BGer 1C_190/2020 | |||
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BGer 1C_190/2020 vom 09.02.2021 |
1C_190/2020 |
Arrêt du 9 février 2021 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
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Chaix, Jametti, Haag et Müller.
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Greffier : M. Alvarez.
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Participants à la procédure
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PPE A.________,
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B.________ SA,
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C.________,
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D.________,
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tous les quatre représentés par Mes Benoît Bovay et Feryel Kilani, avocats,
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recourants,
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contre
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E.________ SA,
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représentée par Me Marc-Etienne Favre, avocat,
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intimée,
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Commune de Roche,
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Municipalité, rue des Salines 2A, Les Saulniers - Case postale 27, 1852 Roche VD, représentée par Me Jacques Haldy, avocat,
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galerie St-François A, 1003 Lausanne.
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Objet
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Permis de construire, contrôle préjudiciel de la planification,
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recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud
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du 19 février 2020 (AC.2019.0109).
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Faits : | |
A. La Commune de Roche est propriétaire des parcelles nos 9 et 744 du cadastre communal. Celles-ci sont affectées à la zone de village B au sens du règlement communal du 4 mai 1984 sur le plan d'extension, la police des constructions et l'attribution des degrés de sensibilité au bruit (RPE), approuvé par le Conseil d'Etat du canton de Vaud le 3 avril 1985.
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La parcelle n o 9, d'une surface de 5'607 m˛, supporte un bâtiment industriel d'une surface au sol de 795 m˛ ainsi que trois garages, tandis que la parcelle no 744, d'une surface de 2'138 m˛, est vierge de toute construction.
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Ces deux biens-fonds se situent dans la partie nord du village de Roche, le long de la rue des Vurziers, parallèle à la route cantonale côté montagne, de part et d'autre du chemin de la Buanderie. Au nord de ces parcelles, un secteur colloqué en zone industrielle s'étend d'un côté de l'autre de la rue des Vurziers de même qu'entre celle-ci et la route cantonale. Ce secteur est construit de nombreux bâtiments industriels.
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Depuis la parcelle n o 9, un immeuble récent est visible en direction de la Vallée du Rhône. Un autre immeuble est en construction au nord-est. A proximité, au sud, se trouve encore un immeuble d'habitation. La parcelle n o 9 se situe dans un environnement "largement bâti", non loin du centre du village et de l'église, distants d'environ 200 m en ligne droite.
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Quant à la parcelle no 744, elle jouxte à l'ouest le bien-fonds no 745, constitué en copropriété par étages "A.________". Les lots de cette PPE appartiennent à B.________ SA (lot 1, locaux d'exploitation hôtelière) ainsi qu'à C.________ et D.________ (en propriété individuelle ou en propriété commune) pour les appartements des étages constituant les lots 2 à 5.
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B. La Commune de Roche a organisé un concours d'architecture pour la mise en valeur des parcelles nos 9 et 744. E.________ SA l'a remporté avec un projet réalisé par F.________ SA; un contrat de vente à terme portant sur les deux parcelles précitées a été conclu avec la Commune de Roche, vente subordonnée à l'obtention du permis de construire litigieux. Après réalisation du projet, un fractionnement des parcelles serait opéré, les nouvelles limites de la parcelle no 744 permettant d'inclure l'intégralité du bâtiment prévu, tandis que la parcelle no 9 supporterait l'actuel bâtiment industriel.
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Le 20 juin 2016, la Commune de Roche, en qualité de propriétaire, et E.________ SA, en qualité de promettant-acquéreur, ont déposé une demande de permis de construire un ensemble résidentiel de 70 logements avec parking souterrain de 85 places et cinq places de parc extérieures. L'état du foncier serait modifié, la surface de la nouvelle parcelle no 744 augmentant de 2'138 m˛ à 5'069 m˛. Le projet porte sur la réalisation d'un bâtiment d'un seul tenant, qui suit une orientation nord-ouest sud-est. Il implique l'abattage de plusieurs arbres protégés situés sur l'actuelle parcelle no 744.
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L'enquête publique a eu lieu du 29 juin au 28 juillet 2016. Le projet a suscité plusieurs oppositions. Par décisions du 6 avril 2017, la municipalité a levé les oppositions et délivré le permis de construire, lequel a été subordonné à différentes conditions.
