BGer 4C.328/2003 | |||
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BGer 4C.328/2003 vom 23.03.2004 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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4C.328/2003 /ech
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Arrêt du 23 mars 2004
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Ire Cour civile
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Composition
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MM. et Mme les juges Corboz, président, Favre et Kiss.
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Greffière: Mme de Montmollin.
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Parties
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A.________,
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demandeur et recourant, représenté par Me Dominique Rigot,
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contre
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X.________ SA,
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défenderesse et intimée, représentée par Me Jacques Micheli.
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Objet
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Contrat de travail; licenciement abusif.
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Recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 4 juillet 2003.
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Faits:
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A.
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A.a A.________ a accompli un apprentissage d'horloger micro-électronicien chez Y.________SA de 1992 à 1995. Par la suite, il a exercé le métier d'horloger qualifié, et suivi une formation pour les complications. En 1996, il a pris la responsabilité du service après-vente chez "Z.________" à Singapour.
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X.________ SA (ci-après: X.________), dont le siège est en Suisse, est active dans le domaine de l'horlogerie. En 1998, l'un de ses représentants est entré en contact à Singapour avec A.________, à qui il a indiqué divers postes disponibles de responsable technique au service après-vente de la société, l'un en Allemagne, l'autre aux USA, un troisième à Hong Kong. A.________ a donné son congé à "Z.________" le 27 mars 1998 alors qu'il était en discussion avec X.________ au sujet de son engagement; il s'intéressait à un emploi aux USA pour un salaire annuel d'environ 95 000 US$.
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Durant le printemps 1998, A.________ et X.________ se sont adressés divers courriers au sujet des conditions concrètes d'une installation de l'horloger et sa famille aux USA.
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Par contrat de travail du 11 juin 1998, X.________ a engagé A.________ en qualité d'horloger-rhabilleur à temps complet dès le 6 juillet 1998 contre un salaire annuel brut initial de 95 000 fr. La collaboration entre les parties devait débuter par une formation et du travail en atelier en Suisse, entrecoupés de quelques voyages en Floride durant lesquels le travailleur pourrait notamment préparer le déménagement de lui et des siens à Fort Lauderdale, prévu en juillet-août 1999. Le contrat, d'une durée indéterminée, fixait un temps d'essai de trois mois. Ensuite, le délai de congé serait de un mois pour la première année.
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A.b Le 3 mars 1999, X.________ a adressé à A.________ un courrier lui confirmant que ses capacités et aptitudes au travail ne correspondaient pas aux exigences du poste auprès de X.________ of America.
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Le travailleur a contesté les reproches qui lui étaient adressés par lettre du 20 mars 1999.
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Le 29 mars 1999, l'employeur a envoyé au travailleur un pli recommandé dans lequel il se disait "malheureusement dans l'obligation de (lui) confirmer (son) licenciement avec effet au 30 avril 1999, dû à une restructuration".
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L'horloger s'est opposé par écrit à son congé le 9 avril 1999. La société a maintenu sa position.
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B.
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Par demande du 12 octobre 1999, A.________ a assigné X.________ devant la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. Le demandeur réclamait à la défenderesse le paiement de 97'500 fr. avec intérêts à 5 % dès le 30 avril 1999 à titre d'une part d'indemnité pour licenciement abusif au sens de l'art. 336a CO, d'autre part de dommages-intérêts correspondant environ à la différence entre son salaire annuel "suisse" et son salaire annuel "américain".
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La Cour civile a rejeté l'action dans un jugement du 4 juillet 2003. Les juges vaudois ont retenu que le demandeur avait échoué à prouver l'existence d'un motif illégitime de licenciement, soit le dessein de son employeur d'éviter de l'envoyer aux USA et de lui verser un salaire supérieur. Le congé avait en réalité été donné parce que l'employé n'avait finalement pas les compétences nécessaires pour le poste concerné, ce que l'art. 335 al. 1 CO permettait dans la mesure où, comme en l'espèce, le délai de congé avait été respecté.
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C.
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A.________ recourt en réforme au Tribunal fédéral contre le jugement du 4 juillet 2003. Il soutient que la cour cantonale a violé l'art. 336 CO en écartant l'existence d'un licenciement abusif et reprend ses conclusions de première instance sur le fond.
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X.________ propose le rejet du recours.
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La cour cantonale se réfère à ses considérants.
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Parallèlement à cette procédure, A.________ avait déposé auprès de la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois un recours qu'il a déclaré retirer par lettre du 19 novembre 2003.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le jugement rendu par la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois revêt le caractère d'une décision finale qui ne peut faire l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal (cf. art. 451a de la loi de procédure civile vaudoise), soit d'un recours ayant un effet suspensif et dévolutif (ATF 120 II 93 consid. 1b p. 94 s.), de sorte que la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral est ouverte (art. 48 al. 1 OJ), parallèlement à celle d'un éventuel recours extraordinaire de droit cantonal (Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, n° 64).
