BGer 6B_94/2019 | |||
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BGer 6B_94/2019 vom 05.02.2019 |
6B_94/2019 |
Arrêt du 5 février 2019 |
Cour de droit pénal | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
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Oberholzer et Jametti.
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Greffier : M. Graa.
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Participants à la procédure | |
X.________,
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représenté par Me Véronique Fontana, avocate,
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recourant,
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contre
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Ministère public central du canton de Vaud,
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intimé.
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Objet
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Arbitraire; internement; traitement thérapeutique institutionnel; proportionnalité,
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recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 27 septembre 2018 (n° 372 PE13.009448-SSM).
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Faits : | |
A. Par jugement du 24 mars 2016, le Tribunal criminel de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a libéré X.________ des chefs de prévention de séquestration et enlèvement aggravé et de pornographie, l'a condamné, pour assassinat, séquestration et enlèvement, contrainte sexuelle et violation grave qualifiée des règles de la circulation, à une peine privative de liberté à vie, et a ordonné son internement à vie.
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Par jugement du 2 septembre 2016, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté l'appel formé par X.________ contre ce jugement.
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Par arrêt du 26 février 2018 (6B_35/2017), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par X.________ contre le jugement du 2 septembre 2016, a annulé celui-ci et a renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Le Tribunal fédéral a considéré que la cour cantonale avait violé le droit fédéral en ordonnant l'internement à vie du prénommé.
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B. Par jugement du 27 septembre 2018, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois, statuant à la suite de l'arrêt de renvoi du 26 février 2018, a très partiellement admis l'appel formé par X.________ contre le jugement du 24 mars 2016 et a réformé celui-ci notamment en ce sens que l'internement du prénommé est ordonné.
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Il en ressort les faits suivants.
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B.a. X.________ est né en 1976. Après l'école, il a notamment accompli un apprentissage d'employé de commerce de 1993 à 1996 et a obtenu un CFC. Au terme de son école de recrue débutée au mois de juillet 1996, il a travaillé un temps auprès de son maître d'apprentissage, puis s'est trouvé sans emploi jusqu'en été 1997. Il a ensuite été engagé en qualité de vendeur dans une grande surface à A.________.
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B.b. Par jugement du 13 juin 2000, le Tribunal criminel du district du Pays-d'Enhaut a condamné X.________ à 20 ans de réclusion, pour assassinat, menaces, séquestration et enlèvement, contrainte sexuelle et viol. Cette condamnation sanctionnait notamment les événements survenus en janvier 1998, au cours desquels X.________ avait contraint son ancienne compagne à le suivre dans un chalet, où il lui avait imposé des rapports sexuels avant de la tuer avec un pistolet.
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B.c. Dans le cadre de la procédure ayant conduit à la condamnation du 13 juin 2000, X.________ a été soumis à une expertise psychiatrique. Dans un rapport du 5 décembre 1998, les experts ont posé le diagnostic de troubles spécifiques de la personnalité (personnalité pervers-narcissique).
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Durant son incarcération, l'intéressé a ensuite été examiné par divers experts psychiatres.
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Dans un rapport du 5 juin 2008 émanant du Département universitaire de psychiatrie de l'adulte, le diagnostic de personnalité narcissique a été retenu.
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Dans un rapport du 18 février 2013 émanant du Centre universitaire romand de médecine légale, le diagnostic de personnalité dyssociale avec traits psychopathiques a été posé.
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B.d. Dès janvier 2013, X.________ a bénéficié d'un régime d'arrêts domiciliaires, en portant un bracelet électronique.
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B.e. Comme il a été exposé dans l'arrêt 6B_35/2017, le recourant a en substance, le 13 mai 2013, emmené B.________ de force dans sa voiture puis, au terme d'un huis-clos qui a duré plusieurs heures et au cours duquel il a en particulier imposé à la prénommée divers actes d'ordre sexuel, l'a tuée en l'étranglant avec une ceinture.
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B.f. Au cours de l'instruction, deux expertises ont été réalisées. L'une par le Dr C.________, qui a rendu son rapport le 30 janvier 2014, l'autre par le Dr D.________, qui a déposé son rapport le 23 décembre 2014.
