[AZA 7]
U 71/01 Mh
IIe Chambre
MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari. Greffier : M. Métral
Arrêt du 7 janvier 2002
dans la cause
A.________, recourant, représenté par Maître Aba Neeman, avocat, place de l'Eglise 2, 1870 Monthey,
contre
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,
et
Tribunal cantonal des assurances, Sion
A.- a) A.________ travaillait en qualité de manoeuvre au service de l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : CNA).
Le 24 février 1996, il fut renversé par une voiture alors qu'il s'était engagé sur un passage pour piétons. Il se rendit le jour même chez son médecin traitant, le docteur B.________, qui posa le diagnostic d'entorse de la cheville gauche, avec un arrachement de l'extrémité de la malléole interne; le patient présentait en outre des contusions et une plaie à la jambe droite. Le docteur B.________ attesta d'une incapacité de travail totale jusqu'au 17 mars 1996. A.________ reprit ensuite son activité professionnelle, mais subit une nouvelle période d'incapacité de travail totale, du 14 au 27 octobre 1996, puis partielle (50 %), dès le 28 octobre 1996, en raison de douleurs persistantes dans la cheville gauche.
Plusieurs examens radiologiques réalisés en novembre 1996 révélèrent la présence d'un fragment osseux non consolidé dans la région marginale antérieure du tibia distal gauche. Ce fragment fut retiré lors d'une arthroscopie et synovectomie antéro-externe, le 5 décembre 1996. Totalement incapable de travailler depuis la seconde opération, A.________ put reprendre son travail à plein temps dès le 7 février 1997. Le 21 janvier 1998, le docteur C.________, médecin d'arrondissement de la CNA, constata l'existence d'une discrète limitation fonctionnelle de la cheville gauche ainsi que d'une augmentation de la laxité ligamentaire externe gauche; l'assuré continuait par ailleurs à faire état de douleurs au niveau de la malléole externe et présentait une rotation externe des deux pieds relativement frappante, mais ne pouvant pas être imputée à l'accident subi.
Par décision du 18 février 1998, confirmée sur opposition le 2 avril 1998, la CNA alloua à A.________ une indemnité de 4860 fr. pour atteinte à l'intégrité et nia son droit à une rente d'invalidité. Le recours de l'assuré contre la décision sur opposition fut rejeté le 26 novembre 1998 par le Tribunal des assurances du canton du Valais, dans la mesure où il était recevable.
b) A.________ fut encore victime d'entorse et de lâchage de la cheville gauche, le 20 février, puis le 22 avril 1998, et présenta une nouvelle incapacité de travail dès cette dernière date. Vu l'instabilité de la cheville, le docteur D.________ procéda le 11 mars 1998 à une plastie ligamentaire externe. Par la suite, l'assuré fit état de douleurs constantes l'empêchant de se déplacer sans cannes anglaises et de reprendre son travail. Aucun progrès significatif ne résulta d'une physiothérapie suivie au Centre thermal Y.________, puis à la Clinique Z.________, où un syndrome de conversion (CIM-10 : F44.4) fut diagnostiqué. Chargé d'une expertise par la CNA, le docteur E.________, spécialiste en médecine interne et maladies rhumatismales, considéra que l'incapacité de travail de l'assuré provenait essentiellement de troubles d'ordre psychique et que son état de santé physique lui permettait de reprendre son travail à 50 % dans l'immédiat, puis à 100 % après une période probatoire de quelques semaines (rapport du 22 février 1999). Cet avis fut également celui du docteur C.________ (rapport du 7 mai 1999). L'assureur-maladie de A.________, la CSS-Assurance, confia pour sa part une expertise au docteur F.________, rhumatologue, qui attesta d'une incapacité de travail totale en raison d'atteintes à la santé psychique (rapport du 15 septembre 1999).
Par décision du 29 juin 1999, confirmée sur opposition le 6 octobre 1999, la CNA nia le droit de A.________ à des prestations de l'assurance-accidents postérieurement au 30 juin 1999.
B.- Par jugement du 15 janvier 2001, le Tribunal des assurances du canton du Valais rejeta le recours de l'assuré contre la décision du 6 octobre 1999.
C.- A.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement. Il conclut à ce que soit reconnue l'existence d'une incapacité de travail totale consécutive à l'accident du 24 février 1996 et demande le renvoi de la cause à la CNA pour qu'elle lui alloue une rente d'invalidité, le tout sous suite de frais et dépens. La CNA conclut au rejet du recours alors que la CSS-Assurance s'en est remise à dire de justice. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
Considérant en droit :
1.- Le litige porte sur le droit du recourant au versement d'une rente d'invalidité par l'intimée.
2.- Le jugement entrepris expose correctement les règles légales et jurisprudentielles relatives à l'exigence d'un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre l'accident assuré et une atteinte à la santé pour que cette dernière donne lieu à prestations de l'assurance-accidents. A cet égard, il suffit donc d'y renvoyer.
