[AZA 0/2]
6S.52/2002/svc
COUR DE CASSATION PENALE
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1er mars 2002
Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
M. Wiprächtiger et M. Kolly, Juges. Greffier: M. Denys.
______________
Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par
S.________, représentée par Me Nicolas Iynedjian, avocat à Genève,
contre
l'arrêt rendu le 8 juin 2001 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois dans la cause qui oppose la recourante au Ministère public du canton deV a u d;
(internement des délinquants d'habitude)
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les faits suivants:
A.- Par jugement du 22 janvier 2001, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné S.________, pour escroquerie par métier, à deux ans et demi de réclusion, sous déduction de cinq cent dix-neuf jours de détention préventive, et a remplacé l'exécution de cette peine par un internement au sens de l'art. 42 CP.
B.- Par arrêt du 8 juin 2001, dont les considérants écrits ont été envoyés aux parties le 15 janvier 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours de S.________.
En résumé, il en ressort ce qui suit:
a) Depuis 1974, S.________, née en 1955, a subi de nombreuses périodes de détention. Elle a notamment été détenue entre 1985 et le début 1989. Après une courte période passée à l'étranger, elle s'est constituée prisonnière en février 1991 et a vécu depuis lors en détention ou en semi-liberté. Après avoir partiellement purgé une peine infligée en 1992, elle a bénéficié d'une période de semi-liberté entre juillet et novembre 1994. Détenue préventivement de novembre 1994 à février 1995, elle a été transférée dans différents établissements pénitentiaires pour exécuter le solde de ses peines. En mars 1998, elle a pu bénéficier de la semi-liberté et a été placée à Riant-Parc (GE). Les faits à l'origine de la présente procédure ont débuté à cette époque. Jusqu'au 4 novembre 1998, elle a vécu dans la région lausannoise tout en passant la nuit à Riant-Parc.
Elle s'est ensuite évadée et est entrée dans la clandestinité. Elle s'est constituée prisonnière en août 1999. Depuis lors, elle a été détenue préventivement.
S.________ a subi les condamnations suivantes: en août 1975, pour escroquerie par métier, en raison de faits commis entre juin 1973 et janvier 1975, à quinze mois d'emprisonnement avec sursis, révoqué en 1976; en mai 1976, pour escroquerie par métier, en raison de faits commis entre novembre 1975 et février 1976, à douze mois d'emprisonnement; en novembre 1986, pour escroquerie par métier et faux dans les titres, en raison de faits commis depuis 1978, à quatre ans de réclusion, la libération conditionnelle accordée en janvier 1989 a été révoquée en septembre 1992; en avril 1992, pour escroquerie par métier, faux dans les titres et instigation à faux dans les titres, en raison de faits commis entre septembre 1988 et février 1991, à cinq ans de réclusion; en septembre 1997, pour escroquerie et incendie intentionnel, en raison de faits commis entre juillet et novembre 1994, à deux ans d'emprisonnement.
L'addition de ces différentes peines donne treize ans et trois mois. En y ajoutant la condamnation relative à la présente procédure (deux ans et demi), on parvient à un total de quinze ans et neuf mois de peines privatives de liberté.
b) S.________ a été soumise à une expertise psychiatrique en 1985. L'expert a posé le diagnostic de personnalité immature présentant une importante problématique narcissique qui pouvait être assimilée à un développement mental incomplet. Il a considéré qu'il existait un risque de récidive important qu'un traitement n'était pas en mesure d'éliminer et qu'il serait même dangereux d'imposer un traitement par décision judiciaire. Cette expertise a été confirmée en 1986 par le Centre psychosocial de Lausanne.
