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Original
 
[AZA 0/2]
6P.151/2000/ROD
6S.686/2000
COUR DE CASSATION PENALE
*************************************************
19 décembre 2000
Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président du Tribunal fédéral, M. Wiprächtiger et M. Kolly, Juges.
Greffière: Mme Revey.
__________
Statuant sur le recours de droit public
et sur le pourvoi en nullité
formés par
X.________, détenu aux Etablissements de la Plaine de l'Orbe, à Orbe, représenté par Me Christian Marquis, avocat à Lausanne,
contre
l'arrêt rendu le 3 juillet 2000 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, dans la cause qui oppose le recourant au Ministère public du canton deV a u d;
(art. 9, 29 Cst. , 6 par. 2 CEDH et 63 CP: appréciation
arbitraire des preuves, principe in "dubio pro reo",
fixation de la peine)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- Le 13 avril 2000, le Tribunal correctionnel du district de Lausanne a condamné X.________, ressortissant albanais né en 1965, à six ans de réclusion pour infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants notamment.
S'agissant des faits, ce jugement retenait en particulier ce qui suit:
B.- Le 19 février 1999, la police lausannoisea arrêté Y.________, alors porteur de cocaïne. Le relevé des appels de son téléphone portable ayant permis d'établir qu'il avait été en contact avec un appareil fixe à Lausanne, la police a visité le 3 mars 1999 l'appartement correspondant à ce téléphone. Elle y a notamment trouvé de l'héroïne, de la cocaïne, de nombreuses feuilles manuscrites contenant des calculs ainsi qu'un agenda recelant une importante comptabilité manuscrite d'acquisitions et de ventes de stupéfiants. Alors que la visite était en cours, un dénommé Z.________, né en 1983, est entré et a été interpellé. Porteur de trois boulettes de cocaïne et de 2'050 fr., il a concédé qu'il transportait drogue et argent pour le compte d'un ressortissant du Kosovo.
Quelques minutes plus tard, X.________ est de même apparu, en possession d'un agenda rouge contenant de nombreux noms et divers calculs, accompagnés des lettres K et B, soit des abréviations des mots "rouge" et "blanche" en albanais, qui désignent respectivement l'héroïne et la cocaïne.
Interrogée, la voisine de palier a déclaré que X.________ séjournait dans ce logement depuis la mi-janvier 1999. Par ailleurs, une empreinte digitale de l'intéressé a été découverte sur l'une des feuilles de la susdite comptabilité. Enfin, la police a retrouvé son passeport dans l'appartement d'un dénommé W.________, lui-même impliqué dans un vaste trafic de drogue, avec lequel il a entretenu au moins 250 conversations téléphoniques.
L'examen détaillé des feuilles manuscrites etdes agendas saisis a permis d'établir que Y.________ et X.________ étaient mêlés aux activités d'un réseau de trafiquants de drogue qui, entre la fin décembre 1998 et février 1999, s'est adonné à l'achat et à la revente de plusieurs kilos d'héroïne et de plus d'un kilo et demide cocaïne. En principe, ces deux protagonistes ne revendaient pas directement aux toxicomanes résidant en Suisse, mais approvisionnaient des petits dealers albanais, généralement mineurs.
S'agissant plus précisément de X.________, le Tribunal correctionnel a retenu que l'intéressé s'était rendu à Genève le 27 janvier 1999, afin d'y livrer de la drogue à un acheteur en contact avec W.________. En effet, le tableau des dépenses inclus dans la susdite comptabilité mentionnait les déplacements de X.________ et indiquait que celui-ci avait effectué un trajet en train ce jour-là. En outre, le relevé des communications des téléphones utilisés par W.________ et X.________ révélait que l'utilisateur non identifié du numéro 079/ 271 88 32 avait contacté W.________ le soir du 26 janvier 1999, puis appelé X.________ deux fois le lendemain matin alors que tous deux se trouvaient à Genève.
Quant à la fixation de la peine, après avoir rappelé les facteurs d'appréciation concernant notamment la personnalité de l'accusé, son mode préparatoire et ses mobiles, le Tribunal correctionnel a indiqué qu'une peine sévère se justifiait "tant en raison des faits commis que dans un but de prévention générale, particulièrement important à l'égard du crime organisé. "
C.- X.________ a déféré ce jugement devant la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois. Il soutenait qu'il existait un doute sérieux sur la réalité de la livraison du 27 janvier 1999 qui lui était imputée, dès lors que le relevé téléphonique ne démontrait pas que l'utilisateur non identifié du numéro 079/ 271 88 32 se trouvait à Genève ce jour-là. En outre, il reprochait au Tribunal correctionnel d'avoir violé l'art. 63 CP en tenant compte de considérations de prévention générale pour fixer la peine.
