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Original
 
[AZA 0/2]
5C.267/1999
IIe COUR CIVILE
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22 août 2000
Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Weyermann et Mme Nordmann, juges.
Greffier: M. Fellay.
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Dans la cause civile pendante
entre
C.________, demandeur et recourant, représenté par Me Frédérique Bensahel-Zimra, avocate à Genève,
et
J.________, défendeur et intimé, représenté par Me François Dugast, avocat à Genève;
(séquestre; revendication)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- J.________ (ci-après: l'intimé) a été l'avocat de dame C.________ et a notamment défendu les intérêts de celle-ci dans le cadre de la procédure de divorce qui l'a opposée, aux Etats-Unis, à C.________ (ci-après: le recourant). Cette procédure s'est terminée par un jugement de la
Cour du Comté de Montgomery (Maryland) du 20 mars 1989, qui a condamné le recourant à verser à son ex-épouse la somme de 62'815 fr. 70 à titre de dépens.
Dans le cadre de la poursuite que l'ex-épouse a introduite pour récupérer cette somme, l'Office des poursuites de Nyon a saisi une villa et trois comptes bancaires appartenant au recourant, ces derniers totalisant un montant de 9'597 fr. 85. Afin d'éviter la réalisation de sa villa, le recourant a remis à l'office, le 31 octobre 1996, un montant de 58'500 fr. représentant la différence entre la créance de son ex-épouse en capital et intérêts, plus les frais, et les sommes saisies.
B.- a) Par ordonnance du 9 août 1996, le Juge de paix du cercle de Rolle a autorisé un premier séquestre (no 280173), en faveur du recourant, de la créance de 62'815 fr. 70 à concurrence de la contre-valeur en francs suisses de 9'070. 61 et 14'800 US$. Comme titres de créance, le recourant invoquait deux jugements de la Cour du Comté de Montgomery des 2 avril 1992 et 22 septembre 1993, condamnant son ex-épouse à lui verser les sommes en dollars précitées. Cette dernière a fait opposition à la poursuite en validation dudit séquestre et la requête du recourant en mainlevée définitive de cette opposition a été rejetée par jugement du Président du Tribunal civil du district de Nyon du 17 décembre 1996. La Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a confirmé ce jugement par arrêt du 4 juillet 1997, à l'encontre duquel aucun moyen de recours n'a été utilisé.
b) Le 7 juillet 1997, l'ex-épouse du recourant a sollicité de l'office la remise des fonds saisis en ses mains. La décision de l'office de restituer rapidement les fonds à l'ex-épouse a fait l'objet, de la part du recourant, d'une plainte LP qui a été rejetée par l'autorité cantonale de surveillance.
Le 24 octobre 1997, l'ex-épouse du recourant a cédé à l'intimé, à titre de paiement partiel de ses honoraires, un montant de 28'406 fr., plus intérêts et frais de poursuite, sur la créance objet du séquestre n° 280173 ordonné le 9 août 1996.
c) Le 10 novembre 1997, le recourant a requis à nouveau le séquestre de la créance de 62'815 fr. 70, en se fondant sur les jugements des 2 avril 1992 et 22 septembre 1993 précités et sur le fait qu'il avait des prétentions en dommages-intérêts à hauteur de 301'500 fr. à faire valoir contre son ex-épouse. Sa requête a été admise par le président du tribunal de district le 6 avril 1998 (séquestre no 310925). Son ex-épouse ayant fait opposition à la poursuite en validation de ce second séquestre, le recourant a agi en exequatur et en mainlevée définitive de cette opposition. Sa requête a toutefois été rejetée par jugement du président du tribunal de district du 7 septembre 1998, confirmé le 14 janvier 1999 par la Cour cantonale des poursuites et faillites.
d) Le 18 septembre 1998, se prévalant de la cession du 24 octobre 1997, soumise au droit suisse, l'intimé a revendiqué la créance de sa cliente contre le recourant, à due concurrence, auprès de l'office. Par jugement du 11 mars 1999, le Tribunal de première instance de Genève a admis cette revendication sur la créance faisant l'objet du séquestre no 310925 à concurrence de 28'406 fr., plus intérêts et frais de poursuite.
Par arrêt du 8 octobre 1999, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé la décision du tribunal de première instance.
