BGer 2C_640/2020 | |||
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BGer 2C_640/2020 vom 01.12.2020 |
2C_640/2020 |
Arrêt du 1er décembre 2020 |
IIe Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux
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Seiler, Président, Zünd et Donzallaz.
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Greffier: M. Tissot-Daguette.
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Participants à la procédure
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A.________,
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représentée par Me Jacques Michod, avocat,
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recourante,
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contre
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Chambre des avocats du canton de Vaud, p.a. Secrétariat général de l'ordre judiciaire, route du Signal 8, 1014 Lausanne.
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B.________,
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tiers intéressée.
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Objet
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Interdiction temporaire de pratiquer,
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recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 11 août 2020 (GE.2019.0257).
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Faits : | |
A. A.________ est une avocate inscrite au registre cantonal des avocats du canton de Vaud. Depuis 2010, elle a fait l'objet de trois mesures disciplinaires.
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Dès le mois de juin 2018, A.________ a représenté un client dans le cadre de procédures de mesures protectrices de l'union conjugale et de divorce. Son client a été mis au bénéfice de l'assistance judiciaire et l'intéressée a été nommée mandataire d'office par l'autorité judiciaire compétente. Entre les mois d'août 2018 et de février 2019, A.________ a adressé à son client quatre notes d'honoraires pour un montant total de 9'190 fr. 55 (au tarif horaire de 350 fr.). Son client lui a versé 5'924 fr. 55, puis, le 20 mars 2019, a requis du Tribunal en charge de la procédure de relever son avocate d'office de son mandat, expliquant que le lien de confiance était rompu en raison de cette facturation d'honoraires. Le 21 mars 2019, A.________ s'est déterminée. Le 26 mars 2019, le Président du Tribunal précité a transmis les positions des deux parties à la Chambre des avocats du canton de Vaud (ci-après: la Chambre des avocats).
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B. Le 8 avril 2019, la Chambre des avocats a ouvert une enquête disciplinaire à l'encontre de A.________. Celle-ci a été entendue à deux reprises, les 16 mai et 2 juillet 2019, par le membre enquêteur de la Chambre des avocats, qui a également auditionné l'ancien client de l'intéressée le 4 juin 2019. Le membre enquêteur a rendu son rapport le 5 octobre 2019. Le 13 novembre 2019, A.________ a encore été entendue par la Chambre des avocats in corpore. Par décision du 13 novembre 2019, la Chambre des avocats, constatant une violation de diverses règles professionnelles auxquelles sont soumis les avocats, a prononcé une interdiction temporaire de pratiquer d'une durée de six mois contre A.________, a désigné l'avocate B.________ en qualité de suppléante de l'intéressée, pour une durée de six mois, avec pour mission d'effectuer toutes les opérations nécessaires à la sauvegarde des intérêts des clients de celle-ci et a ordonné la publication de la décision dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud. A.________ a recouru contre cette décision le 23 décembre 2019 auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Par arrêt du 11 août 2020, le Tribunal cantonal a partiellement admis ce recours, réduisant de six à quatre mois l'interdiction temporaire de pratiquer prononcée contre A.________, rejetant le recours pour le surplus.
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C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, outre l'effet suspensif, de réformer l'arrêt du Tribunal cantonal du 11 août 2020 en remplaçant son interdiction temporaire de pratiquer de quatre mois par un avertissement, un blâme ou une amende et en révoquant la désignation de l'avocate B.________; subsidiairement d'annuler l'arrêt précité.
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Par ordonnance du 1 er septembre 2020, la Juge présidant de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif.
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Le Tribunal cantonal et la Chambre des avocats renoncent à se déterminer. A.________ a adressé des déterminations spontanées au Tribunal fédéral le 1er octobre 2020.