Statuant le 3 juillet 2000, le Tribunal cantonal a rejeté le recours.
D.- Agissant par les voies du recours de droit public et du pourvoi en nullité, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 3 juillet 2000 du Tribunal cantonal. L'intéressé reprend en substance les griefs développés devant l'autorité intimée. Ainsi, il se plaint dans son recours de droit public d'une violation du principe "in dubio pro reo" et d'une constatation arbitraire des faits, soit d'une appréciation arbitraire des preuves (art. 9 et 29 Cst. ; art. 6 par. 2 CEDH). Dans son pourvoi en nullité, il se prévaut de l'art. 63 CP.
X.________ sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire.
E.- Le Ministère public du canton de Vaud conclut au rejet du recours.
Considérant en droit :
I. Recours de droit public (6P. 151/2000)
1.- a) Le recours de droit public au Tribunal fédéral est recevable contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ; art. 269 al. 2 PPF).
b) Lorsque le pouvoir d'examen de l'autorité cantonale de dernière instance est, comme en l'espèce, limité à l'arbitraire, le Tribunal fédéral doit examiner librement la manière dont elle a fait usage de sa cognition limitée, c'est-à-dire si elle a, à tort, admis ou nié l'arbitraire. En effet, on ne saurait admettre la double limitation du pouvoir d'examen du Tribunal fédé-ral ("Willkür im Quadrat", "arbitraire au carré"; ATF 116 III 70 consid. 2b; 112 Ia 350 consid. 1; 111 Ia 353 consid. 1b in fine).
2.- Selon le recourant, le Tribunal cantonal a confirmé à tort qu'il avait effectué une livraison de drogue à Genève le 27 janvier 1999. Ce faisant, l'autorité intimée a procédé à une constatation arbitraire des faits, soit à une appréciation arbitraire des preuves (art. 9 Cst.), et a violé le principe "in dubio pro reo" (art. 29 Cst. et 6 par. 2 CEDH).
a) aa) En recours de droit public, le Tribunal fédéral ne revoit que sous l'angle de l'arbitraire les constatations de faits et l'appréciation des preuves effectuées par l'autorité cantonale. Une jurisprudence constante reconnaît en effet au juge du fait un large pouvoir d'appréciation dans ce domaine (ATF 120 Ia 31 consid. 4b; 119 Ia 362 consid. 3a et les arrêts cités).
Ainsi, le Tribunal fédéral n'intervient que si l'appréciation des preuves est insoutenable ou si elle heurte d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Tel est le cas lorsque l'autorité cantonale a admis ou nié un fait pertinent en se mettant en contradiction évidente avec les pièces et éléments de son dossier, qu'elle n'a tenu compte que des preuves allant dans le même sens, qu'elle méconnaît des preuves pertinentes ou qu'elle n'en tient arbitrairement pas compte ou encore lorsque les constatations de fait sont manifestement fausses (ATF 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 4b; 118 Ia 28 consid. 1b et les références citées).
bb) La maxime "in dubio pro reo", tirée du principe de la présomption d'innocence consacré par l'art. 6 par. 2 CEDH, concerne d'une part la répartition du fardeau de la preuve et d'autre part la constatation des faits et l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2c et les références citées).
Dans le premier sens, la maxime "in dubio pro reo" veut qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité du prévenu, et non à celui-ci de démontrer qu'il n'est pas coupable. Elle est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence ou lorsqu'il résulte à tout le moins de la motivation du jugement que le juge s'est inspiré d'une telle répartition erronée du fardeau de la preuve pour condamner (ATF 120 Ia 31 consid. 2c).
Dans le second sens, la maxime "in dubio pro reo" signifie que le juge pénal ne doit pas tenir pour établi un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. De ce point de vue, la maxime "in dubio pro reo" est violée lorsque le juge aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l'accusé. Des doutes simplement abstraits ou théoriques ne suffisent pas, dès lors qu'ils sont toujours possibles et qu'une certitude absolue ne peut être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, à savoir de doutes qui s'imposent au vu de la situation objective (ATF 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c). Le Tribunal fédéral ne revoyant l'appréciation des preuves que sous l'angle de l'arbitraire, il ne peut intervenir que lorsque le juge condamne l'accusé bien qu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse manifestement subsister un doute sérieux et irréductible quant à la culpabilité (ATF 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2d). Ainsi, dans la procédure du recours de droit public, la maxime "in dubio pro reo" n'offre pas une protection plus étendue que celle de l'interdiction de l'appréciation arbitraire des preuves.
