BGer 1C_654/2019 | |||
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BGer 1C_654/2019 vom 06.10.2020 |
1C_654/2019 |
Arrêt du 6 octobre 2020 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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M. et Mmes les Juges fédéraux Chaix, Président,
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Jametti et Pont Veuthey, Juge suppléante.
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Greffière : Mme Tornay Schaller.
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Participants à la procédure
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A.________, représenté par Mes Michel Oural
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et Hikmat Maleh, avocats,
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recourant,
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contre
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Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud, avenue du Grey 110, 1014 Lausanne.
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Objet
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Avertissement,
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
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de Vaud, Cour de droit administratif et public,
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du 12 novembre 2019 (CR.2019.0020).
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Faits : | |
A. A.________, né en 1966, de nationalité belge, est en possession d'un permis de conduire étranger pour les véhicules de catégories A, B, C et D délivré par les autorités belges. Durant l'année 2018, il a obtenu un permis de conduire suisse.
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Par décision du 27 avril 2017, une interdiction de conduire en Suisse a été prononcée à son encontre en raison d'un excès de vitesse commis le 10 février 2017. Cette sanction a été exécutée du 24 octobre 2017 au 26 novembre 2017.
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Le 9 septembre 2017, lors d'un contrôle de vitesse effectué à 16h07 sur l'autoroute A1 à Morat/Fribourg, en direction d'Avenches, dans le tunnel «Combette», le véhicule immatriculé VD xxx appartenant à A.________ circulait à une vitesse de 116 km/h sur un tronçon limité à 80 km/h. Les photographies n'ont pas permis d'identifier le conducteur. La Gendarmerie du canton de Fribourg a envoyé à A.________ une fiche "identification du conducteur responsable" à laquelle il n'a pas donné suite, ni aux différents courriers qui lui ont été adressés ultérieurement. Elle a aussi adressé une demande d'enquête à la Gendarmerie de Lausanne-Cité qui n'a pas non plus obtenu de réponse de A.________.
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Le 26 octobre 2017, lors d'un contrôle de vitesse effectué à 16h01 sur la route principale Lausanne-Genève à Bursinel, en direction de Rolle, le véhicule VD xxx circulait à une vitesse de 108 km/h sur un tronçon limité à 80 km/h. Les photographies n'ont pas permis d'identifier la personne qui conduisait le véhicule en question.
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B. Le 27 février 2018, la Gendarmerie du canton de Fribourg a dénoncé les faits survenus le 9 septembre 2017 auprès de la Préfecture du district du Lac du canton de Fribourg qui, par ordonnance pénale du 13 mars 2018, a condamné A.________ à une amende de 545 fr. pour violation simple des règles de la circulation routière. Le prénommé n'a pas formé d'opposition à l'ordonnance pénale qui est dès lors entrée en force. Il a aussi payé l'amende qui lui avait été infligée.
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Le 24 avril 2018, le recourant a été entendu, en présence de son mandataire professionnel, par la police cantonale vaudoise à Lausanne au sujet du contrôle de vitesse du 26 octobre 2017 à Bursinel. Renvoyant à des tampons de passages frontières dans son passeport, il a déclaré se trouver avec son épouse à l'étranger à la date de ce contrôle et prêter son véhicule régulièrement à plusieurs personnes.
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Le 30 avril 2018, le Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud (ci-après; le SAN) a adressé à A.________ un courrier au terme duquel il indiquait envisager de prononcer à son encontre une mesure d'interdiction de conduire en Suisse pour les infractions de dépassement de la vitesse autorisée commis le 9 septembre 2017 sur l'autoroute A1 Commune de Morat-Fribourg et de dépassement de la vitesse autorisée commis le 26 octobre 2017 à Bursinel.
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Le 22 mai 2018, A.________ a indiqué qu'il n'était pas présent en Suisse lors des deux excès de vitesse reprochés. Le 30 mai 2018, le SAN a informé A.________ qu'il suspendait la procédure ouverte à son encontre jusqu'à droit connu au pénal.
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Le 11 décembre 2018, le Ministère public de l'arrondissement de la Côte a ordonné le classement de la procédure portant sur les faits du 26 octobre 2017 en raison de la présence de l'intéressé à l'étranger au moment de la commission de l'infraction.