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Par arrêt du 29 août 2018 (AC.2017.0192), la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud a admis le recours déposé contre ces décisions par la PPE "A.________ ", B.________ SA, C.________ et D.________. La cour cantonale a annulé le permis de construire au motif que le mur d'embouchature dépassait la hauteur autorisée pour pouvoir qualifier le dernier niveau de combles; les mesures compensatoires relatives à l'abattage des arbres n'étaient par ailleurs pas assez précises; les autres griefs ont au surplus été rejetés.
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C. Du 7 novembre au 6 décembre 2018, la Commune de Roche et E.________ SA ont soumis à l'enquête publique complémentaire le projet suivant: "Abaissement des murs d'embouchature à 1.00 m; suppression de l'étage des surcombles & rangement; changement de la pente des pans de toiture; modifications du nombre de lucarnes et velux".
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Le 6 décembre 2018, la PPE "A.________ ", B.________ SA, C.________ et D.________ ont derechef formé opposition.
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Le 28 janvier 2019, la centrale des autorisations en matière de construction (CAMAC) a délivré sa synthèse selon laquelle les autorisations spéciales requises ont été délivrées moyennant le respect de certaines conditions.
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Par décision du 8 mars 2019, la municipalité a levé les oppositions au projet et délivré l'autorisation de construire, subordonnant celle-ci à différentes conditions. Cette décision fixe notamment, conformément aux exigences définies par la Cour de droit administratif et public, l'arborisation compensatoire.
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D. Le 9 avril 2019, la PPE "A.________ ", B.________ SA, C.________ et D.________ ont recouru contre cette décision à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal, concluant au refus du permis de construire et des autorisations spéciales.
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Le 30 septembre 2019, la constructrice a versé au dossier une "étude complémentaire d'intégration paysagère" établie par le bureau G.________; la municipalité a indiqué avoir approuvé ce rapport et le plan y afférant pour faire partie intégrante de l'autorisation de construire. Le 21 janvier 2020, la constructrice a encore produit une étude complémentaire.
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Après avoir tenu une audience de débats publics, la cour cantonale a, par arrêt du 19 février 2020, rejeté le recours dont elle était saisie et a confirmé la décision municipale du 8 mars 2019.
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E. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la PPE "A.________ ", B.________ SA, C.________ et D.________ demandent principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt attaqué en ce sens que le permis de construire un ensemble résidentiel de 70 logements avec parking souterrain sur les parcelles nos 9 et 744 est refusé. Subsidiairement, ils concluent au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La Municipalité de Roche conclut au rejet du recours. Il en va de même de E.________ SA. A l'issue d'un ultime échange d'écritures, les recourants, d'une part, et la municipalité, d'autre part, ont implicitement persisté dans leurs conclusions respectives.
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Considérant en droit : | |
1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours en matière de droit public est en principe recevable, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. B.________ SA, C.________ et D.________ ont pris part à la procédure de recours devant l'instance précédente (art. 89 al. 1 LTF). En tant que propriétaires de biens immobiliers directement voisins du projet litigieux, ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué, qui confirme l'autorisation de construire délivrée le 8 mars 2019. Ils peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué. Ils bénéficient dès lors de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité étant au surplus réunies, il convient d'entrer en matière. La qualité pour agir de la PPE "A.________ ", qui n'a au demeurant pas été spécifiquement traitée par l'instance précédente, peut par conséquent demeurer indécise.
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2. Dans une série de critiques qu'il convient de traiter conjointement, les recourants se plaignent, en substance, d'un établissement inexact des faits (art. 97 et 105 al. 2 LTF) et d'une violation du droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst.) en lien avec leur grief matériel relatif au contrôle incident de la planification (art. 15 et 21 al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 [LAT; RS 700]).
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2.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer la constatation de faits que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2 p. 190 et les références). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, l'autorité tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503; 134 V 53 consid. 4.3).
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2.2. Selon la jurisprudence, le contrôle incident ou préjudiciel d'un plan d'affectation dans le cadre d'une procédure relative à un acte d'application est en principe exclu. Un tel contrôle est néanmoins admis, à titre exceptionnel, lorsque les conditions d'un réexamen des plans au sens notamment de l'art. 21 al. 2 LAT sont réunies (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.1 p. 44; 121 II 317 consid. 12c p. 346).
