[AZA 1/2]
1P.633/2000
Ie COUR DE DROIT PUBLIC
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29 janvier 2001
Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Nay, Aeschlimann,
Catenazzi et Mme la Juge suppléante Pont Veuthey.
Greffier: M. Zimmermann.
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Statuant sur le recours de droit public
formé par
le Comité d'initiative "Sauvons nos parcs", case postale 232, à Genève, Rémy Pagani, rue du Village-Suisse 14, à Genève, et Germaine Kindler, chemin de Vincy 2, à Genève,
contre
l'arrêté rendu le 26 juillet 2000 par le Conseil d'Etat du canton de Genève, dans la cause qui oppose les recourantsà Mark Muller, avenue Bertrand 7, à Genève, à la Chambre genevoise immobilière, rue de Chantepoulet 12, case postale 2189, à Genève, et au Conseil municipal de la Ville deG e n è v e;
(art. 85 let. a OJ; art. 68A ss Cst. gen. ; art. 15A ss LExt. ; nullité d'une initiative communale au regard du
droit cantonal en matière d'aménagement du territoire)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- Les art. 15A à 15G de la loi genevoise sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, du 9 mars 1929 (LExt.), régissent les plans d'utilisation du sol et les règlements d'application que les conseils municipaux sont compétents pour adopter selon l'art. 30 al. 1 let. p de la loi genevoise sur l'administration des communes, du 13 avril 1984 (LAC). En matière communale, le droit d'initiative peut porter notamment sur les "études d'aménagement du territoire communal", dans les limites du droit fédéral et cantonal (art. 36 al. 1 let. d LAC).
En décembre 1997, un groupe de citoyens de la Ville de Genève a lancé une initiative populaire municipale, intitulée "Sauvons nos parcs". Cette initiative tendait à ce que le Conseil municipal de la Ville de Genève prenne une délibération
"ayant pour objet de compléter le plan d'utilisation du sol de la Ville de Genève et son règlement d'application conformément aux art. 15A et 15C LExt. et 30 al. 1 let. p LAC, en affectant à des espaces verts inconstructibles, au sens de l'art. 15B al. 1 let. b LExt. , tous les parcs et promenades publics (y compris les quais) et espaces de verdure, privés ou propriété d'une collectivité publique, lorsqu'ils sont ouverts au public ou existent en vertu d'un plan d'affectation du sol (tel le parc des Contamines, objet de la votation de juin 1997), d'une autorisation de construire ou de tout autre acte officiel, sur le territoire de la Ville de Genève, sous réserve, en ce qui concerne la Campagne Rigot (parcelles numéros 2182, 2183 et 2184) de la reconstruction du collège Sismondi au bas du parc, en bordure du chemin Rigot. En conséquence, aucune construction nouvelle, y compris la création de voies de circulation, de parkings ou d'installations sportives, ne sera admise sur ces espaces verts, sous réserve de constructions de peu d'importance nécessaires à l'entretien de ces espaces ou d'aménagements légers, tels que des espaces de jeu pour enfants ou une buvette, toute dérogation éventuelle devant être soumise à l'approbation du Conseil municipal".
Le 25 mars 1998, le Conseil d'Etat du canton de Genève a constaté que l'initiative avait abouti.
Le 2 septembre 1998, le Conseil administratif de la Ville de Genève a présenté au Conseil municipal un rapport concluant à ce que l'initiative, incompatible avec le droit cantonal, soit déclarée nulle.
Le 2 décembre 1998, le Conseil municipal de la Villede Genève a adopté une proposition de délibération déclarant valide l'initiative.
Par arrêté du 26 juillet 2000, le Conseil d'Etat a admis, dans la mesure où il était recevable, le recours formé par Mark Muller et la Chambre genevoise immobilière contre la délibération du 2 décembre 1998. Il a déclaré nulle l'initiative, au motif que celle-ci heurterait les prescriptions du droit cantonal sur l'aménagement du territoire, tant à raison de l'objectif poursuivi que des moyens prévus pour l'atteindre.