Dans le cadre d'une procédure pénale ultérieure, une nouvelle expertise a été menée. Les experts ont rendu leur rapport le 29 janvier 1996. Ils ont posé le diagnostic d'épisodes dépressifs sévères sans symptôme psychotique chez une personnalité dissociale. A leur avis, le trouble de la personnalité dissociale dont souffre S.________ explique sa difficulté à contrôler ses réactions impulsives, à tolérer la frustration et à renoncer aux infractions quand bien même elle a une vision réaliste du caractère délictueux de ses actes; elle éprouve de la difficulté à tenir compte de l'existence de l'autre, ce qui l'empêche d'établir des relations interpersonnelles authentiques et véritables; cela réactive ses sentiments de frustration, la rendant extrêmement vulnérable et en perpétuel manque de quelque chose qu'elle ne peut entrevoir; toutes ces caractéristiques diminuent sa capacité de contrôler ses impulsions et de se remettre en question; son état dépressif majeur constitue une conséquence de ce type de personnalité qui, lorsqu'il est confronté à la réalité des infractions et à sa manière de fonctionner, déprime et peut même considérer que le suicide est la seule solution; un risque de récidive persiste chez S.________ et rien ne permet de penser que quelque chose se soit modifié dans son fonctionnement psychologique ou qu'elle ait pris conscience de sa situation au point de changer de comportement; en ce qui concerne son état dépressif, un traitement de soutien et une médication paraissent indiqués; s'agissant de ses troubles de la personnalité, une psychothérapie est formellement contre-indiquée et ne peut amener le moindre changement. Les experts ont conclu à une légère diminution de la faculté de se déterminer d'après une appréciation suffisante du caractère illicite des actes incriminés et un risque de récidive persistant. Ils ont encore noté que S.________ avait bénéficié d'une tentative de traitement par le Dr G.________ et qu'elle s'était montrée incapable d'utiliser cette ressource, de sorte que d'un point de vue thérapeutique, on ne pouvait qu'émettre un pronostic sombre.
Lors de sa dernière période de détention, S.________ a bénéficié du soutien de la Dresse C.________ puis du Dr B.________. Elle a été soumise à un traitement médicamenteux à base d'antidépresseurs qu'elle a interrompu environ deux mois avant l'audience de première instance mais qu'elle a repris à l'approche de celle-ci.
Elle passe par des périodes d'apathie et vit en situation d'attente et de peur de l'avenir. Elle a vécu plusieurs périodes d'incapacité de travail pendant sa semi-liberté.
Elle a été hospitalisée quelques jours en novembre 1998, pour des problèmes d'oedèmes pulmonaires. Elle prétend avoir fait à cette époque une tentative de suicide. Aux débats de première instance, elle a expliqué se sentir dépressive et avoir souffert de boulimie. Elle a exprimé à de nombreuses reprises des regrets vis-à-vis de certaines victimes. Elle a déclaré avoir compris qu'elle avait un problème psychologique et souhaiter se faire soigner.
Elle était "désolée" de ce qui s'était passé, ajoutant que la détention était très difficile à supporter et que, bien qu'elle ne pût rien promettre, elle espérait sincèrement ne plus commettre d'infractions et pouvoir se resocialiser dans un travail régulier, éventuellement après avoir suivi des cours d'informatique.
c) Les faits pour lesquels la qualification d'escroquerie par métier a été retenue sont en substance les suivants:
Au début janvier 1998, alors qu'elle bénéficiait d'un week-end de congé pénitentiaire, P.________ a rencontré F.________. Celui-ci s'occupait d'une société de taxis (T.________) et l'a engagée comme secrétaire. Il a été immédiatement subjugué par sa personnalité et a entamé avec elle une liaison qui a duré jusqu'en été 1998.
Elle ne lui a pas caché qu'elle était détenue pour des motifs financiers, sans donner plus de détails. Grâce à son charme, à son bagout et notamment en procédant à des mises en scène pour faire croire à l'existence d'un gérant de fortune fictif, elle a obtenu divers prêts de F.________. Elle a signé des postchèques non couverts comme garantie ainsi qu'une reconnaissance de dette.
F.________ l'a pressée de le rembourser car sa société était mise en péril. S.________ savait que sa propre situation financière était obérée et qu'elle ne pourrait rien rembourser. Au total, F.________ lui a au moins remis 55'000 francs.
