA se consacre notamment à l'organisation et à l'exécution des transports de marchandises. Elle a importé en Suisse des marchandises destinées à Z.________ SA, laquelle pratique le commerce et l'import-export des appareils électroniques et des automobiles. X.________ SA a dédouané ces marchandises et acquitté la TVA perçue sur les importations, en deux montants de 33'575 fr.05 et 54'535 fr.35. Z.________ SA s'est ensuite refusée à lui rembourser ces montants.
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2. Le 10 avril 2015, X.________ SA a ouvert action contre Z.________ SA devant le Président du Tribunal régional de l'arrondissement Jura bernois - Seeland. La défenderesse devait être condamnée à rembourser lesdits montants, soit 88'110 fr.40 au total, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 20 septembre 2012.
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La défenderesse a conclu au rejet de l'action.
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Le juge saisi s'est prononcé le 9 juin 2017; il a accueilli l'action et condamné la défenderesse selon les conclusions de la demande.
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La IIe Chambre civile de la Cour suprême du canton de Berne a statué le 14 décembre 2017 sur l'appel de la défenderesse. Dans le dispositif de son arrêt, la Cour constate que le jugement de première instance est nul. Dans les motifs, elle expose que la cause ressortit au Tribunal de commerce, compétent en instance cantonale unique et intégré à la section civile de la Cour suprême; en conséquence, le Président du Tribunal régional était incompétent à raison de la matière. La demanderesse est condamnée aux frais et dépens des deux instances cantonales.
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3. Agissant par la voie du recours en matière civile, la demanderesse requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour suprême et de renvoyer la cause à cette autorité avec injonction de statuer sur l'appel de l'adverse partie.
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La défenderesse n'a pas été invitée à procéder.
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4. Selon la jurisprudence relative à l'art. 42 al. 1 LTF, le mémoire de recours adressé au Tribunal fédéral doit comporter des conclusions sur le sort des prétentions en cause, à allouer ou à rejeter par le tribunal, et la partie recourante n'est en principe pas recevable à réclamer seulement l'annulation de la décision attaquée. Ce dernier procédé n'est admis que dans l'hypothèse où le Tribunal fédéral, en cas de succès du recours, ne pourrait de toute manière pas rendre un jugement final, et devrait au contraire renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour complètement de l'état de fait et nouvelle décision selon l'art. 107 al. 2 LTF (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid. 3).
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En l'espèce, la Cour suprême ne s'est pas prononcée sur les prétentions élevées contre la défenderesse, de sorte que le Tribunal fédéral, même en cas de succès des moyens développés devant lui, ne pourrait pas rendre lui-même et immédiatement un jugement final sur ces prétentions; il devrait au contraire se borner à renvoyer la cause à l'autorité précédente. Il s'ensuit que les conclusions tendant à ce renvoi sont recevables au regard de la jurisprudence ci-mentionnée.
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Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont pour le surplus satisfaites, notamment à raison de la valeur litigieuse.
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5. A teneur de l'art. 4 al. 1 CPC, il appartient en principe au droit cantonal de déterminer la compétence matérielle et fonctionnelle des tribunaux. Selon l'art. 6 al. 1 et 2 CPC, les cantons peuvent notamment instituer un tribunal spécial, dit tribunal de commerce, qui statuera en instance cantonale unique sur les litiges commerciaux (al. 1). Un litige est réputé commercial lorsque les conditions ci-énoncées, cumulatives, sont accomplies: l'activité commerciale d'une partie au moins est concernée (al. 2 let. a); la décision est susceptible du recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral (al. 2 let. b), et les deux parties sont inscrites sur le registre du commerce suisse ou sur un registre étranger équivalent (al. 2 let. c). Le tribunal de commerce est alors impérativement compétent; sa compétence exclut celle du tribunal ordinaire (ATF 140 III 155). Il est constant que le tribunal de commerce est institué dans divers cantons, en particulier dans celui de Berne.