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Interjeté par un travailleur qui a été débouté de l'ensemble de ses conclusions, le recours porte sur une contestation civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8 000 fr. (art. 46 OJ). Il a été déposé en temps utile (art. 54 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ), si bien qu'il est en principe recevable.
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2.
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Le recours en réforme au Tribunal fédéral est destiné à assurer l'application uniforme du droit fédéral en Suisse, mais pas à refaire le procès de son ensemble. L'état de fait dressé en instance cantonale ne peut en particulier être remis en question par cette voie de droit.
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Ainsi, saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). En dehors de ces exceptions, il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Celui qui s'en prend à une constatation de fait dans le cadre d'un recours en réforme doit établir avec précision, et en se référant aux pièces du dossier, que les conditions prévues par les art. 63 al. 2 ou 64 OJ sont réalisées (ATF 119 II 353 consid. 5c/aa; 115 II 399 consid. 2a, 484 consid. 2a).
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3.
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Selon le principe posé à l'art. 335 al. 1 CO, un contrat de travail de durée indéterminée peut être résilié librement par chacune des parties moyennant respect du délai de congé contractuel ou légal, sous réserve d'abus (cf. ATF 127 III 86 consid. 2a p. 88). En droit suisse prévaut donc la liberté du licenciement, ce qui signifie que, pour être conforme au droit, une résiliation n'a en principe pas besoin de reposer sur un motif particulier, sauf cas d'abus (ATF 125 III 70 consid. 2a p. 72 et les références citées). Un congé est abusif lorsqu'il est donné pour un motif qui figure à l'art. 336 CO, mais cette énumération n'est pas exhaustive (ATF 125 III 70 consid. 2a p. 72; 123 III 246 consid. 3b p. 251 et les références citées, confirmé au consid. 3b non publié de l'ATF 128 III 129 traduit in SJ 2002 I 396). Les motifs véritables pour lesquels un congé est donné relèvent du fait et lient par conséquent le Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme (art. 63 al. 2 OJ; ATF 127 III 86 consid. 2a; 115 II 484 consid. 2b).
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4.
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En l'occurrence, le demandeur ne conteste pas, avec raison (art. 335 CO), la faculté pour l'employeur de se séparer d'un travailleur dont il ne serait pas content des prestations. Il soutient toutefois que c'est à tort que la cour cantonale aurait considéré que son licenciement était en l'espèce fondé sur un tel motif.
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A l'appui de son recours, le demandeur cherche à démontrer qu'il possédait en réalité toutes les qualifications requises pour assumer à satisfaction le poste pour lequel il avait été engagé. Selon lui, l'appréciation de la cour cantonale serait fondée sur une confusion entre le métier d'"horloger rhabilleur", qui est un métier de réparation, et celui de "carrossier", qui est un métier de production. Il aurait été débauché puis engagé comme "horloger rhabilleur" et le fait qu'il ne soit pas suffisamment performant comme "carrossier" n'aurait aucune pertinence. Les carences professionnelles évoquées par la société ne constitueraient qu'un prétexte pour éviter à celle-ci d'avoir à respecter ses obligations contractuelles, soit le versement d'un salaire plus élevé aux USA. Cette conclusion serait renforcée par la raison mentionnée dans la lettre de congé, soit une restructuration, ainsi que par le fait que l'employeur aurait mis en concurrence deux personnes pour le même poste.
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Cette argumentation, dirigée uniquement contre le motif de licenciement retenu dans la décision attaquée, s'épuise en une vaine critique des constatations de fait de la cour cantonale. Celle-ci a admis que rien ne permettait de penser qu'il y aurait eu tromperie dès le départ, en ce sens que la défenderesse n'aurait jamais eu ni l'intention d'envoyer le demandeur en Floride, ni celle de négocier ultérieurement un salaire aux USA calculé selon les normes suisses. Elle a estimé que seul le fait que l'employé ne correspondait finalement pas aux espoirs placés en lui pouvait expliquer le licenciement d'un travailleur payé presque un an pour se former. S'il était possible que la défenderesse ait accéléré le licenciement pour éviter un départ aux USA suivi à brève échéance d'un congé, le but de la résiliation du contrat n'était pas d'éviter une augmentation de salaire promise, mais de se séparer en temps utile d'un employé ne correspondant pas au profil du poste promis. Le Tribunal fédéral est lié par ces constatations de fait dans la présente procédure (art. 63 al. 2 OJ).
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Sur la base de ces éléments de fait, on ne discerne dans le raisonnement de la cour cantonale aucune violation du droit fédéral, singulièrement des art. 336 al. 1 let. c et d CO invoqués par le demandeur. Le recours doit être rejeté.
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5.
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La valeur litigieuse au moment de l'introduction de l'instance était supérieure à 30 000 fr. de sorte que la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 et 3 CO). Vu l'issue de la cause, le demandeur supportera les frais de justice et versera une indemnité de dépens à la défenderesse.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté.
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2.
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Un émolument judiciaire de 5 000 fr. est mis à la charge du recourant.
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3.
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Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 6 000 fr. à titre de dépens.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 23 mars 2004
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Au nom de la Ire Cour civile
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: La greffière:
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