3.- Le recourant a subi 3 accidents, les 24 février 1996, 20 février 1998 et 22 avril 1998. L'intimée et les premiers juges ont considéré que les lésions consécutives à ces accidents ne l'empêchaient pas d'exercer pleinement sa profession, dès le 1er juillet 1999. Le recourant ne le conteste pas, à juste titre vu l'ensemble des rapports médicaux figurant au dossier, mais fait valoir que les traumatismes subis ont entraîné des atteintes à sa santé psychique, qui le rendent totalement incapable de travailler.
4.- Le seul rapport psychiatrique figurant au dossier, établi par les docteurs G.________ et H.________, de la Clinique Z.________, n'a pas véritablement porté sur la question du rapport de causalité naturelle entre les accidents subis et les troubles d'ordre psychique constatés, même si ces praticiens semblent avoir implicitement admis l'existence d'un tel rapport. A cet égard, les docteurs F.________ et C.________ ont présenté des avis divergents, alors que le docteur E.________ a recommandé la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique. Dès lors, seule une telle mesure d'instruction permettrait de se prononcer sur ce point. Il convient toutefois d'y renoncer, dans la mesure où même si la causalité naturelle devait être établie sur la base d'investigations supplémentaires, le caractère adéquat de ce rapport de causalité devrait être nié.
5.- a) Selon la jurisprudence, l'existence d'un lien de causalité adéquate entre un accident insignifiant ou de peu de gravité et des troubles psychiques peut, en règle générale, être d'emblée niée, tandis qu'en principe, elle doit être admise en cas d'accident grave; pour admettre le caractère adéquat du lien de causalité entre un accident de gravité moyenne et des troubles psychiques, il faut que soient réunis certains critères particuliers et objectifs. Les plus importants à prendre en considération sont les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l'accident, la gravité des lésions subies, la durée et le degré de l'incapacité de travail, la durée anormalement longue du traitement médical et les douleurs persistantes dues aux seules atteintes à la santé physique, ainsi que les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des séquelles de l'accident (ATF 115 V 139 sv. consid. 6, 408 consid. 5).
La gravité d'un accident ne sera pas déterminée selon la manière dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais plutôt en considérant objectivement l'événement accidentel lui-même (ATF 115 V 139 consid. 6, 407 sv. consid. 5). Par ailleurs, lorsque plusieurs accidents sont susceptibles d'avoir causé des troubles psychiques, l'existence d'un rapport de causalité adéquate doit, en principe, être appréciée séparément pour chacun des accidents assurés (RAMA 1996 no U 248 p. 177 consid. 4b et les références; voir également ATF 115 V 401 consid. 11a).
b) Les accidents des 20 février et 22 avril 1998 sont de peu de gravité, de sorte qu'un lien de causalité adéquate entre ces derniers et les affections psychiques dont souffre le recourant doit être nié d'emblée.
En revanche, au vu de son déroulement et de ses conséquences, l'événement du 24 février 1996 fait partie de la catégorie des accidents de gravité moyenne. Toutefois, il n'a été ni particulièrement impressionnant, ni spécialement dramatique, et n'a entraîné qu'une incapacité de travail d'une durée totale inférieure à 5 mois, dont une partie à 50 % seulement. Par ailleurs, il ressort du rapport établi par les docteurs G.________ et H.________ que les troubles psychiques du recourant sont apparus progressivement depuis 1996 et sont peu à peu devenus la cause principale de ses douleurs. Or, il est vraisemblable, de manière prépondérante, que tel était le cas en mars 1997 déjà. En effet, l'assuré a présenté dès la fin du mois de février 1997 une symptomatologie inhabituelle (ou "bâtarde", selon le docteur D.________), consistant en une rotation externe exagérée de la jambe gauche, que le docteur C.________ a exclu d'attribuer aux lésions subies accidentellement; la physiothérapie suivie par la suite était destinée, pour l'essentiel, à atténuer ces symptômes (cf. rapports du 6 mars 1997 du docteur D.________, du 28 mai 1997 du docteur B.________ et du 22 janvier 1997 du docteur C.________). Dans ces conditions, on ne saurait considérer que l'incapacité de travail, les douleurs ou le traitement médical liés aux seules atteintes à la santé physique du recourant, à l'exclusion des affections psychiques, ont été particulièrement longs. Comme les autres critères pouvant entrer en considération, selon la jurisprudence (cf. consid. 5a supra), ne sont pas davantage remplis en l'espèce - le recourant ne le soutient du reste pas -, il n'y a pas lieu de retenir que les troubles psychiques observés ont été causés, de manière adéquate, par l'accident du 24 février 1996.
6.- Vu ce qui précède, le recours s'avère mal fondé. La procédure porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, si bien qu'elle est gratuite (art. 134 OJ). Par ailleurs, le recourant, qui succombe, ne peut prétendre de dépens (art. 159 OJ a contrario).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
prononce :
I. Le recours est rejeté.
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton du Valais, à la
CSS-Assurance et à l'Office fédéral des assurances
sociales.
Lucerne, le 7 janvier 2002
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :
Le Greffier :