[AZA 7]
H 325/00 Ge
IIe Chambre
composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; Addy, Greffier
Arrêt du 11 mai 2001
dans la cause
Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20, 3003 Berne, recourant,
contre
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
4. D.________,
intimés, tous les quatre représentés par Maître Freddy Rumo, avocat, avenue Léopold-Robert 73, 2301 La Chaux-de-Fonds,
et
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel
A.- Le club de football X.________ FC est constitué sous la forme d'une association; A.________, B.________, C.________ et D.________ occupaient, au sein du club, les fonctions de membres du comité.
Le 6 juin 2000, la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation (ci-après : la caisse de compensation) leur a notifié à chacun une décision par laquelle elle leur réclamait le paiement de 681 549 fr. 55. Ce montant représentait la créance de cotisations AVS/AI/APG/AC que le club devait à la caisse de compensation au 30 juin 2000 et qu'il n'avait pas les moyens de rembourser (cf. actes de défaut de biens du 5 juin 2000).
A.________, B.________, C.________ et D.________ se sont opposés, dans une écriture commune, à ces décisions.
B.- La caisse de compensation a saisi le Tribunal administratif de la République et canton de Neuchâtel, en concluant à ce que les opposants fussent solidairement condamnés à lui payer la somme de 681 549 fr. 55.
En cours de procédure, la caisse de compensation a fait parvenir au Tribunal administratif, pour homologation, une transaction qu'elle avait passée le 8 juin 2000, d'une part avec le club X.________ FC et, d'autre part, avec les sieurs A.________, B.________, C.________ et D.________.
Cette convention avait la teneur suivante :
Article 1X.________ FC versera à la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation en couverture des retenues sur le salaire des employés le montant de 238'551 fr. 55 (deux cents trente huit mille cinq cents cinquante et un francs et trente centimes) dans les dix jours dès l'homologation de la présente transaction judiciaire par le Tribunal Administratif.
Article 2Dans le même délai, il sera versé à la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation un dividende de 8 % du solde de la créance en cause dans la présente affaire (681'549 fr. 55 - 238'551 fr. 35 = 442'998 fr. 20), soit 35'439 fr. 85 (trente cinq mille quatre cents trente neuf francs et quatre-vingt centimes).
Ce dividende correspond au montant versé aux créanciers de X.________ figurant ordinairement en 3ème classe de l'ordre des créanciers au sens de l'art. 219 LP.
Il interviendra pour solde de la créance de la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation envers X.________ FC.
Article 3Moyennant bonne et fidèle exécution de la présente, l'action en réparation du dommage actuellement en cours sera retirée, respectivement classée sans dépens, les frais éventuels étant pris en charge par X.________ FC".
Par jugement du 11 juillet 2000, le Tribunal administratif a ordonné le classement du dossier, après avoir constaté que la convention précitée était en adéquation avec l'état de fait et ne heurtait d'aucune manière l'ordre légal.
C.- L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation, en concluant à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal administratif pour nouveau jugement.
Dans une détermination commune, A.________, B.________, C.________ et D.________ concluent, sous suite de frais et dépens, à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement, à son rejet. La caisse de compensation prend les mêmes conclusions que les prénommés.
Considérant en droit :
1.- a) Dans un premier moyen, les intimés font valoir que le recours de l'OFAS doit être déclaré irrecevable pour cause de tardiveté.
b) Le jugement entrepris a été notifié à l'OFAS le 18 juillet 2000.
Compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b OJ), le délai de trente jours pour recourir devant le Tribunal fédéral des assurances (art. 106 al. 1 en relation avec l'art. 132 OJ) n'a commencé à courir que le 16 août 2000 et n'est ainsi venu à échéance que le 15 septembre 2000, le jour duquel le délai court n'étant pas compté dans la supputation des délais (art. 32 al. 1 OJ).
Déposé le 14 septembre 2000, le recours a donc été formé en temps utile.