C'est exclusivement sous ce second angle que se place le recourant lorsqu'il prétend que la ténuité des preuves à sa charge aurait dû conduire le Tribunal cantonal à refuser de lui imputer une livraison de drogue le 27 janvier 1999. Dès lors qu'il invoque également la protection contre l'arbitraire dans la constatation des faits, soit l'appréciation des preuves, le grief tiré du principe "in dubio pro reo" n'a pas de portée propre et se confond avec celui d'arbitraire.
cc) En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si l'arrêt entrepris est en tous points conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 125 I 71 consid. 1c; 115 Ia 27 consid. 4a; 114 Ia 317 consid. 2b). Par ailleurs, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de caractère appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b; SJ 1998 p. 489 consid. 1e/aa).
Notamment, dans un recours pour arbitraire, le recourant ne peut se contenter de critiquer l'arrêt attaqué, mais doit au contraire préciser en quoi cet arrêt serait arbitraire, ne reposant sur aucun motif sérieux et objectif, apparaissant insoutenable ou heurtant gravement le sens de la justice (ATF 117 Ia 10 consid. 4b; 110 Ia 1 consid. 2a; sur la notion d'arbitraire, ATF 125 I 166 consid. 2a; 125 II 129 consid. 5b et les arrêts cités).
Ainsi, lorsqu'un tribunal de cassation a, comme en l'espèce, examiné le prononcé attaqué devant lui sous l'angle restreint de l'arbitraire, le recourant ne peut se borner à formuler des remarques générales soutenant que le prononcé du tribunal supérieur est arbitraire et qu'il en va de même de l'arrêt du tribunal de cassation niant cet arbitraire. En particulier, s'il fait valoir le principe "in dubio pro reo" en tant que règle d'appréciation des preuves, le recourant doit exposer dans le détail en quoi le tribunal de cassation devait qualifier d'arbitraire l'appréciation des preuves effectuée par le tribunal supérieur. Autrement dit, il lui incombe de préciser en quoi le tribunal de cassation devait constater que l'appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laissait manifestement subsister un doute sérieux et irréductible quant à sa culpabilité (cf. ATF 125 I 492 consid. 2b).
b) aa) En l'espèce, le Tribunal cantonal a confirmé les faits admis par le Tribunal correctionnel, retenant en particulier que le recourant avait effectué une livraison de stupéfiants à Genève le 27 janvier 1999.
L'autorité intimée a toutefois précisé qu'il était certes possible que le correspondant inconnu n'ait pas été physiquement présent à Genève et qu'un intermédiaire ait réceptionné la drogue, mais cela démontrait en définitive que la présence de l'interlocuteur non identifié n'avait qu'une importance secondaire, seule la réalité de la livraison par le recourant étant déterminante.
bb) D'une part, le recourant persiste à soutenir qu'une rencontre le 27 janvier 1999 à Genève avec le correspondant inconnu n'est pas établie. D'autre part, il déclare qu'il ne suffit pas de rapprocher sa présence à Genève de contacts téléphoniques entre un inconnu non localisé et deux acteurs d'un trafic de drogue, pour démontrer qu'il aurait remis des stupéfiants dans cette ville, que ce soit à l'interlocuteur non identifié ou à un tiers. Du reste, il ne ressort pas de la comptabilité qu'un tel acte soit survenu à cette date. Surtout, toujours selon le recourant, la livraison en cause est le seul cas précis retenu à sa charge.
cc) Cependant, le recourant ne conteste pas s'être rendu à Genève le 27 janvier 1999. Il ne nie pas davantage que ce déplacement intervenait dans le cadre d'un trafic de drogue, ainsi qu'en attestait le tableau des dépenses relatif à ce commerce, ni que ce trajet était lié à des contacts téléphoniques entre lui-même, le correspondant inconnu et le dénommé W.________, impliqué dans un vaste trafic de stupéfiants.
En outre, le Tribunal cantonal ne s'est pas limité à retenir la livraison litigieuse, mais a confirmé l'ensemble des faits admis par le Tribunal correctionnel, soit notamment la participation du recourant, de janvier à mars 1999, à un trafic portant sur plusieurs kilos d'héroïne et plus d'un kilo et demi de cocaïne. Or, cette conviction repose sur plusieurs éléments que le recourant ne conteste pas non plus. En particulier, le téléphone fixe de l'appartement hébergeant le recourant a été contacté par Y.________, arrêté en possession de cocaïne.
