2A.262/2000
[AZA 0/2]
IIe COUR DE DROIT PUBLIC
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Séance du 9 mars 2001
Présidence de M. Wurzburger, Président de la Cour.
Présents: MM. et Mme les Juges Hartmann, Hungerbühler, Müller
et Yersin. Greffier: M. Dayer.
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Statuant sur le recours de droit administratif
formé par
X.________, représenté par Me Enrico Monfrini, avocat à Genève,
contre
la décision prise le 27 avril 2000 par la Commission fédérale des banques;
(art. 38 LBVM: entraide administrative internationale deman- dée par la Commission française des opérations de bourse)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- Le 11 août 1999, un projet de rapprochement entre les sociétés B.________, C.________ et la société française D.________ a été annoncé. Durant les jours précédant cette annonce, plus précisément du 2 au 9 août 1999, le cours de l'action D.________ a progressé d'environ 16 %. Par ailleurs, le volume des transactions, qui était encore de 366'378 unités le 9 août 1999, a atteint 1'135'699 unités le 10 août 1999, 2'015'257 unités le 11 août 1999 et 1'541'530 unités le 12 août 1999.
La Commission française des opérations de bourse (ci-après: la COB) a alors ouvert une enquête afin de s'assurer que les transactions réalisées sur les titres D.________ au cours de la période précédant l'annonce susmentionnée n'avaient pas été effectuées dans des conditions contraires aux dispositions légales et réglementaires applicables (notamment quant à l'usage d'une information privilégiée). Ses investigations lui ont notamment permis de découvrir que la société E.________, à Zurich, avait procédé aux achats suivants:
du 2 au 15 juillet 1999, 5'900 options d'achat D.________ avec échéance en septembre 1999 à un prix d'exercice de 50 Euros; le 3 août 1999, 5'000 options d'achat D.________ avec échéance en septembre 1999 à un prix d'exercice de 45 Euros; du 31 juillet au 6 août 1999, 25'650 actions D.________.
B.- Le 13 septembre 1999, la COB a requis l'assistance de la Commission fédérale des banques (ci-après: la Commission fédérale) afin d'obtenir de la société E.________, à Zurich, des informations sur l'identité du ou des clients pour le compte du ou desquels ces actions et options avaient été acquises ainsi que sur celle de la personne qui avait donné l'ordre de les acheter; elle souhaitait également connaître les motivations qui avaient conduit à la réalisation de ces opérations ainsi que l'intitulé exact des comptes utilisés pour les transactions. Elle s'engageait à ce que l'information reçue soit traitée de manière confidentielle et précisait que, si les informations révélaient des faits susceptibles d'une qualification pénale, elle pourrait avoir à les transmettre au Procureur de la République française.
Le 1er décembre 1999, la Commission fédérale a demandé à la société E.________, à Zurich, de lui transmettre les informations sollicitées par la COB, ainsi que de lui indiquer l'ayant-droit économique des transactions et les dates et prix des reventes ultérieures des titres concernés. Le 17 décembre 1999, la société E.________, à Genève, à qui cette demande avait été transmise, a notamment indiqué que X.________ - titulaire d'un compte, qui avait donné les ordres de bourse - avait acheté 20'000 actions D.________ durant la période en cause. Elle joignait à son courrier deux documents établissant que lesdites actions avaient été acquises le 6 août 1999 à 49,89 Euros l'unité et revendues le 11 août 1999 à 54 Euros l'unité, de sorte que le bénéfice global de l'opération s'élevait à 82'200 Euros. Elle renvoyait au surplus à une prise de position de l'intéressé du 14 décembre 1999 et ajoutait que, si la Commission fédérale décidait d'accorder l'assistance sollicitée, celui-ci demandait qu'une décision formelle de transmission des documents à la COB soit prise et lui soit notifiée.
C.- Dans sa prise de position précitée, X.________ a expliqué qu'il était un professionnel de la gestion de patrimoines.
Sa technique reposait sur des études "fondamentales et chartistes". Il en était venu à considérer que la société française D.________ devait avoir un potentiel de hausse intéressant.