B.- Agissant par la voie du recours de droit public au sens de l'art. 85 let. a OJ, le Comité d'initiative "Sauvons nos parcs", ainsi que Rémy Pagani et Germaine (Bichette) Kindler, demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2000, de reconnaître la validité de l'initiative et d'ordonner aux autorités communales de poursuivre la procédure.
Le Conseil d'Etat a produit des observations tendant au rejet du recours.
Muller et la Chambre genevoise immobilière concluent au rejet du recours, dans la mesure où il serait recevable.
Considérant en droit :
1.- L'arrêté attaqué, rendu en dernière instance cantonale, touche aux droits politiques, en l'occurrence le droit d'initiative au niveau communal; il peut, partant, faire l'objet d'un recours de droit public au sens de l'art. 85 let. a OJ (consid. 1 non publié de l'ATF 123 I 175). Pagani et Kindler, citoyens actifs de la Ville de Genève, ont qualité pour agir (ATF 121 I 138 consid. 1 p. 140, 252 consid. 1b p. 255, 357 consid. 2a p. 360 et les arrêts cités). Cela rend superflu l'examen du point de savoir si le Comité d'initiative, qui aurait été constitué après le dépôt de l'initiative selon ce qu'indique l'arrêté attaqué, a lui-même qualité pour agir.
2.- a) A teneur de l'art. 68A al. 2 Cst. gen. , auquel renvoie l'art. 36 al. 2 LAC, l'initiative communale est adressée au conseil municipal et lui demande de délibérer sur un objet déterminé. Cela signifie que l'initiative communale ne peut être présentée qu'en termes généraux, sous les traits de l'initiative dite non formulée, à l'exclusion de l'initiative formulée, c'est-à-dire celle qui est rédigée de toutes pièces. Le Conseil d'Etat a rejeté expressément le grief des intimés selon lesquels l'initiative litigieuse ne respecterait pas cette condition de forme et constituerait, en raison de son caractère précis et rigide, une initiative formulée prohibée par le droit cantonal. Il n'y a pas lieu de revenir sur ce point, malgré les doutes que l'on peut éprouver à ce sujet (cf. ci-dessous consid. 4b et 5b).
b) Une initiative (quelle que soit sa formulation) doit respecter les conditions matérielles qui lui sont imposées.
Elle ne doit, en particulier, rien contenir de contraire au droit supérieur, cantonal, fédéral ou international. L'autorité appelée à statuer sur la validité matérielle d'une initiative doit en comprendre les termes dans le sens le plus favorable aux initiants, en usant des méthodes d'interprétation reconnues. La marge d'appréciation de l'autorité de contrôle est plus grande lorsqu'elle examine une initiative non formulée. En effet, lorsqu'elle se trouve en présence d'une initiative rédigée de toutes pièces, sous la forme d'un acte normatif, l'autorité de contrôle se fonde sur le texte de l'initiative, sans prendre en compte la volonté subjective des initiants (ATF 124 I 107 consid. 5b/aap. 119; 112 Ia 382 consid. 5 p. 386; 111 Ia 292 consid. 2p. 295 et les arrêts cités). En revanche, l'autorité doit tenir compte du fait qu'elle sera appelée à concrétiser un simple voeu émis par les citoyens, en édictant les normes nécessaires. La marge d'appréciation dont elle dispose à cette fin peut lui permettre de corriger d'éventuelles imperfections de l'initiative. Cela ne signifie pas, pour autant, qu'une initiative non formulée ne saurait jamais aller à l'encontre du droit supérieur, parce que l'autorité chargée d'examiner l'initiative pourrait librement en corriger les défauts éventuels sous ce rapport; une telle conception s'écarterait du voeu des initiants et porterait atteinte à l'expression libre de la volonté du peuple (ATF 124 I 107 consid. 5b/aa p. 119 et les arrêts cités).
c) Le Conseil d'Etat a jugé l'initiative incompatible avec le droit cantonal régissant l'aménagement du territoire.
