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Original
 
[AZA 0/2]
5C.310/2001
IIe COUR CIVILE
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28 janvier 2002
Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
et M. Meyer, juges. Greffière: Mme Revey.
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Dans la cause civile pendante
entre
Dame P.________-B. ________, défenderesse et recourante, représentée par Me Marianne Bovay, avocate à Genève,
contre
P.________, demandeur et intimé, représenté par Me Gilbert Bratschi, avocat à Genève;
(modification du jugement de divorce, contributions
d'entretien)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:
A.- P.________ et dame B.________ se sont mariés à Bâle le 16 juin 1977. Trois enfants sont issus de cette union:
X.________, né le 5 mai 1982, Y.________, née le 30 avril 1984, et Z.________, née le 18 avril 1987.
B.- Le 17 septembre 1996, le Tribunal de première instance de Genève a prononcé le divorce des époux P.________.
La garde et l'autorité parentale sur Y.________ et Z.________ ont été attribuées à la mère, celles sur X.________ au père.
Celui-ci, médecin indépendant, a été condamné à verser pour ses filles une contribution d'entretien mensuelle de 800 fr.
par enfant jusqu'à l'âge de dix ans, 900 fr. de dix à quinze ans et 1'000 fr. de quinze ans à la majorité et au-delà en cas d'études supérieures sérieuses, allocations familiales non comprises. Dame P.________ a été dispensée de payer une contribution à l'entretien de son fils. P.________ a par ailleurs été condamné à verser pour son ex-épouse une pension mensuelle sur la base de l'art. 152 aCC. Le Tribunal a estimé sa capacité effective de gain à 10'000 fr. par mois au moins.
Par arrêt du 20 juin 1997, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé ce jugement sur les points précités. A cette occasion, elle a relevé que P.________ avait réalisé des gains sans rapport avec ses taxations fiscales et qu'il gagnait en tout cas 10'000 fr. par mois.
C.- Le 30 juillet 1999, P.________ a requis la modification du jugement précité, soit la réduction des rentes dues à ses filles (alors de 1'000 et 900 fr. respectivement) à 550 fr. par enfant ainsi que la suppression de celle versée à dame P.________. Celle-ci a demandé le rejet de ces conclusions.
Statuant le 8 février 2001, le Tribunal de première instance a réduit la contribution allouée aux filles à 600 fr.
jusqu'à leur majorité et au-delà en cas d'études supérieures sérieuses. Il a en outre supprimé la pension accordée à dame P.________, ces modifications prenant effet dès le 1er août 1999.
Par arrêt du 2 octobre 2001, la Cour de Justice a rejeté l'appel formé par dame P.________ contre ce prononcé. Appliquant l'ancien droit quant à la pension due à l'ex-épouse (soit les art. 152 et 153 al. 2 aCC) mais le nouveau droit s'agissant des contributions dues aux filles (soit les art. 134 al. 2 et 286 al. 2 CC), elle a retenu en substance que les revenus mensuels moyens de P.________ avaient baissé à 5'000 fr. par mois, qu'aucune amélioration n'était à prévoir et qu'il n'avait plus de fortune, de sorte que ses contributions d'entretien pour ses filles devaient être réduites. La situation du fils majeur ne s'opposait pas à cette diminution.
Par ailleurs, le solde subsistant à l'ex-époux après qu'il a assuré l'entretien de ses enfants ne lui permettait pas de verser une rente à son ex-épouse, sauf à entamer son minimum vital, si bien qu'il convenait de supprimer cette pension. Enfin, il n'y avait pas lieu de donner suite aux mesures probatoires requises par l'appelante.
D.- Contre cet arrêt, la défenderesse exerce en parallèle un recours de droit public (5P. 413/2001) et un recours en réforme au Tribunal fédéral. Le premier a été déclaré irrecevable par arrêt de ce jour. Dans le second, elle demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt attaqué et de débouter le demandeur de toutes ses conclusions en modification de jugement de divorce, subsidiairement de renvoyer la cause à l'autorité cantonale. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Considérant en droit :
1.- Formé en temps utile contre une décision finale rendue par le tribunal suprême du canton dans une contestation civile de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr., le recours est recevable au regard des art. 46, 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ.
