VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer I 747/2003  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer I 747/2003 vom 22.12.2004
 
Eidgenössisches Versicherungsgericht
 
Tribunale federale delle assicurazioni
 
Tribunal federal d'assicuranzas
 
Cour des assurances sociales
 
du Tribunal fédéral
 
Cause
 
{T 7}
 
I 747/03
 
Arrêt du 22 décembre 2004
 
IIIe Chambre
 
Composition
 
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Lustenberger et Kernen. Greffière : Mme Moser-Szeless
 
Parties
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,
 
contre
 
G.________, intimé, représenté par Me Charles Munoz, avocat, rue du Casino 1, 1401 Yverdon-les-Bains
 
Instance précédente
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
 
(Jugement du 27 octobre 2003)
 
Faits:
 
A.
 
G.________, ressortissant espagnol né en 1949, a travaillé depuis le 1er novembre 1978 comme machiniste au service de la société M.________ SA.
 
Victime d'une chute qui a entraîné une rupture transfixiante du sus-épineux avec tendinopathie du long chef du biceps et du sous-scapulaire, il a subi une acromioplastie (avec réparation du sus-épineux et ténodèse du long chef du biceps droit) le 1er mars 2001. Du 13 juin suivant au 24 juillet 2001, il a séjourné à la Clinique O.________ pour une prise en charge multidisciplinaire. Par la suite, il a repris à mi-temps une activité plus légère auprès de son employeur, jusqu'à ce que celui-ci mette fin à son contrat de travail au 31 juillet 2003.
 
Le 18 octobre 2001, G.________ a présenté une demande de rente de l'assurance-invalidité à l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: office AI). Dans un rapport du 19 février 2002, le docteur C.________, médecin-conseil de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), a estimé qu'une pleine capacité de travail était exigible de l'assuré dans une activité adaptée. Pour sa part, le docteur P.________, médecin traitant, a notamment fait état, en plus de l'atteinte invalidante à l'épaule droite, d'un status après hernie discale L5-S1 avec syndrome déficitaire résiduel en 1989 puis en 1995, et d'une hernie inguinale droite débutante; ces diagnostics étaient mentionnés à titre d'atteintes sans répercussion sur la capacité de travail. Par ailleurs, le médecin traitant a indiqué que la reprise du travail exercé jusque-là par son patient lui semblait illusoire; selon lui, il y avait lieu de prévoir rapidement une reconversion professionnelle qui devait également tenir compte de douleurs dorsales ressenties par le patient (rapport du 19 décembre 2001).
 
Par décision du 16 septembre 2002, confirmée sur opposition de l'assuré (décision du 31 décembre 2002), la CNA lui a alloué une rente d'invalidité fondée sur un taux d'incapacité de gain de 17%.
 
Pour sa part, l'office AI a, dans un projet de décision du 28 août 2002, informé l'assuré qu'il entendait rejeter sa demande de prestations, au motif que son degré d'invalidité évalué à 10,06% était insuffisant à ouvrir le droit à une rente. A la suite de l'opposition de celui-ci, il a confirmé son refus par décision du 23 octobre 2002.
 
B.
 
Saisi d'un recours de G.________, le Tribunal cantonal vaudois des assurances l'a partiellement admis par jugement du 27 octobre 2003. Il lui a reconnu le droit à des mesures de réadaptation professionnelles et renvoyé la cause à l'administration pour qu'elle détermine celles-ci.
 
C.
 
L'office AI interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en concluant à la confirmation de sa décision du 23 octobre 2002.
 
G.________ conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003, n'est pas applicable au présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 23 octobre 2002 (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les arrêts cités). Il en va de même des modifications de la LAI du 21 mars 2003 (4ème révision de la LAI), entrées en vigueur au 1er janvier 2004.
 
2.
 
Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 125 V 414 consid. 1a, 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).
 
En l'espèce, la décision administrative litigieuse a trait uniquement au refus de la rente d'invalidité requise par l'intimé. Toutefois, la juridiction cantonale est entrée en matière sur la conclusion de l'assuré tendant à la mise en oeuvre d'une mesure de réadaptation professionnelle et l'office recourant a eu l'occasion de prendre position à ce sujet dans ses déterminations sur le recours de droit cantonal. Dès lors, la procédure juridictionnelle administrative peut être étendue, pour des motifs d'économie de la procédure, à cette question qui excède le cadre étroit de la contestation (ATF 122 V 36 consid. 2a et les références).
 
