BGer 4A_537/2018 | |||
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BGer 4A_537/2018 vom 22.03.2019 |
4A_537/2018 |
Arrêt du 22 mars 2019 |
Ire Cour de droit civil | |
Composition
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Mmes les juges Kiss, présidente, Klett et Hohl.
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Greffier : M. Thélin.
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Participants à la procédure | |
X.________,
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représenté par Me Jean-Pierre Huguenin-Dezot,
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défendeur et recourant,
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contre
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D.________,
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représenté par Me Jacques Emery,
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demandeur et intimé.
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Objet
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répétition de l'indu; prescription
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recours contre l'arrêt rendu le 16 août 2018 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel
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(CACIV.2018.42/lbb).
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Faits : | |
A. A.________ est décédé le 5 avril 2003, laissant pour héritiers son fils B.________ et sa fille C.________. Ceux-ci ont conclu une convention de partage le 15 juin 2004. Le notaire X.________ s'est chargé de leur transmettre, après division par moitié, les montants encore attendus en paiement de valeurs vendues par le défunt.
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Par erreur, le notaire a versé à C.________ 138'501 fr.55 en sus de ce qui lui revenait. Ce versement est intervenu le 26 janvier 2008. Le notaire a découvert son erreur le 29 octobre 2008. Sous divers prétextes, C.________ s'est refusée à lui restituer le montant reçu en excédent.
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B. Le 20 juillet 2011, Me X.________ a ouvert action contre C.________ devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. La défenderesse devait être condamnée à payer avec intérêts divers montants, soit notamment 138'501 fr.55 pour restitution de la somme versée par erreur.
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Le tribunal s'est prononcé le 20 septembre 2013. Accueillant partiellement l'action, il a condamné la défenderesse à payer 138'501 fr.60 pour restitution d'une somme versée par erreur, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 1 er décembre 2008.
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La Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a statué le 23 mai 2014 sur l'appel de la défenderesse; elle a confirmé le jugement.
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Selon la défenderesse, le droit du demandeur de répéter l'indu sur la base de l'art. 62 CO était atteint par la prescription et cette créance n'était donc pas exigible. La Cour de justice ne s'est pas explicitement prononcée sur ce moyen. Elle a jugé que le refus de restituer l'indu constituait l'infraction pénale réprimée par l'art. 141bis CP, soit l'utilisation sans droit de valeurs patrimoniales; que ce refus causait au demandeur un dommage correspondant au montant vainement réclamé par lui, et que la défenderesse lui devait réparation de ce dommage selon l'art. 41 al. 1 CO. L'action pénale se prescrivait par sept ans; en vertu de l'art. 60 al. 2 CO, ce délai était applicable aussi à l'action en dommages-intérêts. La Cour accueillait ainsi l'action en paiement et elle rejetait l'exception que la défenderesse prétendait tirer de la prescription.
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C. La défenderesse a usé du recours en matière civile. Elle contestait que l'infraction prévue par l'art. 141bis CP fût réalisée. Elle se plaignait d'une application incorrecte de cette règle de droit pénal et des art. 41 al. 1 et 60 al. 2 CO; elle persistait à se prévaloir d'un délai de prescription d'une année à compter du 29 octobre 2008, jour de la découverte de l'erreur par son adverse partie.
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Une demande d'effet suspensif était jointe au recours; la Présidente de la Ire Cour de droit civil l'a rejetée par ordonnance du 29 septembre 2014.
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Le 7 suivant et par l'intermédiaire de son conseil, le demandeur a sommé la défenderesse de lui verser 218'976 fr.45, soit le capital litigieux au montant de 138'501 fr.55, augmenté des intérêts et des frais de justice. Le demandeur se référait à l'ordonnance de refus d'effet suspensif et il menaçait d'entreprendre une procédure de recouvrement.
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La défenderesse s'est exécutée le 17 octobre 2014.