Le Tribunal fédéral examine cette question sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 123 I 175 consid. 2d p. 178-182).
Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; à cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 10 consid. 3a p. 15, 166 consid. 2a p. 168; 125 II 129 consid. 4b p. 134 et les arrêts cités). Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre interprétation de la loi soit possible, ou même préférable (ATF 124 I 247 consid. 5 p. 250/251; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373; 118 Ia 497 consid. 2a p. 499 et les arrêts cités).
3.- Aux termes de l'art. 15A al. 1 LExt. , les communes élaborent avec l'Etat et adoptent des plans d'utilisation du sol approuvés par leur conseil municipal. Ces plans visent à maintenir et à rétablir l'habitat dans les quatre premières zones de construction au sens de l'art. 19 de la loi d'application de la LAT, du 4 juin 1987 (LALAT), et dans leurs zones de développement, d'y favoriser une implantation des activités harmonieuse et équilibrée, tout en garantissant le mieux possible l'espace habitable et en limitant les nuisances qui pourraient résulter de l'activité économique.
a) Sur le vu de cette norme, les plans d'utilisation du sol ne peuvent régir que les terrains sis dans les quartiers de la Ville de Genève qui se trouvent dans les limites des anciennes fortifications (première zone à bâtir au sens de l'art. 19 al. 1 let. a LALAT); les terrains sis dans les quartiers édifiés sur le territoire des anciennes fortifications et les quartiers nettement urbains qui leur sont contigus (deuxième zone à bâtir au sens de l'art. 19 al. 1 let. b LALAT); les terrains compris dans les régions dont la transformation en quartiers urbains est fortement avancée (troisième zone à bâtir au sens de l'art. 19 al. 1 let. c LALAT); les terrains compris dans les zones destinées aux maisons d'habitation comportant en principe plusieurs logements (quatrième zone à bâtir au sens de l'art. 19 al. 2 LALAT). Les plans d'utilisation du sol s'appliquent en outre aux zones de développement, régies par la loi genevoise sur les zones de développement, du 29 juin 1957 (LZD), relatives aux quatre zones considérées. A contrario, les plans d'utilisation du sol ne peuvent s'appliquer aux autres zones à bâtir définies par la LALAT (soit la cinquième zone à bâtir destinée aux villas, la zone industrielle et artisanale, la zone ferroviaire et la zone aéroportuaire, au sens de l'art. 19 al. 3 à 6 LALAT) et les zones de développement y relatives, pas davantage qu'à la zone agricole (art. 20 al. 1 LALAT), à la zone viticole protégée (art. 20 al. 2 LALAT), à la zone de gravières (art. 20 al. 3 LALAT), à la zone des bois et forêts (art. 23 LALAT), à la zone de verdure (art. 24 al. 1 à 3 LALAT), aux zones sportives (art. 24 al. 4 LALAT) et aux zones de jardins familiaux (art. 24 al. 5 LALAT).
Selon l'arrêté attaqué, les terrains visés par l'initiative seraient, pour l'essentiel, classés dans la zone de verdure et dans la cinquième zone de construction, englobant notamment la plupart des parcs de la ville de Genève et les rives du lac, y compris la Place des Nations et la Campagne Rigot. En cela, l'initiative tendrait à déterminer, par le moyen du plan d'utilisation du sol, l'affectation de terrains qui sont soustraits à son champ d'application territorial.
Les recourants contestent cette appréciation, en faisant valoir que, selon l'art. 15B al. 1 LExt. , les plans d'utilisation du sol ont pour but de donner une ligne directrice quant à l'affectation du territoire communal, en répartissant celui-ci en terrains à bâtir (let. a) et en espaces verts (let. b). Ils en tirent la conclusion que la commune peut étendre l'application des plans d'utilisation du sol à tous les "secteurs d'espaces verts et de détente" se trouvant sur l'ensemble du territoire communal, ce à quoi ne ferait pas obstacle le classement éventuel de ces terrains dans d'autres zones que les quatre premières zonesde construction et les zones de développement y relatives.
