BGer 1B_628/2020 | |||
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BGer 1B_628/2020 vom 15.04.2021 |
1B_628/2020 |
Arrêt du 15 avril 2021 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Chaix, Juge présidant,
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Müller et Merz.
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Greffière : Mme Kropf.
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Participants à la procédure
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Banque A.________ SA, représentée par Mes Carlo Lombardini et Alain Macaluso, avocats,
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recourante,
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contre
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Ministère public de la Confédération, route de Chavannes 31, case postale, 1001 Lausanne,
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Police judiciaire fédérale, route de Chavanne 31, case postale, 1001 Lausanne.
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Objet
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Procédure pénale; actes de la Police judiciaire fédérale,
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recours contre la décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral du 5 novembre 2020 (BB.2020.240).
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Faits : | |
A. Depuis le 5 novembre 2018, le Ministère public de la Confédération (ci-après : MPC) mène une instruction pénale contre la Banque A.________ SA et l'une de ses employées, pour complicité de corruption d'agents publics étrangers (art. 25 et 322septies CP), ainsi que pour blanchiment d'argent aggravé (art. 305bis ch. 1 et 2 CP en relation avec l'art. 102 al. 2 CP). Cette enquête est en lien avec le scandale de corruption lié à la société sud-américaine semi-étatique B.________; dans ce cadre, diverses sociétés actives dans les domaines pétrolier et de la construction sont soupçonnées d'avoir payé des pots-de-vin à des hauts cadres de B.________, notamment au travers et sur des comptes ouverts auprès de la Banque A.________ SA en Suisse. Le 25 juillet 2019, le MPC a étendu l'instruction de ces infractions à l'encontre d'un autre employé de la banque, soit C.________.
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Dans ce cadre, le MPC a établi, le 10 octobre 2019, quatre mandats de perquisition et de mise en sûreté visant :
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1. le ou les lieu (x) de travail de C.________ se trouvant au siège de la Banque A.________ SA à U.________ (ci-après : mandat n° 1);
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2. le siège de la banque précitée à U.________ (ci-après : mandat n° 2);
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3. le ou les lieu (x) de travail de C.________ dans les locaux des succursales de la Banque A.________ SA sises à V.________ (ci-après : mandat n° 3);
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4. le domicile de C.________ à W.________ (ci-après : mandat n° 4).
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Ces perquisitions ont été effectuées le 22 octobre 2019 par la Police judiciaire fédérale (ci-après : PJF). Sur requête notamment de la banque, les éléments saisis en lien avec les mandats nos 1, 3 et 4 ont été placés sous scellés. La banque ayant fait valoir son droit de ne pas collaborer, aucun élément n'a été saisi lors de la perquisition de son siège à U.________ (mandat n° 2). Cette dernière perquisition a fait l'objet de discussions entre les défenseurs de la Banque A.________ SA - contactés par téléphone - et les inspecteurs de la PJF; il en ressort en substance que la banque contestait le comportement adopté par les policiers, lesquels auraient violé, par leurs demandes, son droit de ne pas s'auto-incriminer (cf. le procès-verbal de la perquisition, le rapport explicatif et le courrier du 22 octobre 2019 de l'avocat de la banque).
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Par requête du 11 novembre 2019, le MPC a saisi le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud (ci-après : Tmc) de deux demandes de levée des scellés concernant l'ensemble des documents saisis et bénéficiant de cette protection (cf. les mandats nos 1, 3 et 4). Le Tmc a suspendu, le 17 décembre 2019, cette procédure jusqu'à droit connu sur le recours déposé le 1er novembre 2019 par la Banque A.________ SA contre les quatre mandats de perquisition auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (ci-après : la Cour des plaintes ou le Tribunal pénal fédéral).