Dans ce logement a également été interpellé un mineur, alors porteur de trois boulettes de cocaïne et de 2'050 fr. transportés pour le compte d'un ressortissant du Kosovo. Enfin, cet appartement abritait, outre de la cocaïne et de l'héroïne, une importante comptabilité manuscrite relative à un trafic de stupéfiants. S'agissant du recourant lui-même, une de ses empreintes digitales ainsi que son nom figuraient sur la comptabilité précitée.
De plus, son agenda contenait des noms et des calculs traitant également d'un trafic de stupéfiants.
Enfin, son passeport a été découvert dans l'appartement où logeait notamment W.________, avec lequel il a entretenu au moins 250 conversations téléphoniques.
Dans ce contexte, le Tribunal cantonal pouvait sans arbitraire imputer la livraison litigieuse au recourant, que les stupéfiants aient été remis à l'interlocuteur non identifié ou à un tiers.
En conclusion, le Tribunal cantonal s'est conformé au principe de la protection contre l'arbitraire ainsi qu'à la maxime "in dubio pro reo", de sorte que le recours de droit public est mal fondé.
II. Pourvoi en nullité (6S. 686/2000)
3.- Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait contenues dans la décision attaquée (art. 277bis al. 1 PPF). L'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent ne peuvent pas faire l'objet d'un pourvoi en nullité, sous réserve de la rectification d'une inadvertance manifeste. Le recourant ne peut pas présenter de griefs contre des constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b PPF).
Dans la mesure où il présenterait un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, il ne serait pas possible d'en tenir compte. Autrement dit, le raisonnement juridique doit être mené exclusivement sur la base de l'état de fait retenu par l'autorité cantonale (ATF 126 IV 65 consid. 1; 124 IV 81 consid. 2a, 92 consid. 1 et les arrêts cités).
Le pourvoi en nullité, qui a un caractère cassatoire (art. 277ter al. 1 PPF), ne peut être formé que pour violation du droit fédéral et non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 269 PPF).
La Cour de cassation n'est pas liée par les motifs invoqués, mais elle ne peut aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF), lesquelles doivent être interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 126 IV 65 consid. 1; 124 IV 53 consid. 1; 123 IV 125 consid. 1).
4.- Le recourant dénonce une violation de l'art. 63 CP. Il fait grief au Tribunal cantonal d'avoir confirmé la peine prononcée par l'autorité de première instance en reconnaissant néanmoins que celle-ci avait à tort tenu compte d'un but de prévention générale.
a) Tout en exigeant que la peine soit fondée sur la faute, l'art. 63 CP n'énonce pas de manière détaillée et exhaustive les éléments qui doivent être pris en considération, ni les conséquences exactes qu'il faut en tirer quant à la fixation de la peine; cette disposition confère donc au juge un large pouvoir d'appréciation; même s'il est vrai que la Cour de cassation examine librement s'il y a eu violation du droit fédéral, elle ne peut admettre un pourvoi en nullité portant sur la quotité de la peine, compte tenu du pouvoir d'appréciation reconnu en cette matière à l'autorité cantonale, que si la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle est fondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si les éléments d'appréciation prévus par cette disposition n'ont pas été pris en compte ou enfin si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente au point que l'on doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 124 IV 286 consid. 4a; 123 IV 49 consid. 2a, 150 consid. 2a; 122 IV 156 consid. 3b, 241 consid. 1a, 299 consid. 2a).
Les éléments pertinents pour la fixation de la peine ont été exposés de manière détaillée dans les ATF 117 IV 112 consid. 1 et 116 IV 288 consid. 2a, auxquels il convient de se référer.
La motivation présentée doit justifier la peine, en permettant de suivre le raisonnement adopté, à savoir les éléments pris en compte et l'importance qui leur est accordée (ATF 120 IV 136 consid. 3a). La motivation n'est pas un exercice formel sans rapport avec le résultat; il doit exister un lien harmonieux entre la motivation présentée et la peine infligée (Bernard Corboz, La motivation de la peine, RJB 1995 p. 33; cf. également ATF 121 IV 49 consid. 2a/bb).
b) L'autorité intimée a examiné la formulation du Tribunal correctionnel, selon laquelle une peine sévère se justifiait "tant en raison des faits commis que dans un but de prévention générale, particulièrement important à l'égard du crime organisé. " Elle a retenu que cette expression, "qui paraît mettre presque sur un pied d'égalité la gravité des actes commis par le recourant et des considérations de prévention générale, conduit à considérer que le Tribunal (correctionnel) a voulu, en tenant compte de motifs de prévention générale, aggraver la peine au-delà de ce que justifierait la faute de l'auteur. " En conséquence, toujours selon le Tribunal cantonal, l'autorité de première instance a procédé à une mauvaise application de l'art. 63 CP. Toutefois, rappelant son pouvoir d'examen limité, le Tribunal cantonal a confirmé la mesure de la peine, estimant que la suppression du critère considéré comme inadmissible ne la rendait pas "arbitrairement sévère".
c) Ce raisonnement tombe à faux.