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2.2.1. Aux termes de l'art. 21 al. 2 LAT, lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d'affectation feront l'objet des adaptations nécessaires; une modification sensible des circonstances au sens de l'art. 21 al. 2 LAT peut être purement factuelle, mais également d'ordre juridique, comme une modification législative (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.1 p. 44 s. et les références citées; 127 I 103 consid. 6b p. 105). L'art. 21 al. 2 LAT prévoit un examen en deux étapes: la première déterminera si les circonstances se sont sensiblement modifiées au point de justifier un réexamen du plan; si le besoin s'en fait réellement sentir, il sera adapté, dans une deuxième étape (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.1 p. 44 s.; 140 II 25 consid. 3 p. 29; arrêts 1C_40/2016 du 5 octobre 2016 consid. 3.1; 1C_307/2014 du 7 avril 2015 consid. 3.1). A chacune de ces deux étapes, il convient de procéder à une pesée d'intérêts tenant compte, d'une part, de la nécessité d'une certaine stabilité de la planification et, d'autre part, de l'intérêt d'une adaptation des plans aux changements intervenus. Au stade de la première étape, les exigences seront toutefois moins élevées, le caractère sensible de la modification des circonstances devant déjà être admis lorsqu'une adaptation de la planification sur le territoire entre en considération et qu'elle n'est pas d'emblée exclue par les intérêts opposés liés à la sécurité du droit et à la confiance dans la stabilité des plans.
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2.2.2. La réduction de zones à bâtir surdimensionnées relève d'un intérêt public important (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.2 p. 45; 128 I 190 consid. 4.2 p. 198 s. et la référence à l' ATF 120 Ia 227 consid. 2c p. 233), susceptible d'avoir, sur le principe, le pas sur l'intérêt public à la stabilité des plans ainsi que sur les intérêts privés des propriétaires concernés (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.2 p. 45; arrêt 1P.139/1992 du 20 décembre 1993 consid. 7e et les arrêts cités). La réalisation de cet objectif, expressément prévu par la nouvelle du 15 juin 2012 (art. 15 al. 2 LAT), entrée en vigueur le 1
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2.3. La mesure A11 de la 4ème révision du plan directeur cantonal du canton de Vaud (approuvée par le Conseil fédéral le 31 janvier 2018 [FF 2018 961]; ci-après: PDCn) constate que, d'une manière générale, les réserves légalisées de terrains à bâtir sont réparties inégalement entre les communes, et que leur localisation ne répond plus aux critères actuels. Hors des centres, les réserves sont le plus souvent excédentaires. Les communes sont donc tenues de réviser leurs plans d'affectation dans les cinq ans suivant la 4
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3. Il n'est pas contesté que la Commune de Roche fait partie des villages et quartiers hors centre pour lesquels le PDCn admet un taux de croissance de 0,75% de la population 2015 jusqu'au 31 décembre 2036. Selon les informations de l'ancien Service cantonal du territoire (ci-après: SDT; actuellement Direction générale du territoire et du logement [ci-après: DGTL]), que les parties ne discutent pas non plus, la commune dispose d'un potentiel de croissance de 237 habitants jusqu'au 31 décembre 2036, permettant d'atteindre une population totale de 1'744 habitants.
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3.1. Dans son premier arrêt du 29 août 2018 (AC.2017.0192), la cour cantonale a établi que la municipalité avait déjà délivré plusieurs permis de construire depuis le 1er janvier 2016 permettant d'accueillir potentiellement une centaine d'habitants supplémentaires. Il en résultait qu'avec la réalisation du projet litigieux, représentant à lui seul un potentiel de 132 habitants (à raison d'un habitant par 50 m˛; cf. DIT, Fiche Dimensionnement des zones à bâtir d'habitation et mixtes, février 2019, ch. 3 let. e), "la commune aurait probablement déjà utilisé l'entier de son potentiel de croissance jusqu'au 31 décembre 2036" (cf. arrêt cantonal AC.2017.0192 du 29 août 2018 consid. 2c; arrêt attaqué consid. 3b). En dépit de cela, la cour cantonale a écarté le grief des recourants fondé sur l'effet anticipé des plans: la commune n'avait pas projeté l'instauration d'une zone réservée et sa révision du plan général d'affectation n'était pas du tout avancée, de sorte que les conditions d'application de l'art. 77 aLATC (cf. également actuel art. 47 LATC) n'étaient pas réalisées; le SDT ne s'était en outre pas opposé à la délivrance du permis. Les conditions d'un contrôle incident n'étaient par ailleurs pas non plus réalisées. Les parcelles concernées se situaient à proximité du centre du village. Plusieurs constructions récentes existaient de surcroît sur les biens-fonds attenants. Les parcelles étaient en outre équipées. De plus, il n'apparaissait pas que le dépassement du taux de croissance résulterait de permis délivrés au mépris de l'objectif de redimensionnement des zones à bâtir communales.