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Le Dr C.________ a posé les diagnostics de forme particulièrement grave de trouble de la personnalité dyssociale équivalant au concept clinique de psychopathie et de troubles multiples de la préférence sexuelle. Le Dr D.________ a quant à lui posé le diagnostic de troubles de la personnalité mixte grave aux traits caractériels sadiques, paranoïdes, dyssociaux ("psychopathy") et immatures.
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Les deux experts ont été auditionnés le 29 juin 2015, puis à nouveau le 9 mars 2016, lors des débats de première instance.
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B.g. En détention, X.________ fait l'objet d'un suivi par le Professeur E.________, chef du Service auprès du Service de médecine et psychiatrie pénitentiaires. A la demande de X.________, celui-ci a notamment rendu un rapport du 17 août 2016, dont il ressort que l'intéressé était demandeur des entretiens, qu'il se montrait collaborant, qu'il parlait facilement et témoignait toujours d'un contact courtois et adéquat. Les entretiens avaient d'abord porté sur son vécu du procès et de sa condamnation, puis sur son histoire familiale. Les faits pour lesquels il avait été condamné avaient été évoqués à quelques reprises, à l'occasion de rêves dont X.________ avait fait part lors des séances et qui avaient permis d'aborder certains aspects de sa vie sexuelle et de ses relations avec les femmes.
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C. X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 27 septembre 2018, en concluant principalement à sa réforme en ce sens qu'aucun internement n'est ordonné, subsidiairement à sa réforme en ce sens qu'une mesure thérapeutique institutionnelle est ordonnée en sa faveur et, plus subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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Considérant en droit : | |
1. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir établi les faits de manière arbitraire en retenant, sur la base des avis émis par les experts judiciaires, qu'il était totalement inaccessible à un traitement.
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1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références citées). Le Tribunal fédéral n'entre ainsi pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368).
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1.2. La cour cantonale a exposé que, selon l'expert C.________, il n'existait à l'heure actuelle aucun traitement de nature à modifier le dysfonctionnement émotionnel constituant le coeur des troubles dont souffrait le recourant. La situation était déjà la même 15 ans auparavant, au moment de la première expertise réalisée. Les méthodes en usage dans les institutions risquaient d'aggraver l'évolution des troubles en question. Même en adoptant la position théorique la plus optimiste, considérant que les altérations psychopathes sont la conséquence plutôt que la cause du trouble, celles-ci signalaient un ancrage biologique fondant l'observation de la résistance du recourant à toute intervention psychothérapeutique, sociothérapeutique ou éducative. L'évolution de l'intéressé montrait comment les tentatives de traitement n'avaient eu aucun effet positif, mais avaient au contraire produit un effet négatif. L'expert C.________ avait conclu que, dans le cas du recourant, il était permis d'émettre un pronostic défavorable à vie. Ce pronostic découlait de facteurs structuraux inhérents à sa personnalité et qui ne pouvaient, d'après l'expérience des professionnels de la santé mentale, être modifiés par une quelconque intervention. Selon l'expert D.________, pour l'accessibilité à un traitement, il était indispensable qu'il existe une prise de conscience tout au moins rudimentaire du trouble et une souffrance causée par celui-ci. Or, le recourant ne reconnaissait pas du tout son trouble et attribuait sa souffrance complètement à son entourage. Si, par le passé, l'intéressé avait accepté de rencontrer un psychothérapeute, il s'agissait d'une posture stratégique. La thérapie, menée durant plusieurs années par divers thérapeutes, n'avait eu aucun succès concernant la reconnaissance et la prise de conscience du trouble, non plus que relativement à une confrontation approfondie nécessaire avec les infractions graves du passé. En outre, aucun travail délictuel approfondi n'avait été possible pendant 15 ans et il n'existait aucun point de départ permettant d'attendre des changements à l'avenir. Les événements ayant impliqué B.________ n'avaient pas amené un quelconque changement d'attitude chez le recourant. Pour l'expert D.________, il n'existait pas d'indications qu'une mesure ambulatoire ou institutionnelle pourrait diminuer de manière significative le risque de récidive extrêmement élevé présenté par l'intéressé s'agissant d'infractions comme l'homicide ou le viol. Le recourant n'était actuellement pas accessible à un traitement d'un point de vue forensique. Il n'était pas concevable que le risque de récidive puisse être diminué considérablement par une thérapie. Le recourant entrait dans le très petit cercle des personnes présentant un risque extrêmement élevé de commettre les infractions violentes les plus graves, pour lesquelles aucune possibilité de traitement n'était envisageable. La cour cantonale a ajouté que, lors de leur confrontation du 29 juin 2015 et durant les débats de première instance, les experts avaient confirmé qu'il n'existait pas de traitement envisageable.