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Considérant en droit : | |
1. Le litige concerne une décision traitant d'une sanction disciplinaire (interdiction temporaire de pratiquer d'une durée de quatre mois, prise en application des art. 12 et 17 de la loi fédérale du 23 juin 2000 sur la libre circulation des avocats [LLCA; RS 935.61]). Il relève donc du droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF et ne tombe pas sous le coup de l'une des exceptions de l'art. 83 LTF. Par conséquent, interjeté par l'avocate ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente, directement atteinte par la décision attaquée et ayant un intérêt digne de protection à l'annulation de cette décision (cf. art. 89 al. 1 LTF), le recours en matière de droit public dirigé contre un jugement final (cf. art. 90 LTF) rendu par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai et la forme prévus par la loi (cf. art. 42 et 100 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière.
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2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3 p. 156). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF).
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3. Dans un premier grief, citant les art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH, la recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue. Elle estime notamment que le Tribunal cantonal n'a pas motivé à suffisance son arrêt et qu'il s'est fait l'auteur d'un déni de justice formel.
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3.1. En tout premier lieu, il convient de constater, contrairement à ce qu'affirme la recourante, qu'il ne saurait être question de déni de justice formel en l'espèce, le Tribunal cantonal étant entré en matière sur le recours qui lui était soumis (cf. ATF 142 II 154 consid. 4.2 p. 157 et les références). L'absence de motivation suffisante, invoquée par la recourante, doit ainsi uniquement être examinée sous l'angle d'une éventuelle violation du droit d'être entendu.
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3.2. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 p. 52 s.; 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299 et les références). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299 et les références).
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Le droit d'être entendu impose également à l'autorité judiciaire de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer son droit de recours à bon escient. Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision. Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 142 II 154 consid. 4.2 p. 157 et les références). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565 et les références).
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3.3. En l'occurrence, la recourante affirme avoir sollicité différentes mesures d'instruction auprès du Tribunal cantonal, dont notamment la fixation d'une audience et l'audition de la comptable de son étude.
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3.3.1. Comme le relève à juste titre la recourante, l'autorité précédente a refusé de donner suite à ces demandes, celle-ci ayant considéré que le dossier de la cause était suffisamment complet pour lui permettre de statuer en toute connaissance de cause, ajoutant par ailleurs que l'audition de la comptable de la recourante n'avait pas d'influence sur l'issue de la cause. Par conséquent, le Tribunal cantonal ayant procédé à une appréciation anticipée des moyens de preuve à sa disposition, c'est bien plus d'un établissement inexact des faits dont la recourante aurait dû se plaindre.
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Or, l'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier, ou contraire au sens de la justice et de l'équité ou lorsque l'autorité ne tient pas compte, sans raison sérieuse, d'un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des constatations insoutenables. Il appartient au recourant de démontrer le caractère arbitraire par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62 et les références).
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3.3.2. En l'espèce, il est hautement douteux que la motivation de la recourante remplisse ces exigences. Quand bien même il faudrait examiner ce grief, force serait de constater que le refus d'auditionner la comptable de la recourante n'est en aucun cas arbitraire. Le Tribunal cantonal ne conteste pas le fait que la recourante a délégué sa comptabilité à un tiers. Il se limite à retenir qu'en "tant qu'avocate inscrite au registre cantonal, la recourante demeure seule responsable des notes d'honoraires qu'elle adresse à ses clients ainsi que des courriers rédigés en son nom". Cette explication est exempte d'arbitraire, notamment dans la mesure où, en application de l'art. 12 let. b LLCA, l'avocat exerce son activité professionnelle en toute indépendance, en son nom personnel et sous sa propre responsabilité. Il ne saurait par conséquent être question d'appréciation arbitraire des moyens de preuve en l'espèce. C'est d'ailleurs bien plus d'une mauvaise application du droit, en l'occurrence du principe de proportionnalité, dont la recourante semble se plaindre. Pour le surplus, s'agissant de la violation de l'art. 29 al. 2 Cst. en relation avec l'absence d'audience, force est ici également de constater qu'il ne saurait être question d'arbitraire. C'est en effet de manière pleinement soutenable que l'autorité précédente a constaté que la recourante avait déjà été entendue à trois reprises par la Chambre des avocats et qu'il n'était pas nécessaire de procéder à une nouvelle audition.