2.- a) aa) A teneur de l'art. 153 al. 2 aCC, la pension alimentaire allouée à titre de secours sera supprimée ou réduite, à la demande du débiteur, si l'ayant droit n'est plus dans le dénuement ou si la gêne dans laquelle il se trouvait a sensiblement diminué; il en sera de même si la pension n'est plus en rapport avec les facultés du débiteur.
bb) D'après l'art. 134 al. 2 CC, les conditions se rapportant à la modification de la contribution d'entretien sont définies par les dispositions relatives aux effets de la filiation.
A cet égard, l'art. 286 CC prévoit que le juge peut ordonner qu'elle soit augmentée ou réduite dès que des changements déterminés interviennent dans les besoins de l'enfant, les ressources des père et mère ou le coût de la vie (al. 1). Si la situation change notablement, le juge modifie ou supprime la contribution d'entretien à la demande du père, de la mère ou de l'enfant (al. 2).
Selon la jurisprudence relative aux art. 157 et 286 aCC, la modification du jugement de divorce sur ce point n'est toutefois possible que si des faits nouveaux importants commandent une réglementation différente, le changement de situation devant en outre être durable (ATF 120 II 177 consid. 3a; 100 II 76 consid. 1; 95 II 385 consid. 4).
b) En l'occurrence, la Cour de justice a adhéré aux conclusions du Tribunal de première instance en retenant que les revenus de l'ex-époux ont baissé de manière significative depuis le prononcé du jugement de divorce, apparemment en raison de l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie [LAMal; RS 832. 10], sans que l'intéressé en soit responsable. L'autorité intimée a de même reconnu que le bénéfice net moyen de l'ex-époux s'élève actuellement à 5'000 fr. par mois, qu'aucune amélioration n'est à prévoir et qu'il n'a plus de fortune.
A cet égard, l'autorité intimée a tenu compte des déclarations des parties, de l'audition de onze témoins et de 142 pièces. Notamment, elle s'est appuyée sur la comptabilité de l'ex-époux, ainsi que sur les explications données sous serment par son comptable et son assistante. Elle a relevé qu'il ne payait pas d'impôt, qu'il devait à sa soeur une somme de plus de 40'000 fr. et qu'il avait fait l'objet de plusieurs actes de défaut de biens. Surtout, elle s'est fondée sur une décision de l'Autorité de surveillance des offices de poursuites et de faillites du 16 décembre 1998, prise dans le cadre d'une procédure de saisie pour non paiement de l'entier des contributions d'entretien. Ce prononcé attribuait à l'intimé un revenu mensuel net de 5'805. 30 fr. en 1997, lequel s'était certainement maintenu, voire amélioré en 1998. Les doutes sur les revenus et les charges de l'ex-époux avaient ainsi été levés en 1998. En renonçant à demander une expertise de ces comptes, l'appelante n'avait pas satisfait à l'obligation de preuve lui incombant selon l'art. 8 CC. De plus, on ne discernait pas en quoi la maxime officielle, applicable aux contributions destinées aux enfants, dévoilerait d'hypothétiques ressources ou capitaux cachés que ni le fisc, ni le juge pénal, ni l'autorité de poursuite n'avaient pu détecter.
