BGer 5P.363/2001 |
BGer 5P.363/2001 vom 14.03.2002 |
{T 0/2}
|
5P.363/2001
|
IIe COUR CIVILE
|
***************************
|
14 mars 2002
|
Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
|
et Mme Escher, juges. Greffière: Mme Mairot.
|
__________
|
Statuant sur le recours de droit public
|
formé par
|
X.________, représenté par Me Louis Waltenspuhl, avocat à
|
Genève,
|
contre
|
l'arrêt rendu le 14 septembre 2001 par la Chambre civile de la
|
Cour de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose
|
le recourant à dame X.________, représentée par Me Christine
|
Gaitzsch, avocate à Genève;
|
(art. 9 Cst.; mesures provisoires de divorce)
|
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
|
les f a i t s suivants:
|
A.- Les époux X.________, respectivement nés le 2
|
mars 1940 et le 27 mars 1944 en Turquie, se sont mariés le 21
|
mars 1963 à Kadiköy (Istanbul/Turquie). Ils résident à Genève
|
depuis lors. Deux enfants, actuellement majeurs et indépen-
|
dants sur le plan financier, sont issus de cette union. Les
|
conjoints n'ont pas conclu de contrat de mariage.
|
Le 13 février 1995, ils ont signé une convention vi-
|
sant à régler les effets accessoires du divorce que l'épouse
|
s'engageait à initier et auquel le mari devait acquiescer.
|
Cet accord prévoyait que celui-ci verserait à la demanderes-
|
se, en application de l'art. 151 aCC, une rente mensuelle de
|
4'250 fr. sans limitation dans le temps, ainsi qu'un montant
|
de 100'000 fr. à titre de liquidation du régime matrimonial.
|
Les conjoints se sont séparés en mars 1995. Le mois
|
suivant, l'épouse a renoncé à déposer une demande en divorce;
|
elle s'est opposée à celle formée par son mari le 5 décembre
|
1995.
|
Par ordonnance de mesures préprovisoires du 21 dé-
|
cembre 1995, le Président du Tribunal de première instance de
|
Genève a donné acte aux parties de ce qu'elles s'étaient
|
constitué des domiciles séparés et a condamné le mari à ver-
|
ser à l'épouse la somme de 4'250 fr. par mois à titre de con-
|
tribution d'entretien. Cette somme a été acquittée régulière-
|
ment par le débiteur jusqu'en janvier 2001.
|
Ensuite de la suspension de l'instance "d'accord en-
|
tre les parties" du 3 avril 1997 au 21 février 2000, les
|
époux ont déclaré leur volonté commune de divorcer. Les ques-
|
tions d'ordre financier sont demeurées litigieuses.
|
Le 22 janvier 2001, le mari a sollicité des mesures
|
provisoires tendant à ce qu'il lui soit donné acte de son en-
|
gagement de verser désormais à son épouse 2'500 fr. par mois
|
à titre de contribution d'entretien. Celle-ci s'est opposée à
|
la requête, en concluant au versement mensuel d'une contribu-
|
tion d'entretien de 4'250 fr. et à la confirmation des autres
|
dispositions de l'ordonnance sur mesures préprovisoires.
|
B.- Par jugement sur mesures provisoires du 2 mai
|
2001, le Tribunal de première instance de Genève a condamné
|
le mari à payer à l'épouse une contribution d'entretien de
|
4'250 fr. par mois. Ce faisant, il a confirmé en tant que de
|
besoin les dispositions prévues dans l'ordonnance sur mesures
|
préprovisoires du 21 décembre 1995 et a débouté le requérant
|
de toutes ses conclusions.
|
Le mari a appelé de ce jugement, en reprenant ses
|
conclusions de première instance. Par arrêt du 14 septembre
|
2001, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
|
Genève a confirmé ledit jugement, compensé les dépens et dé-
|
bouté les parties de toutes autres conclusions.
|
C.- Agissant par la voie du recours de droit public
|
au Tribunal fédéral pour violation de l'art. 9 Cst.,
|
X.________ conclut à l'annulation de l'arrêt du 14 septembre
|
2001 et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour
|
nouvelle décision dans le sens des considérants. Des observa-
|
tions n'ont pas été requises.
|
Considérant en droit :
|
1.- a) L'arrêt attaqué, en tant que décision sur me-
|
sures provisoires de divorce, ouvre la voie du recours de
|
droit public (ATF 126 III 261 consid. 1 p. 263 et les réfé-
|
rences citées); le présent recours est dès lors recevable de
|
ce chef. Formé en temps utile contre une décision rendue en
|
dernière instance cantonale, il l'est également au regard des
|
art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.