3.
 
3.1 Selon l'art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d'une invalidité imminente ont droit aux mesures de réadaptation qui sont nécessaires et de nature à rétablir leur capacité de gain à l'améliorer, à la sauvegarder ou à en favoriser l'usage. Ce droit est déterminé en fonction de toute la durée d'activité probable.
 
L'assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend nécessaire le reclassement et si sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être sauvegardée ou améliorée de manière notable (art. 17 al. 1 LAI). Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui en ont besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou améliorer leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI).
 
3.2 Selon la jurisprudence, une perte de gain durable ou prolongée, dans toute activité exigible ne nécessitant pas une formation professionnelle complémentaire, est suffisante pour ouvrir droit au reclassement dans une nouvelle profession lorsqu'elle est de 20% environ (ATF 124 V 110 consid. 2b et les arrêts cités). Ce taux ne constitue pas une limite absolue. Selon les circonstances du cas particulier, une invalidité légèrement inférieure à 20% peut déjà ouvrir un droit à une mesure de reclassement. Ainsi, dans un arrêt non publié J. du 18 octobre 2000, I 665/99, le Tribunal fédéral des assurances a admis le droit au reclassement d'une assurée encore jeune (35 ans au moment du prononcé de la décision administrative), dotée de capacités permettant un reclassement, et qui présentait un degré d'invalidité de 18,52%.
 
4.
 
4.1 Sur le vu des rapports médicaux versés au dossier, l'intimé n'est plus en mesure d'exercer sa profession de machiniste qui impliquait la manutention de piles de carton dont le poids variait de un à cinquante kilos. Les médecins de la Clinique O.________ ont ainsi conclu à une incapacité de travail totale pour la manutention de carton (rapport du 29 août 2001), ce qu'a confirmé le docteur P.________ dans son rapport du 19 décembre suivant.
 
En ce qui concerne la capacité de travail résiduelle, le médecin-conseil de la CNA a conclu qu'il serait exigible de l'assuré qu'il exerçât à plein temps un travail ne nécessitant pas l'utilisation de l'épaule au-delà de l'horizontale ni la manutention dépassant les 10 kg ou les sollicitations répétées du membre supérieur droit. Il n'y a pas lieu de s'écarter de ces conclusions, dès lors qu'elles ne sont remises en cause par aucune autre pièce médicale au dossier. En particulier, le médecin traitant, après avoir confirmé que les seules atteintes à la santé ayant des répercussions sur la capacité de travail de son patient étaient celles liées à l'accident (rapport du 19 décembre 2001), a mentionné par la suite que tout travail en usine était contre-indiqué en raison des problèmes d'épaule, de dos «ainsi que du pouce gauche» (rapport du 30 avril 2003). A défaut de toute motivation à cet égard, cet avis n'est toutefois pas propre à rendre vraisemblable une atteinte invalidante due à d'autres troubles que ceux liés à l'épaule droite.
 
4.2 La juridiction cantonale a admis un taux d'invalidité de 16,66%, en se fondant sur le degré (non arrondi à 17%) retenu par la CNA, dont elle a repris à son compte le calcul de la comparaison des revenus effectué dans la décision initiale du 16 septembre 2002, entrée en force en cours de procédure cantonale de recours. Tout en admettant que le degré d'invalidité se trouvait «à la limite inférieure» du taux minimal ouvrant droit aux mesures professionnelles, elle a considéré que l'évolution du gain d'invalide futur de l'assuré s'annonçait moins favorable que celle qu'aurait connu son revenu sans invalidité au service du même employeur, ce qui justifiait l'octroi de telles mesures.
 
De son côté, l'office recourant fait valoir que le taux d'invalidité retenu par les premiers juges est très éloigné de celui de 20% consacré par la jurisprudence et que l'intimé, âgé de 53 ans au moment du prononcé de la décision litigieuse, n'aurait exploité sa capacité de gain résiduelle que durant douze ans au maximum. Les conditions requises par la jurisprudence pour admettre le droit de l'intimé à des mesures de reclassement professionnel ne saurait dès lors être remplies selon lui.
 
5.
 