3.- La recourante invoque en premier lieu les art. 285 et 286 al. 2 CC.
a) aa) A l'appui, la recourante reproche d'abord à la Cour de justice d'avoir retenu que les revenus mensuels de l'ex-époux avaient passé de 10'000 fr. à 5'000 fr. En se contentant des comptes produits par l'ex-époux et de l'analyse de l'Autorité de surveillance pour écarter les doutes formulés par le juge du divorce, de même qu'en manquant de se rapporter aux constatations de fait ainsi qu'au pronostic effectué par ce juge du divorce, l'autorité intimée avait procédé à une "appréciation contraire aux pièces produites et aux témoignages entendus dans le cadre de la procédure" et violé l'art. 286 al. 2 CC.
bb) En réalité, l'argumentation de la recourante tend exclusivement à remettre en cause l'appréciation des preuves à laquelle la Cour de justice a procédé pour estimer le revenu actuel du demandeur. Ce grief est ainsi irrecevable.
b) aa) La recourante se plaint ensuite de ce que la Cour de justice n'a pas examiné si la diminution des revenus du demandeur était essentielle et durable.
Aux yeux de la recourante, la baisse ne saurait être essentielle dès lors que, d'après elle, le bénéfice du demandeur a augmenté entre la procédure de divorce et celle en modification du jugement de divorce. De même, cette réduction ne peut être qualifiée de durable, puisque leur fils aura terminé son apprentissage dans deux ans, ce qui allégera les charges du demandeur. Enfin, toujours selon la recourante, la Cour de justice était tenue de retenir le témoignage du représentant de l'Association genevoise des médecins, selon lequel l'application du "Tarmed" impliquera une augmentation du revenu des médecins généralistes.
bb) Ce grief est certes recevable dans la mesure où la recourante soutient que la Cour de justice a failli à son devoir d'examiner les critères posés par la jurisprudence à l'application de l'art. 286 al. 2 CC, à savoir la présence d'un changement important et durable. Il est toutefois mal fondé, dès lors qu'en constatant que les revenus du débirentier ont baissé de manière "significative", soit de moitié, et que sa fortune a disparu, la Cour de justice a conclu à une modification importante. De même, en considérant qu'aucune amélioration n'est prévisible, l'autorité intimée a implicitement relevé que la baisse est durable. Par ailleurs, on ne saurait lui reprocher de ne pas avoir tenu compte sous cet angle de l'accès prochain de X.________ à l'autonomie. En effet, elle a retenu que celui-ci est à la charge de son père à raison de 345 fr. par mois, de sorte que l'éventuelle suppression de toute contribution d'entretien du demandeur en faveur de son fils ne constituerait de toute façon pas un changement important au sens de la jurisprudence.
Pour le surplus, ce moyen revient à contester l'appréciation des preuves, de sorte qu'il est irrecevable.
c) La recourante prétend enfin que la Cour de justice devait examiner s'il peut être exigé de l'ex-époux un effort raisonnable pour assurer les contributions d'entretien fixées par le juge du divorce, par exemple une diminution de ses charges professionnelles, lesquelles sont, de l'avis de la recourante, exceptionnellement élevées au vu de son revenu.
Ici également, l'argumentation touche exclusivement à l'appréciation des preuves, si bien qu'elle est irrecevable.
4.- Deuxièmement, la recourante se plaint d'une violation de l'art. 153 al. 2 aCC. Elle réitère toutefois à cet égard les griefs soulevés au considérant 3b ci-dessus. Ce moyen est donc mal fondé en tant que recevable.
5.- Enfin, la recourante se prévaut des art. 280 al. 2 et 254 CC. A l'appui, elle affirme derechef que la Cour de justice ne pouvait se fier aux chiffres comptables avancés par l'ex-époux. Ici de même, son argumentation se ramène pour l'essentiel à une contestation, irrecevable, de l'appréciation des preuves effectuée par la Cour de justice.
6.- Le recours apparaît ainsi manifestement mal fondé dans la mesure où il est recevable et doit être rejeté. Succombant, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Elle n'aura en revanche pas à payer de dépens, le demandeur n'ayant pas été invité à répondre au recours.
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral,
vu l'art. 36a OJ :
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable et confirme l'arrêt entrepris.
2. Met à la charge de la recourante un émolument judiciaire de 1'500 fr.
3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
__________
Lausanne, le 28 janvier 2002 RED/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, La Greffière,