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Informationen zum Dokument  BGer 4C.9/1999  Materielle Begründung
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BGer 4C.9/1999 vom 16.03.2000
 
«AZA 0»
 
4C.9/1999
 
Ie C O U R C I V I L E
 
****************************
 
16 mars 2000
 
Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et Corboz, juges. Greffière: Mme Charif Feller.
 
____________
 
Dans la cause civile pendante
 
entre
 
1. les époux R.________, demandeurs et recourants principaux,
 
représentés par Me Félix Paschoud, avocat à Lausanne,
 
2. Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, rue Caro-
 
line 9, à Lausanne, intervenante,
 
et
 
la Société X.________, défenderesse et recourante par voie de jonction, représentée par Me Edmond C.M. de Braun, avocat à Lausanne;
 
(contrat de travail; résiliation immédiate)
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
 
les f a i t s suivants:
 
A.- La société X.________ (défenderesse) a toujours confié l'exploitation de sa buvette de sport à un couple qui, à chaque fois, a d'abord oeuvré au bénéfice d'une patente provisoire en attendant d'obtenir le certificat de capacité. Par contrat de travail signé le 12 mars 1990, conclu pour durer du 1er avril 1990 jusqu'au 31 mars 1991 et renouvelable tacitement d'année en année, la défenderesse a engagé les époux R.________ (demandeurs) en qualité d'employés responsables du club-house et de l'ensemble de ses installations sportives. Les diverses tâches des demandeurs faisaient l'objet d'un cahier des charges précis, formant partie intégrante du contrat. L'horaire de travail quotidien prévu dans celuici allait de 7h. 45 à 23 h. Durant les périodes de 11h. 30 à 14h. 30 et de 18h. 30 à 20h. 30, la présence de deux personnes était requise. La défenderesse a attiré l'attention des demandeurs sur les conditions à remplir pour obtenir la patente. Ceux-ci lui ont dissimulé le fait qu'ils étaient débiteurs de 17 actes de défaut de biens. Au cours des mois qui ont suivi leur engagement, les demandeurs se sont notamment plaints de leur horaire de travail. En dehors des tournois et autres manifestations, la défenderesse a toujours refusé de tenir compte d'heures supplémentaires, considérant que les demandeurs n'avaient qu'à s'organiser entre eux. A cet égard, l'inspecteur de l'office cantonal de l'emploi a précisé que le contrat lui-même générait des heures supplémentaires constantes. Par la suite, la défenderesse a émis des critiques sur le travail exécuté par les demandeurs, mais n'a fait aucune réserve au sujet de leur situation financière, malgré la saisie opérée sur le salaire de sieur R.________ dont elle était au courant (art. 64 al. 2 OJ). Par lettre du 19 octobre 1990, les demandeurs ont notam-
 
ment requis le paiement de certaines heures supplémentaires. Par courrier séparé, daté du même jour, ils ont sollicité l'intervention de l'inspecteur de l'office cantonal de l'emploi et ont exprimé leur souhait de "faire cesser cette situation et par là même rompre le contrat". L'inspecteur est intervenu sur place le 26 octobre 1990 et a constaté de très nombreuses infractions de la défenderesse notamment à la législation sur le travail. Il a précisé que les demandeurs ne voulaient pas continuer à travailler dans ces conditions et entendaient s'en aller s'ils n'obtenaient pas des conditions normales. Dans son rapport d'enquête il a écrit ce qui suit:
 
"Il n'y a plus aucun rapport de confiance. Les par-
 
ties conviennent de trouver un accord amiable et de
 
rompre le contrat aussitôt que possible.
 
(......)
 
M. L.________ [président de la défenderesse] doit
 
en référer à son comité et proposera une date de
 
rupture tenant compte des intérêts de l'établisse-
 
ment et de M. R.________ qui doit sans tarder se
 
mettre en recherche de travail!
 
(.....)"
 
Les demandeurs ont quitté leur travail et rendu les clés le 29 octobre 1990. Il n'a pas été établi qu'ils ont offert de continuer à travailler. Le conseil de la défenderesse leur a adressé une lettre, datée du 29 octobre 1990, dont la teneur est la suivante:
 
"........, je me vois contraint de vous confirmer
 
l'avis mutuellement exprimé par les parties, mani-
 
festant réciproquement vouloir mettre un terme au
 
contrat qui les lie, avec effet immédiat.
 
