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Original
 
[AZA 7]
P 64/00 Tn
IIe Chambre
composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier
Arrêt du 20 août 2001
dans la cause
D.________, recourant, ayant élu domicile c/o Maître Yves Magnin, avocat, Rue de la Rôtisserie 2, 1204 Genève,
contre
Office cantonal des personnes âgées, Route de Chêne 54, 1208 Genève, intimé,
et
Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève
A.- D.________, a été mis au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité avec effet au 1er avril 1985. A partir de 1990, il a en outre bénéficié de prestations complémentaires en application, d'une part, de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (LPC) et, d'autre part, de la loi cantonale genevoise sur les prestations cantonales à l'AVS et à l'AI du 25 octobre 1968 (LPCC; RS GE J 7 15).
Par décision du 25 octobre 1996, qui faisait suite à un préavis du 6 septembre précédent, l'Office fédéral de l'assurance militaire (OFAM) lui a accordé une rente d'invalidité avec effet au 1er août 1985. Sur une partie des arrérages de rentes, l'OFAM a versé 129 786 fr. 80 à l'Office cantonal genevois des personnes âgées (OCPA), en remboursement des prestations complémentaires versées par ce dernier depuis 1990. Il a également payé 8215 fr. au Service social de la Ville de Genève. Le solde des arriérés, par 919 664 fr. 50, a été payé à l'assuré.
Sur la base du préavis de l'OFAM, l'OCPA a recalculé le revenu déterminant de l'assuré depuis 1990. Il est apparu que la prise en compte de la rente de l'assurance militaire excluait tout droit à des prestations complémentaires (selon la LPC et selon le droit cantonal) depuis cette date. Le 1er octobre 1996, l'OCPA a rendu une décision par laquelle il mettait fin à ses prestations et réclamait à D.________ la restitution du montant précité de 129 786 fr. 80, en précisant que sa créance se trouvait compensée par le paiement de l'OFAM.
L'assuré a formé une réclamation contre cette décision.
Statuant le 5 mai 1997, l'OCPA a confirmé sa décision de restitution pour la période du 1er octobre 1991 au 30 septembre 1996. En revanche, le remboursement des prestations versées pour la période antérieure (1er avril 1990 au 30 septembre 1991) ne pouvait plus être exigé, pour cause de péremption. Pour cette raison, un montant de 25 735 fr. devait être remboursé à l'assuré par l'OCPA.
B.- Par jugement du 24 août 2000, la Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI a rejeté le recours formé contre cette décision par l'assuré.
C.- D.________ interjette un recours de droit administratif dans lequel il conclut, principalement, à la "nullité" du jugement attaqué ainsi que des décisions administratives précédentes. Subsidiairement, il demande au Tribunal fédéral des assurances d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des motifs; il requiert également le tribunal d'inviter le canton de Genève à instituer une autorité de recours conforme à l'art. 6 § 1 CEDH.
La commission cantonale et l'OCPA concluent au rejet du recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il ne s'est pas déterminé à son sujet.
D.- Parallèlement à son recours de droit administratif, D.________ a saisi le Tribunal fédéral d'un recours de droit public contre le même jugement. Par ordonnance du 8 décembre 2000, le Président de la IIe Cour de droit public a suspendu la procédure de recours de droit public jusqu'à droit connu sur la procédure pendante devant le Tribunal fédéral des assurances.
Considérant en droit :
1.- Lorsque le recourant, comme en l'espèce, agit simultanément par la voie du recours de droit public et du recours de droit administratif, il convient, en vertu de la règle de la subsidiarité du recours de droit public énoncée à l'art. 84 al. 2 OJ, d'examiner en premier lieu la recevabilité du recours de droit administratif (ATF 125 V 184 consid. 1).
Selon l'art. 128 OJ, le Tribunal fédéral des assurances connaît en dernière instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens des art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en matière d'assurances sociales.
Quant à la notion de décision pouvant faire l'objet d'un recours de droit administratif, l'art. 97 OJ renvoie à l'art. 5 PA. Selon le premier alinéa de cette disposition, sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral (et qui remplissent encore d'autres conditions, définies plus précisément par rapport à leur objet).
Il s'ensuit que le recours de droit administratif est irrecevable dans la mesure où le litige a trait au remboursement de prestations complémentaires régies par le droit cantonal.
2.- Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 6 § 1 CEDH en reprochant à la commission de recours d'avoir refusé de tenir une audience publique, bien qu'il en eût fait la demande explicite.
a) L'art. 6 § 1 CEDH garantit à chacun le droit à un examen équitable et public de sa cause, englobant en principe le droit pour une partie de pouvoir être entendue oralement devant un tribunal lors d'une séance publique (ATF 121 I 35 consid. 5d et les références), pour autant qu'elle n'y ait pas explicitement ou implicitement renoncé (ATF 125 II 426 consid. 4f). A cet égard, l'obligation d'organiser des débats publics suppose une demande, formulée de manière claire et indiscutable de l'une des parties au procès; une simple requête de preuves, comme des demandes tendant à une comparution ou à une interrogation personnelle, à un interrogatoire des parties, à une audition de témoins ou à une inspection locale, ne suffisent pas pour fonder une semblable obligation (ATF 125 V 38 consid. 2, 122 V 55 consid. 3a). Par ailleurs, la garantie de la publicité vise en priorité le contentieux devant l'autorité judiciaire de première instance (ATF 122 V 54 consid. 3, 120 V 7 consid. 3a in fine et la jurisprudence citée).