C.- Agissant le 15 novembre 1999 par la voie du recours en réforme, le recourant conclut, avec suite de frais et dépens de première instance, d'appel et de recours au Tribunal fédéral, à ce qu'il soit prononcé que l'intimé n'est pas fondé à revendiquer la créance de son ex-épouse contre lui (recourant) dans la procédure de séquestre n° 310925 et qu'en conséquence cette revendication est écartée et supprimée du procès-verbal dudit séquestre. Subsidiairement, il demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
L'intimé conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours.
Considérant en droit :
1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 125 II 293 consid. 1a p. 299 et arrêts cités). Le présent recours a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et satisfait aux conditions des art. 46 et 48 al. 1 OJ.
b) Les frais et dépens des instances cantonales ne sont pas réglés par le droit fédéral. Le recours est donc irrecevable dans la mesure où son auteur cherche à en obtenir (cf. art. 43 al. 1 OJ). Celui-ci entend sans doute son chef de conclusions comme une conséquence de l'admission du recours (cf. art. 159 al. 6 OJ).
2.- Le recourant fait valoir qu'en application de l'art. 12 al. 2 LP, sa dette envers son ex-épouse se serait éteinte le 31 octobre 1996 par la remise des 58'500 fr. à l'office, complétée par l'abandon des 9'597 fr. 85 précédemment saisis. La cession litigieuse aurait donc eu un objet impossible et devrait être déclarée nulle, ce qui entraînerait l'admission du présent recours.
a) Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été constatés par la dernière autorité cantonale (art. 63 al. 2 OJ). Les deux seules exceptions à cette règle sont la violation de dispositions fédérales en matière de preuve, dans la mesure où ce grief est soulevé conformément à l'art. 55 al. 1 let. c OJ, et la rectification d'office de faits reposant manifestement sur une inadvertance, autant que celle-ci est alléguée dans les formes prescrites par l'art. 55 al. 1 let. d OJ. L'art. 64 OJ réserve par ailleurs le complètement de constatations de fait lacunaires. Pour le reste, il ne peut être présenté dans un recours en réforme de griefs contre les constatations de fait, ni de faits nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 119 II 84, 115 II 484 consid. 2a).
Dès lors que le recourant ne fait valoir aucune des exceptions énumérées ci-dessus, la cour de céans fonde son arrêt sur l'état de fait retenu par l'autorité cantonale et ne tient notamment pas compte de l'affirmation du recourant selon laquelle il aurait abandonné à l'office les avoirs des trois comptes saisis.
b) Quand de nouveaux biens sont procurés pour être substitués aux objets saisis et que cette substitution s'opère avec le consentement de l'office et dans des conditions telles que le préposé acquiert le pouvoir de disposer desdits biens à l'exclusion du débiteur, ces nouveaux biens tombent ipso facto sous le coup de la saisie sans qu'il y ait besoin d'une nouvelle saisie (ATF 60 III 195). Lorsque la saisie porte uniquement sur de l'argent comptant ou sur un avoir qui s'est transformé en argent, l'office attribue celui-ci, à l'expiration du délai de participation (art. 110 s. LP), au créancier poursuivant à titre de paiement, le poursuivi étant exproprié de son droit de propriété mobilière sur les espèces (Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Lausanne 2000, Remarques introductives: art. 116-150, n. 14).
L'arrêt attaqué retient clairement que le recourant a remis les 58'500 fr. à l'office le 31 octobre 1996, somme représentant la différence entre la créance de l'ex-épouse (capital, intérêts et frais) et les sommes saisies, dans le but d'éviter la réalisation de sa villa et donc de libérer ce bien immobilier de la saisie. Le montant remis à l'office a ainsi remplacé la villa saisie auparavant et, partant, est automatiquement tombé sous le coup de la saisie. Dès lors qu'il ne ressort pas de l'arrêt cantonal que l'office aurait remis les sommes saisies à l'ex-épouse du recourant à titre de paiement - le recourant ne le prétend d'ailleurs pas -, la créance de celle-ci n'a pas été éteinte par la remise des 58'500 fr. à l'office. L'art. 12 LP, qui prévoit que l'office est tenu d'accepter les paiements fait pour le compte du créancier poursuivant (al. 1) et que le débiteur est libéré par ces paiements (al. 2), n'est d'aucun secours au recourant. Cette disposition, en effet, ne concerne pas le versement d'une somme à l'office dans le but de libérer un bien saisi.
Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas enfreint le droit fédéral en retenant que la dette du recourant envers son ex-épouse existait au moment où celle-ci en a cédé une partie à l'intimé.
c) Le recourant fait valoir qu'il n'y a pas identité entre la créance séquestrée et celle revendiquée, et que la cour cantonale a confondu à tort les deux: la revendication de l'intimé aurait trait à la créance en dépens de l'ex-épouse envers le recourant - créance qui serait d'ailleurs éteinte -, alors que ce dernier aurait séquestré la créance de droit public de son ex-épouse contre l'office née au moment de la remise des 58'500 fr. à celui-ci.
En affirmant que l'objet du second séquestre n'est pas la créance en dépens de son ex-épouse envers lui, mais une créance de droit public de celle-ci contre l'office, le recourant ne fait pas valoir la violation du droit fédéral, mais conteste l'état de fait de l'arrêt attaqué, ce qui est inadmissible (art. 55 al. 1 let. c OJ; cf. supra consid. 2a). Toute son argumentation développée à partir de cette allégation irrecevable ne peut dès lors être prise en considération.
d) Le recourant soutient que, contrairement à l'avis de la cour cantonale, la créance en dépens de son ex-épouse envers lui était toujours frappée par le premier séquestre prononcé le 9 août 1996 lorsque, le 24 octobre 1997, son ex-épouse en a cédé une partie à l'intimé. La créance aurait donc été indisponible à ce moment. Le recourant fonde son argumentation sur des faits nouveaux en rapport avec un procès pendant entre les époux devant les autorités judiciaires vaudoises. Il ne requiert toutefois pas que les constatations de la cour cantonale soient complétées sur ce point; il n'établit pas davantage qu'elles mériteraient de l'être sur la base d'allégations précises faites en instance cantonale. Il ne ressort en tout cas pas des constatations de l'arrêt attaqué que le recourant aurait actionné son ex-épouse en paiement de la somme de 301'500 fr. Le recours est donc également irrecevable sur ce point (art. 55 al. 1 let. c OJ; cf. supra consid. 2a).
3.- Le recourant reproche enfin à la cour cantonale d'avoir violé les art. 16 al. 1 et 145 al. 1 LDIP. Il soutient qu'en vertu de cette dernière disposition, le droit américain était applicable à la cession de la créance, alors que l'autorité cantonale a appliqué le droit suisse. Il prétend en outre qu'il incombait à la cour d'établir et d'appliquer d'office le droit déterminant.
a) Ce grief est recevable dans le cadre du recours en réforme (art. 43 al. 1 et 43a al. 1 let. a OJ).
b) Les motifs à l'appui des conclusions doivent indiquer succinctement quelles sont les règles de droit fédéral violées par la décision attaquée et en quoi consiste cette violation (art. 55 al. 1 let. c OJ). Il n'est pas nécessaire de citer expressément les articles de loi. En revanche, il est indispensable que le recourant discute effectivement les motifs de la décision attaquée, qu'il précise quelles règles du droit fédéral auraient été violées et indique pourquoi elles auraient été méconnues. Des considérations générales, sans lien manifeste ni même perceptible avec les motifs déterminés de la décision entreprise, ne répondent pas à ces exigences (ATF 116 II 745 consid. 3 et les arrêts cités).
La cour cantonale a considéré que c'était à bon droit que le premier juge n'avait pas retenu l'argument du recourant selon lequel, à défaut d'accord de sa part concernant le droit applicable à la cession, celle-ci était soumise au droit américain. Elle a en effet estimé, sur la base de l'avis de Dutoit (Commentaire de la loi fédérale sur le droit international privé, p. 416), que l'élection de droit faite par l'ex-épouse du recourant et l'intimé était valable et qu'il aurait appartenu au recourant d'alléguer et d'établir, ce qu'il n'avait pas fait, que ses intérêts étaient mis en péril par ce choix. La cour a ainsi rejeté l'argument relatif à l'application du droit américain pour des motifs d'ordre procédural. Le recourant omet entièrement de discuter cette motivation de l'arrêt attaqué et n'indique pas en quoi elle serait, avec l'avis de droit sur lequel elle s'appuie, contraire au droit fédéral. Sur ce point aussi, le recours doit donc être déclaré irrecevable en vertu de l'art. 55 al. 1 let. c OJ.
4.- Le recours ne pouvant ainsi qu'être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, les frais et dépens de l'instance fédérale doivent être mis à la charge du recourant (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable et confirme l'arrêt attaqué.
2. Met à la charge du recourant:
a) un émolument judiciaire de 3'000 fr.
b) une indemnité de 3'000 fr. à payer à l'intimé à titre de dépens.
3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
__________
Lausanne, le 22 août 2000
FYC/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,
Le Greffier,