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3.3.3. La recourante se plaint ensuite de ce que le Tribunal cantonal n'aurait pas motivé à suffisance son arrêt, notamment en relation avec la proportionnalité de la mesure prononcée à son encontre. Or, l'autorité précédente a clairement présenté les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, étant rappelé qu'elle n'avait pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par la recourante. D'ailleurs, celle-ci a bel et bien compris les motifs de l'arrêt entrepris, puisqu'elle a valablement pu les contester. Pour le surplus, dans la mesure où la recourante se plaint de l'appréciation juridique effectuée par le Tribunal cantonal, en particulier en relation avec le principe de proportionnalité, il n'est aucunement question de violation de son droit d'être entendue.
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3.4. L'art. 6 par. 1 CEDH garantit notamment le droit à la tenue d'une audience publique lorsque sont en jeu des "droits et obligations de caractère civil" (cf. ATF 127 II 306 consid. 5 p. 309; arrêt 2C_636/2019 du 22 janvier 2020 consid. 2.1). Le présent litige, relatif à une sanction disciplinaire fondée sur la LLCA constitue une contestation relative à des "droits et obligations de caractère civil" au sens de cette disposition (cf. arrêt 2C_204/2020 du 3 août 2020 consid. 2.2.2).
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En application de l'art. 6 par. 1 CEDH, le recourant peut prétendre à des débats publics devant les autorités judiciaires cantonales (cf. ATF 134 I 229 consid. 4.2 p. 236; arrêt 2C_636/2019 du 22 janvier 2020 consid. 2.2 et les références). L'obligation d'organiser des débats publics fondée sur l'art. 6 par. 1 CEDH, et sous réserve de règles procédurales particulières, suppose cependant une demande formulée de manière claire et indiscutable (ATF 130 II 425 consid. 2.4 p. 431; cf. ATF 134 I 331 consid. 2.3 p. 333). Une requête de preuve (demande tendant à la comparution personnelle, à l'interrogatoire des parties, à l'audition de témoins ou à une inspection locale) ne suffit pas à fonder une telle obligation (ATF 134 I 140 consid. 5.2 p. 147; arrêt 2C_636/2019 du 22 janvier 2020 consid. 2.2 et les références).
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En l'espèce, si l'on excepte une unique reprise, la recourante, pourtant représentée par un mandataire professionnel et elle-même avocate, ne cite pas l'art. 6 CEDH dans son recours et ne fait pas non plus référence à la jurisprudence y relative. I l est ainsi douteux que la motivation du recours à ce propos puisse être jugée suffisante (cf. art. 106 al. 2 LTF). Il convient par ailleurs de rappeler qu'il n'existe pas de droit à compléter hors du délai de recours un mémoire qui ne remplirait pas les conditions de motivation suffisante (cf. ATF 134 II 244 consid. 2.4.2 p. 247 s. et les références), si bien que la brève motivation contenue dans le courrier du 1er octobre 2020 ne saurait palier l'absence de motivation suffisante figurant dans le recours. En tout état de cause, même à retenir une motivation suffisante en relation avec l'art. 6 CEDH, force serait de constater que le Tribunal cantonal n'a pas violé cette disposition. La demande formulée devant celui-ci par la recourante tendait en effet uniquement à être auditionnée. La recourante parle d'ailleurs de "mesure d'instruction". Or, elle méconnaît par là la portée de la jurisprudence relative à l'art. 6 CEDH, présentée ci-dessus. Faute d'avoir expressément demandé à l'autorité précédente de pouvoir bénéficier de débats publics au sens de l'art. 6 CEDH (et pas d'une audience d'instruction avec auditions des parties et de témoins), elle ne saurait invoquer une violation de cette disposition devant le Tribunal fédéral. La référence faite à l'arrêt 2C_204/2020 du 3 août 2020 dans ses déterminations du 1er octobre 2020 ne lui est d'aucune aide, puisque dans le cas cité, l'avocat concerné avait précisément demandé à ce que des débats publics soient organisés par l'autorité judiciaire cantonale de dernière instance.