2.- Dans un second moyen, les intimés contestent leur qualité pour défendre, au motif que, d'une part, la qualité de membres du comité ne leur aurait conféré, selon les statuts du club, que "des tâches essentiellement représentatives" et que, d'autre part, leur responsabilité ne pourrait être que subsidiaire par rapport à celle du club.
Le dossier ne contient pas les statuts du club, si bien que la qualité d'organe, au sens formel, des membres du comité, ne peut être examinée. Il ressort toutefois des pièces au dossier que, dès 1998, ce sont les intimés qui ont personnellement mené des négociations, au nom de X.________ FC, en vue d'obtenir de la caisse de compensation des sursis pour le paiement des cotisations AVS/AI/APG/AC dues par le club. La qualité d'organe de fait doit donc, à tout le moins, leur être reconnue (cf. ATF 126 V 237). Vu, par ailleurs, les actes de défaut de biens que l'Office des poursuites a délivrés le 5 juin 2000 à la caisse de compensation à la suite des poursuites que celle-ci avait intentées contre X.________ FC, le principe voulant que les organes d'une société ne répondent qu'à titre subsidiaire des cotisations paritaires impayées est respecté.
3.- a) Selon la jurisprudence, le juge administratif appelé à se prononcer sur une transaction conclue entre les parties doit contrôler, dans le cadre du pouvoir d'examen dont il dispose, la conformité de la convention avec l'état de fait et la loi. Il n'est pas nécessaire que sa ratification fasse l'objet d'un jugement au fond, mais une décision de radiation du rôle suffit. Cette décision a les mêmes effets juridiques qu'un jugement.
Récemment, le Tribunal fédéral des assurances a encore précisé que le résultat du contrôle effectué par le juge appelé à ratifier une transaction doit ressortir de sa décision. Il faut donc que celle-ci contienne au moins l'indication que rien ne s'oppose à la ratification de la transaction, cette indication minimale ayant toutefois plus de poids lorsque le résultat du contrôle de la conformité de la transaction avec l'état de fait et la loi y est mentionné.
En revanche, il ne suffit pas que le juge prenne acte d'une transaction conclue entre les parties et qu'il radie l'affaire du rôle, motif pris que cette transaction a mis fin au litige (SVR 2000 AHV no 23 p. 73ss; VSI 1999, p. 213ss).
b) En l'espèce, les premiers juges ont constaté "qu'une transaction a été signée le 8 juin 2000 par les parties à la procédure et que son contenu est en adéquation avec l'état de fait et ne heurte d'aucune manière l'ordre légal". Ils en ont déduit que rien ne s'opposait à l'approbation de cette transaction, et que la procédure, devenue sans objet, pouvait ainsi être classée (jugement attaqué, p. 2).
Quoique succincte, la mention que la transaction judiciaire est conforme à la situation juridique suffit, selon la jurisprudence précitée, pour que le jugement soit valable. Dans la mesure où l'OFAS expose, de manière générale - et donc appellatoire -, que les transactions judiciaires sont source d'inégalités de traitement et d'arbitraire, son argumentation ne vise d'autre but, bien qu'il s'en défende, que d'ôter aux caisses de compensation la possibilité de conclure de tels arrangements. La jurisprudence précitée a toutefois réaffirmé, à de nombreuses reprises, la licéité de ce mode de faire, si bien que le recours de l'OFAS s'avère mal fondé.
4.- Vu la nature du litige, la procédure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a contrario). Toutefois, bien que l'OFAS succombe, aucun frais ne sera mis à sa charge (art. 156 al. 2 OJ). Il versera en revanche une indemnité de dépens aux intimés, qui obtiennent gain de cause (art. 159 al. 2 OJ)
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
prononce :
I. Le recours est rejeté.
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
III. L'Office fédéral des assurances sociales versera une indemnité de dépens de 1500 fr. aux intimés.
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, et au Tribunal administratif de la République et canton de
Neuchâtel.
Lucerne, le 11 mai 2001
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
p. le Président de la IIe Chambre :
Le Greffier :