Ainsi, il avait déjà donné le 24 juin 1999 un ordre d'achat de 20'000 titres limités à 41,60 Euros. Comme seules cent vingt-deux actions étaient disponibles à ces conditions, il avait annulé cet ordre d'achat et avait repris son projet le 6 août 1999 en raison de l'ascension quasi continue du cours du titre concerné. Il avait été surpris par l'enchaînement rapide des événements après son acquisition, soit par l'annonce du rapprochement des sociétés B.________, C.________ et D.________. Au demeurant, l'achat de 20'000 actions pour un montant global d'environ 1'000'000 Euros n'avait rien d'inhabituel dans le cadre des affaires dont il assumait la gestion.
Le 7 avril 2000, l'Office fédéral de la police a donné son accord à une éventuelle retransmission aux autorités pénales françaises compétentes des renseignements qui seraient fournis à la COB.
D.- Par décision du 27 avril 2000, la Commission fédérale a accordé l'entraide administrative internationale à la COB en lui indiquant que, le 6 août 1999, X.________ avait ordonné l'acquisition de 20'000 actions D.________ par le biais d'un compte ouvert auprès de la société E.________, à Genève, et qu'il prétendait avoir décidé cet achat en se basant sur la progression continue du titre au début du mois d'août 1999 (ch. 1 du dispositif). Elle précisait que les informations et les documents transmis ne devaient être utilisés qu'à des fins de surveillance directe des bourses et du commerce des valeurs mobilières (ch. 2 du dispositif). De plus, en accord avec l'Office fédéral de la police, l'éventuelle communication de ces informations aux autorités pénales françaises compétentes était autorisée, la COB devant toutefois leur rappeler que leur utilisation était limitée à la poursuite du délit d'usage d'une information privilégiée (ch. 3 du dispositif). En outre, en application de l'art. 38 al. 2 lettre c de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières (LBVM; RS 954. 1), leur transmission à des autorités tierces, autres que celles mentionnées au ch. 3 du dispositif ne pouvait se faire qu'avec son assentiment préalable (ch. 4 du dispositif). Enfin, les ch. 1 à 4 du dispositif seraient exécutés à l'échéance d'un délai de trente jours après la notification de la décision à l'intéressé, si aucun recours n'était déposé dans ce délai auprès du Tribunal fédéral (ch. 5 du dispositif).
E.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Commission fédérale du 27 avril 2000 et de dire qu'il n'y a pas lieu d'accorder l'entraide requise, subsidiairement de renvoyer la cause à ladite Commission pour qu'elle statue dans le sens des considérants du Tribunal fédéral.
Il se plaint en substance de constatation inexacte de faits pertinents, d'excès du pouvoir d'appréciation et de violation du droit fédéral, en particulier des principes de la double incrimination et de la proportionnalité ainsi que de son droit d'être entendu.
L'autorité intimée conclut au rejet du recours.
F.- Par ordonnance du 29 juin 2000, le Président de la IIe Cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif présentée par X.________.
Considérant en droit :
1.- a) La décision par laquelle la Commission fédérale accorde l'entraide administrative internationale en application de l'art. 38 LBVM et ordonne la transmission de documents et de renseignements à une autorité étrangère peut directement faire l'objet d'un recours de droit administratif au sens des art. 97 ss OJ (art. 39 LBVM; ATF 125 II 65 consid. 1 p. 69, 79 consid. 2 p. 80).
b) Titulaire du compte bancaire faisant l'objet des renseignements dont la communication est litigieuse, l'intéressé a qualité pour recourir (art. 103 lettre a OJ; ATF 125 II 65 consid. 1 p. 69).