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3.5. Sur le vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, les griefs de violation du droit d'être entendu, de déni de justice et de violation de l'art. 6 CEDH doivent tous être écartés.
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4.
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4.1. Il ressort de l'arrêt entrepris que la recourante, avant la présente procédure, a fait l'objet de trois précédentes procédures disciplinaires. Une première décision du 8 mars 2010 l'a sanctionnée d'une amende de 1'500 fr. pour avoir surfacturé ses prestations à une cliente. Le 27 septembre 2017, la Chambre des avocats a constaté que la recourante avait surévalué ses opérations dans le cadre de ses mandats d'office et de choix et avait facturé à une cliente au bénéfice de l'assistance judiciaire des opérations au tarif d'un avocat de choix, si bien qu'elle l'a sanctionnée d'une amende de 10'000 fr. Par décision du 14 novembre 2018, constatant que la recourante avait contacté un témoin dans le cadre d'une procédure pénale, la Chambre des avocats a prononcé un blâme à son encontre. Quant à la procédure ayant conduit à la décision du 27 septembre 2017, il ressort de l'arrêt entrepris que la recourante avait facturé à sa cliente la somme de 5'336 fr. 75 au tarif d'un avocat de choix, à titre d'"honoraires non pris en charge par l'assistance judiciaire". La Chambre des avocats avait rappelé à ce propos qu'il était illicite pour un avocat de facturer au tarif d'un mandataire de choix des prestations dans un dossier où le client avait obtenu l'assistance judiciaire. Dans cette décision du 27 septembre 2017, l'autorité précitée avait encore précisé que si les graves défauts de facturation relevés devaient se reproduire, la question de la compatibilité du comportement de la recourante avec son activité professionnelle se poserait et une interdiction de pratiquer pourrait être envisagée.
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Quant à la présente procédure, il ressort de l'arrêt entrepris que la recourante a été désignée avocate d'office de l'un de ses clients et que durant son mandat, elle a facturé à celui-ci un montant total de 9'190 fr. 55 d'honoraires, répartis en quatre notes d'honoraires. Les libellés de ces notes étaient "divorce (opérations non couvertes par l'assistance judiciaire) ", "divorce", "divorce" et "divorce (Op non-couvertes par l'AJ) ". L'arrêt entrepris retient également que la recourante a, dans un premier temps, affirmé que les opérations facturées sortaient du cadre des opérations ordinairement effectuées par un avocat, à savoir qu'il s'agissait d'un conseil "sept jours sur sept" et "vingt-quatre heures sur vingt-quatre". La recourante a ensuite expliqué avoir communiqué son numéro de portable au client, qui l'appelait parfois plusieurs fois par jour, y compris en-dehors des heures de bureau, c'est-à-dire également en soirée et le week-end. La recourante a finalement reconnu que le dossier avait été principalement traité par son collaborateur et non par elle-même et a admis que la plupart des opérations litigieuses, couvertes par l'assistance judiciaire, n'auraient pas dû être facturées au client. A ce propos, le Tribunal cantonal a constaté que, parmi les quatre notes d'honoraires figurant au dossier, aucune opération facturée au client n'avait été effectuée un jour de week-end. La recourante a expliqué à ce propos qu'il s'agissait d'une erreur imputable à une jeune employée qui venait de commencer et qu'elle-même se serait rendu compte de l'erreur une fois que le dossier aurait été terminé et la facturation finale établie.