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Pour l'autorité précédente, cette appréciation ne pouvait être modifiée par le suivi en détention, auprès du Professeur E.________, dont bénéficiait le recourant. A l'audience du 9 mars 2016, l'expert C.________ avait indiqué que l'établissement d'un véritable dialogue thérapeutique n'avait jamais été possible, y compris avec le Dr F.________ - lequel suivait régulièrement le recourant à l'époque où ce dernier avait tué B.________ -, que les certificats établis par le Professeur E.________ ne signalaient pas davantage un réel engagement de l'intéressé dans la thérapie et que les écrits de ces spécialistes illustraient l'habileté du recourant à manipuler autrui. L'expert D.________ avait quant à lui indiqué, s'agissant des thérapies tentées ou entreprises par le recourant, qu'une participation régulière à une thérapie était possible mais que celui-ci ne s'impliquait pas et manipulait les thérapeutes. Une thérapie pouvait ainsi fournir un appui au recourant mais n'était pas à même de fonder un pronostic légal. Concernant les indications du Professeur E.________, selon lesquelles le recourant se montrait un peu plus ouvert qu'auparavant dans le contact thérapeutique, celles-ci entraient en contradiction apparente avec la situation constatée, ce qui était dû à l'attitude manipulatrice de l'intéressé, lequel savait bien que la question de l'accessibilité au traitement était très importante. La cour cantonale a encore rappelé qu'avant chaque homicide, tant en 1998 qu'en 2013, le recourant était suivi par des spécialistes, ce qui ne l'avait pas empêché de passer à l'acte.
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1.3. Le recourant fait grief à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte de divers passages tirés des rapports d'expertise ou des documents émanant de ses thérapeutes. Outre que les différentes pièces évoquées par le recourant n'ont nullement été ignorées par l'autorité précédente, l'intéressé ne démontre pas en quoi celle-ci aurait, de manière insoutenable, conclu - en se ralliant sur ce point à l'avis unanime des deux experts judiciaires - à une absence d'accessibilité au traitement. Le recourant se borne en effet à faire état d'extraits dans lesquels ses thérapeutes mentionnent des évolutions dans son attitude ou sa participation aux entretiens. Aucun passage ne concerne les perspectives de voir un jour une thérapie porter ses fruits et en particulier influer sur le risque de récidive de l'intéressé. Les constatations de l'autorité précédente ne s'avèrent donc, à cet égard, aucunement arbitraires.
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Le recourant relève par ailleurs des contradictions entre les deux expertises judiciaires, sans indiquer ce qu'il conviendrait d'en déduire. Il regrette, sans formuler sur ce point un grief répondant aux exigences de motivation découlant des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF, que la cour cantonale n'eût pas recueilli "des preuves complémentaires", sans que l'on perçoive quelle mesure d'instruction aurait été nécessaire s'agissant d'un aspect sur lequel les deux experts judiciaires étaient unanimes et qui n'était pas véritablement contredit - en dépit de la lecture appellatoire et extensive des pièces concernées que tente de faire le recourant - par les thérapeutes E.________ et F.________.
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Enfin, le recourant suggère - sans que son argumentation réponde aux réquisits de l'art. 42 al. 2 LTF en matière de motivation - que la cour cantonale aurait violé le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi (cf. à cet égard les arrêts publiés aux ATF 143 IV 214 consid. 5.3.3 p. 222 s.; 135 III 334 consid. 2.1 p. 335 s.) en retenant qu'il était totalement inaccessible à un traitement. Or, dans l'arrêt 6B_35/2017, le Tribunal fédéral a uniquement examiné le caractère "durablement non amendable" du recourant au sens de l'art. 64 al. 1bis let. c CP et a considéré que l'intéressé ne pouvait, au regard des constatations de l'expert D.________, être considéré a priori comme non amendable sa vie durant (cf. consid. 8.5). On ne voit pas en quoi la cour cantonale se serait écartée de cette appréciation en retenant que le recourant était actuellement totalement inaccessible à un traitement.
