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Original
 
[AZA 0]
5C.97/1999
IIeCOUR CIVILE
******************************
3 avril 2000
Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi, M. Raselli, Mme Nordmann et M. Merkli, juges.
Greffière: Mme Mairot.
__________
Dans la cause civile pendante
entre
1. l'Hoirie de X.________ , à savoir:
A.________,
B.________,
C.________,
2. Y.________, tous défendeurs et recourants, représentés par Me Eric Stoudmann, avocatàLausanne,
et
Z.________, demanderesse et intimée, représentée par Me Pierre-Dominique Schupp, avocat à Lausanne,
(validité d'un testament)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- a) Z.________ et feu F.________ sont les enfants d'un premier lit de W.M.________, décédé le 25 décembre 1977. Ce dernier avait épousé, le 13 janvier 1950, J.________, née V.________, qui est décédée le 16 décembre 1992 à Lutry.
Par contrat de mariage du 8 novembre 1956 instituant le régime de l'union des biens, les époux M.________ sont convenus de l'attribution de la totalité du bénéfice de l'union conjugale à l'époux survivant.
Le 12 octobre 1961, les époux M.________, Z.________ et son mari P.________ ont signé par-devant notaire un contrat au terme duquel dame M.________ déclarait adopter Z.________. Par convention du même jour, cette dernière a préalablement renoncé à sa vocation d'héritière réservataire dans la succession de sa mère adoptive.
b) Le 16 décembre 1976, W.M.________ et J.M.________ ont conclu un pacte successoral prévoyant notamment les dispositions suivantes:
"...
Article troisième
W.M.________ et J.M.________ rappellent que par contrat de mariage [du 8 novembre 1956] il a été stipulé entre eux que la totalité du bénéfice de l'union conjugale serait, au décès du premier d'entre eux, attribuée au conjoint survivant.
...
Article quatrième
J.M.________ rappelle que par Convention préliminaire à son adoption, sa fille adoptive, Z.________ a renoncé à sa qualité d'héritière réservataire dans sa succession à elle J.M.________.
Article cinquième
W.M.________ déclare instituer seuls héritiers de ses biens:
1° son épouse J.M.________, née V.________, pour sa réserve héréditaire, augmentée en outre de toute la quotité disponible, soit au total pour les sept-seizièmes (7/16) de sa succession.
2° ses enfants F.________ et Z.________ pour neuf-seizièmes (9/16) et par parts égales entre eux;
étant entendu (...) qu'en cas de prédécès de J.M.________, ses seuls héritiers à lui W.M.________ seraient ses enfants F.________ pour trois-huitièmes (3/8) et Z.________ pour cinq-huitièmes (5/8) ...
...
Article sixième
Au titre de règle de partage, W.M.________ exige que la totalité des immeubles (.....) qu'il possède à Lutry avec tout ce qui les meuble et garnit, de même que toutes les actions quelconques de la société garage T.________ SA à Lausanne dont il pourrait être propriétaire au jour de son décès, soient attribués, en partage, à son épouse, J.M.________, ce à valoir sur la part successorale de cette dernière et le cas échéant en paiement partiel des créances qu'elle aura contre la succession pour remboursement de ses apports et du fait du bénéfice matrimonial qui doit lui revenir en entier aux termes du contrat de mariage précité; ...
...
Article huitième
J.M.________ née V.________ déclare, par les présentes:
a) pour le cas où elle viendrait à décéder avant son époux W.M.________, instituer ce dernier seul héritier de l'universalité de ses biens.
b) pour le cas où elle viendrait à décéder après avoir hérité de son époux W.M.________ et avoir en outre perçu l'entier du bénéfice matrimonial conformément au contrat de mariage (...) prérappelé, instituer sa fille adoptive Z.________ seule héritière.
..."
c) Le frère de Z.________, F.________, est décédé le 5 octobre 1977 et leur père, W.M.________, deux mois et demi après, le 25 décembre 1977. F.________ a laissé une fille unique, S.________, qui est intervenue dans la succession de son grand-père.
Le 26 décembre 1978, Z.________, S.________ et J.M.________ ont conclu une convention de partage de la succession de W.M.________. Après avoir rappelé le contrat de mariage du 8 novembre 1956 et le pacte successoral du 16 décembre 1976, les parties ont notamment exposé ce qui suit:
"...