Au début avril 1998, S.________ a fait la connaissance de D.________, avec lequel elle s'est liée d'amitié, passant notamment un week-end avec lui. Il a rapidement su qu'elle avait été condamnée à plusieurs années de détention pour des questions d'argent. Il l'a crue lorsqu'elle lui a dit posséder des fonds importants bloqués en France. Par son intermédiaire, elle a fait la connaissance d'A. ________. Prétextant l'achat d'un appartement et la réception imminente de 200'000 francs à la suite de son divorce, elle s'est fait remettre 10'000 francs par ce dernier, lui promettant un remboursement sous septante-deux heures. Elle n'a jamais remboursé ce prêt.
Au printemps 1998, S.________ a fait la connaissance de J.________, chauffeur de taxi pour l'entreprise T.________. A plusieurs reprises, elle s'est faite véhiculer par lui et lui a donné l'impression d'être une femme aisée, offrant de généreux pourboires. En juillet 1998, elle lui a téléphoné pour lui demander de lui prêter d'urgence 25'000 francs, qui devaient lui servir à bloquer un appartement qu'elle voulait acheter. Elle lui a indiqué posséder des fonds en France, lui a transmis les coordonnées téléphoniques d'un employé de banque pouvant lui confirmer l'existence desdits fonds et lui a encore montré une pièce bancaire falsifiée. Il était question qu'elle lui rembourse 30'000 francs compte tenu du gain qu'elle réaliserait avec cet appartement. Elle lui a remis plusieurs postchèques sans provision en garantie du prêt. Elle n'a jamais remboursé les 25'000 francs.
En été 1998, S.________ a rencontré M.________, ne lui cachant pas qu'elle était en semi-liberté. Une liaison intime s'est rapidement nouée. En septembre 1998, elle lui a demandé 13'000 francs, qu'elle a prétendu devoir déposer comme caution pour obtenir sa libération anticipée.
M.________, qui croyait que des fonds importants devaient rapidement parvenir à S.________, lui a prêté cette somme en vidant son compte. Elle ne lui a rien remboursé.
En été 1998, S.________ a fait la connaissance de E.________, propriétaire d'une boutique de cadeaux à Genève. Les deux femmes se sont liées d'amitié et S.________ a eu l'occasion de raconter à E.________ qu'elle attendait un forte rentrée d'argent. En octobre 1998, S.________ s'est rendue à la boutique en expliquant à cette dernière qu'elle avait un urgent besoin de 4'500 francs en liquide, qu'elle devait déposer comme garantie pour un appartement qu'elle allait louer. Elle a ajouté qu'elle attendait une rentrée d'argent et lui a remis en garantie un postchèque non couvert d'un montant de 10'000 francs. E.________ n'a pu prêter que 3'000 francs, qui ne lui ont jamais été remboursés.
Au printemps 1999, S.________, alors hébergée chez une tierce personne, a pris contact avec P.________, qui cherchait à sous-louer son appartement pendant quelques mois. Elle s'est rendue à son domicile avec cette tierce personne, qu'elle a présentée comme sa tante et personne de référence, et s'est annoncée sous un faux nom, indiquant qu'elle venait de la région parisienne pour travailler dans la publicité. P.________ et S.________ se sont entendus au sujet de la sous-location de l'appartement et de l'utilisation du raccordement téléphonique.
Elle n'a cependant jamais payé les trois mois de loyer, par 2'010 francs, ni les factures téléphoniques, par 2'475 fr. 40. En juin ou juillet 1999, S.________ a appelé P.________, qui séjournait en Autriche, et a faussement prétendu qu'elle avait versé 20'000 francs par erreur sur son compte et qu'elle manquait de liquidités.
Elle souhaitait qu'il lui rembourse tout de suite 5'000 francs. P.________ a préféré attendre que le montant de 20'000 francs soit crédité avant de rétrocéder quoi que ce soit, de sorte qu'il ne lui a pas versé les 5'000 francs demandés.
En juin ou juillet 1999, S.________ a connu K.________, avec laquelle elle a sympathisé. Elle lui a offert un poste d'assistante médicale dans le cabinet de physiothérapie qu'elle prétendait ouvrir prochainement et lui a montré l'immeuble censé l'accueillir.
S.________ a établi l'ébauche d'un contrat de travail.