2.- a) Saisi d'un recours de droit administratif, le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral, qui englobe les droits constitutionnels des citoyens (cf. ATF 125 II 497 consid. 1b/aa p. 500 et la jurisprudence citée), en examinant notamment s'il y a eu excès ou abus du pouvoir d'appréciation (cf. art. 104 lettre a OJ). Il examine en particulier librement dans quelle mesure la coopération internationale doit être accordée. S'il est lié par les conclusions des parties, il ne l'est en revanche pas par leurs motifs et peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (cf. art. 114 al. 1 OJ; ATF 125 II 497 consid. 1b/aa p. 500 et la jurisprudence citée).
b) aa) Bien qu'elle soit indépendante de l'administration, la Commission fédérale n'est pas une autorité judiciaire au sens de l'art. 105 al. 2 OJ (cf. ATF 115 Ib 55 consid. 2a p. 57), de sorte que le Tribunal fédéral revoit, le cas échéant d'office, ses constatations de fait (cf. art. 104 lettre b et 105 al. 1 OJ ).
bb) Invoquant la constatation inexacte de faits pertinents, l'intéressé conteste avoir "décidé d'acheter les 20'000 actions D.________ en se basant sur la progression continue du titre au début du mois d'août 1999", comme l'a retenu l'autorité intimée. Dans sa prise de position du 14 décembre 1999, il a toutefois expressément déclaré: "Le cours de D.________ continuait à monter et il est devenu pour moi dès le début août de plus en plus flagrant que quelque chose devait se passer sur le titre. J'ai donc décidé de racheter le 6 août 1999 les 20'000 titres D.________ à un prix de 49,89 euros". Le passage incriminé de la décision attaquée reprend exactement ces propos. Le grief du recourant n'est ainsi pas fondé. Au demeurant, il ressort de ladite décision (cf. consid. 7c de celle-ci) que la Commission fédérale a tenu compte de l'ensemble du processus qui a abouti à l'achat par le recourant de 20'000 actions D.________ le 6 août 1999.
cc) L'intéressé soutient également que l'autorité intimée a retenu à tort que son ordre d'achat du 24 juin 1999 avait "été annulé en raison du cours trop élevé du titre à cette époque". Dans sa prise de position précitée, il a cependant affirmé: "C'est en fonction des éléments qui précèdent que, suite à une légère baisse du cours, j'ai placé un ordre d'achat de 20'000 titres limités à 41,60 Euros, le 24 juin 1999. L'exécution de cet ordre limité s'est révélé difficile, puisque dans un premier temps, je n'ai pu acheter à ce prix que 122 actions D.________. J'ai donc annulé mon ordre en pensant pouvoir racheter ma position plus tard moins chère". Le passage litigieux de la décision attaquée reflète parfaitement les affirmations du recourant, de sorte que son moyen doit être écarté.
3.- a) Dans une procédure administrative, le droit d'être entendu (cf. l'art 29 al. 2 Cst. dont la portée est similaire à celle de l'art. 4 aCst. , cf. Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale, in FF 1997 I p. 1 ss, p. 183-184; sur le contenu de ce droit, cf. ATF 126 I 7 consid. 2b p. 10; 124 II 132 consid. 2b p. 137 et la jurisprudence citée) n'implique pas celui de s'exprimer oralement (ATF 122 II 464 consid. 4c p. 469; cf. Alfred Kölz/Isabelle Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd., Zurich 1998, n. 149, p. 52-53).
En procédure administrative fédérale, ce droit est notamment concrétisé par les art. 29 ss PA qui trouvent application dans la procédure d'entraide administrative devant la Commission fédérale (cf. art. 38 al. 3 LBVM; ATF 126 II 111 consid. 6b/aa p. 122). En particulier, l'art. 30 al. 1 PA prévoit que l'autorité entend les parties avant de prendre une décision.