5.1 Comme l'ont à juste titre rappelé les premiers juges, la notion d'invalidité est, en principe, identique en matière d'assurance-accidents, d'assurance militaire et d'assurance-invalidité. Dans ces trois domaines, elle représente la diminution permanente ou de longue durée, résultant d'une atteinte à la santé assurée, des possibilités de gain sur le marché du travail équilibré qui entre en ligne de compte pour l'assuré. L'uniformité de la notion d'invalidité n'a cependant pas pour conséquence de libérer chacune de ces assurances de l'obligation de procéder dans chaque cas et de manière indépendante à l'évaluation de l'invalidité. D'un autre côté, une évaluation entérinée par une décision en force d'un assureur ne peut pas rester simplement ignorée par l'autre assureur qui doit se laisser opposer la présomption d'exactitude de l'évaluation effectuée. Une appréciation divergente de celle-ci ne peut intervenir qu'à titre exceptionnel et seulement s'il existe des motifs suffisants. Peuvent constituer de tels motifs le fait qu'une évaluation repose sur une erreur de droit ou sur une appréciation insoutenable, qu'elle résulte d'une simple transaction conclue avec l'assuré ou de mesures d'instruction extrêmement limitées ou superficielles ou encore qu'elle n'est pas du tout convaincante ou entachée d'inobjectivité (ATF 126 V 293 consid. 2d, 119 V 474 consid. 4a; voir aussi RAMA 2000 n° U 406 p. 402 s. consid. 3, 2001 n° U 410 p. 73 s. consid. 3).
 
5.2 Dans le cadre de la comparaison des revenus qu'il a effectuée, l'assureur-accidents s'est fondé sur les salaires résultant de cinq descriptions de poste de travail (DPT) pour déterminer le revenu d'invalide de l'intimé, qu'il a fixé à 52'000 fr. Selon la jurisprudence, les données salariales qui résultent de tels documents peuvent servir au calcul du revenu d'invalide pour autant que certaines conditions soient remplies. Ainsi, l'assureur doit produire cinq DPT et préciser le nombre total de places de travail documentées entrant en considération pour le handicap donné, les salaires maximum et minimum de celles-ci et le salaire moyen du groupe correspondant (ATF 129 V 480 consid. 4.2.2). En l'occurrence, ces conditions n'ont pas été remplies, de sorte qu'il n'est pas possible de vérifier la représentativité des postes choisis par l'assureur-accidents. Cela constitue un motif suffisant pour écarter les données salariales résultant des DPT en tant que base de calcul pour fixer le revenu d'invalide de l'intimé.
 
5.3 Aussi, convient-il, en l'absence d'un revenu effectivement réalisé, de se référer aux données salariales, telles qu'elles résultent des enquêtes sur la structure des salaires de l'Office fédéral des statistiques (ATF 126 V 76 sv. consid. 3b/aa et bb). En l'espèce, compte tenu de l'activité adaptée de substitution que pourrait exercer l'intimé, le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives dans le secteur privé, soit en 2002, 4557 fr. par mois, part au 13ème salaire comprise (Enquête suisse sur la structure des salaires 2002, [ESS], p. 43, TA1; niveau de qualification 4). Comme les salaires bruts standardisés tiennent compte d'un horaire de travail de quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2002 (41,7 heures; La Vie économique, 6/2004, p. 90, B 9.2), ce montant doit être porté à 4750 fr., ce qui donne un salaire annuel de 57'008 fr. Ce salaire doit encore faire l'objet d'un abattement de 15% afin de tenir compte des limitations liées au handicap de l'intimé, de son âge et de ses années de service. Selon la jurisprudence, lorsque le revenu d'invalide est déterminé uniquement sur la base des données statistiques, il se justifie en effet de s'écarter du salaire brut standard pour la catégorie d'emplois en cause afin de tenir compte des empêchements propres à la personne de l'invalide (ATF 126 V 78 consid. 5). On peut donc retenir un montant de 48'458 fr. à titre de salaire d'invalide.
 
La comparaison avec le revenu sans invalidité de 62'400 fr. retenu par l'assureur-accidents sur la base des renseignements obtenus auprès de l'ancien employeur de l'intimé conduit à un taux d'invalidité de 22,34, soit, arrondi au chiffre en pour cent inférieur (ATF 130 V 122 consid. 3.2), 22%.
 
Ce degré d'invalidité étant supérieur au seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement (supra consid. 3.2), le jugement entrepris peut être confirmé dans son résultat.
 
6.
 
Sur le vu de l'issue du litige, l'intimé, représenté par un avocat, a droit à une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
3.
 
Le recourant versera à l'intimé la somme de 1500 fr. (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance cantonale.
 
4.
 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 22 décembre 2004
 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
 
La Présidente de la IIIe Chambre: La Greffière:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).