BGer 2F_21/2020 | |||
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BGer 2F_21/2020 vom 15.10.2020 |
2F_21/2020 |
Arrêt du 15 octobre 2020 |
IIe Cour de droit public | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux
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Seiler, Président, Aubry Girardin et Donzallaz.
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Greffier : M. Jeannerat.
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Participants à la procédure
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Département fédéral de l'environnement,
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des transports, de l'énergie et de la communication, Office fédéral de l'énergie,
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recourant,
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contre
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Ville de Lausanne, Services industriels de Lausanne (SIL),
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représentée par Me Jürg Borer, avocat, Borer Rechtsanwälte AG,
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intimée,
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Commission fédérale de l'électricité ElCom,
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Tribunal administratif fédéral, Cour I.
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Objet
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Vérification des coûts et tarifs 2009 et 2010 de la fourniture d'énergie,
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demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral suisse du 16 juillet 2020 (2C_828/2019).
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Faits : | |
A. La Commission fédérale de l'électricité (ci-après: l'ElCom) a ouvert, en date du 12 octobre 2009, une procédure à l'encontre des Services Industriels de la Ville de Lausanne (ci-après: les Services industriels lausannois). Elle entendait vérifier les tarifs proposés par celle-ci pour l'utilisation de son réseau de distribution électrique et pour l'approvisionnement de base en électricité durant les années 2009 et 2010.
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Par décision partielle du 17 septembre 2015, l'ElCom a fixé les coûts d'exploitation et de capitaux imputables à l'utilisation du réseau de la Ville de Lausanne pour les années tarifaires précitées et a décidé que les excédents de couverture obtenus durant celles-ci devaient être remboursés aux consommateurs finaux, conformément à sa Directive 1/2012 relative aux "Différences de couverture des années précédentes". Elle a simultanément suspendu la procédure de vérification des tarifs en tant qu'elle concernait encore l'approvisionnement de base en énergie électrique de la Ville de Lausanne relatifs aux deux années considérées. N'ayant fait l'objet d'aucun recours, cette décision est entrée en force.
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B. Après avoir décidé, en date du 1er septembre 2016, de reprendre la procédure de contrôle des tarifs de l'approvisionnement de base en électricité des Services industriels lausannois, l'ElCom a constaté, par décision du 15 décembre 2016, que les "coûts d'approvisionnement" imputables à cette prestation se montaient à 73'831'217 fr. pour 2009 et à 68'457'424 fr. pour 2010. Elle a en outre évalué les "coûts de gestion bénéfice inclus" imputable à cet approvisionnement en électricité à 10'436'985 fr. pour l'année tarifaire 2009 et à 10'544'810 fr. pour l'année tarifaire 2010. Sur cette base, elle a constaté que les excédents de couverture de l'approvisionnement de base en énergie électrique de la Ville de Lausanne s'élevaient à 18'049'210 fr., respectivement 16'029'530 fr. pour chacune de ces années et a ordonné que ces montants soient remboursés aux consommateurs finaux conformément à sa Directive 1/2012 relative aux "Différences de couverture des années précédentes". La décision précisait encore que la Ville de Lausanne devait informer le Secrétariat technique de l'ElCom du développement des différences de couverture s'agissant de l'approvisionnement de base en énergie électrique jusqu'à l'élimination totale des excédents de couverture constatés.
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Par arrêt du 26 août 2019, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours formé par la Ville de Lausanne contre la décision du 1 er septembre 2016 de l'ElCom.