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Le Tribunal fédéral a statué sur le recours en matière civile le 4 février 2015. Il a jugé que dans les circonstances de l'espèce, le refus de restituer l'indu ne réalisait pas l'infraction réprimée par l'art. 141bis CP. L'arrêt de la Cour de justice était à cet égard erroné. Le Tribunal fédéral a réformé cet arrêt et rejeté l'action en paiement (arrêt 4A_424/2014 du 4 février 2015; ATF 141 IV 71).
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D. A réception de cet arrêt du Tribunal fédéral, C.________ a exigé de Me X.________ la restitution du montant versé par elle le 17 octobre 2014. Elle lui a fait notifier un commandement de payer au montant de 225'476 fr.45 avec intérêts au taux de 5% par an dès le 3 mars 2015. Me X.________ a formé opposition. C.________ a requis sans succès la mainlevée définitive de cette opposition. Saisie en dernière instance, la IIe Cour civile du Tribunal fédéral a confirmé que l'arrêt du 4 février 2015 ne condamne pas Me X.________ à restituer le montant en cause (arrêt 5A_824/2015 du 18 mars 2016).
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E. Le 31 mars 2017, C.________ a ouvert action contre Me X.________ devant le Tribunal civil de l'arrondissement du Littoral neuchâtelois et du Val-de-Travers. Le défendeur devait être condamné aux prestations déjà réclamées par voie de commandement de payer.
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C.________ est décédée le 20 mai 2017; dans le procès, son neveu et unique héritier D.________ lui a succédé en qualité de demandeur.
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Le défendeur a conclu au rejet de l'action.
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Le demandeur a amplifié ses conclusions en ce sens qu'il requérait la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer.
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Le tribunal s'est prononcé le 12 mars 2018; il a accueilli l'action et condamné le défendeur selon les conclusions amplifiées.
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La Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a statué le 16 août 2018 sur l'appel du défendeur; elle a rejeté cet appel et confirmé le jugement.
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F. Agissant par la voie du recours en matière civile, le défendeur requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour d'appel.
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Le demandeur a pris position sur une demande d'effet suspensif jointe au recours; il n'a pas été invité à répondre au recours.
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Par ordonnance du 22 octobre 2018, la Présidente de la Ire Cour de droit civil a rejeté la demande d'effet suspensif.
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Considérant en droit : | |
1. Selon la jurisprudence relative à l'art. 42 al. 1 LTF, le mémoire de recours adressé au Tribunal fédéral doit comporter des conclusions sur le sort des prétentions en cause, à allouer ou à rejeter par le tribunal, et la partie recourante n'est en principe pas recevable à réclamer seulement l'annulation de la décision attaquée. Ce dernier procédé n'est admis que dans l'hypothèse où le Tribunal fédéral, en cas de succès du recours, ne pourrait de toute manière pas rendre un jugement final, et devrait au contraire renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour complètement de l'état de fait et nouvelle décision selon l'art. 107 al. 2 LTF (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid. 3).
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En l'occurrence, à la lecture de l'argumentation développée, il apparaît sans équivoque que le recours tend au rejet intégral de l'action; le mémoire doit être pour ce motif jugé conforme à l'art. 42 al. 1 LTF.
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Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont pour le surplus satisfaites, notamment à raison de la valeur litigieuse.
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2. En substance, selon son argumentation, Me X.________ est devenu créancier de C.________ dès le versement qu'il a exécuté le 26 janvier 2008. Il s'agissait d'une créance en répétition de l'indu qui s'est prescrite par l'écoulement d'une année dès le 29 octobre 2008. Par son propre versement du 17 octobre 2014, C.________ a exécuté son obligation, quoiqu'elle fût prescrite. Actuellement, l'art. 63 al. 2 CO interdit à son héritier, soit au demandeur, d'exiger la restitution de ce versement-ci.