Cette conception n'est pas compatible avec le texte clairde l'art. 15A al. 1 LExt. A supposer que le sens de cette norme devait être éclairci selon les méthodes usuelles (ce qui n'est pas le cas), l'interprétation très extensive qu'en font les recourants rendrait superflu, pour ne pas dire incompréhensible, le renvoi aux quatre premières zones de construction que fait l'art. 15A al. 1 LExt. A cela s'ajoute, d'un point de vue systématique, que l'art. 15B LExt. , dont se prévalent les recourants, ne peut être appliqué qu'en relation avec l'art. 15A de la même loi qu'il concrétise.
Les lignes directrices mentionnées à l'art. 15B al. 1 LExt. concernent ainsi l'affectation du territoire communal uniquement dans la mesure où celui-ci est compris dans le périmètre défini par l'art. 15A al. 1 LExt. Cette interprétation de la loi, retenue par le Conseil d'Etat, n'est assurément pas arbitraire.
b) L'initiative prévoit de rendre inconstructibles les terrains qu'elle vise. Or, cette mesure n'est pas prévue par la LExt. Les plans d'utilisation du sol ont pour objet de fixer des lignes directrices quant à la répartition du territoire communal compris dans le périmètre défini par l'art. 15A LExt. , en distinguant les espaces verts des terrains à bâtir (art. 15B al. 1 LExt.), puis en répartissant ceux-ci entre un secteur d'intérêt public (art. 15B al. 2 let. a LExt.), un secteur d'habitation ou de logements (art. 15B al. 2 let. b LExt.) et un secteur de travail ou d'emplois (art. 15B al. 2 let. c LExt.). Cette répartition faite, le règlement annexé au plan d'utilisation du sol détermine les indices d'utilisation et le taux de répartition entre les différents secteurs, afin d'assurer notamment un équilibre entre l'habitat, les activités et les secteurs de détente (art. 15C LExt.). Ces dispositions ne prévoient pas la possibilité pour les communes d'édicter d'autres mesures, notamment celle consistant, comme le voudraient les initiants, à désigner des secteurs non constructibles. Les recourants rétorquent à cela que la mesure qu'ils préconisent revient simplement à fixer, pour les terrains concernés, un indice nul d'utilisation. Cette conception, outre qu'elle revientà jouer sur le sens des termes légaux, ne peut pas être partagée pour la raison que les indices d'utilisation concernent les secteurs d'habitat et d'activités et constituent le moyen d'atteindre l'objectif d'équilibre et de développement harmonieux visé à l'art. 15A al. 1 LExt. La fixation d'un indice d'utilisation pour des espaces verts ou de détente ne présente guère de sens. Contrairement à ce qu'allèguent les recourants, l'arrêt rendu le 11 janvier 1991 par le Tribunal fédéral dans la cause Ventouras (1P. 227/1990) ne dit pas que le plan d'utilisation du sol, au sens des art. 15A ss LExt. , permet de prévoir la création d'espaces verts avec un taux nul d'utilisation. Dans cette affaire qui portait sur l'aménagement de terrains à bâtir, le Tribunal fédéral a tout au plus admis que les plans d'utilisation du sol peuvent être assimilés à une étude d'aménagement, entrant dans le domaine de l'initiative communale selon l'art. 36 LAC, pour donnerà l'affectation du territoire communal la "ligne directrice" évoquée à l'art. 15 al. 1 LExt. (sur la nature ambiguë des plans d'utilisation du sol à cet égard, cf. Thierry Tanquerel, La participation de la population à l'aménage-ment du territoire, Lausanne, 1988, p. 257).