Ma cliente déclare avoir adhéré à cette résolution
 
commune, dans la mesure notamment où elle a dû
 
constater - contre toute attente - que vous ne rem-
 
plissiez (ni l'un ni l'autre) les conditions per-
 
sonnelles requises par la loi, pour l'obtention de
 
la patente nécessaire à l'exploitation de la buvet-
 
te. La confiance mutuelle que présuppose l'exécu-
 
tion régulière du contrat, exécution rendue impos-
 
sible par des faits nouveaux inhérents à vos per-
 
sonnes, rend incompatible la poursuite de cette
 
relation.
 
En foi de quoi et compte tenu de la résiliation im-
 
médiate intervenue d'accord entre parties, il con-
 
vient d'arrêter mutuellement les comptes à la date
 
de cette résiliation.
 
(.......)
 
D'ores et déjà, j'observe que votre contrat de tra-
 
vail est lié à l'usage d'un logement qui est mis à
 
votre disposition et à vos frais, par ma cliente.
 
Compte tenu de la résiliation du contrat principal,
 
cela entraîne également celui ayant trait au loge-
 
ment, qu'il vous appartient d'évacuer à votre plus
 
proche convenance et au plus tard à l'échéance du
 
30 novembre 1990.
 
(.......)"
 
Les demandeurs ont admis en cours de procédure que le contrat de travail a pris fin le 29 octobre 1990, soit sept mois après leur engagement. Par courrier du 31 octobre 1990, leur conseil a contesté que la résiliation immédiate soit intervenue d'entente entre les parties. Le 16 novembre 1990, la défenderesse a notamment précisé que le contrat de travail, dénoncé pour justes motifs, est de surcroît entaché de nullité pour erreur essentielle et de dol. Selon elle, les demandeurs savaient dès le départ qu'ils n'étaient pas habilités à occuper le poste en raison des actes de défaut de biens, dont ils lui ont caché l'existence. B.- Le 14 décembre 1990, les demandeurs ont assigné la défenderesse en paiement de 80 000 fr., avec intérêts, à titre de salaires jusqu'au 31 mars 1991 ainsi que de diverses indemnités pour vacances, heures supplémentaires, jours fériés, congés non pris et en cas de grossesse.
 
La Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, intervenante, a conclu au paiement par la défenderesse de la totalité des indemnités versées aux demandeurs du 1er novembre au 31 mars 1991, somme qui sera imputée sur le montant de 70 000 fr., alloué à ceux-ci.
 
La défenderesse a conclu à ce que les demandeurs et l'intervenante soient déboutés de toutes leurs prétentions. Elle a déclaré opposer en compensation une créance de 2841 fr.30, correspondant à des montants versés en trop aux demandeurs.
 
Par jugement du 12 mai 1998, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a condamné la défenderesse au paiement de 9473 fr.50, avec intérêts, sous déduction des charges sociales et de la somme de 5251 fr.50, allouée à l'intervenante.
 
Par arrêt du 1er juillet 1999, la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le recours en nullité des demandeurs contre le jugement de la Cour civile et rejeté dans la mesure où il est recevable celui de la défenderesse.
 
C.- Les demandeurs interjettent un recours en réforme au Tribunal fédéral. Ils concluent principalement à la réforme du jugement entrepris, en ce sens que la défenderesse leur paiera la somme de 55 811 fr.20, avec intérêts, sous déduction des charges sociales et des montants alloués à l'intervenante. Subsidiairement, ils requièrent l'annulation du jugement entrepris et le renvoi de la cause à la Cour civile pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
 
L'intervenante requiert l'admission des conclusions des demandeurs et l'allocation des montants qu'elle leur a avancés. La défenderesse propose le rejet du recours. Agissant par la voie du recours joint, elle conclut, principalement, à la réforme du jugement cantonal, en ce sens qu'elle devra verser aux demandeurs la somme de 3973 fr., sous déduction des charges sociales. A titre subsidiaire, la défende-
 
resse conclut à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à la Cour civile pour nouvelle décision dans le sens des considérants. L'intervenante et les demandeurs proposent le rejet des conclusions de la défenderesse.
 