- que renversant sa jurisprudence antérieure constante, le Tribunal fédéral a prononcé par arrêt du 18 novembre 1976 (JT 1977 I 130) que l'attribution par contrat de mariage du bénéfice de l'union conjugale au conjoint survivant dans le régime de l'union des biens constitue une libéralité réductible pour la part excédant le droit légal du conjoint - l'action en réduction ne compétant toutefois en ce cas qu'aux descendants du de cujus, - que pour se conformer à cette nouvelle jurisprudence, les parties conviennent de partager l'ensemble de l'actif net laissé par W.M.________ - y compris le bénéfice de l'union conjugale - à raison de 30/48èmes pour J.M.________ et de 9/48èmes pour chacune des deux descendantes, - ...
Cela étant, les parties conviennent de ce qui suit:
1. La part de S.________ aux actifs nets laissés par son grand-père W.M.________ est de Fr. 1'000'000 (un million de francs) payables en espèces dans les dix jours qui suivront l'inscription au registre foncier du transfert des immeubles compris dans la succession.
...
2. La part de Z.________ aux actifs nets laissés par son père W.M.________ est de Fr. 1'000'000 (un million de francs) payables dans l'année qui suivra la signature de la présente convention.
...
3. Le surplus des actifs nets laissés par W.M.________ est attribué à Madame J.M.________ aussi bien pour sa part au bénéfice de l'union conjugale que pour sa part héréditaire.
4...."
Le 19 août 1980, J.M.________ et Z.________, ainsi que Y.________ et le notaire G.________, exécuteurs testamentaires de W.M________, ont signé une convention-quittance relative à l'exécution de l'acte de partage du 26 décembre 1978. Par cet accord, Z.________ déclarait donner à J.M.________ quittance et décharge de la part de 1'000'000 fr. que la convention de partage lui attribuait et de tous ses droits et prétentions quelconques dans et contre la succession de son père W.M.________, sous réserve d'encaissement de dite part, lequel est intervenu le même jour.
d) Les relations entre Z.________ et sa mère adoptive se sont dégradées après la mort de W.M.________. Par testament du 4 septembre 1991, révoquant toutes dispositions antérieures, J.M.________ a notamment prévu ce qui suit:
"...
Article deuxième. -
Je fais les legs suivants, à délivrer par mes exécuteurs testamentaires avant de procéder au partage de ma succession:
1) aux époux C.________, en propriété commune, société simple, ma villa, à savoir la parcelle XXXX feuille (XX) de la Commune de Lutry ...
Article troisième. -
Je lègue en outre:
a) à Y.________ et X.________, une de mes deux actions, l'une nominative et l'autre au porteur, de la société anonyme Garage T.________ SA, à Lausanne ...
b) à Z.________, la propriété des locaux industriels et administratifs occupés par la société précitée dans les immeubles de l'Avenue (...) numéros (...) et (...) et du Chemin (...) numéro (...), à Lausanne (...), sous les réserves et conditions suivantes:
...
- mes exécuteurs testamentaires constitueront dans les six mois qui suivront l'acceptation de ce legs par Z.________, les trois immeubles précités en propriété par étages de façon à ce que tous les locaux occupés comme dit ci-dessus par le Garage T.________ SA forment dans chacun de ces immeubles un lot distinct;
...
Article quatrième. -
J'institue héritiers:
a) pour la moitié de ma succession X.________, domicilié à Epalinges ou, à son défaut, ses fils, (...), par parts égales entre eux;
b) pour l'autre moitié de ma succession Y.________, domicilié à Lausanne ou, à son défaut, ses fils (...), par part égales entre eux.
Article cinquième. -
A titre de règle de partage, je prescris que l'immeuble sis à l'Avenue (...) numéro (...) reviendra à Y.________ et l'immeuble sis Chemin (...) numéro (...) à X.________.
..."
Il est admis que le legs en faveur de Z.________ figurant à l'article troisième lettre b de ce testament représente une valeur vénale de l'ordre de 6'000'000 fr.
Le testament de J.M.________ du 4 septembre 1991 a été homologué le 21 janvier 1993 par la Justice de Paix du cercle de Lutry.
Le 19 février 1993, Z.________ a, par l'intermédiaire de son conseil, fait opposition à la délivrance des certificats d'héritiers. La Justice de Paix du cercle de Lutry a pris acte de cette opposition le 4 mars 1993.