c) Le Conseil d'Etat reproche aux initiants d'avoir omis de mentionner, dans le texte de l'initiative, la réserve de l'art. 15A al. 3 LExt. , à teneur duquel les plans d'utilisation du sol ne s'appliquent pas aux bâtiments destinés principalement à un équipement public de la Confédération, du canton, de la Ville, d'établissements ou de fondations de droit public, ainsi qu'aux terrains de la Confédération, du canton et de la Ville sur lesquels seraient édifiés des bâtiments destinés aux organisations intergouvernementales bénéficiant d'un accord de siège. Cette omission n'est pas sans importance. Il est en effet notoire que sur la rive droite du lac, à l'intérieur des limites territoriales de la Ville de Genève, se trouvent des terrains, d'une surface totale assez considérable, qui tombent sousle coup de la clause d'exclusion de l'art. 15A al. 3 LExt.
Il ne serait pas indifférent à l'électeur appelé à signer l'initiative ou à se prononcer sur celle-ci, de connaîtrela règle de l'art. 15A al. 3 LExt. , laquelle restreint dans une mesure non négligeable la portée de l'initiative. Cela étant, celle-ci ne pourrait de toute manière déroger à l'art. 15A al. 3 LExt. , norme de droit supérieur, de sorte que l'on pourrait se demander si l'omission reprochée ne constitue pas un défaut mineur et réparable de l'initiative.
d) Ce point souffre de rester indécis, le Conseil d'Etat pouvant de toute manière admettre sans arbitraireque l'initiative est incompatible avec l'art. 15A al. 1 LExt. , mis en relation avec les art. 15B et 15C de la même loi, s'agissant de son champ d'application territorial etde la mesure d'inconstructibilité des espaces verts qu'elle prévoit.
4.- Selon le Conseil d'Etat, l'objectif poursuivi par les initiants ne pourrait être atteint que par la création de zones de verdure au sens de la LALAT, soit par la modification des plans d'affectation, soit par l'adoption de plans de quartier. Or, cette matière relèverait des autorités cantonales, sur les compétences exclusives desquelles l'initiative empiéterait. Les recourants soutiennent, au contraire, que les communes seraient habilitées à soumettre les espaces verts (lesquels ne se confondraient pas, selon eux, avec les zones de verdure au sens de l'art. 24 LALAT) à une réglementation plus stricte que celle prévue par le droit cantonal.
a) La LALAT règle la procédure d'élaboration des plans d'affectation au sens de l'art. 14 LAT (art. 1er let. b LALAT). Parmi les plans d'affectation ("plans de zones", selon la terminologie genevoise), la loi distingue les zones ordinaires, les zones de développement et les zones protégées (art. 12 LALAT). L'art. 13 LALAT énumère les autres types de plans d'affectation, parmi lesquels figurent les plans d'utilisation du sol régis par les art. 15A ss LExt.
(art. 13 al. 1 let. g LALAT). La zone de verdure fait partie des zones ordinaires définies par le Chapitre III de la loi.
A teneur de l'art. 24 LALAT, cette zone comprend les terrains ouverts à l'usage public et destinés au délassement, ainsi que les cimetières (al. 1); les constructions, installations et défrichements sont interdits s'ils ne servent l'aménagement de lieux de délassement de plein air, respectivement de cimetières (al. 2); toutefois, si la destination principale est respectée, le département cantonal peut exceptionnellement, après consultation de la commission cantonale d'urbanisme, autoriser des constructions d'utilité publique dont l'emplacement est imposé par leur destination, et des exploitations agricoles (al. 3). Le Conseil d'Etat propose au Grand Conseil l'extension de la zone de verdure au fur et à mesure de l'accroissement des besoins de l'agglomération (art. 25 al. 1 LALAT). Aux termes de l'art. 25 al. 2 LALAT, le Conseil d'Etat veille à inclure dans ces zones les surfaces répondant à leur but, telles que notamment les parcs, jardins et squares situés dans les zones bâties (let. a), ainsi que les surfaces en bordure des cours d'eau et du lac (let. b). Les zones de verdure font partie des zones réservées ("zones à protéger", selon la terminologie genevoise) au sens de l'art. 27 LAT (art. 29 let. g LALAT).