C o n s i d é r a n t e n d r o i t :
 
1.- a) En l'espèce, la cour cantonale a constaté que la défenderesse était au courant de la situation financière des demandeurs et qu'elle n'a pas réagi immédiatement, de sorte qu'elle ne saurait se prévaloir de l'impossibilité d'obtenir une patente comme juste motif de licenciement immédiat. Les juges cantonaux ont estimé que le contrat a pris fin, comme l'ont admis les demandeurs eux-mêmes, le 29 octobre 1990. La cour cantonale a ensuite considéré que pour déterminer le montant de la créance des travailleurs, il fallait rechercher quel aurait été le terme du contrat si une résiliation immédiate injustifiée n'était pas intervenue. Se fondant sur le rapport de l'inspecteur de l'office cantonal de l'emploi, elle a conclu que le 26 octobre 1990, les parties sont convenues de mettre fin aux rapports de travail sans toutefois fixer une échéance laquelle devait, par conséquent, être inférée des circonstances. La défenderesse ayant rappelé dans son courrier du 29 octobre 1990 que le contrat de travail est lié à l'usage d'un logement et que celui-ci doit être libéré au plus tard le 30 novembre 1990, la cour cantonale a déduit de l'absence de contestation de cette exigence par les demandeurs que les parties sont convenues tacitement que les rapports de travail s'achevaient le 30 novembre 1990. b) aa) Les demandeurs invoquent d'abord la violation par la cour cantonale des règles de droit fédéral en matière d'interprétation des contrats. Ils contestent avoir décidé de mettre fin à leurs rapports de travail d'un commun accord avec la défenderesse. A leur avis, les manifestations de volonté exprimées le 26 octobre 1990 ne peuvent être comprises, selon les règles de la bonne foi, qu'en ce sens que les parties sont convenues d'entrer en négociations sur le règlement financier des prétentions des demandeurs et sur la résiliation du contrat. L'accord des parties visait la recherche d'une solution amiable et non la résiliation ellemême.
 
bb) Pour déterminer s'il y a eu effectivement accord entre parties, il y a lieu de rechercher, tout d'abord, leur réelle et commune intention (art. 18 al. 1 CO). Il incombe donc au juge d'établir, dans un premier temps, la volonté réelle des parties, le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Selon les constatations de fait de la cour cantonale, qui lient le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ), la résiliation immédiate injustifiée est intervenue le 29 octobre 1990. Lorsque l'employeur résilie immédiatement le contrat sans justes motifs, le travailleur a droit à ce qu'il aurait gagné, si les rapports de travail avaient pris fin à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée (art. 337c al. 1 CO). En l'espèce, le contrat a été conclu initialement pour une durée déterminée allant du 1er avril 1990 au 31 mars 1991. Toutefois, les faits tels que constatés par la cour cantonale laissent apparaître non seulement la volonté des demandeurs de rompre le contrat avant terme, exprimée antérieurement à la réception de la lettre de licenciement, mais surtout la volonté commune des parties de mettre un terme à leurs rapports de travail avant l'échéance prévue initialement. Ainsi, le rapport établi le 26 octobre par l'inspecteur de l'office cantonal de l'emploi relève notamment que "les parties conviennent de
 
trouver un accord amiable et de rompre le contrat aussitôt que possible". S'agissant de l'abrègement consensuel de leurs rapports de travail, la réelle et commune intention des parties a été donc souverainement établie par la cour cantonale et ne saurait, en tant que constatation de fait, être remise en cause dans le présent recours. 2.- a) Les demandeurs reprochent également à la cour cantonale d'avoir violé les art. 337 ss CO en fixant la fin des rapports de travail au 30 novembre 1990. A leurs yeux, cette date est en contradiction avec celle du 29 octobre 1990, retenue par le jugement entrepris. L'usage du logement de service étant lié au contrat de travail, les demandeurs allèguent qu'ils étaient tenus de libérer ledit logement le 29 octobre 1990 et que ce fait ne peut être interprété comme une manifestation de volonté des parties de rompre le contrat au 30 novembre 1990. De leur avis, en l'absence d'une résiliation d'un commun accord, le contrat de travail ne pouvait prendre fin que le 31 mars 1991, date correspondant à l'échéance de la durée minimale convenue du contrat.
 
b) Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle des parties ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté réelle manifestée par l'autre, il recherchera quel sens les parties pouvaient et devaient donner, selon les règles de la bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (application du principe de la confiance). Cette interprétation se fera non seulement d'après les termes utilisés et leur contexte, mais aussi d'après l'ensemble des circonstances dans lesquelles elles ont été émises; il s'agit d'une question de droit qui peut être revue librement dans un recours en réforme (ATF 125 III 305 consid. 2b p. 308, 435 consid. 2a/aa; 123 III 165 consid. 3a; 122 III 106 consid. 5a p. 108 s.).
 
