VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 8G.147/2003  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 8G.147/2003 vom 23.03.2004
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
8G.147/2003 /rod
 
Arrêt du 23 mars 2004
 
Chambre d'accusation
 
Composition
 
MM. les Juges Karlen, Président,
 
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
 
Greffier: M. Fink.
 
Parties
 
X.________,
 
plaignant, représenté par Me Jean-Marc Carnicé,
 
avocat,
 
contre
 
Juge d'instruction fédéral, Effingerstrasse 43,
 
Case postale 5959, 3001 Berne,
 
Ministère public de la Confédération,
 
Taubenstrasse 16, 3003 Berne.
 
Objet
 
Ordonnance de séquestre et de production de documents,
 
plainte contre l'ordonnance du Ministère public de la Confédération du 23 avril 2003.
 
Faits:
 
A.
 
Par une ordonnance du 23 avril 2003, le Ministère public de la Confédération (abrégé MPC) a séquestré tous les avoirs de X.________ et de Y.________, déposés sur des comptes ouverts à la banque Z.________; la production des documents touchant aux relations bancaires a également été requise. Interdiction a été faite à la banque de donner des informations sur ces mesures de contrainte. En cas de difficulté, notamment lors d'une demande de sortie de fonds, la banque était invitée à faire patienter ses clients et à prendre contact avec le Procureur fédéral signataire de l'ordonnance. Il est précisé, en tête de celle-ci, que l'enquête de police judiciaire est ouverte pour blanchiment d'argent (art. 305bis CP). Les art. 65, 69 à 71 PPF et 59 CP sont également mentionnés.
 
B.
 
Le 6 novembre 2003, sur requête du MPC, le Juge d'instruction fédéral (P. Perraudin) a ouvert une instruction préparatoire.
 
C.
 
Le 29 décembre 2003, X.________ a saisi la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral d'une plainte (art. 105bis PPF) tendant principalement à l'annulation de l'ordonnance du 23 avril 2003, subsidiairement à autoriser le plaignant à consulter et à copier les pièces pertinentes du dossier, avec octroi d'un délai pour compléter son mémoire; plus subsidiairement, il demande l'annulation de l'ordonnance attaquée et son remplacement par une nouvelle décision de séquestre et de production, limitée quant à la matière et au temps ainsi qu'au montant saisi, en tenant compte de ce qui est strictement nécessaire à l'instruction.
 
En premier lieu, le plaignant expose que le 18 décembre 2003, il s'est enquis auprès de sa banque du motif du blocage de ses avoirs. Le 23 décembre 2003, il a reçu de la banque une télécopie de l'ordonnance du 23 avril 2003.
 
En bref, l'intéressé fait grief au MPC d'avoir violé le droit d'être entendu, faute d'indication des faits à l'origine des soupçons, et d'avoir violé le principe de la proportionnalité ainsi que la garantie de la propriété en ordonnant le séquestre de tous les avoirs, sans distinction.
 
D.
 
Le plaignant a pris contact avec le Juge d'instruction fédéral. De l'échange de correspondance qui s'ensuivit, en particulier de la lettre du magistrat instructeur du 30 janvier 2004, il ressort que la banque elle-même avait annoncé la relation bancaire du plaignant au MPC en application de l'art. 305ter al. 2 CP. En effet, les explications du client, fonctionnaire brésilien, n'avaient pas paru justifier la provenance des importantes sommes déposées (le compte séquestré est créditeur d'un peu plus de USD 1'400'000). Le MPC est saisi de plusieurs autres annonces visant des fonctionnaires fiscaux brésiliens dont les avoirs paraissent d'origine douteuse. En 1998, par exemple, le compte du plaignant a reçu plusieurs montants selon des modalités insolites. Des canaux de compensation semblables ont été utilisés par des fonctionnaires soupçonnés de corruption publique au Brésil. Le Juge d'instruction fédéral estime que les soupçons contre le plaignant sont justifiés en l'état et qu'il appartient à l'intéressé d'apporter toutes les précisions nécessaires sur l'origine des avoirs en compte, cela avant que l'on puisse envisager une levée du séquestre.
 
E.
 
Le MPC, qui a transmis le dossier au Juge d'instruction fédéral, a renoncé à se déterminer. Le magistrat instructeur s'est référé à sa lettre du 30 janvier 2004 adressée au plaignant.
 
F.
 