K.________ a donné son congé à son employeur et s'est inscrite à des cours de secrétariat. En juillet 1999, S.________ lui a demandé un prêt, exposant qu'elle manquait de liquidités. K.________ a ainsi prêté 1'000 francs et S.________ lui a signé une reconnaissance de dette sous un faux nom. K.________ a reçu deux acomptes de 100 francs en remboursement.
En juin 1999, S.________ s'est présentée sous un faux nom dans un magasin et a acheté sur facture des appareils électroménagers pour 218 fr. 80. Elle ne s'est pas acquittée de la facture.
A une date indéterminée, toujours sous un faux nom, S.________ a obtenu des médicaments pour 346 fr. 90 sur la base d'une ordonnance établie par un médecin. Elle a indiqué au pharmacien son assurance-maladie, sans préciser que la police n'était pas établie au nom sous lequel elle s'était présentée.
Il a été retenu que S.________ avait dépensé la quasi-totalité des montants mentionnés ci-dessus pour paraître, s'acheter du superflu et se faire apprécier par des cadeaux.
C.- S.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Elle conclut à son annulation.
Elle sollicite par ailleurs l'effet suspensif et l'assistance judiciaire.
Considérant en droit :
1.- Le pourvoi en nullité ne peut être formé que pour violation du droit fédéral, à l'exclusion de la violation de droits constitutionnels (art. 269 PPF).
Le pourvoi n'est pas ouvert pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p. 83). Sous réserve de la rectification d'une inadvertance manifeste, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de l'autorité cantonale (art. 277bis al. 1 PPF). Il ne peut être présenté de griefs contre celles-ci, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b PPF). Le raisonnement juridique doit être mené sur la base des faits retenus dans la décision attaquée, dont la recourante est irrecevable à s'écarter (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67 et les arrêts cités).
Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions de la recourante (art. 277bis PPF). Les conclusions devant être interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 127 IV 101 consid. 1 p. 103), la recourante a circonscrit les points litigieux.
2.- Se plaignant d'une violation de l'art. 42 CP, la recourante conteste son internement.
a) L'internement selon l'art. 42 CP suppose notamment que le délinquant ait déjà commis de nombreux crimes ou délits intentionnels et qu'il ait ainsi été privé de liberté, soit par des peines de réclusion ou d'emprisonnement, soit par une mesure d'éducation au travail ou encore par un internement comme délinquant d'habitude, pour une durée globale d'au moins deux ans; il faut en outre que, dans les cinq ans qui suivent sa libération définitive, il ait commis un nouveau crime ou délit intentionnel qui dénote son penchant à la délinquance (cf. art. 42 ch. 1 al. 1 CP).
Le but premier de l'internement est d'assurer la sécurité publique contre les délinquants d'habitude, insensibles aux autres sanctions pénales; cette mesure vise donc d'abord à protéger le public contre des délinquants incorrigibles et socialement dangereux en empêchant la commission de nouvelles infractions, et non à la resocialisation du délinquant, même si celle-ci ne doit pas être négligée (ATF 118 IV 10 consid. 3a p. 12).
L'internement, notamment en raison de sa durée indéterminée, constitue une grave atteinte à la liberté; il s'agit du moyen ultime du système de répression pénale; il y a donc lieu de faire preuve de retenue dans l'application de l'art. 42 CP et de renoncer à l'internement, au profit de l'exécution de la peine, lorsque cette dernière paraît présenter des chances égales sur le plan de la prévention. Il convient en outre de respecter le principe de la proportionnalité, en relation avec l'infraction en cause et celles dont on peut redouter la commission:
l'internement s'impose d'autant moins que les infractions commises ne sont pas d'une gravité particulière et que les infractions à craindre paraissent de peu d'importance; même lorsque l'infraction à sanctionner est de gravité moyenne, on peut renoncer à l'internement s'il apparaît disproportionné (ATF 125 IV 118 consid. 5b/aa p. 120; 118 IV 213 consid. 2c p. 215 ss, 10 consid. 3a p. 12).
b) La recourante ne conteste pas qu'à la suite des diverses condamnations qui lui ont été infligées, elle a subi plus de deux ans de réclusion ou d'emprisonnement pour des crimes et délits intentionnels. Etant donné cependant que les faits pour lesquels l'arrêt attaqué a confirmé sa condamnation ont été commis pendant l'exécution de sa dernière peine, alors qu'elle bénéficiait du régime de la semi-liberté, respectivement qu'elle était en fuite, elle prétend qu'ils ne sont pas intervenus dans les cinq ans suivant "sa libération définitive", conformément au libellé de l'art. 42 ch. 1 al. 1 CP. Elle invoque une interprétation littérale de cette disposition et un changement de la jurisprudence à ce propos.
Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de se prononcer sur cette question: dans un premier arrêt, il a posé que celui qui commet une nouvelle infraction avant d'être définitivement libéré de l'établissement où il subit une peine ou une mesure ne peut pas être interné en raison de cette nouvelle infraction (ATF 98 IV 1). Dans plusieurs arrêts ultérieurs, il est cependant revenu sur cette jurisprudence après une étude approfondie. Il a considéré, sur la base des travaux préparatoires, que l'introduction du délai de cinq ans avait eu pour seul but de déplacer la date limite, après laquelle un internement ne peut plus être prononcé, et non pas de déterminer le début de la période dans laquelle une infraction doit avoir été commise pour conduire à un internement. Il a relevé que si l'on excluait la possibilité d'interner celui qui récidive pendant l'exécution d'une peine, on devrait renoncer à interner un multirécidiviste aussi longtemps qu'il n'a pas été définitivement libéré, alors même qu'il apparaît, en raison de la nature et du nombre de ses infractions, indiscutablement comme un délinquant d'habitude contre lequel les peines habituelles sont sans effet et contre lequel la société doit être protégée. Il a ainsi conclu que l'interprétation littérale de l'art. 42 CP ne pouvait raisonnablement pas correspondre au sens véritable de la loi et que tant que le délai de cinq ans, courant dès la libération définitive du délinquant, n'est pas atteint, celui qui récidive même avant sa libération définitive peut être interné, qu'il ait agi durant la libération conditionnelle ou pendant l'exécution d'une peine ou d'une mesure, alors qu'il était détenu, en fuite ou en régime de semi-liberté (ATF 104 IV 60 consid. 4b p. 61/62 et les arrêts cités).
L'argumentation de la recourante n'apporte aucun élément qui n'aurait pas déjà été pris en compte dans la jurisprudence précitée. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir.
Comme la recourante a agi alors qu'elle bénéficiait du régime de la semi-liberté, respectivement alors qu'elle était en fuite, elle s'expose à la mesure prévue à l'art. 42 ch. 1 al. 1 CP.
c) Relevant qu'au moment du jugement de première instance, l'expertise psychiatrique du 29 janvier 1996 sur laquelle s'est fondée le Tribunal correctionnel remontait à cinq ans, la recourante soutient qu'une nouvelle expertise aurait dû être ordonnée.
Le juge qui envisage de prononcer un internement n'est tenu de faire examiner l'état mental du délinquant que si cela est nécessaire (cf. art. 42 ch. 1 al. 2 CP).
En l'absence d'expertise antérieure utilisable, il ne pourra renoncer qu'exceptionnellement à une expertise, qui doit en principe être ordonnée; en revanche, lorsque le délinquant a été expertisé au cours d'une précédente procédure et que l'expertise établie à cette occasion reste pertinente, une nouvelle expertise est superflue (ATF 118 IV 105 consid. 1e p. 107). Selon l'art. 42 ch. 1 al. 2 CP, l'expertise doit porter sur l'état mental du délinquant. Elle doit notamment permettre d'éviter que l'art. 42 CP ne soit appliqué à des délinquants mentalement anormaux pour lesquels une des mesures de l'art. 43 CP serait appropriée (cf. ATF 118 IV 105 consid. 1e p. 107/108), étant d'ailleurs précisé que lorsque les conditions de l'internement sont réunies à la fois selon les art. 42 et 43 CP , cette dernière disposition, qui prévoit une mesure moins incisive, prime (ATF 125 IV 118 consid. 5e p. 122 ss). Il n'en reste pas moins qu'il appartient au juge - et non à l'expert - de tirer les conséquences de récidives constantes en dépit des peines ou des traitements déjà exécutés et de trancher la question de savoir si la sécurité du public justifie le prononcé d'un internement.
