BGer 1B_174/2019 | |||
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BGer 1B_174/2019 vom 03.05.2019 |
1B_174/2019 |
Arrêt du 3 mai 2019 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
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Karlen et Muschietti.
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Greffière : Mme Arn.
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Participants à la procédure | |
A.________, représenté par Me Christophe Quennoz, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public du canton du Valais, Office régional du Bas-Valais, place Ste-Marie 6,
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1890 St-Maurice.
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Objet
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détention provisoire,
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recours contre l'ordonnance du Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale, du 8 mars 2019
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(P3 19 20).
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Faits : | |
A. Le 4 août 2016, à 23h50, A.________, ressortissant turc d'origine kurde, a téléphoné à la Centrale d'engagement de la police cantonale (CEN) pour annoncer avoir été victime d'un vol par introduction clandestine dans son studio à Saxon. Entre cet appel et l'arrivée de la patrouille, le prénommé a contacté la police à dix reprises; celle-ci a quitté son appartement à 00h51. Le 5 août 2016, à 1h10, soit quelques minutes après cet événement, un appel téléphonique composé depuis le portable de A.________ informait la police d'un incendie, dans les termes suivants: "toi pas prendre à la main", "maintenant regarde à la rue du simplon", "ma maison tous a du feu", "viens regarder tous a du feu", "viens regarder tous a du feu". L'intervention des pompiers a été nécessaire pour circonscrire l'incendie survenu dans le studio de A.________. Celui-ci a contesté être l'auteur de l'appel en question, quant bien même il a reconnu avoir contacté la CEN à onze reprises, quelques dizaines de minutes plus tôt. Une expertise en comparaison de voix a été ordonnée.
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Par décision du 22 août 2016, Me Christophe Quennoz a été désigné défenseur d'office de A.________ dès lors que ce dernier était mis en prévention pour des faits susceptibles d'être constitutifs d'incendie intentionnel (art. 132 al. 1. let. a CPP).
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B. Il ressort du rapport d'expertise en comparaison de voix, remis le 17 janvier 2019, au Procureur de l'office régional du ministère public du Bas-Valais qu'il était hautement vraisemblable que A.________ soit l'auteur de l'appel téléphonique litigieux. Ce dernier a été arrêté le jour même; lors de son audition d'arrestation, il n'a pas contesté être l'auteur de l'appel téléphonique litigieux, mais a soutenu qu'il se trouvait alors à l'extérieur du studio et a réfuté avoir bouté le feu à son logement. A.________ a été placé en détention provisoire, par ordonnance du 18 janvier 2019 du Tribunal des mesures de contrainte (Tmc), en raison notamment des risques de fuite et de réitération.
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Par courrier du 25 février 2019, le Procureur a adressé aux parties un avis de prochaine clôture de l'instruction (art. 318 CPP).
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C. Par ordonnance du 8 mars 2019, le Juge unique de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du Valais a rejeté le recours intenté par A.________ contre cette décision (chiffre I du dispositif), a mis les frais de la procédure de recours, par 500 fr., à la charge du prénommé (chiffre II du dispositif) et enjoint l'Etat du Valais à verser une indemnité de 900 fr. à Me Christophe Quennoz au titre de la défense d'office, précisant que A.________ était tenu au remboursement de ce montant dès que sa situation financière le permettrait (chiffre III du dispositif). En substance, le Juge unique a retenu l'existence de charges suffisantes et d'un risque de fuite qu'aucune mesure de substitution ne permettait de pallier.
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D. A.________ forme un recours en matière pénale contre cette ordonnance, concluant à l'annulation des chiffres I et II de son dispositif, ainsi qu'à sa libération immédiate et à ce qu'il soit constaté que la détention subie jusqu'à ce jour était illicite; il conclut, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
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Invitée à se déterminer, la cour cantonale s'est référée aux considérants de sa décision. Quant au Ministère public, il a renoncé à se déterminer.
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Considérant en droit : | |
1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre les décisions relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. Formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et qui touche le recourant - prévenu actuellement détenu - dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF), le recours en matière pénale est recevable.
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2. Conformément à l'art. 42 al. 1 LTF, le mémoire de recours doit être motivé et contenir des conclusions. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Selon la jurisprudence, pour répondre à cette exigence, la partie recourante est tenue de discuter au moins sommairement les considérants de la décision entreprise (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 88 ss et 115 consid. 2 p. 116 s.; 134 II 244 consid. 2.1 p. 245 s.).
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3. Le recourant ne remet pas en cause l'existence de charges suffisantes pesant à son encontre (art. 221 al. 1 CPP). Il reproche en revanche à l'autorité précédente d'avoir retenu l'existence d'un risque de fuite.
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3.1. Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP).
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Selon la jurisprudence, le risque de fuite au sens de l'art. 221 al. 1 let. a CPP doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 143 IV 160 consid. 4.3 p. 166 s.; 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70).