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4.2. Fondé sur ces éléments de fait, le Tribunal cantonal a tout d'abord constaté que la recourante contestait principalement la proportionnalité de la mesure de six mois d'interdiction de pratiquer, prononcée par la Chambre des avocats, reconnaissant néanmoins avoir commis une faute en facturant à un client au bénéfice de l'assistance judiciaire des opérations couvertes par l'Etat. L'autorité précédente a également retenu que la recourante ne méconnaissait pas la situation de récidive et ne remettait pas en cause le principe d'une gradation des sanctions. Elle a toutefois jugé qu'eu égard à la nature sérieuse des manquements constatés, à la récidive du comportement et à l'avertissement dans la précédente décision ayant sanctionné des faits de nature semblable, une interdiction de pratiquer n'apparaissait pas, dans son principe, disproportionnée ni constitutive d'un abus de son pouvoir d'appréciation par la Chambre des avocats.
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Quant à la quotité de la sanction, le Tribunal cantonal a considéré que les faits reprochés à la recourante étaient graves, ce d'autant plus qu'elle avait fait l'objet d'un avertissement dans la décision du 27 septembre 2017. La recourante avait reproduit le comportement qui lui avait été reproché dans cette décision. L'autorité précédente, après avoir présenté divers arrêts du Tribunal fédéral relatifs à des interdictions de pratiquer prononcées à l'encontre d'avocats, a jugé que la gravité des faits en cause n'atteignait pas un degré tel qu'une interdiction de six mois soit justifiée. Elle a retenu que la recourante avait certes commis une violation sérieuse de ses devoirs professionnels, mais qu'on ne saurait l'apparenter à une violation massive de ceux-ci justifiant une interdiction de pratiquer d'une durée supérieure à quatre mois, d'autant moins que la recourante n'avait pas subi de condamnations pénales pour les faits reprochés. Le Tribunal cantonal a considéré qu'une interdiction temporaire de pratiquer d'une durée de six mois apparaissait comme étant disproportionnée et a ramené cette interdiction à une durée de quatre mois.
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4.3. La recourante conteste exclusivement la mesure de la sanction de quatre mois d'interdiction de pratiquer son activité d'avocate. Elle estime que le fait d'avoir déjà fait l'objet de mesures disciplinaires ne suffit pas à légitimer une interdiction temporaire à l'exercice de la profession d'avocate. Selon elle, rappelant ne pas avoir fait l'objet de condamnations pénales, le Tribunal cantonal aurait dû expliquer en quoi le plafond de quatre mois était proportionné à sa situation. Faisant en particulier référence aux arrêts 2C_878/2011 du 28 février 2012 et 2A.499/2006 du 11 juin 2007, la recourante est d'avis qu'une interdiction temporaire de pratiquer de quatre mois constitue une limite maximale admissible en présence d'une violation des règles professionnelles qui ne constitue toutefois pas un manquement particulièrement grave. La recourante ajoute que le comportement qui lui est reproché est ponctuel et limité, accréditant la thèse d'un fait isolé et inexpliqué, voire inexplicable, nonobstant des mesures drastiques mises en place pour contrôler la facturation. La recourante estime finalement que l'autorité précédente n'a pas suffisamment pris en compte sa situation et en particulier les conséquences de la mesure sur son étude et ses collaborateurs. Pour la recourante, cette mesure jette un discrédit sur sa personne.
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5.
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5.1. L'art. 12 LLCA énonce les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis. Celui-ci doit notamment exercer sa profession avec soin et diligence (art. 12 let. a LLCA). Cette disposition constitue une clause générale qui permet d'exiger de l'avocat qu'il se comporte correctement dans l'exercice de sa profession. Il lui est en particulier interdit d'entreprendre des actes qui pourraient nuire aux intérêts de son client. L'art. 12 let. a LLCA suppose toutefois l'existence d'un manquement significatif aux devoirs de la profession (cf. arrêt 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.1 et les références). Cependant, eu égard à la légèreté de la mesure la moins lourde parmi celles énoncées par la loi (cf. consid. 6.1 ci-dessous), à savoir l'avertissement (art. 17 al. 1 let. a LLCA), le manquement en question n'a pas à atteindre un haut seuil de gravité. Le Tribunal fédéral revoit librement le point de savoir s'il y a eu violation des règles professionnelles (arrêt 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.1 et les références) en fonction du comportement concret de la personne mise en cause au regard de la situation qui se présentait à elle au moment des faits.