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Saisi d'un recours en matière de droit public déposé par la Ville de Lausanne contre l'arrêt précité, le Tribunal fédéral l'a rejeté dans le sens des considérants par arrêt du 16 juillet 2020 (arrêt 2C_828/2019). Il a estimé, en substance, que le Tribunal administratif fédéral avait respecté le droit fédéral en confirmant la décision de l'ElCom du 15 décembre 2016. Il était en l'occurrence possible d'ordonner à la Ville de Lausanne de compenser, par réduction tarifaire, les gains injustifiés de 18'049'210 fr. et de 16'029'530 fr. qui résultaient des tarifs d'électricité trop élevés pratiqués durant les années 2009 et 2010. Cela étant, le Tribunal fédéral a également relevé dans son arrêt que ni la décision de l'ElCom du 15 décembre 2016, ni l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 26 août 2016 n' ordonnaient le paiement d'un quelconque intérêt sur ces montants - quand bien même les participants semblaient partir d'une prémisse inverse - de sorte qu'aucun intérêt n'était dû par la Ville de Lausanne en la cause. D'après le Tribunal fédéral, l'obligation de payer un intérêt sur les excédents de couverture ne pouvait pas, dans le cas d'espèce, découler du renvoi à la Directive 1/2012 contenu dans le dispositif dans la décision de l'ElCom, confirmée par le Tribunal administratif fédéral, dans la mesure où cette directive n'envisageait pas explicitement un tel intérêt en lien avec le contrôle des tarifs relevant de l'approvisionnement de base en électricité.
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C. Par acte du 8 septembre 2020, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC), agissant par l'Office fédéral de l'énergie (OFEN), forme une demande de révision de l'arrêt 2C_828/2019 du 16 juillet 2020. Il conclut à l'annulation de la deuxième partie du chiffre 1 de son dispositif qui précise que le recours est rejeté "dans le sens des considérants". Autrement dit, il demande à ce que l'arrêt précité soit révisé en ce sens que le recours en matière de droit public de la Ville de Lausanne contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 26 août 2019 soit rejeté sans aucune réserve.
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Par acte du même jour, l'ElCom a également demandé la révision de l'arrêt fédéral précité (cause 2F_20/2020).
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Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
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Considérant en droit : | |
1. En vertu de l'art. 61 LTF, les arrêts du Tribunal fédéral acquièrent force de chose jugée le jour où ils sont prononcés. Ils sont définitifs et ne sont pas susceptibles d'un recours ordinaire sur le plan interne. Ils ne peuvent être modifiés que par la voie extraordinaire de la révision (art. 121 ss LTF).
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1.1. Fondée sur l'art. 121 let. d LTF, la présente demande de révision a été déposée dans le délai de 30 jours prévu à l'art. 124 al. 1 let. b LTF, compte tenu des féries estivales (art. 46 al. 1 let. b LTF). Le mémoire répond par ailleurs aux exigences de motivation découlant de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, applicables à la procédure de révision (arrêt 4F_2/2019 du 28 février 2019 consid. 1.1).
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1.2. Le demandeur en révision doit avoir la qualité pour former une demande de révision. Celle-ci se détermine de jurisprudence constante selon les règles applicables à la qualité pour recourir dans la procédure antérieure (cf. ATF 138 V 161 consid. 2.5.2 p. 167; arrêts 2F_3/2020 du 24 juin 2020 consid. 1.2; 2F_13/2015 du 30 juillet 2015 consid. 1; 1F_23/2014 du 27 juin 2014 consid. 1.2). En effet, comme le droit suisse ne connaît en principe pas l'action populaire, il faut admettre, même si la loi ne le dit pas expressément, que la révision ne peut être demandée que par une partie à la procédure ayant conduit à l'arrêt mis en cause (ATF 121 IV 317 consid. 1a p. 320; 138 V 161 consid. 2.5.2 p. 167).