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3.2. En l'espèce, le Juge unique a considéré que les attaches du recourant en Suisse étaient ténues sur les plans personnel, professionnel et patrimonial. Il a notamment relevé que le prévenu était en Suisse depuis 2014, que seule sa mère vivait aussi en Suisse (à Bâle) et que, lors de sa première audition du 5 août 2016, il avait déclaré avoir de la famille en Suisse, mais qu'il ne lui parlait pas; le recourant n'avait par ailleurs exercé aucune activité régulière en Suisse, le seul revenu perçu (480 fr.) provenant de son activité auprès du centre de requérants d'asile, respectivement de l'aide sociale (150 fr.). Compte tenu de ces éléments et de la gravité de l'infraction qui lui était reprochée, il était à craindre, selon l'instance précédente, que le recourant quitte le territoire suisse s'il était remis en liberté ou qu'il disparaisse dans la clandestinité pour échapper aux autorités de poursuite pénale.
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3.3. Le recourant soutient tout d'abord que l'arrêt attaqué souffre d'un défaut de motivation, dans la mesure où il ne répondrait pas à certains de ses arguments relatifs au risque de fuite. En l'occurrence, l'instance précédente a examiné le risque de fuite présenté par le recourant. Le fait que l'instance cantonale n'ait pas suivi le raisonnement du recourant et qu'elle n'ait pas répondu en détail à tous ses arguments ne constitue pas une violation des exigences de motivation découlant de l'art. 29 al. 2 Cst., l'intéressé étant en mesure d'apprécier correctement la portée de la décision et de l'attaquer à bon escient. Cette critique peut dès lors être écartée.
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Ensuite, pour contester tout risque de fuite, le recourant se prévaut essentiellement du fait qu'il ne s'est pas enfui, ni n'a tenté de fuir, entre l'ouverture de la procédure pénale à son encontre en été 2016 et son placement en détention provisoire en janvier 2019. Cet élément n'est toutefois pas suffisant pour nier l'existence d'un risque de fuite, lequel apparaît probable en l'espèce eu égard au statut de l'intéressé, à ses liens ténus avec la Suisse et à la peine encourue en cas de condamnation. Si le recourant n'ignorait certes pas l'existence d'une procédure pénale à son encontre dès 2016, le Procureur a, en février 2019, notifié l'avis de prochaine clôture de l'instruction, de sorte que la peine encourue en cas de condamnation était alors devenue plus concrète: selon ce document, le Procureur prévoyait de déférer l'intéressé devant la juridiction de jugement pour incendie intentionnel, plus particulièrement incendie intentionnel aggravé, infraction passible d'une peine privative de liberté minimale de trois ans (art. 221 al. 2 CP). Celle-ci pourrait inciter le recourant à faire certains sacrifices pour y échapper. Dans ces circonstances, l'instance précédente n'a pas violé le droit fédéral en retenant l'existence d'un risque de fuite.
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La confirmation de ce risque permet de se dispenser - comme l'a fait l'instance précédente - d'examiner un éventuel risque de réitération.
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3.4. Enfin, il n'apparaît pas que la détention doive se prolonger au-delà de la durée admissible dans la mesure où le Ministère public a adressé aux parties un avis de prochaine clôture de l'instruction.
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4. Enfin, le recourant fait grief à l'instance précédente, dans une argumentation difficilement compréhensible, d'avoir rejeté sans aucune motivation sa requête d'assistance judiciaire, avant d'affirmer qu'elle avait "peut-être potentiellement constaté de manière erronée que l'assistance judiciaire était déjà octroyée au recourant".
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En l'occurrence, il ressort clairement de l'arrêt attaqué que le recourant bénéficie de l'assistance d'un défenseur d'office en la personne de Me Christophe Quennoz (cf. arrêt entrepris consid. en fait let. C et consid. en droit 8.1 et 8.2). S'agissant de la procédure cantonale de recours, l'instance précédente a considéré que l'indemnité du défenseur d'office, fixée à 900 fr., était supportée par l'Etat du Valais, sous réserve de remboursement par le prévenu dès que sa situation financière le permettrait (cf. art. 135 al. 4 CPP). Quant aux frais, ils étaient mis à la charge du recourant qui succombait (cf. art. 416, 421 al. 2 let. c et 428 al. 1 CPP), l'instance précédente précisant que le droit à l'assistance judiciaire gratuite consacré par l'art. 29 Cst. ne comportait aucune prétention à être libéré des frais.
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En l'occurrence, le recourant - qui n'invoque aucune disposition légale - ne discute pas, même de manière succincte, ce raisonnement traitant de la question des frais et dépens de la procédure cantonale de recours, se contentant pour l'essentiel d'affirmer qu'il n'avait jamais bénéficié de l'assistance judiciaire. Son grief ne répond ainsi manifestement pas aux exigences de motivation découlant de l'art. 42 al. 2 LTF et doit donc être déclaré irrecevable (cf. consid. 2 ci-dessus).
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5. Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Son recours était cependant d'emblée dénué de chances de succès et cette requête doit être rejetée. Le recourant supporte donc en principe les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF); compte tenu de sa situation financière, il se justifie cependant de statuer exceptionnellement sans frais. Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Il n'est pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens.
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4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public du canton du Valais, Office régional du Bas-Valais, et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale.
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Lausanne, le 3 mai 2019
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Chaix
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La Greffière : Arn
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