Il apparaît ainsi que la zone de verdure au sens de l'art. 24 LALAT pourrait accueillir les espaces de verdure ouverts au public, ainsi que les parcs et promenades publics, visés par l'initiative, réalisant ainsi les objectifs de celle-ci (comme l'atteste au demeurant le fait, évoqué par les recourants eux-mêmes, qu'une grande partie des terrains visés par l'initiative est déjà classée dans la zone de verdure). Le pouvoir de décider de la création de zones de verdure appartient au Grand Conseil, selon ce que prévoient les art. 15 à 16 LALAT, les communes disposant tout au plus d'un droit de suggestion (art. 15A al. 1 et 2 LALAT) ou de proposition (art. 15A al. 2 et 4 LALAT). Pour le surplus, c'est au Conseil d'Etat que revient la tâche de proposer l'extension progressive de la zone de développement, en y incluant des espaces verts qui correspondent à ceux que l'initiative voudrait protéger. Le Conseil d'Etat est aussi compétent pour adopter les plans localisés de quartier (art. 5 al. 7 LExt.); ceux-ci peuvent notamment englober des espaces libres privés ou publics, notamment des places, des promenades, des espaces verts et de jeux pour enfants, sous réserve de la compétence du Grand Conseil dans le cas visé à l'art. 5 al. 8 LExt. Enfin, conférer au Conseil municipal la compétence de déroger à l'interdiction de bâtir posée par l'initiative, comme le voudrait celle-ci, est incompatible avec l'art. 26 LALAT qui confie cette mission au département cantonal. Pour toutes ces raisons, le Conseil d'Etat pouvait admettre sans arbitraire que l'initiative viole la LALAT parce qu'elle permettrait à la Ville de Genève de créer, de fait, des zones de verdure alors que la compétence en appartient uniquement à l'autorité cantonale.
b) Sans prétendre que le catalogue des plans d'affectation de la LALAT ne serait pas exhaustif, ou que cette loi déléguerait aux communes la compétence de créer des zones de verdure, les recourants objectent que le plan d'utilisation du sol, en tant qu'instrument complétant la planification cantonale, permettrait à la Ville de Genève de prendre les mesures qu'ils préconisent. Ils soutiennent qu'en maintenant l'art. 15B LExt. au moment d'adopter l'art. 24 LALAT, le législateur cantonal aurait sciemment prévu deux régimes distincts, l'un de droit cantonal, l'autre de droit communal, applicables aux espaces verts. Cette analyse heurte le texte légal, car il serait inconcevable de laisser subsister, à côté de zones de verdure établies selon les prescriptions de la LALAT, des espaces verts rendus inconstructibles en vertu de plans d'utilisation du sol, alors que ceux-ci sont définis comme de simples "lignes directrices" selon l'art. 15B LExt. Une pareille hypothèse paraît d'autant moins envisageable en l'espèce que l'initiative, même exprimée sous forme de voeu, est rédigée d'une manière extrêmement précise et détaillée et l'inconstructibilité des espaces verts qu'elle prévoit est établie d'une manière rigoureuse. Ces traits donnent à l'initiative litigieuse un caractère contraignant et obligatoire, au point que la délibération qui la concrétiserait constituerait, de fait, un nouveau type de zone de verdure, concurrente à celle régie par l'art. 24 LALAT. Or, le droit cantonal ne prévoit pas une telle possibilité. Il suit de là que le classement des terrains visés par l'initiative dans des zones de verdure constitue un moyen approprié pour réaliser les buts poursuivis par l'initiative. A cela s'ajoute que le plan d'utilisation du sol et son règlement d'application doivent se conformer au plan directeur cantonal et aux plans de zones existants (art. 15D let. c LExt.). Cette obligation marque la relation hiérarchique entre les plans d'affectation et les plans d'utilisation du sol, subordination difficilement compatible avec la thèsede compétence concurrente défendue par les recourants.