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Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. Le recourant soutient que la cour cantonale aurait violé l'art. 64 CP en ordonnant son internement.
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2.1. Selon l'art. 64 al. 1 CP, le juge ordonne l'internement si l'auteur a commis un assassinat, un meurtre, une lésion corporelle grave, un viol, un brigandage, une prise d'otage, un incendie, une mise en danger de la vie d'autrui, ou une autre infraction passible d'une peine privative de liberté maximale de cinq ans au moins, par laquelle il a porté ou voulu porter gravement atteinte à l'intégrité physique, psychique ou sexuelle d'autrui et si, en raison des caractéristiques de la personnalité de l'auteur, des circonstances dans lesquelles il a commis l'infraction et de son vécu, il est sérieusement à craindre qu'il ne commette d'autres infractions du même genre (let. a), ou si, en raison d'un grave trouble mental chronique ou récurrent en relation avec l'infraction, il est sérieusement à craindre que l'auteur ne commette d'autres infractions du même genre et que la mesure prévue à l'art. 59 CP semble vouée à l'échec (let. b).
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Par rapport aux autres mesures, l'internement n'intervient qu'en cas de danger "qualifié". Il suppose un risque de récidive hautement vraisemblable. Pratiquement, le juge devra admettre un tel risque s'il ne peut guère s'imaginer que l'auteur ne commette pas de nouvelles infractions du même genre. Une supposition, une vague probabilité, une possibilité de récidive ou un danger latent ne suffisent pas (ATF 137 IV 59 consid. 6.3 p. 70). En présence d'un trouble psychiatrique, l'internement constitue, conformément au principe de proportionnalité consacré par l'art. 56 al. 2 CP, une mesure subsidiaire aux mesures institutionnelles prévues par l'art. 59 CP. En tant qu'ultima ratio, en raison de la gravité de l'atteinte à la liberté personnelle qu'il représente, l'internement n'entre pas en considération tant que la mesure institutionnelle apparaît utile. Ce n'est que lorsque cette dernière semble dénuée de chances de succès que l'internement peut être ordonné, s'il est nécessaire. Cette démarche doit permettre d'éviter qu'un auteur soit déclaré a priori "incurable" et interné dans un établissement d'exécution des peines (ATF 140 IV 1 consid. 3.2.4 p. 9; 134 IV 315 consid. 3.2 p. 32).
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Aux termes de l'art. 59 al. 1 CP, lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, le juge peut ordonner un traitement institutionnel lorsque celui-ci a commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et qu'il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce trouble (let. b). Selon la jurisprudence, la condition posée par l'art. 59 al. 1 let. b CP - qu'il soit à prévoir que la mesure détournera l'intéressé de nouvelles infractions en relation avec son trouble - est réalisée lorsque, au moment de la décision, il est suffisamment vraisemblable qu'un traitement institutionnel entraînera dans les cinq ans de sa durée normale une réduction nette du risque de récidive (ATF 140 IV 1 consid. 3.2.4 p. 9; 134 IV 315 consid. 3.4.1 p. 321 s.). La possibilité vague d'une diminution du risque ou l'espoir d'une diminution seulement minimale de ce risque ne sont en revanche pas suffisants (ATF 141 IV 1 consid. 3.2.4 p. 8 s.; 134 IV 315 consid. 3.4.1 p. 321). L'exigence d'un tel pronostic ne signifie pas qu'un condamné souffrant de trouble mental ne pourra pas recevoir l'assistance nécessaire, mais seulement que la mesure préconisée par l'art. 59 CP n'est pas adéquate, tout au moins dans l'état des choses, au moment où la décision est rendue. La personne soumise à l'internement peut du reste bénéficier d'un traitement psychiatrique (art. 64 al. 4 CP).
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2.2. La cour cantonale a considéré que les deux experts judiciaires s'étaient rejoints pour affirmer que le recourant était inaccessible à un traitement. Si l'expert C.________ avait émis un tel pronostic à vie, l'expert D.________ avait limité le sien à 20 ans, en raison de l'impossibilité de prédire les progrès de la science, tout en confirmant qu'il n'existait aucun processus thérapeutique connu dans le monde permettant un remodelage complet de la structure de la personnalité de l'intéressé, nécessaire à l'obtention d'une amélioration significative du pronostic concernant le risque de récidive. Pour l'autorité précédente, un traitement thérapeutique institutionnel n'était ainsi pas susceptible d'entraîner un quelconque changement dans les cinq prochaines années, non plus qu'une nette réduction du risque de récidive, mais risquait au contraire d'aggraver la situation. Le recourant était ainsi, sinon à vie du moins à terme, inaccessible à tout traitement.