Le Tribunal fédéral admet à certaines conditions la possibilité de réparer après coup une atteinte au droit d'être entendu, en particulier lorsque la décision qui en est entachée est couverte par une nouvelle décision qu'une autorité supérieure - jouissant d'un pouvoir d'examen au moins aussi étendu - a prononcée après avoir donné à la partie lésée la possibilité d'exercer effectivement ce droit (cf. ATF 118 Ib 111 consid. 4b p. 120-121; 116 Ia 94 consid. 2 p. 95).
b) Invoquant la violation de son droit d'être entendu, le recourant soutient que la Commission fédérale ne pouvait valablement apprécier la situation sur la base de sa prise de position susmentionnée du 14 décembre 1999 - dans laquelle il ne se serait pas déterminé de façon étendue - et qu'elle aurait dû le convoquer avant de statuer. Il fait valoir qu'il ne connaissait pas le déroulement de la procédure et ne savait pas que l'autorité intimée prendrait une décision sur la base de ce seul document, sans l'entendre. Il se plaint en outre de n'avoir pas été informé d'une démarche auprès de l'Office fédéral de la police et de n'avoir reçu aucune copie du courrier de ce dernier.
c) L'intéressé admet que la lettre - et ses annexes, soit notamment la demande d'assistance de la COB du 13 septembre 1999 - que la Commission fédérale a adressée à la société E.________ à Zurich le 1er décembre 1999 lui a été remise le 14 décembre 1999. Lorsqu'il a rédigé ce même jour sa prise de position à l'intention de l'autorité intimée, il savait dès lors qu'il bénéficiait d'un délai échéant le 20 décembre 1999 pour se déterminer, qu'il devait indiquer s'il désirait une décision formelle de celle-ci et que cette décision pourrait habiliter la COB à transmettre des informations aux autorités pénales françaises compétentes.
Dans cette prise de position, le recourant a par ailleurs expliqué de façon précise pourquoi il avait acheté 20'000 actions D.________ le 6 août 1999 et, plus généralement, comment il exerçait son activité de gérant de patrimoines.
Le fait que la Commission fédérale a considéré qu'il s'était exprimé de façon étendue alors que sa détermination n'occupe qu'environ une page est sans importance. Ce qui compte, c'est qu'il a pu donner son point de vue. S'il avait voulu compléter sa prise de position, il aurait pu le faire jusqu'à l'échéance du délai qui lui avait été imparti. Il aurait également pu demander une prolongation de délai. N'ayant pas fait usage de ces possibilités, il ne saurait se plaindre que l'autorité intimée ne pouvait valablement apprécier la situation sur la base de sa détermination. En outre, il ne peut lui reprocher de n'avoir pas procédé à son audition alors qu'il ne l'avait pas demandée et qu'en procédure administrative, le droit d'être entendu s'exerce en principe par écrit. Au demeurant, devant dire à la Commission fédérale s'il désirait une décision formelle, il aurait pu déduire qu'il n'aurait pas d'autre occasion de s'exprimer avant que celle-ci statue.
d) La démarche de l'autorité intimée auprès de l'Office fédéral de la police découlait du texte de l'art. 38 al. 2 lettre c LBVM in fine selon lequel "l'autorité de surveillance décide en accord avec l'Office fédéral de la police".
Cette procédure était expressément mentionnée dans le courrier précité du 1er décembre 1999 dont l'intéressé a eu connaissance.
Sur ce point, il ne peut dès lors se prévaloir de son ignorance. Quant au courrier de l'Office fédéral de la police du 7 avril 2000, la Commission fédérale aurait assurément dû le communiquer au recourant. Toutefois, vu l'issue du présent litige (cf. consid. 8 ci-dessous), cette violation de son droit d'être entendu - à supposer qu'elle ne soit pas guérie par la procédure devant l'autorité de céans - reste sans conséquence.
4.- a) Selon l'art. 38 al. 2 LBVM, l'entraide administrative internationale peut être accordée à des autorités étrangères de surveillance des bourses et du commerce des valeurs mobilières, à condition, notamment, qu'elles utilisent les informations transmises exclusivement à des fins de surveillance directe des bourses et du commerce des valeurs mobilières (lettre a; principe de la spécialité) et qu'elles soient liées par le secret de fonction ou le secret professionnel (lettre b).
b) Ces conditions sont réalisées en l'espèce (cf.
également ATF 126 II 86 consid. 3 p. 88-89), ce que l'intéressé reconnaît lui-même.