B.- Le 25 octobre 1993, Z.________ a ouvert action contre X.________, Y.________, ainsi que contre les époux
C.________, en prenant la conclusion suivante: "Le testament du 4 septembre 1991 de J.M.________ née V.________ est annulé, nul et de nul effet". Les défendeurs ont conclu au rejet de la demande.
Par jugement du 8 février 1999, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a annulé les articles deuxième, chiffre 1, ainsi que troisième à cinquième du testament litigieux, jugés incompatibles avec le pacte successoral du 16 décembre 1976. L'autorité cantonale a en outre statué sur les frais et dépens de la procédure et rejeté toutes autres ou plus amples conclusions.
C.- L'hoirie de X.________, soit A.________, B.________ et C.________, ainsi que Y.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer ce jugement en ce sens que le testament du 4 septembre 1991 est valide et maintenu dans son intégralité; subsidiairement, ils concluent à ce que
Z.________ soit invitée à agir en reconstitution de sa quote-part.
Z.________ propose le rejet du recours. Les époux C.________ s'en remettent à justice.
D.- Y.________ et les hoirs de X.________ ont en outre interjeté un recours en nullité auprès du Tribunal cantonal vaudois. Conformément à l'art. 57 al. 1 OJ, la procédure devant le Tribunal fédéral a été suspendue jusqu'à droit connu sur le recours cantonal. Ledit recours a par la suite été retiré.
La Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois a également été saisie d'un recours en nullité et en réforme des époux C.________, lesquels ont ultérieurement retiré leurs conclusions en nullité.
Par arrêt du 12 juillet 1999, la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud a suspendu l'instruction du recours en réforme interjeté par les époux C.________ jusqu'à droit connu sur le recours déposé devant le Tribunal fédéral.
Considérant en droit :
1.- Interjeté en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale, dans une contestation civile dont la valeur dépasse manifestement 8'000 fr., le recours est recevable au regard des art. 46, 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ.
2.- L'autorité cantonale a considéré, en substance, que l'article huitième, lettres a et b, du pacte successoral était de nature bilatérale et que les mentions figurant à la lettre b - notamment la perception par l'épouse de l'entier du bénéfice matrimonial - constituaient de véritables conditions mises à l'institution de la demanderesse comme héritière.
La Cour civile a cependant estimé que le partage du bénéfice de l'union conjugale intervenu le 28 décembre 1978 n'autorisait pas J.M.________ à disposer librement de sa succession; dans la mesure où le testament du 4 septembre 1991 ne respectait pas le pacte successoral, en particulier son article huitième lettre b, il ne pouvait déployer d'effets et devait en conséquence être annulé.
Les recourants soutiennent que l'institution d'héritier contenue dans ledit articleestsubordonnéeàlaconditionquel'épousereçoivel'intégralitédubénéficematrimonial, conditionquin'estenl'occurrencepasréalisée. De toute manière, cette disposition pouvait être librement révoquée en raison de son caractère unilatéral.
3.- Aux termes de l'art. 494 CC, le disposant peut s'obliger, dans un pacte successoral, à laisser sa succession ou un legs à l'autre partie contractante ou à un tiers (al. 1). Il continue à disposer librement de ses biens (al. 2). Peuvent être attaquées toutefois les dispositions pour cause de mort et les donations inconciliables avec les engagements résultant du pacte successoral (al. 3).
Les dispositions prises en la forme d'un pacte successoral peuvent contenir, outre des clauses de nature contractuelle, des dispositions testamentaires ou unilatérales, librement révocables en vertu de l'art. 509 CC (ATF 101 II 305 consid. 3a p. 309/310; 96 II 273 consid. 3 p. 281 et les références citées). Un testament ou une donation ultérieurs ne peuvent être attaqués selon l'art. 494 al. 3 CC si la partie du pacte qui est en cause ne renferme pas de clause de nature contractuelle, mais seulement des dispositions testamentaires, unilatérales (ATF 101 II 305 consid. 3a p. 309/310). En l'occurrence, contrairement à ce que soutiennent les recourants, l'article troisième lettre b du pacte successoral présente un caractère contractuel, comme l'a démontré pertinemment l'autorité cantonale, dont l'argumentation peut être reprise (art. 36a al. 3 OJ).