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Le 29 avril 2020, la Cour des plaintes a déclaré ce recours irrecevable. Par arrêt du 22 septembre 2020 (cause 1B_275/2020), le Tribunal fédéral a partiellement admis, dans la mesure où il était recevable, le recours formé par la Banque A.________ SA contre cette décision. Il l'a annulée dans la mesure où la Cour des plaintes ne se prononçait pas sur la recevabilité du recours en lien avec les griefs soulevés contre les actes de la PJF; la cause a été renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle procède à l'examen des conditions de recevabilité du recours sur ces comportements et, le cas échéant, entre en matière (cf. consid. 3.5 et 4). Pour le surplus, l'arrêt attaqué a été confirmé (cf. consid. 3.3, 3.4 et 4).
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B. Invitée à déposer d'éventuelles observations, la Banque A.________ SA s'est déterminée le 16 octobre 2020, concluant à la constatation que les actes accomplis le 22 octobre 2020 [recte 2019] par la PJF en exécution du mandat n° 2 avaient violé l'interdiction de ne pas s'auto-incriminer.
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Le 5 novembre 2020, la Cour des plaintes a rejeté le recours, dans la mesure de sa recevabilité, en tant qu'il concernait les actes de la PJF. Elle a constaté l'absence d'un intérêt juridique actuel, ainsi que pratique à recourir et a laissé ouverte la question de savoir s'il existait un intérêt public suffisamment important justifiant l'entrée en matière indépendamment de la réalisation de cette condition (cf. consid. 3.4 p. 10 s.). Sur le fond, elle a considéré que la PJF n'avait eu recours à aucune menace ou moyen de contrainte illicite; aucune saisie ou copie forensique n'avait en outre été effectuée, la PJF ayant ainsi respecté le choix de la banque de ne pas collaborer (cf. consid. 4.3 p. 12 s.).
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C. Par acte du 7 décembre 2020, la Banque A.________ SA forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant à la constatation que les actes accomplis le 22 octobre 2019 par la PJF, en exécution du mandat de perquisition de son siège à U.________, ont violé son droit de ne pas s'auto-incriminer, ainsi que le droit fédéral. A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente.
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Invitée à se déterminer, l'autorité précédente a renvoyé aux termes de sa décision, sans formuler d'observations. La PJF s'en est remise à l'appréciation du Tribunal fédéral. Quant au MPC, il a conclu au rejet du recours, en se référant aux pièces de la procédure dont ses observations du 14 octobre 2020 et la décision attaquée. Ces écritures ont été communiquées à la recourante le 28 janvier 2021.
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Considérant en droit : | |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 145 I 239 consid. 2 p. 241).
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1.1. Selon l'art. 79 LTF, le recours en matière pénale est recevable contre les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral qui portent sur des mesures de contrainte, soit notamment les décisions relatives à des perquisitions (ATF 143 IV 85 consid. 1.2 p. 87). Tel est le cas en l'occurrence même si la recourante ne conteste pas la validité du mandat de perquisition (n° 2), puisque l'arrêt attaqué confirme en substance la licéité des actes opérés par la PJF lors de son exécution (voir également ATF 132 IV 63 consid. 5.2 p. 68 s.).
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1.2. Contrairement à ce que soutient la recourante, la décision attaquée n'est pas finale (cf. art. 90 LTF), puisqu'elle ne met pas un terme à la procédure pénale ouverte notamment à son encontre. Le prononcé entrepris est donc de nature incidente et le recours au Tribunal fédéral n'est ainsi en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'étant pas applicable en l'occurrence).
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En matière pénale, un tel préjudice se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1 p. 130). Selon la jurisprudence, toute mesure de contrainte n'entraîne pas par principe un tel préjudice (ATF 136 IV 92 consid. 3.3 p. 95; arrêt 1B_521/2019 du 14 novembre 2019 consid. 2) et il incombe dès lors au recourant de démontrer l'existence d'un tel préjudice lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (ATF 141 IV 289 consid. 1.3 p. 292; 284 consid. 2.3 p. 287).
