[AZA 3]
4P.298/1999
Ie C O U R C I V I L E
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2 mars 2000
Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et Corboz,
juges. Greffier: M. Ramelet.
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Statuant sur le recours de droit public
formé par
Banque Edouard Constant S.A., à Genève, représentée par Me
Pierre-Louis Manfrini, avocat à Genève,
contre
l'arrêt rendu le 14 octobre 1999 par la Chambre d'appel de la
juridiction des prud'hommes du canton de Genève dans la cause
qui oppose la recourante à
Arnold Meilland, à Genolier, re-
présenté par Me Marc Bonnant, avocat à Genève;
(art. 4 aCst.; droit d'être entendu)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les
f a i t s suivants:
A.-
a) En 1981, Arnold Meilland fut engagé en qua-
lité de responsable du département de la recherche par la
Banque Scandinave en Suisse (ci-après: BSS; devenue le 27
septembre 1996 Banque Edouard Constant S.A.). La BSS le nomma
sous-directeur le 26 avril 1982; à cette occasion, le délai
de dénonciation du contrat de travail du prénommé fut porté à
six mois pour la fin d'un mois. Meilland a été nommé direc-
teur et membre du comité de direction de l'établissement dès
1987.
b) Le 19 mai 1992, Meilland et la BSS conclurent un
contrat, rédigé en anglais, intitulé "Termination Agreement".
La BSS passa des contrats identiques avec les autres membres
du comité de direction.
Après le préambule, dont la teneur était la sui-
vante:
" Attendu que la société souhaite stimuler ses cadres
et accroître ses moyens de retenir les membres
actuels de sa direction, et attendu que la société
souhaite récompenser le cadre pour les services
précieux et dévoués qu'il rend à la société, si le
contrat de travail du cadre devait être résilié aux
conditions décrites ci-dessous, et attendu que le
conseil d'administration considère par conséquent
qu'il est dans l'intérêt de la société et de ses
actionnaires de conclure des contrats de résilia-
tion avec certains cadres majeurs de la société et
attendu que le cadre est actuellement un membre dû-
ment élu du comité de direction, avec lequel le
conseil a dûment autorisé la société à conclure le
présent contrat, par conséquent, en vue d'assurer à
la société le dévouement soutenu du cadre et la
disponibilité de ses conseils si ces circonstances
se produisaient, et moyennant toute autre bonne et
valable contre-prestation, dont chaque partie accu-
se réception et qu'elle reconnaît appropriée, la
société et le cadre conviennent de ce qui suit",
la convention stipulait notamment les points suivants:
" 1. Portée du contrat.
1.1 Résiliation du contrat de travail
a. Les dispositions du paragraphe 2 des présentes dé-
ploieront leurs effets si le contrat de travail du
cadre est résilié à l'initiative de la société pour
d'autres motifs que le décès, l'invalidité et la
faute professionnelle. [...]
c. Aux fins des présentes: [...]
(III) "faute professionnelle" signifie:
i. la commission volontaire par le cadre d'un acte dé-
lictueux ou autre causant ou susceptible de causer
des dommages économiques à la société ou un tort
substantiel à sa réputation professionnelle
ii. la commission par le cadre d'un acte frauduleux
dans l'exercice de sa charge pour le compte de la
société
iii.le manquement continu et volontaire du cadre à
l'exécution de ses obligations en sa qualité de ca-
dre de la société (autre que tout manquement résul-
tant de l'invalidité du cadre en raison d'une mala-
die physique ou mentale), après que le conseil
d'administration aura adressé au cadre la notifica-
tion écrite d'un tel manquement (qui en précisera
raisonnablement les détails) et lui aura laissé la
possibilité d'être entendu et de réparer son man-
quement.
[...]