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3. L'arrêt de la Cour de justice genevoise du 23 mai 2014, plus tard réformé par le Tribunal fédéral, reconnaissait à Me X.________ deux actions en concours contre C.________: une action en répétition de l'indu (art. 63 CO), qui paraissait et qui était en réalité prescrite; une action en réparation d'un dommage (art. 41 CO), qui n'était pas prescrite et qui motivait la condamnation de C.________. Sur recours, le Tribunal fédéral a ensuite rejeté cette action délictuelle en réparation d'un dommage, constaté que l'action en répétition de l'indu était prescrite, et réformé l'arrêt genevois (arrêt 4A_424/2014 du 4 février 2015).
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Les actions en concours permettent d'exiger une seule fois la même prestation; elles sont en principe indépendantes et, en particulier, chacune d'elles se prescrit selon ses règles propres (cf. Ingeborg Schwenzer, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 7e éd., n° 5.05 p. 38).
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4. L'art. 63 al. 2 CO vise ce qui a été payé « pour » acquitter une dette prescrite. Il faut donc élucider pourquoi C.________ a payé le 17 octobre 2014, c'est-à-dire quelle était la cause de son paiement au regard de l'art. 63 al. 2 CO. Parce que son paiement faisait suite à l'arrêt de la Cour de justice genevoise, à l'échec d'une demande d'effet suspensif et à une menace de poursuite de Me X.________, la cause juridique du paiement doit être vue dans la dette de dommages-intérêts constatée par l'arrêt, correspondant à l'action délictuelle fondée sur l'art. 41 CO. C.________ n'a en revanche pas payé la dette de restitution d'un enrichissement illégitime, dette qui était depuis longtemps inexigible parce que prescrite, et de plus contestée et déniée par la débitrice depuis le début de l'affaire. Il faut ici tenir compte de l'indépendance des deux actions en concours, et s'abstenir de les confondre dans l'application de l'art. 63 al. 2 CO.
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Après le paiement et dans son arrêt du 4 février 2015, le Tribunal fédéral a constaté que Me X.________ n'avait pas d'action délictuelle à exercer en concours avec son action en répétition de l'indu, autrement dit que l'obligation de réparer un dommage constatée par la Cour de justice n'existait pas (consid. 8). L'arrêt de cette autorité a été en conséquence réformé. Il s'ensuit que le 17 octobre 2014, C.________ a payé une dette qui n'existait pas, qu'elle a payé « sans cause valable » aux termes de l'art. 62 al. 2 CO, et qu'elle est elle-même devenue créancière en répétition de l'indu. Contrairement à l'opinion du défendeur, elle n'a pas payé « pour acquitter une dette prescrite » aux termes de l'art. 63 al. 2 CO. En raison de la contrainte qui résultait de l'arrêt de la Cour de justice, alors exécutoire, elle n'a pas non plus payé « volontairement » aux termes de l'art. 63 al. 1 CO (cf. ATF 123 III 101 consid. 3b p. 108). Ces deux dispositions ne lui sont donc pas opposables.
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5. Il existe ainsi entre les parties, actuellement, deux créances réciproques en répétition de l'indu: celle du défendeur Me X.________, née avec son versement du 26 janvier 2008, et celle dont le demandeur a hérité, née avec le versement de C.________ le 17 octobre 2014. Celle du défendeur est atteinte par la prescription depuis le 29 octobre 2009. Elle était donc déjà prescrite lorsque l'autre créance a pris naissance. En conséquence, l'art. 120 al. 3 CO interdit au défendeur de l'opposer en compensation; ce plaideur doit au contraire acquitter sa propre obligation, conformément à l'arrêt du Tribunal cantonal neuchâtelois qui est présentement attaqué devant le Tribunal fédéral.
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6. Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de partie qui succombe, son auteur doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral; il doit aussi acquitter les dépens auxquels l'autre partie peut prétendre pour avoir pris position sur la demande d'effet suspensif.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté.
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2. Le défendeur acquittera un émolument judiciaire de 6'000 francs.
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3. Le défendeur versera une indemnité de 1'000 fr. au demandeur, à titre de dépens.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
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Lausanne, le 22 mars 2019
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La présidente : Kiss
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Le greffier : Thélin
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