5.- a) Dans le domaine de l'entraide administrative internationale, le principe de la proportionnalité découle de l'art. 38 al. 2 LBVM qui autorise uniquement la transmission d'informations et de documents liés à l'affaire. Selon ce principe, l'entraide administrative ne peut être accordée que dans la mesure nécessaire à la découverte de la vérité recherchée par l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignements demandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure étrangère est en principe laissée à l'appréciation de ce dernier. L'Etat requis ne dispose généralement pas des moyens lui permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'administration de preuves déterminées au cours de la procédure menée à l'étranger, de sorte que, sur ce point, il ne saurait substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité étrangère chargée de l'enquête. Il doit uniquement examiner s'il existe suffisamment d'indices de possibles distorsions du marché justifiant la demande d'entraide. La coopération internationale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans rapport avec d'éventuels dérèglements du marché et manifestement impropres à faire progresser l'enquête, de sorte que ladite demande apparaît comme le prétexte à une recherche indéterminée de moyens de preuve ("fishing expedition"; ATF 126 II 409 consid. 5 p. 413-415, 86 consid. 5a p. 90-91 et les références citées).
b) Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir violé le principe de la proportionnalité et excédé son pouvoir d'appréciation. Il fait valoir que la demande d'entraide de la COB porte sur des transactions boursières réalisées dès le 2 juillet 1999 et ne s'intéresse ainsi pas à celles accomplies précédemment au mois de juin et notamment pas à celle que lui-même a effectuée le 24 de ce mois-là, de sorte qu'aucun "soupçon initial de délit d'initié" n'existerait en rapport avec cette dernière opération. Or, dans la mesure où son achat du 6 août 1999 ne pourrait en être dissocié et résulterait en outre d'une étude de l'évolution des titres D.________ effectuée durant plusieurs mois, son comportement ne pourrait être considéré comme "suspect". De plus, le nombre de titres qu'il a acquis lors de cette deuxième transaction était similaire et non pas supérieur à celui qu'il avait eu l'intention d'acheter au mois de juin, ce qui démontrerait qu'il n'était pas "devenu initié" entre sa première et sa seconde acquisition. Enfin, le montant de son investissement n'aurait rien d'exceptionnel au regard du type de gestion qu'il effectue et le bénéfice retiré de l'opération litigieuse ne représenterait que 2,04 % du portefeuille qu'il gère.
c) L'autorité requérante a observé une animation du marché des titres D.________ dans les semaines qui ont précédé l'annonce, le 11 août 1999, d'un rapprochement entre les sociétés B.________, C.________ et la société française D.________. Ainsi, le cours de l'action de cette dernière a progressé d'environ 16 % du 2 au 9 août 1999 et le volume des transactions a passé de 366'378 unités le 9 août 1999 à 1'135'699 unités le 10 août 1999 pour atteindre 2'015'257 unités le 11 août 1999. Dès lors, la COB disposait d'indices suffisants d'éventuels dérèglements du marché. Elle avait en outre découvert qu'un nombre important de titres D.________ avait été acquis par l'intermédiaire d'une banque suisse durant cette période, soit 10'900 options d'achat avec échéance en septembre 1999 et 25'650 actions, dont 20'000 pour le recourant.
Vu ces éléments, elle pouvait légitimement demander à la Commission fédérale des précisions sur ces acquisitions (cf. dans le même sens ATF 126 II 86 consid. 5b p. 91 et la jurisprudence citée). Les raisons invoquées par l'intéressé pour expliquer son achat ne font pas obstacle à l'octroi de l'entraide administrative. L'autorité chargée de se prononcer sur cette question n'est en effet pas tenue d'examiner si les indices de possibles distorsions du marché justifiant la demande d'entraide sont confirmés ou infirmés par les informations et les explications recueillies à la demande de l'autorité requérante. Seule cette dernière pourra, sur la base de ses propres investigations et des informations transmises par la Commission fédérale, décider si ses craintes initiales étaient ou non fondées (cf. ATF 126 II 86 consid. 5b p. 91).
Par ailleurs, le recourant ne peut rien tirer en sa faveur du fait que la COB a fait partir son enquête du 2 juillet 1999.
