[AZA 0/2]
1P.548/2000
Ie COUR DE DROIT PUBLIC
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26 mars 2001
Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Aeschlimann et Favre.
Greffier: M. Thélin.
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Statuant sur le recours de droit public
formé par
K.________, représenté par Me Ulrich Seiler, avocat à Berne,
contre
l'arrêt rendu le 10 mai 2000 par la IIe Chambre pénale de la Cour suprême du canton de Berne;
(appréciation des preuves)
Considérant en fait et en droit:
1.- Par jugement du 6 octobre 1999, le Tribunal d'arrondissement judiciaire II de Bienne-Nidau a reconnu K.________ coupable de lésions corporelles simples, incendie intentionnel et tentative d'escroquerie; il lui a infligé une peine de quinze mois d'emprisonnement, avec sursis durant un délai d'épreuve de trois ans. Le tribunal a notamment retenu que le prévenu avait délibérément mis le feu à son véhicule Chevrolet Corvette le 11 mars 1998, puis tenté d'obtenir un dédommagement de l'assurance.
K.________ a interjeté appel de ce prononcé; sans mettre en cause la condamnation pour lésions corporelles simples, il contestait avoir mis le feu à son véhicule et soutenait que l'incendie s'était déclaré fortuitement. Il a ensuite présenté une demande de complément de preuve, tendant à une expertise scientifique destinée à élucider la cause de l'incendie.
La IIe Chambre pénale de la Cour suprême du canton de Berne a rejeté cette requête par une décision incidente du 6 avril 2000. A l'issue des débats, cette juridiction a confirmé le verdict de culpabilité et a prononcé une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis durant deux ans.
2.- Agissant par la voie du recours de droit public, K.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour suprême. Il se plaint de violation du droit d'être entendu, en tant que la juridiction intimée a refusé l'expertise requise, et d'appréciation arbitraire des preuves quant à la condamnation pour incendie intentionnel. Le recourant a présenté une demande d'assistance judiciaire.
Invités à répondre, la Cour suprême et le Procureur général du canton de Berne ont renoncé à déposer des observations.
3.- Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. ou 4 aCst. confère aux parties le droit d'obtenir l'administration des preuves qu'elles ont valablement offertes, à moins que celles-ci ne portent sur un fait dépourvu de pertinence ou qu'elles soient manifestement inaptes à faire apparaître la vérité quant au fait en cause. Par ailleurs, le juge est autorisé à effectuer une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles et, s'il peut admettre de façon exempte d'arbitraire qu'une preuve supplémentaire offerte par une partie serait impropre à ébranler sa conviction, refuser d'administrer cette preuve (ATF 124 I 208 consid. 4a p. 211, 122 V 157 consid. 1 d p. 162, 119 Ib 492 consid. 5b/bb p. 505; cf. aussi ATF 125 I 417 consid. 7 p. 430).
En l'occurrence, la Cour suprême a refusé l'expertise supplémentaire demandée par le recourant au motif que, à son avis, les faits étaient suffisamment établis par un rapport du service d'identité judiciaire et par les indices qui ressortaient des déclarations du prévenu et des témoins. Ce refus ne peut donc constituer une violation du droit du recourant d'être entendu que dans la mesure où ces preuves ont été, le cas échéant, appréciées de façon arbitraire.
L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'invalide la solution retenue par le juge de la cause que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective ou adoptée sans motifs objectifs; il ne substitue pas sa propre appréciation à celle du juge du fond. Par ailleurs, il ne suffit pas que les motifs du verdict soient insoutenables; il faut en outre que l'appréciation soit arbitraire dans son résultat. Il ne suffit pas non plus qu'une solution différente puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134).
4.- Aux termes de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit contenir un exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation.
Lorsqu'il se plaint d'arbitraire, le recourant ne peut donc pas se contenter de critiques générales ou imprécises, ni se borner à reprendre les arguments déjà développés en instance cantonale, ainsi que l'on peut le faire devant une juridiction d'appel habilitée à revoir librement la cause tant en fait qu'en droit. Au contraire, il incombe au recourant de préciser de façon détaillée en quoi la juridiction ou l'autorité intimée s'est gravement trompée, et est parvenue à une décision manifestement erronée ou injuste; une argumentation qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495, 117 Ia 10 consid. 4b p. 11/12, 110 Ia 1 consid. 2a p. 3).
Dans son arrêt, la Cour suprême a procédé à une discussion détaillée de tous les renseignements disponibles concernant l'incendie imputé au prévenu. Elle a notamment pris position de façon également détaillée sur les déclarations successives de celui-ci, partiellement divergentes, qui tendaient à faire admettre un déclenchement fortuit de l'incendie; elle a indiqué de manière circonstanciée pourquoi cette version des faits n'emportait pas sa conviction. Or, dans la présente procédure, le recourant ne tente pas de réfuter les motifs de l'arrêt attaqué, précis et concluants, autrement que par de simples dénégations ou de simples répétitions de ses allégations antérieures. Le recours apparaît donc irrecevable au regard de l'art. 90 al. 1 let. b OJ.
5.- Selon l'art. 152 OJ, le Tribunal fédéral peut accorder l'assistance judiciaire à une partie à condition que celle-ci soit dans le besoin et que ses conclusions ne paraissent pas d'emblée vouées à l'échec. Il n'est pas nécessaire de vérifier si le recourant est effectivement dépourvu de ressources car, de toute manière, la procédure entreprise devant le Tribunal fédéral n'avait manifestement aucune chance de succès. La demande d'assistance judiciaire doit dès lors être rejetée.
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Déclare le recours irrecevable.
2. Rejette la demande d'assistance judiciaire.
3. Met un émolument judiciaire de 1500 fr. à la charge du recourant.
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Procureur général et à la IIe Chambre pénale de la Cour suprême du canton de Berne.
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Lausanne, le 26 mars 2001 THE/col
Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,