4.- Il y a donc lieu de déterminer si, comme le prétendent les recourants, l'autorité cantonale a violé le droit fédéral en considérant que le testament du 4 septembre 1991 ne respectait pas le pacte successoral antérieur.
a) Savoir si une disposition à cause de mort ultérieure est incompatible avec les obligations prises par le défunt dans un pacte successoral est une question d'interprétation. Alors que, s'agissant de dispositions testamentaires ou unilatérales, l'interprétation doit tendre uniquement à dégager la véritable volonté du disposant, sans qu'il importe de savoir comment cette volonté a pu être comprise par telle ou telle personne (ATF 120 II 182 consid. 2a p. 184 et les arrêts cités), le pacte successoral, en tant qu'acte juridique bilatéral, doit, en principe, être interprété selon les règles du droit des obligations (cf. ATF 99 II 382 consid. 4a p. 385; arrêt non publié du 10 juin 1999 dans la cause E. c. E., consid. 2b; Piotet, Droit successoral, Traité de droit privé suisse, p. 191; contra: Tuor, Berner Kommentar, n. 11 ss, spécialement 15, des remarques préliminaires aux art. 481 ss, Escher, Zürcher Kommentar, n. 10 ss, spécialement 14, de l'introduction au titre XIX, qui appliquent les règles des testaments). Le contenu du pacte successoral - à l'exclusion de ses dispositions unilatérales - se détermine dès lors en premier lieu selon la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO). Si elle ne peut être établie, il faut se fonder sur leur volonté probable ou présumée, selon le principe dit de la confiance ou de la bonne foi; cette interprétation (objective ou normative) se fera non seulement d'après le texte et le contexte de la déclaration, mais aussi d'après les circonstances qui l'ont précédée et accompagnée (ATF 122 III 106 consid. 5a p. 108 s.; 121 III 118 consid. 4b/aa p. 123 et les références). Les constatations de l'autorité cantonale sur la volonté interne des parties relèvent du fait et lient, dès lors, le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ); l'interprétation du contrat selon le principe de la confiance ressortit, en revanche, au droit, de sorte que le Tribunal fédéral peut en connaître librement (ATF 123 III 165 consid. 3a p. 163 et les références citées).
Cette question - règles d'interprétation du testament ou du contrat - ne joue cependant pas un rôle décisif en l'espèce, car l'une et l'autre méthodes conduisent au même résultat.
b) Il ressort de l'article huitième lettre b du pacte successoral que la défunte a entendu instituer l'intimée seule héritière "pour le cas où elle viendrait à décéder après avoir hérité de son époux W.M.________ et avoir en outre perçu l'entier du bénéfice matrimonial conformément au contrat de mariage notarié (...) et prérappelé". Selon l'autorité cantonale, cette dernière mention doit se comprendre comme la confirmation de la volonté - réelle et concordante - des conjoints de récompenser l'épouse de son travail et du soutien apporté par celle-ci à son mari dans le cadre de ses entreprises. Ce désir de reconnaissance s'expliquait d'autant mieux qu'au début de leur mariage, les époux n'avaient pratiquement aucune fortune, laquelle avait été constituée grâce à leurs efforts conjugués; l'arrêt entrepris retient en outre, de manière à lier la cour de céans, qu'à l'époque de la signature du pacte successoral, les conjoints connaissaient le changement de jurisprudence du Tribunal fédéral survenu près d'un mois auparavant, reconnaissant des droits réservataires aux descendants du de cujus en cas d'attribution du bénéfice de l'union conjugale au conjoint survivant (ATF 102 II 313 ss). Selon les premiers juges, on ne pouvait toutefois raisonnablement admettre que le mari ait accepté que sa fille, qu'il avait fait adopter par sa femme et qu'il avait privilégiée dans sa propre succession en cas de prédécès de celle-ci, selon l'article cinquième in fine du pacte, puisse être déshéritée si la première ne percevait pas l'entier du bénéfice de l'union conjugale, et cela en faveur de tiers étrangers à sa famille; on ne pouvait davantage considérer que telle était la volonté de l'épouse au moment de la signature du pacte, puisque cet acte instituait comme héritiers, après le décès du couple, les descendants du mari, et par conséquent l'intimée.
c) Cette opinion ne peut être suivie. Il est en effet établi que lors de la signature du pacte successoral, le 16 décembre 1976, les époux M.________ connaissaient le changement de jurisprudence opéré par le Tribunal fédéral et qu'ils ont néanmoins décidé de maintenir leur choix de l'attribution de l'entier du bénéfice de l'union conjugale au conjoint survivant, conformément à leur contrat de mariage.