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Dans l'arrêt attaqué (AC.2019.0109, consid. 3c), le Tribunal cantonal indique ne pas voir de raison de s'écarter de sa première décision (arrêt AC.2017.0192 du 29 août 2018) s'agissant de l'effet anticipé des plans, le nouvel art. 47 LATC n'apportant aucune modification pertinente en l'espèce. Cet aspect, qui relève de l'application du droit cantonal, n'est d'ailleurs plus discuté à ce stade. En ce qui concerne la question du contrôle incident, l'instance précédente a nié que le dépassement du potentiel de croissance à l'horizon 2036 soit de nature à justifier une remise en cause de la planification. Eu égard à la situation des parcelles litigieuses - à la limite entre la zone village et la zone industrielle -, une mesure consistant à empêcher d'y construire serait incompatible avec les exigences définies par le droit fédéral en matière de développement de l'urbanisation vers l'intérieur du milieu bâti (art. 1 al. 2 let. abis LAT), de création d'un milieu bâti compact (art. 1 al. 2 let. b LAT) et de densification des surfaces de l'habitat (art. 3 al. 3 let. abis LAT). La cour cantonale a par ailleurs souligné que la méthode choisie pour la planification directrice, fondée sur des plafonds de population à un horizon donné, entraînait, selon l'Office fédéral du développement territorial (ci-après: ARE), des incitations négatives à la densification vers l'intérieur. Il ne serait dès lors pas envisageable de rendre inconstructible des parcelles se trouvant au sein de la zone à bâtir et entourées de constructions existantes quand bien même le potentiel constructible serait dépassé.
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3.2. Les recourants contestent cette appréciation; ils reprochent plus particulièrement à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte de leurs moyens de preuve, qui démontreraient non seulement que le projet litigieux conduirait nécessairement à un dépassement du potentiel démographique à l'horizon 2036 autorisé par le PDCn, mais également que de nombreux appartements situés dans les promotions autorisées entre 2016 et 2018 seraient, depuis leur réalisation, toujours vacants. Ces éléments, auxquels s'ajoute l'obsolescence du plan communal d'extension, commanderaient de procéder à un contrôle incident de la planification et de refuser l'autorisation de construire litigieuse.
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3.2.1. Comme le relèvent à juste titre les recourants, le plan sur lequel se fonde le permis de construire litigieux a été adopté par l'exécutif cantonal en 1985; l'horizon des 15 ans visé à l'art. 15 LAT apparaît ainsi largement dépassé (cf. ATF 128 I 190 consid. 4.2 p. 199; arrêt 1C_87/2019 du 11 juin 2020 consid. 3.2; voir également THIERRY TANQUEREL, in Commentaire pratique LAT: Planifier l'affectation, 2016, n. 39 ad art. 21 LAT).
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3.2.2. En outre, même si les parcelles concernées se trouvent dans un environnement bâti, à 200 m, en ligne droite du centre du village, cela n'exclut pas nécessairement la possibilité d'un contrôle incident lié à l'entrée en vigueur du nouvel art. 15 LAT et au surdimensionnement de la zone à bâtir communale. Il ne ressort en effet ni du dossier ni de l'arrêt attaqué que ces parcelles se situeraient au sein du territoire urbanisé, délimité par la commune en amont de la révision future de sa planification (cf. PDCn, glossaire, p. 440; DIT, Fiche d'application: Territoire urbanisé, février 2019, ch. 1), auquel la priorité en matière de développement doit en principe être donnée (voir PDCn, p. 46 et p. 49; SDT, Lignes directrices à l'intention des communes vaudoises - Redimensionnement des zones à bâtir, octobre 2015, p.12). Cette situation n'autorisait en particulier pas le Tribunal cantonal à renoncer à instruire la question du dépassement du potentiel démographique à l'horizon 2036, dont se sont expressément prévalus les recourants.