En effet, s'il avait effectivement acheté 20'000 actions D.________ le 24 juin 1999 pour les revendre le 11 août 1999, il est probable que cette enquête porterait aussi sur la période du 24 juin au 2 juillet 1999. En effet, l'achat d'un aussi grand nombre d'actions un mois et demi environ avant l'annonce du fait confidentiel, soit dans une période sensible (cf. ATF 126 II 86 consid. 5b p. 91), suivi de la revente de ces titres le jour même de cette annonce, aurait certainement alerté l'autorité requérante.
6.- a) Aux termes de l'art. 38 al. 2 lettre c LBVM, les informations reçues par l'autorité étrangère de surveillance des bourses et du commerce des valeurs mobilières ne peuvent être transmises à des autorités compétentes et à des organismes ayant des fonctions de surveillance dictées par l'intérêt public qu'avec l'assentiment préalable de l'autorité de surveillance suisse ou en vertu d'une autorisation générale contenue dans un traité international; lorsque l'entraide judiciaire en matière pénale est exclue, aucune information ne peut être transmise à des autorités pénales; l'autorité de surveillance décide en accord avec l'Office fédéral de la police (depuis le 1er juillet 2000, c'est l'Office fédéral de la justice qui est l'Office en charge de l'entraide judiciaire en matière pénale, cf. art. 7 al. 6a de l'ordonnance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police [Org DFJP; RS 172. 213.1]).
b) Cette disposition oblige concrètement la Commission fédérale à ne pas perdre le contrôle de l'utilisation des informations après leur transmission à l'autorité étrangère de surveillance (principe dit du "long bras"; "Prinzip der langen Hand"; ATF 126 II 409 consid. 6b/bb p. 417, 126 consid. 6b/bb p. 139, 86 consid. 6b p. 92 et la jurisprudence citée).
Les autorités étrangères ne sont toutefois pas tenues de faire une déclaration contraignante selon le droit international public, mais doivent s'engager, notamment, à mettre tout en oeuvre pour respecter le principe dit du "long bras" (exigence qualifiée en anglais de "best efforts" ou de "best endeavour") dans l'hypothèse d'une retransmission d'informations à d'autres autorités, pénales ou non. Aussi longtemps que l'Etat requérant respecte effectivement ce principe et qu'il n'existe aucun signe qu'il ne le fasse pas dans le cas concret, rien ne s'oppose à accorder l'entraide administrative.
S'il devait s'avérer qu'une autorité étrangère ne puisse plus se conformer à ce principe en raison de sa législation interne ou d'une décision contraignante à laquelle elle n'a pas les moyens de s'opposer, la Commission fédérale devrait alors refuser l'entraide (cf. ATF 126 II 126 consid. 6b/bb p. 139, 86 consid. 6c p. 92 et la jurisprudence citée).
c) Dans un courrier de son Président adressé le 26 mars 1999 au Président de la Commission fédérale (cf. ATF 126 II 86 consid. 7a p. 92-93), la COB s'est expressément engagée à ne retransmettre d'informations à des autorités pénales ou non pénales qu'avec l'accord préalable de l'autorité intimée.
Faute d'éléments concrets (cf. ATF 126 II 409 consid. 4b/bb p. 413) et même si l'autorité de céans a pu se montrer hésitante dans une précédente affaire s'agissant de la retransmission d'informations auxdites autorités pénales (cf. ATF 126 II 86 consid. 7d/aa p. 94), rien ne permet en l'espèce de supposer que l'autorité requérante ne se conformera pas à cet engagement. Le recourant ne le prétend d'ailleurs pas. Au demeurant, l'obligation de la COB de communiquer certaines informations au Procureur de la République (cf. consid. 7a ci-dessous) ne fait pas, en soi, obstacle à l'octroi de l'entraide administrative (cf. dans ce sens ATF 126 II 409 consid. 4b/aa p. 412-413).