En référence à un arrêt saint-gallois du 25 octobre 1988 (SG GVP 1988 n° 55 p. 114), la recourante prétend qu'une expertise datant de plus de deux ans ne convient plus. Elle déduit par ailleurs d'un arrêt du Tribunal fédéral 6S.443/1998 du 28 août 1998 qu'une expertise établie dans une précédente procédure pénale peut encore être pertinente à la double condition qu'elle confirme une ou des expertises antérieures et que l'état mental du délinquant n'ait pas évolué. Or, l'arrêt saint-gallois indique uniquement qu'un internement selon l'art. 42 CP doit être fondé sur un rapport d'expertise actuel. L'arrêt du Tribunal fédéral 6S.443/1998 du 28 août 1998 ne fixe quant à lui nullement comme critère pour pouvoir prendre en compte une précédente expertise qu'elle ait elle-même confirmé une ou des expertises antérieures. Il en ressort seulement que l'expertise établie dans une procédure précédente doit rester pertinente et rendre ainsi un nouvelle expertise superflue. Cet arrêt ne fait que confirmer la jurisprudence précitée (ATF 118 IV 105 consid. 1e p. 107).
Selon la recourante, sa personnalité a sensiblement évolué depuis l'expertise du 29 janvier 1996. En particulier, renvoyant aux pages 8 et 9 de l'arrêt attaqué, elle observe qu'elle passe par des périodes d'apathie et vit en situation d'attente et de peur de l'avenir; elle a connu des problèmes physiques (oedèmes pulmonaires); elle a fait une tentative de suicide, a souffert de boulimie et a compris qu'elle avait un problème psychologique et souhaitait se faire soigner.
Tant le Tribunal correctionnel que la Cour de cassation cantonale ont soigneusement examiné la question de savoir si l'état mental de la recourante avait évolué.
Ils ont considéré que cela n'était pas le cas, en se fondant en particulier sur l'appréciation émise en cours d'enquête par les psychiatres de l'établissement pénitentiaire où était détenue la recourante. La connaissant depuis plusieurs années, ces derniers ont déclaré qu'aucun élément nouveau ne plaidait en faveur de la mise en oeuvre d'une autre expertise (cf. arrêt attaqué, p. 28-34 et 44-46). Or, savoir si l'état mental de l'auteur correspond à celui constaté dans une précédente expertise ou s'il s'est modifié depuis sont des questions de fait, qui ne peuvent faire l'objet d'un pourvoi en nullité (ATF 106 IV 236 consid. 2b p. 238/239). En se prévalant d'une modification de son état mental non constatée en instance cantonale, la recourante formule donc une argumentation irrecevable dans un pourvoi. Quoi qu'il en soit, lors de l'enquête, les psychiatres de l'établissement pénitentiaire où était détenue la recourante ont affirmé, en parfaite connaissance du cas de cette dernière, qu'aucune évolution psychique ne pouvait justifier une nouvelle expertise.
En raison de cette confirmation de l'état de la recourante postérieure à l'expertise du 29 janvier 1996, la Cour de cassation cantonale n'avait aucune raison sérieuse d'ordonner une nouvelle expertise. Elle pouvait sans violer le droit fédéral considérer que l'expertise du 29 janvier 1996 était toujours d'actualité. Au surplus, sur la base des éléments contenus dans cette expertise, la Cour de cassation cantonale a exclu que la recourante présentât une anomalie mentale au sens où l'entend l'art. 43 CP et a donc rejeté le grief soulevé sur ce point devant elle (cf. arrêt attaqué, p. 46/47). La recourante ne critique pas cette conclusion, sur laquelle il n'y a donc pas lieu de revenir.
d) La recourante met encore en cause la proportionnalité de la mesure prononcée à son encontre. Elle signale la révision de la partie générale du Code pénal en cours et l'avis critique de certains auteurs à propos de l'internement selon l'art. 42 CP (cf. Hans Wiprächtiger, Die Revision des Strafgesetzbuches: Freiheitsentziehende Massnahmen - eine Bestandesaufnahme nach den Beratungen des Ständerates, in PJA 2001, p. 139 ss, 143; GünterStratenwerth, Neuere Tendenzen im Massnahmerecht: Vereinbarkeit mit rechtsethischen Grundsätzen, in PJA 2000, p. 1345 ss).