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1.2.1. A cet égard, la recourante soutient en substance qu'en l'absence de toute saisie, la question du comportement litigieux de la PJF - laquelle aurait violé la garantie de ne pas s'auto-incriminer (cf. les art. 113 CPP, 6 par. 1 et 2 CEDH, 14 ch. 3 let. g Pacte ONU II et 29 al. 1 Cst.) - ne pourrait pas être revue dans une autre décision ultérieure, notamment celle mettant un terme à la procédure pénale. Selon la recourante, si tel devait être le cas, elle se verrait en outre opposer le défaut d'intérêt juridique à l'examen de cette problématique vu l'écoulement du temps. La recourante affirme également avoir des raisons sérieuses de craindre que les agissements reprochés à la PJF se reproduisent à l'avenir.
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1.2.2. Tout d'abord, faute de saisie au siège de la recourante le 22 octobre 2019, un préjudice irréparable ne découle pas en l'occurrence de l'éventuelle exploitation - notamment à charge - de moyens de preuve obtenus éventuellement illicitement à la suite des comportements reprochés à la PJF (cf. art. 140 et 141 CPP; voir pour un exemple, arrêt 1B_234/2018 du 27 juillet 2018).
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Il n'est certes ensuite pas exclu - ainsi que l'a retenu l'autorité précédente (cf. consid. 3.4 p. 10 de l'arrêt attaqué) - que d'autres mandats de perquisition puissent être ordonnés par le MPC à l'encontre de la recourante et que ceux-ci soient ensuite exécutés par la PJF. Si tel devait être le cas et dans la mesure où la recourante, assistée par des mandataires professionnels, ne serait pas à même de faire valoir ses droits au cours de cette/ces future (s) perquisition (s), elle n'est manifestement pas dénuée de tout droit : elle peut ainsi faire valoir ses arguments contre la perquisition et son déroulement dans le cadre de la procédure de levée des scellés qui pourrait en découler ou dans celle relative à une éventuelle décision de séquestre (ANDREAS J. KELLER, in DONATSCH/SUMMERS/LIEBER/WOHLERS [édit.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 3e éd. 2020, n° 16 ad art. 244 CPP; CATHERINE HOHL-CHIRAZI, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, no 48 ad art. 244 CPP). Elle peut également invoquer, notamment devant le juge du fond, le caractère inexploitable de moyens de preuve obtenus de manière prétendument illicite. Il s'ensuit que l'hypothèse de la répétition d'éventuels actes litigieux de la part de la PJF - pure conjecture au demeurant - ne permet pas d'établir un préjudice irréparable qu'aucune décision ultérieure ne serait à même de réparer.
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Enfin, dans la mesure où la recourante ne dispose d'ores et déjà pas d'un intérêt actuel et pratique (cf. ch. 51 ss de son recours relatifs aux conditions permettant exceptionnellement l'entrée en matière indépendamment de la réalisation de cette condition; voir également consid. 3.4 p. 10 s. de l'arrêt attaqué), l'écoulement du temps qui pourrait lui être opposé ne suffit pas pour établir l'existence d'un préjudice irréparable. Cela vaut d'autant plus si la constatation demandée en lien avec les actes du 22 octobre 2019 pourrait finalement ne tendre qu'à l'obtention d'une éventuelle indemnité au sens de l'art. 431 CPP, question entrant dans la compétence du juge du fond (ATF 140 I 246 consid. 2.5.1 p. 250; arrêt 1B_207/2020 du 26 mai 2020 consid. 1; MIZEL/RÉTORNAZ, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 13 ad art. 431 CPP, auteurs soutenant qu'un prévenu n'est pas astreint à exercer tous les recours à sa disposition dans le seul but d'obtenir un constat d'illicéité dont il pourra se prévaloir ultérieurement; WEHRENBERG/FRANCK, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnug, Art. 195-457 StPO, 2e éd. 2014, n° 3b ad art. 431 CPP).
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Au regard de ces considérations, la recourante ne subit aucun préjudice irréparable justifiant l'entrée en matière immédiate sur ses griefs en lien avec le déroulement de la perquisition opérée le 22 octobre 2019 et le recours est irrecevable.
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2. Il s'ensuit que le recours est irrecevable.
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La recourante, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est irrecevable.
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2. Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, au Ministère public de la Confédération, à la Police judiciaire fédérale et à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral.
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Lausanne, le 15 avril 2021
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant : Chaix
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La Greffière : Kropf
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