7.- a) Les renseignements fournis à l'autorité requérante dans le cadre de l'entraide administrative le sont avant tout pour lui permettre d'exercer sa mission de surveillance des marchés; ils peuvent cependant amener cette autorité à soupçonner l'existence d'un délit d'initié. Si tel est le cas, il lui appartient alors d'effectuer des investigations supplémentaires puis de décider si, compte tenu des renseignements obtenus, elle doit saisir les autorités pénales compétentes (cf. ATF 126 II 409 consid. 5b/aa p. 415 et 6b/cc p. 418). A cet égard, elle ne peut leur communiquer les informations fournies par la Commission fédérale qu'avec l'autorisation de cette dernière (cf. art. 38 al. 2 lettre c LBVM et consid. 6 ci-dessus). L'autorité intimée, de même que l'Office fédéral de la police, se prononcent sur la base des éléments dont ils disposent et doivent, au besoin, demander des compléments d'information à l'autorité requérante (cf.
ATF 125 II 450 consid. 4a p. 459). Ils sont tenus d'examiner si toutes les conditions matérielles de l'entraide pénale internationale sont remplies, notamment si l'exigence de la double incrimination est satisfaite (cf. ATF 126 II 409 consid. 6b/bb et 6b/cc p. 417-419).
Une telle procédure en deux temps permet de ne pas soumettre à des exigences trop élevées l'octroi, dans un premier temps, de l'entraide administrative à l'autorité requérante (cf. ATF 126 II 409 consid. 6b/cc p. 419; cf. aussi consid. 5 ci-dessus). Cette dernière pourra ainsi obtenir rapidement les informations dont elle a besoin pour sa mission de surveillance des marchés.
b) Si, lors du dépôt de sa demande d'entraide administrative, les investigations de l'autorité requérante sont déjà suffisamment avancées et font déjà apparaître la nécessité d'une éventuelle retransmission d'informations aux autorités pénales étrangères compétentes, la Commission fédérale peut directement y consentir dans sa décision accordant l'entraide administrative. Ce consentement est toutefois soumis à des exigences plus élevées que celles nécessaires à l'octroi de ladite entraide. Des variations significatives du volume des titres échangés et de leur cours peu avant une annonce de rachat de société ne sont en particulier pas suffisantes.
L'autorité intimée doit disposer d'éléments supplémentaires insolites lui permettant de soupçonner concrètement et avec un minimum de vraisemblance l'existence d'un comportement tombant sous le coup du droit pénal. Il ne faut cependant pas poser d'exigences trop sévères quant à l'exposé des faits figurant dans la demande, notamment parce qu'il n'est pas encore possible de savoir avec certitude si, compte tenu de ses investigations ultérieures, l'autorité requérante transmettra ou non - malgré l'autorisation de la Commission fédérale - ses informations aux autorités pénales étrangères compétentes.
Ainsi, pour pouvoir simultanément accorder l'entraide administrative à l'autorité requérante et l'autoriser à retransmettre les informations qui lui sont fournies aux autorités pénales étrangères compétentes, la Commission fédérale doit avoir connaissance - outre de la variation du cours des titres en cause et de l'augmentation de leur volume d'échanges durant une période sensible - d'indices lui permettant de soupçonner concrètement et de manière vraisemblable l'utilisation d'une information privilégiée par l'intéressé en rapport avec la transaction examinée. Si tel n'est pas le cas, la question d'une telle retransmission d'informations devra faire l'objet d'une nouvelle procédure et d'une décision séparée ultérieure (cf. lettre a ci-dessus et ATF 126 II 409 consid. 6b/cc p. 419-420 et les arrêts cités).
8.- a) La COB peut être tenue de transmettre au Procureur de la République française des informations révélant des faits susceptibles d'une qualification pénale (cf. art. 12-2 al. 3 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une commission des opérations de bourse et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse; cf. également ATF 126 II 86 consid. 7d/aa p. 94).
b) Dans sa requête d'entraide du 13 septembre 1999, la COB n'a pas expressément sollicité l'autorisation de communiquer audit Procureur les informations fournies par l'autorité intimée. Elle a toutefois clairement indiqué à cette dernière son obligation de le saisir si ces informations révélaient une infraction pénale. La Commission fédérale pouvait considérer d'office cette indication comme une demande d'autorisation implicite (cf. dans ce sens ATF 125 II 65 consid. 7 p. 75).
c) L'autorité intimée a par ailleurs soumis à l'Office fédéral de la police une prise de position détaillée sur laquelle celui-ci s'est déterminé de manière circonstanciée.