La deuxième phrase de l'art. 6 § 1 CEDH prévoit des exceptions au principe de la publicité, dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale, ou lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou encore lorsque, dans des circonstances spéciales, la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
En outre, en matière d'assurances sociales, il est admissible de refuser la tenue d'une audience publique malgré une requête expresse du justiciable, quand il s'agit de questions hautement techniques ou pour tenir compte de l'exigence de la célérité du procès; il en va de même dans l'hypothèse d'un recours manifestement irrecevable ou mal fondé (ATF 122 V 55 ss consid. 3b, 121 I 37 consid. 5e; Michel Hottelier, La portée du principe de la publicité des débats dans le contentieux des assurances sociales, SJ 1996, p. 650 ch. 10; Auer/Malinverni/Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, no 1263 p. 602).
b) En l'espèce, le recourant a déclaré en procédure cantonale qu'il ne renonçait pas à une audience publique "quoi qu'il soit décidé", ce qui ne peut être compris que comme une demande claire et indiscutable d'organiser des débats. Dans ses déterminations, la commission de recours explique cependant qu'elle a considéré que le recours était manifestement mal fondé (ces termes figurent au bas des considérants du jugement attaqué), de telle sorte qu'il n'y avait pas lieu, pour ce motif, d'organiser des débats publics.
Devant la commission cantonale, le recourant s'est plaint, entre autres griefs, d'une motivation insuffisante de la décision de l'OCPA. Il invoquait, à ce propos, l'art. 29 al. 3 OPC-AVS/AI. Selon cette disposition, les cantons et communes qui, outre les prestations complémentaires, versent leurs propres prestations d'assurance ou d'aide, doivent faire figurer celles-ci séparément sur la feuille de calcul et dans la décision. Tel est aussi le cas pour les prestations complémentaires versées indûment qui ont fait l'objet d'un ordre de restitution ou d'une remise ou qui ont dû être déclarées irrécouvrables conformément à l'art. 27. Visiblement, cette exigence particulière de motivation s'explique par des raisons d'ordre administratif et sans doute aussi par le fait que l'allocation ou la restitution des prestations complémentaires n'est pas soumise aux mêmes conditions légales et aux mêmes voies de recours selon qu'elle est régie par le droit cantonal ou par le droit fédéral (cf. ATF 125 V 184 consid. 2a et b); il importe donc que l'assuré connaisse les montants qui lui sont réclamés à un titre ou à un autre et puisse ainsi exercer utilement ses droits de recours (ATF 125 II 372 consid. 2c) Or, dans le cas particulier, l'OCPA, dans ses décisions successives, n'a pas établi de décompte séparé conforme à l'art. 29 al. 3 OPC-AVS/AI. On note au passage que le jugement attaqué ne contient pas non plus un récapitulatif détaillé des montants sujets à remboursement.
Les premiers juges relèvent certes que l'intimé "a communiqué au recourant, en annexe à sa décision de restitution, des décisions détaillées faisant ressortir le montant précis des prestations complémentaires cantonales et fédérales qui ont été versées durant la période du 1er octobre 1991 au 30 septembre 1996". Le recourant le conteste. Il affirme en effet que l'OCPA ne lui a communiqué, en annexe à sa demande de restitution, que les décisions par lesquelles il a recalculé le revenu déterminant en tenant compte de la rente de l'assurance militaire; ces décisions - qui niaient rétroactivement tout droit de l'assuré à des prestations - ne contenaient rien au sujet du montant à restituer. En l'état, le dossier ne permet pas de dire ce qu'il en est exactement à ce sujet. On peut d'ailleurs se demander si, en ce domaine, le devoir de motiver de l'administration n'implique pas, sous peine de créer une situation confuse, de délimiter clairement dans la décision même de restitution les prestations complémentaires versées selon le droit cantonal et le droit fédéral, au lieu de se contenter de renvoyer à de multiples pièces annexées.
Quoi qu'il en soit, le point de savoir si les décisions de l'OCPA étaient ou non suffisamment motivées n'a pas à être tranché ici. Les considérations qui précèdent suffisent pour admettre que le grief soulevé par le recourant n'apparaissait pas d'emblée dénué de tout fondement.
Le motif invoqué par la commission à l'appui de son refus n'était donc pas justifié. On ne voit par ailleurs pas d'autres motifs qui justifieraient une dérogation au principe de la publicité des débats. Le grief tiré d'une violation de l'art. 6 § 1 CEDH est dès lors bien fondé.
3.- Le droit découlant de la publicité des débats est de nature formelle. Il convient en conséquence d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle donne suite à la demande du recourant d'organiser des débats publics, sans que l'on doive se demander si cette mesure aurait modifié l'issue du litige (ATF 121 I 40 consid. 5j) et sans qu'il y ait lieu, au stade actuel de la procédure, d'examiner les autres griefs du recourant.
4.- Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ).
Le recourant conclut au versement d'une indemnité de dépens. Bien qu'il obtienne gain de cause, il ne remplit cependant pas les conditions auxquelles une partie qui agit dans sa propre cause peut exceptionnellement prétendre à une telle indemnité (ATF 110 V 82 consid. 7).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
prononce :
I. Dans la mesure où il est recevable, le recours est
partiellement admis. Le jugement de la Commission cantonale
genevoise de recours en matière d'AVS/AI du 24 août 2000 est annulé en tant qu'il porte sur des
prestations complémentaires régies par le droit fédéral.
II. La cause est renvoyée à la commission cantonale de recours pour qu'elle procède conformément aux considérants et statue à nouveau.
III. Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de dépens.
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI, à l'Office fédéral des assurances sociales
et au Tribunal fédéral.
Lucerne, le 20 août 2001
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :
Le Greffier :