BGer 1B_11/2015 | |||
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BGer 1B_11/2015 vom 13.05.2015 | |
{T 0/2}
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1B_11/2015
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Arrêt du 13 mai 2015 |
Ire Cour de droit public | |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
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Merkli et Chaix.
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Greffier : M. Kurz.
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Participants à la procédure | |
A.________, représenté par Me Loïc Parein, avocat,
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recourant,
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contre
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B.B________ et C.B.________,
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D.B.________,
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tous les trois représentés par Me Jacques Barillon, avocat,
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intimés,
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Procureur général du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
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Objet
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procédure pénale; retranchement de pièces du dossier,
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
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de Vaud, Chambre des recours pénale, du 27 novembre 2014.
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Faits : | |
A. A.________ fait l'objet d'une procédure pénale pour assassinat, enlèvement et contrainte sexuelle notamment, commis le 13 mai 2013 sur la personne de E.________. Le 6 décembre 2013, la police cantonale vaudoise a rendu un rapport d'investigation analysant les données téléphoniques et informatiques récoltées jusque-là. Ce rapport mentionne de nombreuses connexions, messages écrits, images et vidéos qui ne sont pas reproduits in extenso. Il contient le descriptif d'une surveillance téléphonique rétroactive (STR) des raccordements attribués à A.________, avec un détail du flux des communications. Un raccordement attribué à la victime a aussi fait l'objet d'une STR. Le rapport relève que les conversations avec A.________ ont été découvertes dans le téléphone de ce dernier et font l'objet de descriptions à ce titre. Le rapport évoque aussi du matériel informatique appartenant à la victime (un PC, un disque dur externe et deux clés USB), considérant qu'il ne contient rien qui pourrait intéresser l'enquête.
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Le 6 février 2014, le défenseur de A.________ a notamment demandé l'accès aux données brutes évoquées dans le rapport de police, ce qui a été refusé par le Procureur général. Par arrêt du 28 mai 2014, la Chambre pénale de recours du Tribunal cantonal vaudois a admis le recours formé par A.________: l'ensemble du matériel examiné par la police faisait partie du dossier. Un refus général de consultation n'était pas justifiable, mais des mesures devaient être prises pour préserver les droits de la personnalité de la victime et de ses proches.
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Une séance de consultation, limitée aux avocats, a été fixée au 15 septembre 2014 en présence d'un inspecteur de police. Le défenseur de A.________ fit savoir qu'il réservait le droit d'accès de son client.
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Par ordonnance du 17 octobre 2014, après avoir entendu les parties, le Procureur général a retranché du dossier pénal la liste des 3314 connexions du numéro de téléphone de la victime, dont la majorité datait d'avant la rencontre avec le prévenu, les autres ressortant également de la surveillance effectuée sur les téléphones de ce dernier. Le Procureur général a également ordonné la restitution du matériel informatique de la victime à sa famille.
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B. Par arrêt du 27 novembre 2014, la Chambre des recours pénale a confirmé cette décision. L'avocat du prévenu ayant eu accès aux pièces - même s'il avait refusé d'examiner le contenu des fichiers -, le droit d'être entendu avait été respecté. Le prévenu n'avait pas clairement expliqué en quoi le listing des connexions pouvait être utile à l'enquête; les documents devaient toutefois être conservés séparément jusqu'à la clôture de l'enquête. S'agissant du matériel informatique - qui ne paraissait pas avoir été formellement versé au dossier -, on ne voyait pas quel élément supplémentaire pouvait en être retiré, les échanges entre la victime et le prévenu figurant déjà au dossier.
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C. A.________ forme un recours en matière pénale contre ce dernier arrêt. Il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert l'assistance judiciaire.
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La Chambre des recours pénale a renoncé à se déterminer. Le Ministère public et les parties plaignantes concluent au rejet du recours. Dans ses dernières déterminations, le recourant persiste dans ses conclusions.
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Considérant en droit : | |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 140 IV 57 consid. 2 p. 59).
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1.1. La décision attaquée a été rendue dans une cause pénale par une juridiction cantonale statuant en dernière instance (art. 80 al. 1 LTF). Le recours en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF est donc en principe ouvert. Le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et les conclusions présentées sont recevables (art. 107 al. 2 LTF). Le prévenu dispose en outre d'un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de l'arrêt attaqué, dès lors qu'il conteste le retrait de certaines pièces du dossier pénal (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF).
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1.2. Une décision relative à l'administration et à l'exploitation des moyens de preuve (art. 139 ss CPP) ne met pas fin à la procédure pénale; elle a donc un caractère incident. Le recours en matière pénale contre une telle décision n'est dès lors recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, soit en présence d'un préjudice irréparable; l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'est généralement pas applicable en matière pénale, et il n'est pas invoqué par le recourant.
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1.2.1. En matière pénale, le préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 137 IV 172 consid. 2.1 p. 173 s.).