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Le 16 janvier 2019, le SAN a informé A.________ que la procédure administrative concernant l'excès de vitesse commis le 9 septembre 2017 était reprise et qu'il envisageait de prononcer un avertissement à son encontre en le priant de faire valoir ses observations. Il n'a pas déposé de détermination.
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Par décision du 4 mars 2019, le SAN a prononcé un avertissement à l'encontre de A.________ pour avoir commis, en date du 9 septembre 2017, un excès de vitesse de 30 km/h sur l'autoroute A1 à Morat, infraction qualifiée de légère. A.________ a formé une réclamation en indiquant avoir séjourné en Belgique du 7 au 9 septembre 2017 au soir. Par décision du 11 avril 2019, le SAN a rejeté la réclamation et confirmé la décision du 4 mars 2019.
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C. Par arrêt du 12 novembre 2019, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: le Tribunal cantonal) a confirmé cette décision. En substance, elle a retenu que A.________ qui avait déjà été sanctionné une première fois le 27 avril 2017, devait prévoir qu'une procédure administrative allait être ouverte à son encontre voire même qu'il risquait un retrait de permis, de sorte qu'il lui incombait de produire les moyens de preuve en sa possession lors de la procédure pénale concernant la nouvelle infraction du 9 septembre 2017 et qu'il ne pouvait pas attendre la procédure administrative pour révéler sa présence en Belgique au moment des faits reprochés. Elle a souligné que les règles de la bonne foi imposaient aussi que la personne qui compte ne pas accepter un avertissement n'attende pas la procédure administrative pour présenter ses éventuels moyens de défense; dans ces circonstances, l'autorité n'avait aucune raison de se distancer des faits retenus par l'autorité pénale.
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D. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 12 novembre 2019, de dire et constater qu'aucun avertissement n'est prononcé à son encontre. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants, le tout avec suite de frais et dépens.
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Invités à se déterminer, le Tribunal cantonal, le SAN et l'Office fédéral des routes concluent au rejet du recours et se réfèrent aux considérants de l'arrêt attaqué.
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Par ordonnance du 30 décembre 2019, le Président de la Ire Cour de droit public a rejeté dans la mesure où elle n'était pas sans objet la requête d'effet suspensif présentée par le recourant.
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Considérant en droit : | |
1. La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss LTF, est ouverte contre une décision de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) au sujet d'une mesure administrative relative au permis de conduire (art. 82 let. a LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par le destinataire de l'arrêt attaqué, qui a un intérêt digne de protection à l'annulation de celui-ci (art. 89 al. 1 LTF), le présent recours est en principe recevable.
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2. Le recourant se plaint d'une constatation manifestement inexacte des faits (art. 97 al. 1 LTF) et reproche à l'autorité précédente de ne pas avoir pris en considération le fait qu'il se trouvait en Belgique au moment de l'infraction du 9 septembre 2017. Ce faisant, il reproche au Tribunal cantonal de ne pas s'être écarté du jugement pénal vu les preuves produites dans la procédure administrative. Il fait aussi valoir une violation de l'art. 16a al. 3 LCR.
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2.1. L'autorité administrative statuant sur un retrait du permis de conduire ne peut en principe pas s'écarter des constatations de fait d'un jugement pénal entré en force. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits. L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 p. 101). Cela vaut non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d'une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également à certaines conditions, lorsque la décision a été rendue à l'issue d'une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police. Il en va notamment ainsi lorsque la personne impliquée savait ou aurait dû prévoir, en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés, qu'il y aurait également une procédure de retrait de permis. Dans cette situation, la personne impliquée est tenue, en vertu des règles de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale, le cas échéant en épuisant les voies de recours à sa disposition. Elle ne peut pas attendre la procédure administrative pour exposer ses arguments (ATF 123 II 97 consid. 3c/aa p. 104; voir aussi arrêts 1C_403/2020 du 20 juillet 2020 consid. 3 et 1C_470/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5.1.2).
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2.2. Selon l'état de fait non contesté de l'arrêt attaqué, le recourant a été condamné, par ordonnance pénale du 13 mars 2018, à une amende de 545 fr. pour violation simple des règles de la circulation routière pour avoir circulé, le 9 septembre 2017, à une vitesse de 116 km/h sur un tronçon limité à 80 km/h.