2. Paiements lors de la résiliation
Si la société résilie le contrat de travail du ca-
dre pour une raison autre que le décès, l'invali-
dité, la retraite ou la faute professionnelle du
cadre tels que décrits au paragraphe 1.1 [...]
a. la société versera au cadre, en rétribution des
services rendus, avant ou à la date de résiliation,
une somme forfaitaire en numéraire (soumise à toute
déduction ou imposition applicable devant être re-
tenue et calculée au taux appliqué pour les paie-
ments supplémentaires) égale à deux (2) fois la
moyenne de la rétribution annuelle du cadre payable
par la société.
b. le cadre aura droit aux "pensions spéciales de re-
traite" telles que prévues dans les présentes, de
sorte que la pension de retraite totale que le ca-
dre recevra de la société s'approchera de la pen-
sion de retraite totale que le cadre aurait reçue
au titre de tous les plans de retraite et autres
contrats de travail de la société auxquels le cadre
est partie si le cadre avait eu entièrement droit à
ces plans de retraite et à toutes les pensions
payables aux termes de ces autres contrats de tra-
vail et si le cadre avait continué à être employé
par la société pendant trente-six mois suivant la
date de résiliation ou jusqu'à la date de sa re-
traite, si celle-ci survenait plus tôt. Ces pen-
sions spéciales de retraite seront payables aux
moments et de la manière prévue dans les plans de
retraite et autres contrats de travail en vigueur
auxquels elles se réfèrent.
c. "rétribution annuelle" signifie le montant détermi-
né en prenant la rétribution annuelle moyenne en
numéraire, y compris l'indemnité de représentation
et la prime au mérite à court terme, reçue lors des
trois années immédiatement antérieures à la date de
résiliation. Les postes suivants, tels qu'utilisés
dans les présentes, ne font pas partie de la rétri-
bution annuelle: frais remboursés, tout versement
au titre de primes d'assurance ou autres contribu-
tions à d'autres plans de sécurité sociale ou de
pension. Pour la période 1992-1994, la prime spé-
ciale au mérite versée en 1992 pour l'exercice de
1991 sera comprise dans le calcul à raison d'un
tiers (1/3) du montant effectivement reçu.
3. Généralités
[...]
a. Pour une période de trois ans suivant la date de
résiliation, le cadre ne prendra, directement ou
indirectement, aucun engagement, intérêt ou parti-
cipation dans une organisation exerçant ses activi-
tés ou entrant en concurrence avec la société, tel-
le que définie par la société vis-à-vis de ses
clients au moment de la résiliation. Le cadre re-
connaît que la société est seule propriétaire de
toutes ses informations et convient de traiter ces
informations comme confidentielles pendant cette
période. Sans le consentement préalable par écrit
de la société, il ne divulguera aucune information
confidentielle à quiconque pour aucune raison ni à
aucune fin, ni n'utilisera des informations confi-
dentielles pour son propre intérêt ou au bénéfice
d'un tiers. Le cadre restituera tout matériel con-
tenant ces informations à la résiliation du contrat
de travail.
b. L'obligation de la société de verser au cadre sa
rétribution et d'effectuer les démarches décrites
dans les présentes est absolue et inconditionnelle
et ne sera modifiée en aucune circonstance. Sauf
comme prévu au paragraphe 3.a des présentes, tout
paiement versé au titre des présentes par la socié-
té sera définitif et la société ne cherchera pas à
exiger, pour quelque raison que ce soit, la resti-
tution de tout ou partie de ce paiement du cadre ou
de tout ayant droit.
[...]
e. Aux fins des présentes, "date de résiliation" si-
gnifie la date indiquée dans l'avis de résiliation,
qui ne sera pas plus de quatre-vingt-dix (90) jours
après que cet avis aura été adressé. Si, dans les
trente (30) jours suivant la date à laquelle l'avis
a été donné, la partie le recevant informe l'autre
partie de l'existence d'un litige, la date de rési-
liation sera la date à laquelle le litige sera dé-
finitivement déterminé, soit par consentement mu-
tuel par écrit des parties, ou par un jugement fi-
nal, une ordonnance ou un arrêt rendu par un tribu-
nal compétent [...]".