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1.3. En l'occurrence, la procédure antérieure à la base de la présente demande de révision concernait un recours en matière de droit public déposé par la Ville de Lausanne à l'encontre d'un arrêt du Tribunal administratif fédéral en lien avec la tarification de l'approvisionnement de base en électricité dans cette commune durant les années 2009 et 2010. Il est indéniable que le DETEC aurait eu la qualité pour recourir dans cette affaire, en application de l'art. 89 al. 2 let. a LTF qui reconnaît aux départements fédéraux la qualité pour recourir si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions (cf. arrêt 2C_682/2015 du 20 juillet 2016 consid. 2.2 non publié in ATF 142 II 451). L'approvisionnement en énergie relève effectivement de son domaine d'activité (cf. art. 1 al. 3 let. c de l'ordonnance du 6 décembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication [Org DETEC; RS 172.217.1]). Cela étant, dans les faits, le département précité n'a jamais participé à la procédure ayant conduit à l'arrêt 2C_828/2019 dont il demande la révision, ni devant le Tribunal fédéral, qui ne l'a pas invité à se prononcer en la cause, ni devant le Tribunal administratif fédéral. On peut dès lors se demander s'il peut requérir la révision de cet arrêt qui clôture une procédure à laquelle il n'a pas formellement participé - dès lors que, selon la jurisprudence, la révision ne peut en principe être demandée que par une partie à la procédure ayant conduit à l'arrêt mis en cause (cf. supra consid. 1.2) - ou si les départements jouissent d'un droit abstrait et autonome de demander la révision d'arrêts fédéraux, analogue à leur qualité pour recourir au Tribunal fédéral (cf. ATF 135 II 338 consid. 1.2.1 p. 341 s.). Il n'est cependant pas nécessaire de trancher ce point, car la question de la qualité du DETEC pour former la présente demande de révision peut rester indécise en l'espèce. La demande révision doit en effet de toute façon être rejetée faute de réalisation d'un motif de révision.
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2. Le DETEC fonde sa demande de révision sur l'art. 121 let. d LTF.
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2.1. Aux termes de l'art. 121 let. d LTF, la révision d'un arrêt du Tribunal fédéral peut être demandée si, par inadvertance, le tribunal n'a pas pris en considération des faits pertinents qui ressortent du dossier. Ce motif de révision vise le cas où le Tribunal fédéral a statué en se fondant sur un état de fait incomplet ou différent de celui qui résultait du dossier. L'inadvertance implique une erreur et consiste soit à méconnaître soit à déformer un fait ou une pièce. Elle doit se rapporter au contenu même du fait, à sa perception par le tribunal, mais non pas à son appréciation juridique. Les faits doivent ressortir du dossier, à savoir non seulement de la décision attaquée, mais aussi de l'ensemble des actes de procédure comprenant le dossier complet de l'autorité cantonale ou inférieure ainsi que les mémoires et pièces adressés au Tribunal fédéral dans la mesure où ils sont recevables (arrêt 2F_8/2017 du 19 septembre 2017 consid. 3.2 et les références). L'inadvertance doit, en outre, porter sur un fait pertinent, c'est-à-dire susceptible d'entraîner une décision différente, plus favorable à la partie requérante (cf. ATF 122 II 17 consid. 3 p. 19). Pour être fondé, le reproche d'inadvertance suppose encore que le Tribunal fédéral ait pu prendre en considération le fait important dont on lui reproche de ne pas avoir tenu compte. Le Tribunal fédéral ne saurait se voir reprocher, dans la procédure de révision subséquente, de ne pas avoir rectifié par inadvertance une erreur affectant une constatation faite par les juges précédents (arrêts 2F_21/2019 du 7 février 2020 consid. 2; 2F_17/2019 du 20 décembre 2019 consid. 2; 4F_15/2017 du 30 novembre 2017 consid. 2.1). Il en va de même lorsque la demande de révision n'émane pas de la partie qui avait formé le recours devant le Tribunal fédéral, mais de la partie intimée, dans la mesure où la partie recourante avait abordé dans son recours les éléments de faits litigieux. On considère en effet qu'il aurait alors appartenu à la partie intimée de contester l'état de fait dans sa réplique au recours. En revanche, la partie intimée conserve le droit de souligner, par le biais de la révision, une inadvertance sur des faits pertinents non traités dans le recours antérieur, car, dans une telle situation, elle n'avait pas de raison de former un grief relatif à l'état de fait déjà à ce moment-là (cf. arrêt 2F_3/2020 du 24 juin 2020 consid. 2.2).