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3.2.2.1. Il est certes exact que le Tribunal fédéral a jugé qu'un tel dépassement n'impliquait pas nécessairement un contrôle incident du plan; il en allait ainsi lorsque les permis de construire délivrés antérieurement à l'autorisation en cause l'avaient été dans le respect des principes définis par le PDCn en matière de redimensionnement et de densification, le dépassement pouvant alors témoigner d'une possible insuffisance des prévisions des besoins en terrains constructibles à 15 ans (cf. arrêt 1C_244/2017 du 17 avril 2018 consid. 2.2.1; PDCn, Mesure A11, p. 49). On ne peut cependant pas en déduire, de manière générale, que le dépassement du potentiel démographique n'aurait pas à être considéré en lien avec la question de l'examen préjudiciel de la planification. La jurisprudence a d'ailleurs déjà eu l'occasion de préciser que ce dépassement pouvait aussi justifier l'instauration d'une zone réservée dans le but de garantir les opérations de redimensionnement (cf. arrêts 1C_94/2020 du 10 décembre 2020; 1C_267/2019 du 5 mai 2020 consid. 3.3); or l'application de l'art. 27 LAT suppose, à l'instar de l'art. 21 al. 2 LAT, la nécessité de l'adoption d'une planification, respectivement de sa révision (cf. ATF 113 Ia 362 consid. 2a/cc p. 366; voir également arrêt 1P.304/1994 du 2 février 1995 consid. 3, publié in Zbl 1996 p. 229; ALEXANDER RUCH, in Commentaire Pratique LAT: Planifier l'affectation, n. 31 ad art. 27 LAT).
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3.2.2.2. Un dépassement manifeste du potentiel démographique à l'horizon 2036 témoigne ainsi non seulement de l'intérêt d'une adaptation du plan, mais également d'une gestion du développement territorial contraire aux données et prescriptions du PDCn. Dans ce contexte, la délivrance d'une autorisation supplémentaire est susceptible de conduire à une aggravation de la situation de surdimensionnement. Cette circonstance doit par conséquent être prise en considération dans la pesée des intérêts que suppose le contrôle incident (cf. art. 21 al. 2 LAT), non seulement lorsque les permis délivrés antérieurement l'ont été au mépris des principes en matière de densification (cf. arrêt 1C_244/2017 du 17 avril 2018 consid. 2.2.1), mais également s'ils ne répondent à aucune demande concrète, comme le soutiennent les recourants, qui arguent d'un taux de vacance important. En effet, dans une telle situation, il n'apparaît pas d'emblée qu'un intérêt public prépondérant justifie ce dépassement (cf. PDCn, mesure A11, p. 48) ni que celui-ci révélerait une insuffisance des prévisions des besoins en terrains constructibles. On relèvera à cet égard que l'augmentation prochaine de la population prétendument entraînée par la création du parc technologique et industriel des Vernes et l'implantation de l'Hôpital Riviera-Chablais, dont se prévaut la commune, relève à ce stade de la pure hypothèse; ces éléments pourront le cas échéant être pris en considération lors de la révision de la planification générale, qu'il est ainsi dans l'intérêt de la commune d'entreprendre rapidement (cf. réponse du Conseil d'Etat du canton de Vaud du 31 janvier 2018 à l'interpellation Didier Lohri [17_INT_061], p. 2 s.).
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3.2.3. Par ailleurs, que le Conseil fédéral ait estimé que la méthodologie de dimensionnement fondée sur des plafonds de population à un horizon donné, choisie par le planificateur vaudois, entraînait des incitations négatives au développement vers l'intérieur (cf. ARE, rapport d'examen du plan directeur du canton de Vaud du 16 janvier 2018, p. 24; décision d'approbation du Conseil fédéral du 31 janvier 2018, ch. 9 let. h) n'y change rien et ne permettait en particulier pas non plus au Tribunal cantonal de faire l'économie d'une instruction complète s'agissant du dépassement du potentiel démographique: en effet, dans le cadre de la pesée des intérêts commandée par le contrôle incident, cet aspect est pris en compte, le dépassement éventuel devant être mis en balance également avec les principes de développement vers l'intérieur, de création d'un milieu bâti compact et de densification (cf. art. 1 al. 2 let. abis, 1 al. 2 let. b LAT et 3 al. 3 let. abis LAT) - spécialement lorsque les parcelles concernées se situent au sein d'un milieu bâti -, la réduction de la zone constructible n'étant pas le seul objectif poursuivi par la LAT (cf. art. 1 et 3 LAT; voir également ATF 144 II 41 consid. 5.3 p. 47).