Le texte de l'art. 3.b de l'accord n'a pas été re-
produit dans l'arrêt cantonal. Il s'agissait d'une inadver-
tance manifeste qu'il y avait lieu de rectifier d'office
(art. 63 al. 2 in fine OJ).
c) A la fin 1993, le principal actionnaire de la
BSS, Scandinaviska Endskilda Banken (ci-après: la SEB), déci-
da de vendre sa participation dans la banque. La SEB et les
membres du comité de direction de la BSS convinrent alors
d'un accord dit "Incentive Agreement", prévoyant que ces der-
niers toucheraient une participation financière proportion-
nelle au produit de la vente du capital-actions de la banque.
Afin de les assister dans la négociation avec la SEB, les
membres dudit comité de direction consultèrent l'avocat
Bernard Lachenal, dont la note d'honoraires, par 132 500 fr.,
fut réglée par le débit de la BSS, avec l'accord de l'action-
nariat de la banque. Dans le même cadre, les membres du comi-
té de direction mandatèrent le 10 mars 1994, après avoir ob-
tenu l'aval et du président du conseil d'administration de la
BSS et d'un représentant de la SEB, un consultant spécialisé,
SG Warburg & Co S.A.; la facture que ce consultant a établie,
arrêtée à 850 000 fr., fut honorée le 14 juillet 1994 par le
débit de la banque.
Le 30 mars 1994, la Fondation de famille Sandoz
acheta le capital-actions de la BSS. Le 4 mai 1994, la Fonda-
tion précitée, d'une part, et les membres du comité de direc-
tion de la BSS, d'autre part, conclurent une convention vi-
sant à constituer une société holding qui détiendrait 90% du
capital de la BSS, holding dont le 60 % des actions serait
détenu par la Fondation de famille Sandoz, le solde étant aux
mains du comité de direction. L'exécution de la convention
fut différée, en particulier en raison d'un différend survenu
à la suite de la vente à un tiers d'une filiale de la BSS, la
société Skandifinanz AG.
Peu après le rachat de la BSS, des tensions apparu-
rent entre le nouvel actionnaire et la direction de l'éta-
blissement, lesquelles s'amplifièrent au cours de l'année
1995 en raison des mauvais résultats financiers de la BSS.
Le 7 novembre 1994, Meilland signa un accusé de ré-
ception du nouveau règlement du personnel de la BSS, qui dis-
posait notamment qu'après neuf ans de service, le contrat de
travail pouvait être résilié pour la fin d'un mois moyennant
un délai de congé de trois mois. Dans ce document, il précisa
que "conformément à la politique de la banque, (il restait)
bénéficiaire des droits acquis, en matière de vacances et de
délai de congé".
Le litige relatif à Skandifinanz AG ayant été réso-
lu en février 1996, les membres du comité de direction priè-
rent la Fondation de famille Sandoz d'appliquer la convention
du 4 mai 1994. Il s'ensuivit entre mars et avril 1996 un
échange épistolaire peu amène, au terme duquel le conseil
d'administration de la BSS prit la décision de licencier no-
tamment Arnold Meilland. La BSS convoqua ainsi le prénommé le
matin du 16 avril 1996 et lui proposa un arrangement finan-
cier s'il mettait lui-même fin à son contrat de travail. De-
vant le refus de l'intéressé, la BSS lui remit une lettre de
licenciement pour le 31 juillet 1996, laquelle lui rappelait
singulièrement ses devoirs de réserve et de non-concurrence;
Meilland était libéré de son obligation de travailler avec
effet immédiat, ses effets personnels devant être retirés de
son bureau le même jour avant midi.