Selon l'autorité cantonale, la référence audit bénéfice dans la déclaration de l'épouse formulée à l'article huitième lettre b du pacte devait se comprendre comme la confirmation de la volonté de W.M.________, à laquelle adhérait J.M.________, de récompenser celle-ci de son aide et de son soutien en lui évitant de devoir partager le bénéfice de l'union conjugale de son vivant. Entendu comme témoin, le notaire Louis Grassmann a confirmé que l'intention commune des époux pour le cas où le mari viendrait à décéder le premier avait toujours été que la fortune de ce dernier revînt alors entièrement à l'épouse. On ne voit dès lors pas pour quel motif la vocation héréditaire de l'intimée dans la succession de sa mère adoptive ne serait pas subordonnée à cette pleine attribution, comme il résulte du texte même du pacte. Les arguments formulés sur ce point par l'autorité cantonale ne sont guère convaincants. En particulier, la volonté de W.M.________ que l'oeuvre de sa vie - à savoir le garage T.________ SA - reste dans sa famille n'est en rien contrecarrée par le testament de l'épouse: selon l'arrêt entrepris, W.M.________ a, le 9 janvier 1976 - soit moins d'un an avant la conclusion du pacte successoral- attribué au mari de sa fille, P.________, et au Garage T.________ SA, alors exploité par ceux-ci (qui en étaient en outre les actionnaires principaux), un droit de préemption sur les immeubles occupés par la société précitée; la défunte est du reste allée au-delà de ce que souhaitait son mari, en léguant la propriété de ces immeubles à sa fille adoptive. La cour cantonale a de plus considéré qu'il n'était pas établi que le pacte successoral soit la suite des décisions prises le 9 janvier 1976. Au demeurant, cette autorité se contredit, dans la mesure où elle a par ailleurs rejeté les allégations de l'intimée selon lesquelles son père entendait que l'oeuvre de sa vie restât dans sa famille. La cour a également considéré qu'il n'était pas démontré, contrairement à ce que prétendait la demanderesse, que W.M.________ eût entrepris, d'entente avec sa femme, des démarches destinées à favoriser autant que possible sa fille, ni que la volonté des époux eût consisté à s'assurer qu'après leur décès, celle-ci fût instituée héritière unique sous réserve des droits successoraux de son frère.
L'arrêt entrepris retient en revanche le témoignage du notaire G.________, en tant qu'il établit qu'en instituant sa fille adoptive héritière "pour le cas où elle viendrait à décéder après avoir hérité de son époux et avoir en outre perçu l'entier du bénéfice matrimonial", J.M.________ entendait subordonner la vocation héréditaire de celle-ci à la condition qu'elle-même ait auparavant perçu l'entier du bénéfice matrimonial, soit la quasi totalité de la fortune de feu W.M.________. Or, cette condition ne s'est manifestement pas réalisée, vu le contenu de l'acte de partage du 26 décembre 1978.
Au vu de ces éléments, l'autorité cantonale a violé le droit fédéral en considérant que le fait d'avoir renoncé à une partie du bénéfice de l'union conjugale n'autorisait pas la défunte à disposer librement de sa succession, étant donné l'engagement pris dans le pacte successoral. Le chef de conclusions principal des recourants devant ainsi être alloué, il n'y a pas lieu d'examiner celui qu'ils ont formulé à titre subsidiaire.
5.- Le recours doit par conséquent être admis et l'arrêt entrepris réformé en ce sens que la demande de l'intimée est rejetée. Les frais et dépens de la présente procédure seront donc mis à sa charge (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Admet le recours et réforme l'arrêt entrepris en ce sens que la demande de Z.________ est rejetée.
2. Met à la charge de Z.________:
a) un émolument judiciaire de 20'000 fr.
b) une indemnité de 20'000 fr. à payer aux recourants à titre de dépens.
3. Renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
4. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties, aux époux C.________ et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
__________
Lausanne, le 3 avril 2000
MDO/frs
Au nom de la IIe Cour civile
duTRIBUNALFEDERALSUISSE :
Le Président,
La Greffière,