BGer 6B_938/2018 | |||
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BGer 6B_938/2018 vom 28.11.2018 |
6B_938/2018 |
Arrêt du 28 novembre 2018 |
Cour de droit pénal | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
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Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
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Greffière : Mme Cherpillod.
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Participants à la procédure | |
X.________,
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représentée par Me Pierre Bayenet, avocat,
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recourante,
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contre
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Ministère public de la République et canton de Genève,
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intimé.
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Objet
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Indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en procédure,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 21 août 2018
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(AARP/248/2018 [P/2975/2017]).
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Faits : | |
A. Par ordonnance pénale du 12 juin 2017, X.________ a été condamnée pour injure et menace à 30 jours-amende, à 30 fr. le jour avec sursis pendant trois ans. Il lui était reproché d'avoir, sur son lieu de travail à la banque A.________, injurié un autre employé en lui disant notamment que son père et lui avaient toujours été stupides et en le traitant de " connard " et de " fils de pute ". Il lui était également reproché d'avoir à cette occasion menacé cet employé de lui couper la gorge.
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B. A la suite de l'opposition formée par X.________, le Tribunal de première instance de la République et canton de Genève l'a, par jugement du 2 novembre 2017, acquittée du chef de menaces et condamnée pour injure à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, à 30 fr. le jour avec sursis durant deux ans.
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C. Par arrêt du 21 août 2018, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève a acquitté X.________ du chef d'injure. Elle a mis les frais de la procédure de première instance et d'appel à la charge de l'Etat et a rejeté les conclusions en indemnisation de X.________, estimant que le recours aux services d'un avocat ne pouvait être qualifié de dépenses raisonnables au sens de l'art. 429 al. 1 let. a CPP.
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D. X.________ forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre cet arrêt. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à son annulation en ce qu'il lui refuse une indemnité et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.
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Invités à se déterminer sur le recours, l'autorité précédente y a renoncé, le ministère public a conclu au rejet.
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Considérant en droit : | |
1. La recourante voit dans le refus de l'autorité précédente de lui accorder une indemnité fondée sur l'art. 429 CPP une violation de cette disposition.
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1.1. Aux termes de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, le prévenu, acquitté totalement ou en partie ou qui bénéficie d'une ordonnance de classement, a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette disposition s'applique également aux voies de recours (y inclus l'appel) en vertu de l'art. 436 al. 1 CPP.
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L'indemnité ici visée correspond en particulier aux dépenses assumées par le prévenu libéré pour un avocat de choix (ATF 139 IV 241 consid. 1 p. 242). L'allocation d'une indemnité pour frais de défense selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP n'est pas limitée aux cas de défense obligatoire visés par l'art. 130 CPP. Elle peut être accordée dans les cas où le recours à un avocat apparaît tout simplement raisonnable. Il faut garder à l'esprit que le droit pénal matériel et le droit de procédure sont complexes et représentent, pour des personnes qui ne sont pas habituées à procéder, une source de difficultés. Celui qui se défend seul est susceptible d'être moins bien loti. Dans le cadre de l'examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, il doit être tenu compte, outre de la gravité de l'infraction et de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu. Par rapport à un délit ou à un crime, ce n'est qu'exceptionnellement que l'assistance d'un avocat peut être considérée comme ne constituant pas un exercice raisonnable des droits de la défense. Cela pourrait par exemple être le cas lorsque la procédure fait immédiatement l'objet d'un classement après une première audition (cf. ATF 142 IV 45 consid. 2.1. p. 47; 138 IV 197 consid. 2.3.5 p. 203).
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Déterminer si l'assistance d'un avocat procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure et si, par conséquent, une indemnité pour frais de défense selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP peut être allouée au prévenu, est une question de droit fédéral que le Tribunal fédéral revoit librement. Il s'impose toutefois une certaine retenue lors de l'examen de l'évaluation faite par l'autorité précédente, particulièrement de la détermination, dans le cas concret, des dépenses qui apparaissent raisonnables (ATF 142 IV 45 consid. 2.1. p. 47 et les références citées).
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1.2. En l'espèce, la procédure pénale a fait l'objet d'une ordonnance de condamnation, puis, à la suite de l'opposition formée par la recourante, d'une mise en accusation pour deux délits, soit menace au sens de l'art. 180 al. 1 CP et injure au sens de l'art. 177 al. 1 CP. La première infraction était passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire, la seconde d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende au plus. La recourante a fait appel à un avocat la veille de l'audience du tribunal de première instance. A la suite de l'appel formé par elle, qui n'avait été condamnée par l'autorité de première instance que pour injure, à une peine pécuniaire de 20 jours-amendes, à 30 fr. le jour avec sursis pendant deux ans, l'autorité d'appel a traité l'appel en procédure écrite, impartissant un délai à la recourante pour déposer un mémoire d'appel motivé. Entre la plainte pénale formée le 22 janvier 2017 et l'arrêt d'appel du 21 août 2018 se sont écoulés 19 mois. L'autorité précédente retient que l'impact de la procédure sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu doit être pris en compte dans le caractère raisonnable. Elle n'établit pas les faits y afférant, constatant toutefois que les faits reprochés se sont déroulés devant témoins sur le lieu de travail de la recourante, ce qui laisse présager qu'ils ne sont pas anodins pour elle, que ce soit du point de vue professionnel ou personnel.
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Il résulte de ces éléments que la cause ne pouvait être considérée comme ne nécessitant pas un avocat en première instance, la recourante étant alors poursuivie pour menace et injure. Il en va de même en seconde instance, du fait notamment de la nature du délit poursuivi, de la quotité de la peine à laquelle elle s'opposait et du fait que l'autorité précédente avait ordonné une procédure écrite, non aisée pour la recourante qui exerçait au moment des faits le métier de femme de ménage. Les arrêts auxquels se réfère l'autorité précédente (6B_458/2014 du 25 septembre 2014 et 6B_156/2014 du 30 juin 2014) sont à cet égard sans pertinence dès lors déjà qu'ils visent tous deux une procédure qui a été clôturée, devant le ministère public, par classement, sans mise en accusation. Que la partie plaignante n'ait pas été assistée en l'occurrence ne suffit pas non plus à retenir, dans les circonstances d'espèce, que l'assistance d'un avocat n'était pas raisonnable pour la recourante, prévenue.
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2. Il s'ensuit que le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision s'agissant de l'indemnité requise par la recourante en vertu de l'art. 429 CPP.
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La recourante, qui obtient gain de cause, ne supportera pas de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Elle a droit à des dépens à la charge du canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
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2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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3. Le canton de Genève versera à la recourante une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
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Lausanne, le 28 novembre 2018
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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La Greffière : Cherpillod
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