En l'espèce, la cour cantonale n'a pas pu établir la volonté réelle des parties au sujet de la date censée mettre un terme à leurs rapports de travail. Elle a par conséquent procédé à l'interprétation du passage suivant du courrier de la défenderesse du 29 octobre 1990: "D'ores et déjà, j'observe que votre contrat de travail est lié à l'usage d'un logement qui est mis à votre disposition et à vos frais, par ma cliente. Compte tenu de la résiliation du contrat principal, cela entraîne également celui ayant trait au logement, qu'il vous appartient d'évacuer à votre plus proche convenance et au plus tard à l'échéance du 30 novembre 1990". Au vu de la volonté commune des parties de rompre le contrat aussitôt que possible, le passage susmentionné pouvait raisonnablement et de bonne foi être interprété comme fixant la fin des rapports de travail au plus tard au 30 novembre 1990. Cela est du reste corroboré par l'attitude des demandeurs qui ont restitué les clés du logement le 29 octobre, sans contester ladite échéance comme le relève le jugement entrepris, et qui se sont abstenus d'offrir leurs services à leur employeur par la suite. Dès lors, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en retenant que la date du 30 novembre 1990 correspondait à la fin anticipée des rapports de travail liant les parties. S'agissant de l'indemnité pour résiliation injustifiée (art. 337c al. 3 CO) requise par les demandeurs, la cour cantonale a estimé que ceux-ci portaient une lourde part de responsabilité dans le cadre de leur licenciement, en taisant leurs dettes alors qu'ils s'étaient déjà engagés à suivre les cours pour l'obtention de la patente nécessaire à l'exploitation de la buvette et que la délivrance de ladite patente supposait une bonne situation financière. Compte tenu de cette circonstance et de la particularité du cas présent, à savoir l'existence d'une volonté commune des parties de rompre rapidement le contrat avant son échéance, c'est à juste titre que les juges cantonaux, qui bénéficient d'un large
 
pouvoir d'appréciation dans ce domaine, ont renoncé à condamner l'employeur au versement de cette indemnité. 3.- Dans son recours joint, la défenderesse soutient que les rapports de travail auraient pris fin le 29 octobre et non le 30 novembre 1990, par un accord oral et tacite entre les parties ainsi que par actes concluants des demandeurs. Au vu de ce qui précède, ses arguments, fondés sur une prétendue violation des art. 1 à 40 CO et 2 CC, ne peuvent qu'être rejetés. 4.- La valeur litigieuse dépassant 20 000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 3 CO a contrario). Chacune des parties succombant entièrement en ce qui concerne ses propres conclusions, elle supportera les frais judiciaires afférents à son recours (art. 156 al. 1 OJ). Les demandeurs verseront en outre à la défenderesse une indemnité à titre de dépens réduits (art. 159 al. 3 OJ). Quant à l'intervenante, elle ne supportera ni frais judiciaires ni dépens (art. 69 al. 2 PCF par renvoi de l'art. 40 OJ).
 
Par ces motifs,
 
l e T r i b u n a l f é d é r a l :
 
1. Rejette le recours principal et le recours joint et confirme le jugement attaqué;
 
2. Met un émolument judiciaire de 2000 fr. à la charge des demandeurs et un émolument judiciaire de 1000 fr. à la charge de la défenderesse;
 
3. Dit que les demandeurs, débiteurs solidaires, verseront à la défenderesse une indemnité de 2000 fr. à titre de dépens réduits; 4. Communique le présent arrêt en copie aux parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
 
____________
 
Lausanne, le 16 mars 2000
 
ECH
 
Au nom de la Ie Cour civile
 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
 
Le Président,
 
La Greffière,
 
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