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3.2.4. Enfin et dès lors que la conformité de l'affectation en zone à bâtir doit également s'examiner à l'échelle supracommunale (cf. art. 15 al. 3 LAT; HEINZ AEMISEGGER/SAMUEL KISSLING, in Commentaire pratique LAT: Planifier l'affectation, 2016, n. 71 ad art. 15 LAT; Message du Conseil fédéral du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la LAT, FF 2010 ch. 2.4 p. 982), la délivrance récurrente de permis de construire au mépris du potentiel démographique peut aboutir à une délimitation non conforme du territoire constructible non seulement à l'échelle communale, mais également au détriment d'autres communes, le PDCn évoquant, à ce sujet, la nécessité d'une compensation avec le territoire de localités qui n'utiliseraient pas leur potentiel (cf. PDCn, mesure A11, p. 48).
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3.3. En définitive, sur le vu des considérations qui précèdent, la cour cantonale ne pouvait, dans le cas particulier, renoncer à éclaircir la question du dépassement démographique à l'horizon 2036, et ce indépendamment de la situation des parcelles au sein du milieu bâti. Les recourants ont en effet produit une série d'éléments susceptibles de confirmer non seulement l'existence d'un tel dépassement, mais également que de nombreux logements créés, sur le territoire communal, depuis 2015, et conduisant aujourd'hui à ce dépassement, demeuraient vacants. En n'instruisant pas cet aspect du dossier, la cour cantonale a établi de manière insuffisante les faits sur des éléments propres à influer sur le sort de la cause (art. 95 et 105 al. 2 LTF). Le grief doit par conséquent être admis pour ce motif.
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La cause doit dès lors être renvoyée au Tribunal cantonal pour qu'il instruise la question du potentiel constructible à l'horizon 2036, ainsi que celle de la vacance des logements récemment autorisés par la commune (dans la fourchette de l'horizon de planification 2015-2036 - cf. DIT, Fiche d'application: Dimensionnement des zones à bâtir, Février 2019, ch. 2). Ceci fait, procédant à la pesée des intérêts commandée par l'art. 21 al. 2 LAT, il lui appartiendra de déterminer si les éléments ainsi mis en lumière - confrontés notamment aux objectifs de développement vers l'intérieur et de densification (cf. art. 1 al. let. abis, 1 al. 2 let. b et 3 al. 3 let. abis LAT) - laissent apparaître que la planification n'est plus adaptée au vu de l'évolution des circonstances, en particulier au regard des exigences de la LAT en matière de réduction de la zone à bâtir surdimensionnée (art. 15 al. 2 LAT); en d'autres termes, il s'agira de déterminer si les conditions d'entrée en matière pour un contrôle incident (première étape) sont réalisées et, le cas échéant, il faudra procéder à cet examen (deuxième étape). A cet égard, conformément au PDCn, la cour cantonale est invitée à interpeler et à obtenir les déterminations de la DGTL, en sa qualité d'autorité cantonale compétente spécialisée (cf. PDCn, Mesure A11, Compétences, p. 51).
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4. Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants. Compte tenu de l'issue du litige, il n'est pas nécessaire, à ce stade, d'examiner les autres griefs invoqués par les recourants. Les frais de justice sont arrêtés à 4'000 fr. Ceux-ci sont mis à la charge de l'intimée à raison de 2'500 fr., et pour le solde, à la charge de la commune, qui intervient également en qualité de promettant-vendeur des parcelles litigieuses (art. 66 al. 1 et 4 LTF). L'intimée et la commune verseront en outre des dépens aux recourants, qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 4 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé. La cause est renvoyée à l'instance précédente pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée, à raison de 2'500 fr., et à la charge de la Commune de Roche, à hauteur de 1'500 fr.
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3. Une indemnité de 3'000 fr. est allouée aux recourants, solidairement entre eux, à titre de dépens, à la charge de l'intimée, à raison de 2'000 fr., et à la charge de la Commune de Roche, à hauteur de 1'000 fr.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la Commune de Roche, ainsi qu'à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 9 février 2021
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Kneubühler
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Le Greffier : Alvarez
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