Par l'entremise de son conseil, la BSS motiva le 2
mai 1996 la résiliation du contrat par "la rupture du rapport
de confiance nécessaire à une bonne coopération entre le con-
seil d'administration et la direction de la banque, causée
par (le comportement de son directeur) ", repoussa le terme du
congé au 31 octobre 1996, offrit la somme de 1 225 351 fr. à
titre d'indemnité calculée selon le "Termination Agreement",
rappela la clause de non-concurrence insérée dans cet accord
et mit en demeure le travailleur de ne plus chercher à flé-
trir la réputation de l'établissement. Par courriers des 24
mai et 8 juillet 1996, Arnold Meilland contesta son licencie-
ment; s'opposant à la prolongation du délai de congé, il dé-
clara que la clause de non-concurrence du "Termination Agree-
ment" était caduque et chiffra à 1 628 610 fr. l'indemnité
réclamée en vertu de l'art. 2 de cet accord, correspondant à
deux fois la moyenne annuelle de la rétribution perçue lors
des deux années ayant précédé le congé (814 305 x 2).
d) Le 18 août 1996 selon la presse, le 1er septem-
bre 1996 selon ses dires, Meilland a été nommé directeur de
la Banque Piguet & Cie S.A.
Le 26 août 1996, la BSS a licencié Meilland avec
effet immédiat, l'accusant d'avoir fait concurrence directe-
ment à ladite banque auprès d'un établissement tiers avant la
fin de son contrat de travail.
B.-
Le 16 septembre 1996, Arnold Meilland a ouvert
action contre la BSS devant la juridiction des prud'hommes de
Genève et a réclamé le montant total de 2 283 334 fr.75 plus
intérêts à 5% dès le 16 juillet 1996; cette somme se décompo-
se comme il suit:
- 1 621 213 fr.40 à titre d'indemnité de départ selon le
"Termination Agreement" du 19 mai 1992;
- 162 121 fr.35 à titre de contribution de la BSS à la caisse
de prévoyance;
- 500 000 fr. à titre d'indemnité pour réparation du tort mo-
ral.
La défenderesse a conclu à libération. Elle a formé
une reconvention tendant à ce que le demandeur soit condamné,
solidairement avec un autre cadre de la banque également con-
gédié sans délai, à lui verser 4 888 410 fr., soit,
- 850 000 fr. à titre de remboursement des honoraires de
SG Warburg & Co S.A.;
- 75 000 fr. au titre de remboursement partiel des honoraires
de l'avocat Lachenal;
- 170 000 fr. de dommages-intérêts pour débauchage d'em-
ployés;
- 3 043 410 fr. comme dommages-intérêts pour perte de fonds
sous gestion, transférés à la Banque Piguet & Cie S.A.;
- 250 000 fr. représentant des dommages-intérêts pour déni-
grement;
- 500 000 fr. de dommages-intérêts pour actes de concurrence
directe illégaux.
En cours de procédure, la défenderesse a requis
l'apport des pièces saisies dans la procédure pénale dirigée
contre le demandeur en raison de l'établissement des factures
de l'avocat Lachenal et de SG Warburg & Co S.A., procédure
suspendue jusqu'à droit connu sur le procès civil.
Par jugement du 30 juin 1998, le Tribunal des
prud'hommes de Genève a préalablement débouté la BSS de ses
conclusions tendant à l'apport des pièces saisies auprès de
SG Warburg & Co S.A. Au fond, le Tribunal a rejeté tant la
demande principale que la reconvention.
Saisie d'un appel du demandeur et d'un appel inci-
dent de la défenderesse, la Chambre d'appel de la juridiction
des prud'hommes du canton de Genève, par arrêt du 14 octobre
1999, a annulé le jugement déféré, puis, statuant à nouveau,
condamné la Banque Edouard Constant S.A. à payer à Arnold
Meilland la somme de 1 621 213 fr.40 plus intérêts à 5% dès
le 31 juillet 1996, dit que la Banque Edouard Constant S.A.