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2.3. L'argumentation du recourant est irrecevable dans la mesure où elle consiste à affirmer qu'il serait accessible à un traitement, l'intéressé s'écartant de la sorte de l'état de fait de la cour cantonale, par lequel le Tribunal fédéral est lié (cf. art. 105 al. 1 LTF) et dont il n'a pas démontré l'arbitraire (cf. consid. 1.3 supra). Au demeurant, outre que les extraits de rapports médicaux ou d'expertise dont se prévaut le recourant concernent son attitude et sa participation aux thérapies mais n'évoquent nullement les perspectives de succès des traitements ni le pronostic relatif au risque de récidive, l'intéressé ne prétend pas qu'un traitement pourrait, dans les cinq ans de la durée normale d'une mesure à titre de l'art. 59 CP, entraîner une réduction nette du risque de récidive (cf. consid. 2.1 supra).
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2.4. Se référant à quelques auteurs (MARIANNE HEER, in Basler Kommentar, Strafrecht I, 4e éd. 2019, n° 86 ss ad art. 64 CP; GÜNTER STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil II, Strafen und Massnahmen, 2e éd. 2006, § 12 no 13; SCHWARZENEGGER/HUG/ JOSITSCH, Strafrecht II, 8e éd. 2007, p. 190), le recourant soutient qu'il ne peut être renoncé au prononcé d'une mesure thérapeutique institutionnelle que si celle-ci est vouée à l'échec, ce qui ne pourrait être admis qu'après qu'une tentative sérieuse de traitement eut été entreprise et eut échoué. Selon l'intéressé, aucune tentative sérieuse de traitement n'aurait à ce jour été entreprise.
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La condition à laquelle se réfère le recourant ne ressort pas du texte légal. Elle ne peut davantage être déduite de la systématique du CP, puisque les art. 59 et 64 al. 1 let. b CP décrivent des situations différentes - l'auteur pouvant, dans le premier cas, de manière prévisible être détourné de nouvelles infractions en relation avec son trouble alors que, dans le second cas, le traitement paraît voué à l'échec -, le juge devant directement prononcer la mesure adéquate - en tenant compte du principe de subsidiarité découlant de l'art. 56a al. 1 CP - et non successivement des mesures dont l'échec est prévisible. Le prononcé d'une mesure thérapeutique institutionnelle dont l'échec est prévisible entrerait d'ailleurs en contradiction avec les art. 56 al. 6 et 62c al. 1 let. a CP, qui commandent de renoncer à une mesure dont les conditions ne sont pas ou plus remplies. L'adjonction de la condition en question avait certes été proposée lors de la révision de la partie générale du CP, mais avait finalement été écartée (cf. Message concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal] et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, FF 1999 1901; MARIANNE HEER, op. cit., n° 106 ad art. 64 CP). Lors des débats parlementaires, une proposition minoritaire avait derechef été faite en ce sens - soit en exigeant qu'un internement soit uniquement prononcé lorsqu'une mesure thérapeutique institutionnelle est restée sans effet - mais n'avait pas été suivie par le législateur (cf. proposition de la minorité Menétrey-Savary, Garbani, Vischer, BO 2006 CN 219 ss).
| 34 |
Il découle de ce qui précède que le législateur n'a aucunement voulu conditionner le prononcé d'un internement à l'échec préalable d'un traitement institutionnel. Hormis GÜNTER STRATENWERTH (cf. op. cit., § 8 no 8 et § 12 no 13), les auteurs auxquels se réfère le recourant n'évoquent d'ailleurs pas cet élément comme une exigence absolue, mais y voient en substance une garantie de sécurité pour la formulation du pronostic (cf. MARIANNE HEER, op. cit., n° 106 ss ad art. 64 CP; JOSITSCH/EGE/SCHWARZENEGGER, Strafrecht II, Strafen und Massnahmen, 9e éd. 2018, p. 215). Or, en l'occurrence, deux experts judiciaires se sont accordés pour conclure à l'inaccessibilité du recourant à tout traitement ainsi qu'à l'inexistence, à l'heure actuelle, d'un traitement adéquat compte tenu de la pathologie présentée par ce dernier. Le pronostic relatif à l'évolution du recourant n'a donc pas été formulé à la légère ni assorti de réserves notables de la part des experts. Au regard des conclusions des experts judiciaires, on ne voit au demeurant pas quel traitement - au sens de l'art. 59 CP - pourrait être entrepris.