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2.2. En l'occurrence, le DETEC estime que le Tribunal fédéral a négligé, par inadvertance, un élément essentiel du dossier au moment de constater que la décision du 15 décembre 2016 de l'ElCom, à l'instar de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, n'ordonnait le paiement d'aucun intérêt rémunératoire de la part de la Ville de Lausanne en lien avec les excédents tarifaires relevant de l'approvisionnement en électricité durant les années 2009 et 2010. Selon le Département, le Tribunal fédéral aurait dû prendre en considération que la Directive 1/2012 - auquel l'ElCom avait renvoyé dans le dispositif de sa décision - mentionne une annexe consultable sur internet sous la forme d'un fichier
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2.3. Dans son arrêt 2C_828/2019, le Tribunal fédéral s'est fondé sur un double constat pour considérer que l'ElCom n'avait pas valablement ordonné le paiement d'un intérêt dans sa décision du 15 décembre 2016, quand bien même les parties à la procédure semblaient partir d'un autre postulat: il a relevé, d'une part, que le dispositif de la décision de l'ElCom du 15 décembre 2016 précisait uniquement que les montants perçus en trop " Pour le reste, dans la mesure où le DETEC affirme que le renvoi à la Directive 1/2012 se serait en réalité aussi référé au " Formulaire DE_2 ", soit plus précisément à son onglet " Différence de couvert._Energie " (cf. no 19 de la requête), force est de constater qu'il tente de remettre en cause de manière inadmissible la façon dont le Tribunal fédéral a apprécié la portée réelle du renvoi à la Directive 1/2012 opéré par la décision de l'ElCom. La Cour de céans a en effet considéré dans son arrêt - quand bien même de manière implicite - que ce renvoi couvrait, d'un point de vue juridique, exclusivement le document auquel il était expressément et directement renvoyé. Cette appréciation de la portée juridique des faits pris en compte dans l'arrêt 2C_828/2019 ne peut être remise en question par la voie de la révision au motif prétendu que le renvoi était également censé inclure - par effet de double renvoi ou "par ricochet" - les documents qualifiés lapidairement d'"annexes" en toute fin de directive, étant précisé que ces documents ne sont pas évoquées par la décision de l'ElCom et ne sont consultables que de manière séparée sur internet en tant que fichier Excel. On notera qu'il incombait, quoi qu'il en soit, à l'ElCom de régler avec clarté la question des intérêts - rémunératoires ou sur l'enrichissement - courant sur les excédents de couverture, d'autant qu'il s'agit d'une problématique controversée en droit public (cf. notamment ATF 143 II 37 consid. 7 et 8 p. 51 ss) et que ses implications financières sont importantes, comme le DETEC le souligne lui-même dans sa demande de révision (cf. no 20 de la requête; cf. aussi, à titre de comparaison, ATF 134 I 179 consid. 6.4 p. 182 s. sur l'inefficacité d'un double renvoi en matière législative pour réclamer une indemnisation du préjudice résultant du non-paiement de cotisations sociales).
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2.4. Il résulte de ce qui précède que le motif de révision envisagé à l'art. 121 let. d LTF et avancé par le DETEC dans sa demande n'est pas réalisé, car le Tribunal fédéral n'a pas commis d'inadvertance s'agissant des faits pertinents dans son arrêt 2C_828/2019.
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3. Il s'ensuit que la présente demande de révision doit être rejetée, dans la mesure où elle est recevable.
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4. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF), ni alloué de dépens à la Ville de Lausanne qui constitue une collectivité publique ayant agi dans l'exercice d'une attribution officielle et qui n'a pas été appelée à se déterminer sur la présente demande de révision (art. 68 al. 2 et 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. La demande de révision est rejetée dans la mesure où elle est recevable.
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2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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3. Le présent arrêt est communiqué au DETEC, au mandataire de la Ville de Lausanne, à l'ElCom et au Tribunal administratif fédéral, Cour I.
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Lausanne, le 15 octobre 2020
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Seiler
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Le Greffier : Jeannerat
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