En l'état du droit, l'internement vise au premier chef à assurer la sécurité du public et, comme il constitue une grave atteinte à la liberté, il doit être appliqué avec retenue en respectant le principe de la proportionnalité.
En ce sens, cela rejoint les préoccupations de la révision en cours. Cela dit, le projet présenté par le Conseil fédéral n'exclut pas l'internement des escrocs invétérés et rusés (cf. FF 1999 II 1901). Selon la version adoptée par les Chambres fédérales (art. 64), respectivement le 14 décembre 1999 par le Conseil des Etats et le 7 juin 2001 par le Conseil national, un internement peut notamment être ordonné en cas d'"[. ..] infraction passible d'une peine privative de liberté maximale de dix ans ou plus, par laquelle [l'auteur] a causé ou voulu causer à autrui un grave dommage" (cf. BO 1999 CE p. 1123/1124; BO 2001 CN p. 573 ss). L'escroquerie par métier mise à la charge de la recourante est susceptible d'une peine maximale de dix ans (cf. art. 146 al. 2 CP).
La recourante a été condamnée pour la première fois en 1975. Depuis, elle a vécu de manière constante dans la délinquance, en commettant des escroqueries de même nature.
Elle a subi de nombreuses périodes de détention, qui n'ont eu aucun effet sur elle. Ses différentes condamnations, y compris celle d'espèce, représentent quinze ans et neuf mois de peines privatives de liberté. Les derniers cas d'escroquerie reprochés datent de 1998 jusqu'à l'été 1999 alors qu'elle était en semi-détention puis en fuite. Comme l'a observé la Cour de cassation cantonale, une telle persévérance dans la délinquance ne peut qu'être qualifiée de rare. Dans le cadre des procédures pénales ayant abouti aux condamnations prononcées en 1992 et en 1997, la recourante avait été avertie qu'elle s'exposait à un internement selon l'art. 42 CP en cas de récidive. Les psychiatres s'accordent pour dire que rien ne permet d'espérer un changement d'attitude de sa part. En semi-détention puis en fuite, la recourante a multiplié les actes répréhensibles, se procurant en relativement peu de temps quelque 100'000 francs. Comme par le passé, la recourante a commis la plupart de ces actes au préjudice de gens dont elle avait su gagner la confiance, qui étaient devenus ses amis proches ou intimes et dont certains se sont retrouvés dans une situation difficile. Les faits reprochés atteignent donc une gravité certaine et, compte tenu de l'incapacité de la recourante à surmonter sa tendance à la délinquance, ceux qui sont à craindre constituent une menace pour la sécurité du public. Dans ces conditions, la Cour de cassation cantonale pouvait admettre sans violer le droit fédéral qu'une mesure d'internement en vertu de l'art. 42 CP ne heurtait pas le principe de la proportionnalité.
3.- Le pourvoi doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Vu les questions qu'il soulève, on ne saurait dire qu'il était d'emblée voué à l'échec, l'indigence de la recourante étant par ailleurs suffisamment établie. Il y a ainsi lieu d'admettre la requête d'assistance judiciaire (art. 152 al. 1 OJ). En conséquence, il ne sera pas perçu de frais et une indemnité sera allouée au mandataire de la recourante.
La cause étant tranchée, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet.
Par ces motifs,
le Tribunal fédéral :
1. Rejette le pourvoi dans la mesure où il est recevable.
2. Admet la requête d'assistance judiciaire.
3. Dit qu'il n'est pas perçu de frais.
4. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 2'500 francs à Me Nicolas Iynedjian, mandataire de la recourante.
5. Communique le présent arrêt en copie au mandataire de la recourante, au Ministère public du canton de Vaud et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois.
__________
Lausanne, le 1er mars 2002
Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,
Le Greffier,