Lorsqu'à la suite d'un recours, un élément d'appréciation retenu par les premiers juges est écarté, l'autorité ne peut maintenir la peine inchangée sans que cela ne soit justifié par une motivation particulière (ATF 117 IV 395 consid. 4; cf. également ATF 118 IV 18 consid. 1c/bb; Corboz, op. cit. p. 22; Hans-Jürgen Bruns, Das Recht der Strafzumessung, 2ème éd. Cologne 1985, p. 276). Cette règle s'impose comme la conséquence du lien qui doit exister entre la motivation présentée et la peine infligée; elle tend aussi à ne pas rendre illusoire l'exercice des voies de recours. Sauf justification spéciale, on ne saurait admettre que la peine reste inchangée, quels que soient la qualification juridique des infractions ou les critères retenus dans la fixation de la peine.
En l'occurrence, le Tribunal cantonal a reconnu que des motifs de prévention générale avaient conduit le Tribunal correctionnel à aggraver la peine. Il a en outre estimé, à juste titre (cf. ATF 118 IV 14 consid. 2, 21 consid. 2b, 342 consid. 2g; 116 IV 288 consid. 2a), que ce facteur était en l'espèce inadmissible. Force est dès lors de déduire que l'autorité de première instance aurait infligé une peine moindre si elle avait su que ce critère ne pouvait être pris en considération. Dès lors, le Tribunal cantonal ne pouvait se borner à examiner la peine infligée sous l'angle de l'arbitraire; il devait, suivant les règles de procédure cantonale qu'il n'y a pas lieu d'étudier ici, soit en revoir lui-même la quotité avec plein pouvoir d'appréciation en retranchant le critère jugé inadmissible, soit renvoyer l'affaire au Tribunal correctionnel pour nouvelle décision dans ce sens.
Seule la prise en compte de circonstances aggravantes ayant pu échapper à l'autorité de première instance aurait permis à l'autorité intimée de maintenir la même peine, ce qu'elle n'a pas exposé en l'occurrence. Sur ce point, l'arrêt attaqué est d'autant moins soutenable que, selon les constatations du Tribunal cantonal, les motifs de prévention générale "paraissent" avoir joué dans la fixation de la peine un rôle "presque" aussi important que les considérations de prévention spéciale; il n'était donc en tout cas pas exclu que la suppression des premiers doive impliquer une réduction appréciable de la peine.
L'autorité intimée a dès lors violé l'art. 63 CP en se limitant à revoir sous l'angle de l'arbitraire la peine infligée par le Tribunal correctionnel, alors qu'elle avait constaté que celui-ci avait tenu compte d'un critère inadmissible dans la fixation de la peine.
Encore peut-on relever qu'il est de toute façon étonnant que le Tribunal cantonal ne revoie la quotité de la peine que sous l'angle de l'arbitraire, alors que le Tribunal fédéral, auquel il se réfère pourtant en citant l'ATF 117 IV 112, examine librement si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente. Enfin, il sied de souligner qu'un arrêt publié du Tribunal fédéral (ATF 117 IV 395 consid. 4 susmentionné) a déjà annulé, pour des motifs quasi identiques à ceux de la présente affaire, un prononcé de l'autorité intimée.
5.- Vu ce qui précède, le recours de droit public doit être rejeté. Ses conclusions étant dénuées de chances de succès, il convient de refuser l'assistance judiciaire (art. 152 OJ) et de mettre à la charge du recourant des frais judiciaires, qui seront fixés compte tenu de sa situation financière (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ).
Le pourvoi en nullité doit être admis, l'arrêt attaqué annulé en tant qu'il concerne la fixation de la peine et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Le recourant obtenant gain de cause, la Caisse du Tribunal fédéral lui versera (à son mandataire) une indemnité à titre de dépens (art. 278 al. 3 PPF), ce qui rend la demande d'assistance judiciaire sans objet sur ce point.
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral,
1. Rejette le recours de droit public.
2. Admet le pourvoi en nullité, annule l'arrêt attaqué dans le sens des considérants et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
3. Refuse la demande d'assistance judiciaire dans la mesure où elle n'est pas devenue sans objet.
4. Met un émolument judiciaire de 800 fr. à la charge du recourant.
5. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera au mandataire du recourant une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens.
6. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois.
__________
Lausanne, le 19 décembre 2000
Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,
La Greffière,