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5.2. On doit en premier lieu constater que la recourante, à raison, ne conteste pas que les faits reprochés constituent des manquements aux règles professionnelles prévues par l'art. 12 let. a LLCA. L'avocat d'office n'a en effet pas le droit de se faire rétribuer par le client au bénéfice de l'assistance judiciaire. Il n'est pas non plus autorisé à demander à ce client une rétribution supplémentaire par rapport à ce qu'il perçoit de l'Etat. Le paiement d'un honoraire par le client au bénéfice de l'assistance judiciaire est exclu, même lorsque la rétribution d'office ne représente pas la rétribution d'un avocat de choix (cf. arrêt 2C_379/2009 du 7 décembre 2009 consid. 3.1). La recourante se plaint en revanche de ce que la sanction prononcée par la Chambre des avocats, même si elle a été réduite sur recours par le Tribunal cantonal, est disproportionnée.
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6.
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6.1. L'art. 17 al. 1 LLCA prévoit qu'en cas de violation d'une règle professionnelle, l'autorité de surveillance (cantonale) peut prononcer à l'encontre d'un avocat plusieurs mesures disciplinaires qui vont de l'avertissement (let. a) à l'interdiction définitive de pratiquer (let. e). L'interdiction de pratiquer (définitive [let. e] ou temporaire [let. d]) constitue la mesure la plus sévère et ne peut en principe être prononcée qu'en cas de récidive, lorsqu'il apparaît que des sanctions plus légères n'ont pas permis à l'avocat de se conformer aux règles professionnelles (arrêt 2C_878/2011 du 28 février 2012 consid. 7.1 et les références). Selon la gravité, un acte unique peut toutefois, à lui seul, fonder une interdiction de pratiquer. Si le Tribunal fédéral revoit librement l'application des règles professionnelles, il s'impose en revanche une certaine retenue lors de l'examen de la sanction disciplinaire prononcée. Il n'intervient que lorsque l'autorité compétente a excédé les limites de son pouvoir d'appréciation, au point que la sanction apparaît clairement disproportionnée et confine à l'arbitraire (cf. arrêts 2C_243/2020 du 25 juin 2020 consid. 4.1; 2C_878/2011 du 28 février 2012 consid. 7.1 et les références).
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6.2. En l'occurrence, il convient tout d'abord de relever que, contrairement à l'avis de la recourante, le comportement de celle-ci, contraire aux règles professionnelles de la profession d'avocat, doit être qualifié de grave. En envoyant une note d'honoraires à un client au bénéfice de l'assistance judiciaire et pour lequel l'Etat renonce donc aux frais de procédure et s'acquitte de dépens, la recourante méconnaît gravement l'activité de l'avocat d'office, composante pourtant essentielle de sa profession. En procédant de la sorte, elle nuit aussi bien aux intérêts de son client qu'à ceux de l'Etat et porte atteinte à la réputation de la profession d'avocat, pour sa seule satisfaction financière personnelle. Durant la présente procédure, la recourante, plutôt que de reconnaître ses torts, a commencé par chercher à faire reposer la responsabilité sur des tiers, tels une jeune employée et son client lui-même. Ce manque de remise en question ne parle pas en sa faveur. En outre et surtout, à peine une année après avoir été sanctionnée pour avoir notamment perçu des honoraires auprès d'une cliente au bénéfice de l'assistance judiciaire, la recourante a persisté dans son comportement répréhensible en transmettant quatre notes d'honoraires à un autre client dans une situation semblable. Ainsi, et contrairement à ce que la recourante affirme, son comportement ne saurait en aucun cas être considéré comme étant isolé et ponctuel. Elle démontre bien plus n'avoir que peu d'intérêt pour le respect des règles de sa profession. A cela s'ajoute qu'elle avait déjà été sanctionnée pour d'autres comportements contraires à ces règles. La recourante fait grand cas de l'engagement d'une comptable. On relèvera que, s'il est louable d'avoir pris des mesures pour tenter d'éviter d'autres violations des règles de la profession d'avocat, la comptable, selon les faits retenus dans l'arrêt entrepris, a été engagée directement à la suite de la sanction du 27 septembre 2017. Elle n'a par conséquent pas été d'un grand secours en vue d'éviter la présente procédure, laissant parvenir à quatre reprises au client de la recourante des notes d'honoraires qui n'étaient pas dues. Il incombait à celle-ci, le cas échéant, d'assurer la surveillance de sa comptable.