Elle a dès lors recueilli le consentement de ce dernier conformément aux exigences posées par la jurisprudence (cf. ATF 126 II 86 consid. 7d/bb p. 94-95).
d) Au moment de prendre sa décision, la Commission fédérale connaissait l'évolution du titre D.________ durant la période sensible précédant l'annonce du projet de rapprochement entre les sociétés B.________, C.________ et la société française D.________. Elle savait en outre que, le 24 juin 1999, le recourant avait renoncé à acquérir 20'000 actions, faute d'avoir pu toutes les acheter au prix limite qu'il s'était fixé (41, 60 Euros). Elle était de surcroît au courant du fait que, le 6 août 1999, il avait finalement acquis ces 20'000 actions à un prix plus élevé (49, 89 Euros) que celui qu'il était disposé à payer le 24 juin 1999 et qu'il avait revendu ces titres le jour même, avec bénéfice.
Ces seuls éléments ne sont cependant pas suffisants pour faire naître un soupçon concret et vraisemblable de délit d'initié. En effet, en tant que professionnel de la gestion de patrimoines, l'intéressé était sans nul doute particulièrement attentif à l'évolution des valeurs boursières et son comportement consistant à renoncer à un achat en spéculant sur une baisse du prix des titres qu'il convoitait ne paraît pas insolite. De même, il ne semble pas exclu, comme il le soutient, que sa décision d'achat au début du mois d'août résulte d'une analyse fondée sur la comparaison entre l'évolution du titre D.________ et celle d'actions de sociétés concurrentes depuis la date de son ordre d'achat du mois de juin.
En l'état, l'autorité intimée ne disposait dès lors pas d'informations suffisantes lui permettant d'autoriser la COB à retransmettre aux autorités pénales françaises compétentes les informations qui lui étaient fournies. La décision attaquée doit dès lors être annulée dans cette mesure. Dans ces conditions, il est superflu d'examiner encore si, comme le soutient le recourant, la Commission fédérale a violé le principe de la double incrimination.
e) Par conséquent, conformément à la procédure en deux temps indiquée ci-dessus (cf. consid. 7a), si, après avoir poursuivi ses investigations, la COB devait juger nécessaire de retransmettre au Procureur de la République les informations actuellement fournies par la Commission fédérale, il lui incombera de solliciter l'autorisation de l'autorité intimée dont la décision, portant alors sur cette seule question, pourra, selon toute probabilité, intervenir dans des délais raisonnables.
9.- Vu ce qui précède, le présent recours doit être partiellement admis et le chiffre 3 du dispositif de la décision attaquée annulé, de même qu'au chiffre 4 les mots "autres que celles figurant sous chiffre 3". Pour le surplus, le recours est rejeté.
N'obtenant que partiellement gain de cause, le recourant supporte une part des frais judiciaires (cf. art. 156 al. 3, 153 et 153a OJ ). La Commission fédérale lui versera des dépens réduits (cf. art. 159 al. 1 et 3 OJ ).
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Admet partiellement le recours et annule le chiffre 3 du dispositif de la décision de la Commission fédérale des banques du 27 avril 2000, de même qu'au chiffre 4 les mots "autres que celles figurant sous chiffre 3"; pour le surplus, rejette le recours.
2. Met un émolument judiciaire de 3'000 fr. à la charge du recourant.
3. Dit que la Commission fédérale des banques versera au recourant une indemnité réduite de 2'000 fr. à titre de dépens.
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant ainsi qu'à la Commission fédérale des banques.
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Lausanne, le 9 mars 2001 DBA/elo
Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,
Le Greffier,