|
b) Le chef de conclusions tendant au renvoi de la
|
cause est superfétatoire: ce n'est que la conséquence d'une
|
annulation éventuelle (arrêt 5P.442/1993 du 15 décembre 1993,
|
SJ 1994 p. 433; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechts-
|
mittel in Zivilsachen, Zurich 1992, p. 226 n. 10).
|
c) Dans un recours de droit public pour arbitraire,
|
les faits ou moyens de preuve nouveaux sont en principe ex-
|
clus (ATF 120 Ia 369 consid. 3b p. 374 et les arrêts cités;
|
118 III 37 consid. 2a p. 39). Le Tribunal fédéral s'en tient
|
donc généralement à l'état de fait sur lequel la décision at-
|
taquée est fondée, à moins que le recourant n'établisse que
|
l'autorité cantonale a constaté des faits inexactement ou in-
|
complètement (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26 et l'arrêt ci-
|
té). Les compléments ou précisions que le recourant entend
|
apporter au déroulement des faits sont donc irrecevables,
|
sous réserve des moyens qui font l'objet d'un grief de viola-
|
tion de la Constitution motivé conformément aux exigences dé-
|
coulant de l'art. 90 al. 1 let. b OJ.
|
2.- Le recourant reproche d'abord à la Cour de jus-
|
tice d'avoir pris en compte un revenu hypothétique supérieur
|
à celui qu'il réalise effectivement, en se fondant sur des
|
constatations insoutenables. Le prétendu manque de clarté de
|
sa situation financière et les doutes émis quant à la véraci-
|
té de ses comptes ne reposeraient en outre sur aucun élément
|
objectif.
|
a) Lors de la fixation des contributions d'entre-
|
tien, le revenu effectif est en principe déterminant. Le dé-
|
biteur peut toutefois se voir imputer un gain hypothétique
|
supérieur à celui qu'il obtient effectivement de son travail,
|
pour autant qu'une augmentation de gain correspondante soit
|
réellement possible et qu'elle puisse raisonnablement être
|
exigée de lui. Les critères permettant de déterminer le mon-
|
tant de ce revenu hypothétique sont en particulier la quali-
|
fication professionnelle, l'âge, l'état de santé et la situa-
|
tion du marché du travail (ATF 128 III 4 consid. 4a et les
|
références citées). En matière de mesures provisoires, les
|
moyens de preuve sont toutefois limités et les faits allégués
|
doivent seulement être rendus vraisemblables (ATF 126 III 257
|
consid. 4b p. 260; 118 II 376 consid. 3 p. 377, 378 consid.
|
3b p. 381; Sutter/Freiburghaus, Kommentar zum neuen Schei-
|
dungsrecht, Zurich 1999, n. 23 ad art. 137 CC; cf. aussi
|
Fabienne Hohl, La réalisation du droit et les procédures ra-
|
pides, Fribourg 1994, p. 155 n. 485). Il serait dès lors con-
|
traire à la nature de cette procédure d'ordonner une instruc-
|
tion longue et coûteuse. Lorsque les affirmations concernant
|
le montant du revenu ne sont pas crédibles et que les pièces
|
produites ne sont pas convaincantes, le juge peut par consé-
|
quent se fonder sur le train de vie mené par les époux jus-
|
qu'à la cessation de la vie commune (Brähm/Hasenböhler, Com-
|
mentaire zurichois, n. 76 ad art. 163 CC).