Le plaignant a sollicité la suspension de la présente procédure afin de réunir les justificatifs nécessaires. Un délai au 24 février 2004 lui a été accordé, mais la suspension n'a pas été ordonnée.
 
Par une lettre du 24 février 2004, le plaignant a déclaré maintenir sa plainte et a indiqué qu'il demanderait le déblocage des fonds et la restitution des documents saisis, après avoir réuni les justificatifs nécessaires. Il précise qu'il n'a pas reçu d'autres explications des motifs de la mesure de contrainte que celles figurant dans la lettre du 30 janvier 2004, émanant du Juge d'instruction fédéral.
 
La Chambre considère en droit:
 
1.
 
La qualité de l'intéressé pour porter plainte selon l'art. 105bis PPF en liaison avec l'art. 214 al. 2 PPF est incontestée. Elle découle en effet du fait qu'il est directement touché par le séquestre de ses avoirs.
 
2.
 
Pour l'essentiel, le plaignant fait valoir une violation de son droit d'être entendu (garanti à l'art. 29 Cst.) car l'absence de l'énoncé des faits à charge ne lui permettrait pas de présenter une défense circonstanciée.
 
Selon la jurisprudence, le séquestre constitue une mesure provisoire (conservatoire), de nature procédurale, destinée à garantir temporairement la conservation des moyens de preuve ou des objets et valeurs patrimoniales qui seront probablement séquestrés (art. 65 PPF; ATF 124 IV 313 consid. 4 p. 316 et la jurisprudence citée). En tant que mesure d'instruction, le séquestre ne nécessite pas une motivation approfondie (voir ATF 120 IV 297 consid. 3e).
 
En l'espèce, l'ordonnance attaquée n'est pas motivée. Cependant, compte tenu de l'échange d'écritures et des courriers du Juge d'instruction fédéral qui ont suivi le dépôt de la plainte, ou ne discerne pas en quoi le plaignant aurait été empêché de présenter une défense circonstanciée. Les motifs de la mesure de contrainte lui ont été indiqués par les lettres du magistrat instructeur des 8 et 30 janvier 2004 et l'occasion lui a été donnée de développer ses griefs devant la Chambre de céans (délai imparti au 24 février 2004). Le vice affectant l'ordonnance de séquestre a dès lors été guéri par la procédure subséquente.
 
Dans ces circonstances, le moyen tiré d'une violation du droit d'être entendu est mal fondé.
 
Il y a lieu néanmoins de relever qu'une telle ordonnance devrait être motivée, même sommairement, en vertu des garanties fondamentales de procédure, ce qui permettrait notamment aux intéressés de se déterminer à son sujet d'emblée en toute connaissance de cause.
 
3.
 
Le plaignant fait grief au MPC d'avoir violé le principe de la proportionnalité et la garantie de la propriété (art. 29 et 26 Cst.) en bloquant l'ensemble des avoirs visés, sans référence à une opération en particulier et sans limitation dans le temps ou quant au montant bloqué.
 
On ne saurait le suivre car, d'une part, le caractère temporaire de la mesure de séquestre ne porte pas matériellement atteinte aux droits patrimoniaux et n'anticipe aucunement une confiscation (ATF 120 IV 297 consid. 3e, 365 consid. 1c avec la jurisprudence et la doctrine citées). D'autre part, pour les motifs indiqués par le Juge d'instruction fédéral, que le plaignant ne réfute pas, on ne discerne pas quelle mesure moins incisive qu'un séquestre serait à même de prévenir la disparition des avoirs, dont l'origine douteuse n'est démentie, en l'état, par aucun élément objectif. Quant à une limitation de la mesure, rien n'indique qu'une partie des fonds au moins proviendrait d'une activité licite ni qu'il se justifierait de limiter le séquestre dans le temps.
 
Ainsi, l'ordonnance du MPC ne viole ni le principe de la proportionnalité ni la garantie de la propriété.
 
4.
 
La plainte doit être rejetée dans toutes ses conclusions. On ne saurait considérer qu'elle ait été portée à la légère au sens de l'art. 219 al. 3 PPF, ce qui exclut la perception d'un émolument judiciaire.
 
Par ces motifs, la Chambre prononce:
 
1.
 
La plainte est rejetée.
 
2.
 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du plaignant, au Juge d'instruction fédéral et au Ministère public de la Confédération.
 
Lausanne, le 23 mars 2004
 
Au nom de la Chambre d'accusation
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).