| 35 |
2.5. Le recourant soutient encore que l'internement ordonné porterait atteinte au principe de la proportionnalité découlant des art. 5 al. 2 et 36 Cst. ainsi que 56 al. 2 CP. Selon lui, un internement ne pourrait être ordonné que si sa dangerosité ne pouvait être contenue par un autre moyen, ce qui ne serait pas le cas au regard de la peine privative de liberté à vie lui ayant été infligée.
| 36 |
L'argumentation du recourant tombe à faux. Celui-ci admet que, dans l'arrêt publié aux ATF 142 IV 56, le Tribunal fédéral a eu l'occasion d'examiner l'articulation de la peine privative de liberté à vie et de l'internement, en concluant que le prononcé d'une telle peine n'excluait aucunement celui d'une telle mesure. Le recourant ne critique pas cette jurisprudence et ne soutient pas qu'il conviendrait de la modifier. Il prétend cependant que le Tribunal fédéral n'y aurait pas spécifiquement examiné la question sous l'angle de la proportionnalité, ni n'aurait expliqué "pour quelles raisons le respect de la sécurité publique serait globalement mieux assuré par une mesure d'internement par rapport à une peine privative de liberté à vie". Il apparaît pourtant que, dans l'arrêt précité, le Tribunal fédéral a longuement cherché si le prononcé d'un internement en sus d'une peine privative de liberté à vie pouvait se révéler superflu ou au contraire se justifier pour des motifs de sécurité publique. A cet égard, il a constaté que les exigences concernant la libération conditionnelle d'une peine privative de liberté prononcée simultanément à un internement étaient plus élevées, sur un plan formel et matériel, que celles présidant à une libération conditionnelle de la seule peine privative de liberté (cf. ATF 142 IV 56 consid. 2.5 p. 62). En particulier, la libération conditionnelle de la peine privative de liberté lorsqu'un internement a été simultanément prononcé ne peut être accordée que s'il existe une forte probabilité que l'auteur se conduira correctement en liberté (cf. art. 64a al. 1 CP; ATF 142 IV 56 consid. 2.4 p. 62 et les références citées), et seulement après que l'autorité compétente eut pris connaissance de diverses informations, notamment d'une expertise indépendante et de l'avis d'une commission composée de représentants des autorités de poursuite pénale, des autorités d'exécution et des milieux de la psychiatrie (cf. art. 64b al. 2 cum 62d al. 2 CP; ATF 142 IV 56 consid. 2.4 p. 62). En outre, lorsqu'un internement est prononcé simultanément à une peine privative de liberté, la réintégration de la personne libérée conditionnellement peut précéder la commission de nouvelles infractions, ce qui n'est pas le cas lorsque seule une peine privative de liberté a été prononcée (cf. art. 64a al. 3 et 89 al. 1 CP; ATF 142 IV 56 consid. 2.4 p. 61 s.). Le Tribunal fédéral a donc estimé que des motifs de sécurité publique commandaient de prononcer simultanément un internement et une peine privative de liberté à vie lorsque les conditions de l'art. 64 al. 1 CP sont remplies, puisque, dans ce cas, le risque de pronostics erronés lors de l'octroi de la libération conditionnelle de la peine ainsi que celui de commission de nouvelles infractions après la libération conditionnelle sont réduits (cf. ATF 142 IV 56 consid. 2.6 p. 63). Partant, contrairement à ce que suggère le recourant, le prononcé d'un internement ne saurait, en ce qui le concerne, être regardé comme superflu, les impératifs de sécurité publique n'étant pas pleinement satisfaits par la seule exécution de la peine privative de liberté à vie.
| 37 |
2.6. Compte tenu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral ou constitutionnel en ordonnant une mesure d'internement à l'endroit du recourant. Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
| 38 |
3. Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme les conclusions du recourant étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant devra supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 5 février 2019
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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Le Greffier : Graa
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