|
b) Selon les constatations de l'autorité cantonale,
|
le mari exerce la profession d'architecte en qualité d'em-
|
ployé d'une société anonyme, dont il est l'actionnaire uni-
|
que. Les certificats de salaire déposés, portant sa propre
|
signature, attestaient respectivement de revenus annuels nets
|
d'un montant de 135'756 fr.30 en 1994, 121'855 fr.50 en 1998
|
et 107'522 fr.50 en 2000. Ce dernier document précisait que
|
son salaire mensuel net était passé de 9'350 fr.50 durant les
|
dix premiers mois à 7'008 fr.75 dès novembre 2000. Il ressor-
|
tait toutefois des pièces produites par l'épouse qu'il était
|
propriétaire de plusieurs biens immobiliers pouvant être des-
|
tinés à des projets de construction. Par ailleurs, il était
|
très récemment apparu dans la Feuille des Avis officiels com-
|
me mandataire de deux projets immobiliers relativement impor-
|
tants à Genève, qu'il n'avait pas mentionnés en première ins-
|
tance et à propos desquels il n'avait fourni aucune explica-
|
tion dans son mémoire d'appel. De plus, rien dans son train
|
de vie réel ne semblait avoir changé depuis le début de la
|
procédure. En effet, il occupait une villa à Chêne-Bougeries,
|
s'était trouvé en mesure de rembourser près de 30'000 fr. à
|
sa banque en 1999 et avait récemment acquis un véhicule auto-
|
mobile de luxe pour la somme de 50'000 fr. (ou DM). Il conve-
|
nait aussi de relever que les dettes décrites dans ses écri-
|
tures remontaient toutes à plus de dix ans, de sorte qu'on ne
|
pouvait y voir une modification récente de sa situation fi-
|
nancière. Enfin, il était notoire que le marché immobilier à
|
Genève, notamment celui des villas dans lequel le mari se di-
|
sait spécialisé, connaissait une spectaculaire reprise. Ces
|
circonstances laissaient apparaître que sa capacité de gain
|
réelle était supérieure à 7'000 fr. par mois. L'interdépen-
|
dance entretenue entre son patrimoine personnel, celui de sa
|
société, celui de sa concubine et, enfin, celui de la société
|
de celle-ci, ne permettait pas de déterminer avec précision
|
le montant de ses revenus effectifs. Sur ce point, la Cour de
|
justice a estimé qu'elle pouvait d'ailleurs raisonnablement
|
émettre des doutes quant à la véracité des différents comptes
|
présentés, du moment qu'ils étaient établis par le mari et
|
que l'organe de contrôle avait indiqué lors des enquêtes
|
qu'il se fiait aux indications de celui-ci et de sa secrétai-
|
re. Considérant ainsi qu'il possédait une longue expérience
|
comme architecte, qu'il avait en cours plusieurs projets de
|
construction et que le marché immobilier connaissait une im-
|
portante reprise à Genève, l'autorité cantonale a jugé qu'on
|
pouvait attendre de lui qu'il réalisât un revenu net d'au
|
moins 10'000 fr. par mois. Il s'agissait d'ailleurs du revenu
|
qu'il avait déclaré pendant plusieurs années, alors que la
|
crise des métiers de la construction sévissait véritablement.
|
c) Ces considérations n'apparaissent pas arbitrai-
|
res; du moins, le recourant ne le démontre pas (art. 90 al. 1
|
let. b OJ; ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4). Dans une argumen-
|
tation essentiellement appellatoire, et par conséquent irre-
|
cevable (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495), il prétend que les
|
biens immobiliers mentionnés par la Cour de justice, dont il
|
n'est du reste que copropriétaire, sont tous surendettés,
|
comme le démontrerait son bilan et compte de pertes et pro-
|
fits au 31 décembre 2000. En outre, les terrains sis sur la
|
commune de Z.________ se seraient révélés inconstructibles et
|
seraient invendables, ainsi qu'un témoin l'aurait confirmé.
|
Il ajoute que si ses biens immobiliers autres que des ter-
|
rains devaient être vendus, l'argent ainsi réalisé irait di-
|
rectement en main de ses créanciers. En ce qui concerne les
|
projets de construction publiés dans la Feuille des Avis of-
|
ficiels, il relève que les requêtes en autorisation de cons-
|
truire ont été déposées au nom de sa société et que, contrai-
|
rement à ce qu'à retenu l'autorité cantonale, il a expliqué
|
durant la procédure qu'il n'avait encore reçu aucune provi-
|
sion et que le projet ne serait certainement pas attribué
|
dans sa totalité à sa société. Il s'en prend aussi aux cons-
|
tations de la Cour de justice relatives à son train de vie et
|
soutient que cet élément, de même que le fait que ses dettes
|
remontent à plus de dix ans, n'est pas déterminant. Il con-
|
teste enfin la reprise du marché immobilier genevois, ainsi
|
qu'une quelconque interdépendance entre son patrimoine per-
|
sonnel et celui de sa concubine ou encore ceux de leurs so-
|
ciétés respectives.