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L'activité commerciale d'une partie est concernée, aux termes de l'art. 6 al. 2 let. a CPC, lorsque le litige présente un lien de connexité avec cette activité. Seul importe un lien de connexité objectif entre la prétention litigieuse et l'activité commerciale principale, accessoire ou complémentaire d'une partie; le fondement juridique de la prétention est en revanche indifférent (arrêt 5A_592/2013 du 29 octobre 2013, consid. 5.1, RNRF 2016 p. 140).
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En l'espèce, le remboursement de la TVA acquittée lors de l'importation de marchandises, réclamé par la demanderesse à la défenderesse, se rattache à la fois aux activités de transport et d'agence en douane de cette partie-là et aux activités d'import-export de partie-ci. Nonobstant l'opinion différente de la demanderesse, la nature commerciale du litige est ici indiscutable. Les conditions de l'art. 6 al. 2 let. b et c CPC sont également accomplies. Le Tribunal de commerce du canton de Berne était donc seul compétent, à l'exclusion du Président du Tribunal régional.
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6. Une demande en justice doit être introduite devant le tribunal compétent à raison de la matière; il s'agit d'une condition de recevabilité que le juge saisi doit examiner d'office selon les art. 59 al. 2 let. b et 60 CPC. Dans le cas où cet examen est omis et qu'un jugement est rendu sur le fond par un juge incompétent, ce jugement est entaché d'un vice grave qui, selon les circonstances, peut en entraîner la nullité (ATF 137 III 217 consid. 2.4.3 p. 225). C'est pourquoi le juge de l'appel ou du recours doit lui aussi contrôler la compétence à raison de la matière, également lorsqu'aucune des parties ne la met en doute (arrêt 4A_488/2014 du 20 février 2015, consid. 3.1). Cela n'est pas contesté par la demanderesse.
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Elucider si le jugement d'un tribunal incompétent à raison de la matière est nul ou s'il était seulement annulable n'est nécessaire que dans les éventualités où une autorité est requise d'exécuter ce jugement, ou appelée à apprécier s'il est doté de l'autorité de chose jugée et s'il empêche donc un nouveau procès sur le même objet. En revanche, s'il y a comme en l'espèce appel de ce même jugement, le juge du second degré peut et doit se borner à l'annuler et à déclarer la demande en justice irrecevable. L'arrêt de la Cour suprême sera donc rectifié sur ce point.
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7. La demanderesse conteste qu'elle doive assumer les frais et dépens de première instance et d'appel.
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En règle générale, selon l'art. 106 al. 1 CPC, les frais judiciaires et les dépens du procès civil doivent être imputés à la partie qui succombe; cette partie est d'ordinaire celle qui subit le rejet de ses conclusions. Il s'agit en l'espèce de la demanderesse, qui n'obtient pas le remboursement de la TVA auquel elle prétend. Parce que la demanderesse a elle-même saisi le Président du Tribunal régional, lequel était pourtant incompétent, elle peut être tenue d'assumer les frais du jugement qui se révèle vicié, rendu par ce magistrat. En équité, il ne s'impose pas de déroger en application de l'art. 107 al. 1 let. e CPC à la répartition ordinaire des frais judiciaires et des dépens entre les parties; il ne s'impose pas non plus d'imputer les frais judiciaires au canton de Berne en application de l'art. 107 al. 2 CPC.
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8. Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de partie qui succombe, son auteur doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral. L'adverse partie n'a pas été invitée à répondre et il ne lui sera donc pas alloué de dépens.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1. Le recours est rejeté.
 
2. Le ch. 1 du dispositif de l'arrêt de la Cour suprême est rectifié en ce sens que le jugement de première instance est annulé et que la demande en justice est déclarée irrecevable.
 
3. La demanderesse acquittera un émolument judiciaire de 4'500 francs.
 
4. Il n'est pas alloué de dépens.
 
5. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour suprême du canton de Berne.
 
Lausanne, le 7 mai 2018
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La présidente : Kiss
 
Le greffier : Thélin
 
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