devra verser à l'institution de prévoyance désignée par le
demandeur le montant de 162 121 fr.35 avec intérêts à la même
date, débouté les parties de toute autre conclusion et invité
la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales
usuelles. En substance, l'autorité cantonale a préalablement
jugé que les pièces produites par les parties étaient suffi-
santes pour trancher le litige, de sorte qu'elle a considéré
qu'il ne se justifiait pas d'ordonner l'apport de la procé-
dure pénale susmentionnée. Après avoir rappelé que l'indemni-
té prévue par le "Termination Agreement" ne pouvait être oc-
troyée au demandeur s'il pouvait se voir reprocher une faute
professionnelle, elle a retenu que les raisons invoquées
d'emblée par la défenderesse, même considérées dans leur en-
semble, ne suffisaient pas à établir l'existence d'un quel-
conque manquement imputable au travailleur. Quant aux élé-
ments découverts après le licenciement, qui prétendument
justifieraient le congé, ils n'ont nullement été établis. Les
relations contractuelles entre parties ont pris fin le 31
juillet 1996, a poursuivi la cour cantonale, car la BSS est
liée par sa déclaration de résilier pour ce terme le contrat
du travailleur, lequel n'a pas consenti à le voir repousser
au 31 octobre 1996. Le demandeur était donc libre dès le 1er
août 1996 de s'engager au service d'un autre employeur, de
sorte qu'il n'a pas violé son obligation de fidélité par sa
prise d'emploi ultérieure auprès de la Banque Piguet & Cie
S.A. Comme la défenderesse n'avait pas de motif justifié pour
mettre un terme au contrat de travail de son directeur, la
prohibition de concurrence convenue dans le "Termination
Agreement" ne doit déployer aucun effet. Le demandeur a ainsi
droit au versement et de l'indemnité et de la pension de re-
traite prévues dans cet accord, les montants articulés à ce
titre n'ayant pas été contestés par la BSS. En revanche, les
circonstances de son licenciement ne permettaient pas de lui
accorder une indemnité pour tort moral. Enfin, les juges can-
tonaux ont rejeté tous les postes de la reconvention formée
par la défenderesse, aucune forme de responsabilité du tra-
vailleur à l'égard de son ancien employeur ne pouvant entrer
en considération.
C.-
La BSS saisit le Tribunal fédéral parallèlement
d'un recours de droit public et d'un recours en réforme con-
tre l'arrêt précité. Dans le recours de droit public, elle
requiert l'annulation de la décision cantonale.
L'intimé conclut au rejet du recours, alors que la
cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt.
C o n s i d é r a n t e n d r o i t :
1.-
a) Conformément à la règle générale de l'art.
57 al. 5 OJ, il y a lieu de statuer d'abord sur le recours de
droit public.
b) Le recours de droit public au Tribunal fédéral
est ouvert contre une décision cantonale pour violation des
droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a
OJ).
L'arrêt rendu par la cour cantonale, qui est final,
n'est susceptible d'aucun autre moyen de droit sur le plan
fédéral ou cantonal dans la mesure où la recourante invoque
la violation directe d'un droit de rang constitutionnel, de
sorte que la règle de la subsidiarité du recours de droit
public est respectée (art. 84 al. 2, 86 al. 1 et 87 OJ). En
revanche, si la recourante soulève une question relevant de
l'application du droit fédéral, le grief n'est pas recevable,
parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours en réforme
(art. 43 al. 1 et 84 al. 2 OJ).
c) En instance de recours de droit public, le Tri-
bunal fédéral n'examine que les griefs exposés de manière
assez claire et détaillée pour qu'il puisse déterminer quel
est le droit constitutionnel dont l'application est en jeu.
Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues
griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 122 I 70 con-
sid. 1c; 121 IV 317 consid. 3b; 119 Ia 197 consid. 1d).
2.-
a) La recourante soutient que la cour cantona-
le a commis un déni de justice formel et violé son droit
d'être entendue en refusant d'examiner son argumentation
principale, qui peut se résumer comme suit: le "Termination
Agreement" revêtirait un caractère bilatéral en ce sens que
le paiement de l'indemnité prévue dans l'accord ne constitue-
rait pour le cadre licencié que la contrepartie de l'inter-
diction d'exercer une activité dans le domaine bancaire; il
suivrait de là que le travailleur qui entreprendrait une ac-
tivité concurrentielle perdrait son droit à l'indemnité, car
l'employeur serait en mesure d'invoquer l'exception de
l'inexécution (art. 82 CO).
b) Il y a déni de justice lorsqu'une autorité se
refuse à rendre une décision, alors qu'elle y est obligée
(ATF 124 V 130 consid. 4; 117 Ia 116 consid. 3a).