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Le recourant n'a pas formé opposition à l'ordonnance pénale qui est entrée en force. Il s'est ensuite acquitté du montant de l'amende à laquelle il avait été condamné. Il a ainsi démontré se soumettre entièrement à l'ordonnance pénale puisqu'il n'a ni allégué que les faits retenus à son encontre n'étaient pas conformes à la réalité, ni formé opposition pour ce motif. Le recourant n'a pas, pour des raisons qui lui sont imputables, contesté la condamnation pénale, alors que rien ne l'empêchait de faire valoir ses griefs en épuisant au besoin les voies de recours à disposition dans la procédure pénale. Les faits qui y sont constatés lient dès lors l'autorité administrative.
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Les faits dont le recourant entend maintenant se prévaloir dans le cadre de la procédure administrative, lui étaient connus lors de la procédure pénale puisqu'il prétend avoir été absent de Suisse au moment de l'infraction reprochée. Dès lors, il ne saurait invoquer que des constatations de fait inconnues du juge pénal n'ont pas été prises en considération ou que les faits auraient été établis au mépris des règles essentielles de procédure ou encore qu'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat. Selon les règles de la bonne foi, il lui appartenait en effet de faire valoir ces constatations de fait dans le volet pénal, au stade de l'instruction, puis en épuisant, le cas échéant, toutes les voies de droit à sa disposition. Cela ressort d'ailleurs de l'ATF 123 II 97 que cite le recourant et dont il ne peut rien tirer d'autre.
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S'ajoute à cela que le recourant n'a pas répondu à plusieurs interpellations, tant de la gendarmerie fribourgeoise que vaudoise, lui demandant de retourner le formulaire avec l'identité du conducteur. Il n'a ainsi jamais fourni le nom du conducteur.
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Dans ces circonstances, le Tribunal cantonal n'a pas violé le droit fédéral en se fondant sur les faits retenus par la Préfecture du district du Lac du canton de Fribourg. Il n'existait en effet aucun motif qui aurait pu justifier de s'écarter de l'appréciation de l'autorité pénale selon laquelle le recourant a commis une violation simple des règles de la circulation routière. Le Tribunal cantonal pouvait ainsi réfuter les moyens de défense (en particulier la facture de location de voiture à l'aéroport de Bruxelles, le billet d'avion, les extraits de carte de crédit, les témoins et les photos) que le recourant a fait valoir pour la première fois en procédure administrative alors qu'il disposait de tous les éléments pour le faire lors de la procédure pénale. Cela est d'autant plus vrai que, comme l'a souligné l'autorité précédente, le recourant avait déjà commis une précédente infraction à la LCR, le 10 février 2017, pour laquelle il avait été sanctionné le 27 avril 2017 par une interdiction de conduire en Suisse durant un mois. Il ne pouvait donc ignorer qu'une procédure administrative allait être ouverte à son encontre et qu'il ne pouvait attendre la procédure administrative pour produire les moyens de preuve en sa possession et exposer ses arguments, à savoir qu'il se serait trouvé en Belgique au moment des faits reprochés.
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En tant qu'il remet en cause la présence du recourant en Suisse le 9 septembre 2017, le recours est ainsi mal fondé.
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3. Le recourant se prévaut enfin sommairement d'une violation de l'interdiction du formalisme excessif (art. 29 al. 1 Cst.), au motif que le Tribunal cantonal a appliqué schématiquement la jurisprudence établie aux arrêts précités (voir consid. 2.1) en refusant de traiter la question du lieu où il se trouvait le 9 septembre 2017.
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Ce grief doit être d'emblée écarté. Une stricte application de la jurisprudence précitée, constante et bien établie, est en effet justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (cf. ATF 125 V 65 consid. 1 p. 66; arrêt 1C_365/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.2). Cela est d'autant plus vrai en l'espèce que le jugement pénal, non contesté, est entré en force et a été exécuté.
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4. Il s'ensuit que le recours est rejeté, aux frais du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge du recourant.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, au Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral des routes.
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Lausanne, le 6 octobre 2020
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Chaix
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La Greffière : Tornay Schaller
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