c) Ceux-ci reprochent au Conseil d'Etat d'avoir appliqué la loi de manière différente dans l'affaire concernant l'initiative du même nom concernant la Ville de Carouge. Ils se prévalent dans ce contexte de l'arrêté rendu le 29 juillet 1998 par le Conseil d'Etat. Cette décision concernait une proposition à maints égards comparable à l'initiative litigieuse, à la différence près que les terrains visés par celle-là étaient classés dans la zone à bâtir (la quatrième zone urbaine au sens de l'art. 19 al. 2 let. a LALAT), soit dans le champ d'application territorial des plans d'utilisation du sol, tel qu'il est défini par l'art. 15A al. 1 LExt.
Pour le Conseil d'Etat, cette distinction de fait permettrait de traiter l'initiative litigieuse d'une manière différente de celle concernant la Ville de Carouge. Quoi qu'il en soit, la seule évocation de l'arrêté du 29 juillet 1998 ne suffit pas pour démontrer que la solution retenue dans l'arrêté attaqué serait arbitraire au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus.
5.- Les recourants reprochent au Conseil d'Etat de ne pas avoir interprété l'initiative dans un sens conforme au droit supérieur.
a) Lorsque le texte de l'initiative se prête à une interprétation la laissant apparaître comme conforme au droit supérieur, elle doit être déclarée valable et soumise au peuple, quitte à annuler partiellement l'initiative, pour autant que la partie subsistante puisse former un tout cohérent et corresponde à la volonté des initiants (ATF 124 I 107 consid. 5b p. 118/119; 121 I 334 consid. 2a p. 338, 357 consid. 4 p. 362 et les arrêts cités). Ces principes sont concrétisés, pour ce qui concerne le Conseil municipal, par l' art. 68C al. 2 et 3 Cst. gen.
b) Les initiants veulent que la Ville de Genève modifie le plan d'utilisation du sol et le règlement d'application afin d'affecter à des espaces verts inconstructibles tous les parcs et promenades publics, ainsi que tous les espaces de verdure, privés ou publics, ouverts au public, sis surle territoire communal. L'initiative litigieuse est rédigée dans des termes précis et clairs, tant pour ce qui concerne son objet, les terrains visés, le but poursuivi, que les moyens choisis à cet effet. Elle contient une réglementation complète qui ne laisse guère de marge de manoeuvre à l'autorité chargée, en principe, de la concrétiser. Celle-ci ne dispose en effet pas de la possibilité de restreindre le champ d'application de l'initiative, d'en changer le but ou les moyens choisis pour atteindre celui-ci. En cela, l'initiative ne se prête à aucune interprétation favorable aux initiants. Les recourants ne prétendent pas, pour le surplus, que l'initiative devrait être comprise comme le voeu de voir les autorités cantonales protéger les terrains qu'elle vise par le moyen de la zone de verdure ou du plan localisé de quartier, ou de restreindre la portée de la clause d'inconstructibilité qui forme le coeur de l'initiative, voire encore de déroger à la répartition des compétences qu'elle établit. Il ne restait dès lors pas d'autre choix au Conseil d'Etat, lié par la formulation étroite de l'initiative, que de déclarer celle-ci entièrement nulle.
6.- Le recours doit ainsi être rejeté. Conformément à la pratique, il est statué sans frais. En revanche, il convient de mettre à la charge des recourants, solidairement entre eux, une indemnité en faveur des intimés, à titre de dépens (art. 159 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens pour le surplus.
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Rejette le recours.
2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
3. Met à la charge des recourants, solidairement entre eux, une indemnité de 2000 fr. en faveur des intimés, à titre de dépens.
4. Communique le présent arrêt en copie aux parties et au Conseil d'Etat du canton de Genève.
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Lausanne, le 29 janvier 2001 ZIR/mnv
Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,
Le Greffier,