En l'espèce, il est manifeste que la cour cantonale
a statué sur toutes les conclusions prises devant elle, de
sorte qu'il n'y a pas trace d'un déni de justice au sens de
l'art. 4 aCst.
c) Lorsqu'elle invoque la violation de son droit
d'être entendue, la recourante se prévaut plus précisément du
droit pour tout justiciable à obtenir une décision motivée.
La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu,
découlant de l'art. 4 aCst., le devoir pour l'autorité de mo-
tiver sa décision, afin que le destinataire puisse la com-
prendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité
de recours puisse exercer son contrôle (ATF 125 II 369 con-
sid. 2c; 124 II 146 consid. 2a; 124 V 180 consid. 1a; 123 I
31 consid. 2c; 123 II 175 consid. 6c). Il suffit cependant
que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui
l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de maniè-
re à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée
de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 123 I
31 consid. 2c; 122 IV 8 consid. 2c). Il n'a pas l'obligation
d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et
griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se
limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui apparaissent perti-
nents (ATF 122 IV 8 consid. 2c; 121 I 54 consid. 2c et les
arrêts cités).
Déterminer si la motivation présentée est convain-
cante est une question distincte de celle du droit à un ju-
gement motivé. Dès lors que l'on peut discerner les motifs
qui ont guidé la décision des juges, le droit à une décision
motivée est respecté, même si la motivation est erronée.
En l'espèce, la Chambre d'appel a admis que la dé-
fenderesse avait résilié le contrat de travail du demandeur
en l'absence de tout motif justifié, si bien que, conformé-
ment à l'art. 340c al. 2 CO, elle ne pouvait pas exiger le
respect de la prohibition de concurrence convenue dans le
"Termination Agreement". Comme l'intimé ne s'était au demeu-
rant rendu coupable d'aucune faute professionnelle telle que
l'entendait l'art. 1.1.c.III, l'indemnité prévue par la con-
vention est due. Cette motivation, parfaitement intelligible,
est évidemment suffisante pour comprendre les raisons pour
lesquelles la recourante a été condamnée à paiement. Il n'y a
ainsi pas eu de violation de son droit à recevoir une déci-
sion motivée.
Quant au point de savoir si l'art. 340c al. 2 CO a
été sainement appliqué par la Chambre d'appel, il s'agit
d'une question de droit fédéral qui ressortit à l'instance de
réforme, ce qui exclut qu'elle soit examinée par la voie
subsidiaire du recours de droit public (art. 84 al. 2 OJ).
S'agissant du "Termination Agreement" litigieux, la
cour cantonale n'a pas déterminé la volonté réelle des par-
ties; elle a interprété les clauses de l'accord selon le
principe de la confiance. Or, la détermination de la volonté
hypothétique des parties sur la base d'une interprétation ob-
jective est une question de droit, qui peut être réexaminée
dans un recours en réforme (ATF 125 III 305 consid. 2b p.
308, 435 consid. 2a/aa; 123 III 106 consid. 5a, 420 consid.
3a). La subsidiarité absolue du recours de droit public (art.
84 al. 2 OJ) ne permet donc pas que le problème soit discuté
dans la présente instance.
3.-
En définitive, le recours doit être rejeté
dans la mesure de sa recevabilité. La valeur litigieuse étant
très largement supérieure à 20 000 fr., la procédure n'est
pas gratuite (cf. art. 343 al. 2 et 3 CO ). Les frais et dé-
pens doivent être mis à la charge de la recourante qui suc-
combe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs,
l e T r i b u n a l f é d é r a l :
1. Rejette le recours dans la mesure où il est re-
cevable;
2. Met un émolument judiciaire de 13 000 fr. à la
charge de la recourante;
3. Dit que la recourante versera à l'intimé une in-
demnité de 15 000 fr. à titre de dépens;
4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre d'appel de la juridiction
des prud'hommes du canton de Genève.
_____________
Lausanne, le 2 mars 2000
ECH
Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,