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6.3. Que la recourante n'ait pas fait l'objet de condamnations pénales n'est pas pertinent, de telles condamnations n'étant pas nécessaires pour prononcer la sanction en cause. A ce propos, les deux références jurisprudentielles citées par la recourante ne lui sont d'aucun secours. Dans l'arrêt 2A.499/2006 du 11 juin 2007 consid. 5.3, le Tribunal fédéral a jugé que, dans le cas qui le concernait, une sanction de quatre mois d'interdiction de pratiquer était une sanction maximale en présence d'une importante violation des règles professionnelles, lorsque le recourant avait déjà fait l'objet de précédentes sanctions. Sans examiner plus avant les détails du cas précité, on ne voit pas en quoi la présente mesure disciplinaire ne pourrait pas être prononcée, la recourante ayant justement été sanctionnée d'une interdiction de pratiquer de quatre mois en situation de récidive. En outre, dans l'arrêt 2C_878/2011 du 28 février 2012, l'avocat recourant avait été sanctionné, pour la première fois, d'une interdiction de pratiquer d'une durée de six mois pour des manquements particulièrement graves et répétés. Ici également, outre que la mesure disciplinaire est plus importante que celle prononcée à l'encontre de la recourante, on ne voit pas en quoi cet arrêt permettrait de considérer la sanction de la recourante comme étant disproportionnée, celle-ci estimant à tort que son comportement est ponctuel et n'est pas grave.
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6.4. Finalement, si, comme l'affirme la recourante, il n'est pas exclu que son étude et sa réputation soient impactés par la présente sanction, force est de constater qu'une avocate, d'ores et déjà nommée par la Chambre des avocats, reprendra ses dossiers durant son interdiction de pratiquer et qu'elle bénéficie de collaborateurs qui veilleront à minimiser au maximum les impacts négatifs sur le fonctionnement de l'étude. Quant à la réputation de la recourante, cet élément ne saurait primer sur la confiance que doivent pouvoir mettre les justiciables dans l'activité d'avocat.
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6.5. Par conséquent, sur le vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, on ne saurait considérer que le Tribunal cantonal a excédé son pouvoir d'appréciation en prononçant comme sanction à l'encontre de la recourante une interdiction temporaire de pratiquer d'une durée de quatre mois. En outre, la publication de la sanction étant prévue par le droit cantonal, en l'occurrence l'art. 60 al. 2 de la loi vaudoise du 9 juin 2015 sur la profession d'avocat (LPAv/VD; BLV 177.11), et la recourante n'ayant ni invoqué d'application arbitraire de cette disposition (art. 9 Cst.), ni fait valoir une éventuelle violation d'une autre disposition de droit constitutionnel (cf. art. 106 al. 2 LTF; cf. arrêt 2C_134/2020 du 7 août 2020 consid. 2), il se justifie également de confirmer l'arrêt entrepris sur ce point. Le recours doit ainsi être rejeté.
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7. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à la Chambre des avocats et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi qu'à Antonella Cereghetti, avocate à Lausanne.
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Lausanne, le 1er décembre 2020
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Seiler
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Le Greffier : Tissot-Daguette
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