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1.2.2. Lorsque, pendant la procédure préliminaire, des moyens de preuve sont retirés du dossier par le Ministère public ou l'autorité de recours (par exemple au motif qu'ils sont considérés comme non exploitables au sens de l'art. 141 al. 5 CPP ou lorsqu'ils sont jugés non pertinents au sens de l'art. 139 al. 2 CPP), le ministère public ou le prévenu ne peuvent recourir immédiatement que dans des circonstances particulières.
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Le Ministère public peut agir lorsqu'il rend vraisemblable que, sans les moyens de preuve écartés, la continuation de la procédure pénale s'en trouverait sérieusement entravée. Tel n'est cependant pas le cas s'il dispose d'autres mesures d'instruction pour continuer la procédure et, cas échéant, rendre une ordonnance de mise en accusation (cf. ATF 139 IV 25 consid. 1 p. 27; arrêt 1B_363/2013 du 12 mai 2015 consid. 2.4).
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S'agissant du prévenu, lorsqu'une pièce est écartée du dossier, le recours immédiat contre cette décision peut être ouvert lorsque les droits de la défense s'en trouvent irrémédiablement atteints, ou lorsque la décision ne peut plus être remise en cause ultérieurement. Tel peut être le cas lorsque le moyen de preuve doit être détruit ( cf. par exemple les art. 248, 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP) ou lorsqu'il est susceptible de s'altérer ou de disparaître (cf. art. 394 let. b CPP). Comme pour le ministère public, il incombe au recourant d'alléguer, en vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir (ATF 141 IV 1 consid. 1.1; 138 IV 86 consid. 3 p. 88 et les arrêts cités) et ceux permettant de démontrer l'existence d'un préjudice irréparable lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (ATF 138 III 46 consid. 1.2 p. 47 et les arrêts cités).
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1.2.3. S'agissant de la liste des écoutes rétroactives, la cour cantonale a pris soin de préciser que les données retranchées du dossier pénal devaient être conservées séparément jusqu'à l'issue de la procédure. Il n'y a dès lors aucun risque de disparition ou de destruction de ces pièces, de sorte que le recourant pourra requérir ultérieurement leur réintégration au dossier. A cet égard, il convient de rappeler que le contrôle rétroactif du raccordement de la victime avait été ordonné en tout début d'enquête, alors qu'il s'agissait de localiser la victime. Si les conversations entre celle-ci et le prévenu sont maintenues au dossier, il n'y a en revanche pas d'intérêt à conserver les échanges de la victime avec des tiers. A ce propos, le recourant se contente d'évoquer les liens de la victime avec une bande, le rôle de cette dernière dans le passage à l'acte et son rapport avec la recherche d'une arme. Ces assertions évasives et difficilement compréhensibles sont insuffisantes pour établir l'existence d'un préjudice irréparable. Le fait que la décision litigieuse aurait été prise, selon le recourant, en violation de son droit d'être entendu n'est pas non plus propre à fonder l'existence d'un tel préjudice.
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Le recours est dès lors irrecevable en tant qu'il porte sur la surveillance téléphonique rétroactive.
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1.2.4. Le matériel informatique de la victime doit, selon l'arrêt attaqué, être restitué à ses proches. Il existe donc a priori un risque que les données ne soient plus accessibles. Cela ne suffit toutefois pas pour admettre l'existence d'un préjudice irréparable. Conformément à l'art. 42 al. 1 LTF, il appartient encore au recourant d'indiquer ce qu'une consultation du matériel informatique appartenant à la victime pourrait lui permettre de démontrer. Dans la mesure où l'on ignore le contenu de ces supports de données, on ne saurait certes exiger des indications précises. Le recourant doit toutefois rendre vraisemblable que les moyens de preuve écartés présentent une certaine pertinence au regard de l'objet de l'enquête.
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En l'occurrence, le recourant prétend que l'examen du matériel informatique permettrait de vérifier ses déclarations concernant "quelles vidéos et quelles images il aurait vues avant les faits dans ce matériel". Sur ce point également, le recourant se contente d'allusions ambiguës. Selon le rapport de police, ces supports contiennent notamment des photos de famille et des vidéos où l'on voit chanter la victime, d'autres où elle montre comment elle se maquille ou danse, ainsi que des "films familiaux". Il ressort clairement de cette description que ce matériel ne contient rien qui puisse intéresser l'enquête, et le recourant n'apporte aucune indication permettant de mettre en doute cette appréciation.
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Faute de toute démonstration de l'existence d'un préjudice irréparable, le recours est également irrecevable sur ce point.
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2. Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. Le recourant a demandé l'assistance judiciaire. Celle-ci peut lui être accordée. Il y a lieu de désigner Me Loïc Parein en qualité d'avocat d'office et de fixer ses honoraires, qui seront supportés par la Caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). En revanche, il devra verser une indemnité de dépens aux intimés, lesquels obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : | |
1. Le recours est irrecevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Loïc Parein est désigné comme avocat d'office du recourant et ses honoraires, supportés par la Caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs.
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3. Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée aux intimés B.B.________, C.B.________ et D.B.________ , à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Procureur général du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
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Lausanne, le 13 mai 2015
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Fonjallaz
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Le Greffier : Kurz
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