|
Ces allégations ne sont toutefois pas propres à dé-
|
montrer que l'opinion de l'autorité cantonale relative à son
|
revenu hypothétique soit arbitraire, c'est-à-dire manifeste-
|
ment insoutenable, méconnaissant gravement une norme ou un
|
principe juridique clair et indiscuté ou encore heurtant de
|
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité
|
(ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56; 126 I 168 consid. 3a p. 170;
|
125 I 166 consid. 2a p. 168). Le recourant prétend en effet
|
en vain que la Cour de justice aurait commis des erreurs dans
|
l'évaluation de sa situation financière. Ce faisant, il se
|
borne à critiquer les motifs de l'arrêt attaqué, sans établir
|
en quoi celui-ci serait arbitraire dans son résultat (ATF 125
|
I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 con-
|
2b p. 139 et les arrêts cités). En particulier, il ne rappor-
|
te pas la preuve qu'il était insoutenable d'admettre que,
|
compte tenu de sa longue expérience d'architecte, on pouvait
|
attendre de lui qu'il réalisât un revenu net de 10'000 fr.
|
par mois. A cet égard, il sied de rappeler qu'il n'appartient
|
pas au Tribunal fédéral de procéder une nouvelle fois à
|
l'appréciation des preuves administrées, telles que les dé-
|
clarations des parties ou des témoins reproduites par le re-
|
courant dans son écriture. Au demeurant, les mesures
|
provisoires de divorce, destinées à régler temporairement la
|
situation des conjoints, sont rendues au terme d'une instruc-
|
tion sommaire (cf. supra, consid. 2a). Dans ces conditions,
|
la Cour de justice n'est pas tombée dans l'arbitraire en es-
|
timant que la capacité de gain du recourant n'avait pas dimi-
|
nué.
|
3.- Le recourant conteste en outre le décompte de
|
ses charges. Il reproche à l'autorité cantonale d'avoir rete-
|
nu un montant de 750 fr. par mois à titre de loyer au lieu
|
des 1'000 frqu'il paye réellement et d'avoir omis de tenir
|
compte du remboursement de ses prêts bancaires.
|
En ce qui concerne le loyer, la Cour de justice a
|
retenu, à l'instar du juge de première instance, un montant
|
de 750 fr. par mois, à savoir la moitié de la somme due pour
|
le logement que le recourant occupe avec sa concubine. L'au-
|
torité cantonale a en effet estimé qu'il n'y avait aucune
|
raison de tenir compte, dans le calcul du minimum vital, d'un
|
montant de 1'000 fr. par mois correspondant au loyer d'un ap-
|
partement que le mari admettait ne pas occuper sans pour au-
|
tant donner d'explications à ce propos. Cette appréciation
|
n'est à l'évidence pas insoutenable; de toute manière, le re-
|
courant ne démontre pas à satisfaction de droit qu'elle soit
|
arbitraire. Quant à ses dettes, la cour cantonale a admis un
|
montant de 500 fr. par mois correspondant au remboursement
|
d'un prêt, le recourant ayant établi qu'il s'en acquittait
|
régulièrement. Elle a en revanche considéré que le rembourse-
|
ment effectif des prêts à l'égard de l'UBS n'était pas prouvé
|
et que la banque ne paraissait pas envisager de poursuites à
|
son encontre, de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'en tenir
|
compte. Le recourant se contente d'affirmer qu'un tel raison-
|
nement est insoutenable, dès lors que c'est précisément en
|
raison de la contribution astronomique de 4'250 frqu'il
|
doit verser pour l'entretien de l'intimée qu'il n'est pas en
|
mesure de faire face à ses obligations à l'égard des banques.
|
Cet argument n'est cependant pas décisif. En effet, les det-
|
tes que le débiteur de la contribution a envers les tiers ne
|
doivent être prises en compte que restrictivement dans le
|
calcul du minimum vital. La doctrine estime que l'inclusion
|
des dettes dans le minimum vital du débirentier se justifie
|
quand elles ont été contractées alors que les époux faisaient
|
ménage commun et que leur but était l'entretien des deux con-
|
joints. En revanche, tel ne devrait pas être le cas si la
|
dette n'existe que dans l'intérêt d'un des époux, à moins que
|
les deux conjoints n'en répondent solidairement. Quant à
|
l'amortissement des dettes hypothécaires, il ne saurait être
|
pris en compte, sauf si les moyens financiers des époux le
|
permettent (ATF 127 III 289 consid. 2a/bb p. 292 et les réfé-
|
rences citées). En l'occurrence, le recourant ne prétend pas,
|
ni a fortiori ne démontre, que les prêts qu'il invoque entre-
|
raient dans la première catégorie; il ne précise du reste pas
|
non plus s'il s'agit de dettes personnelles ou de sa société
|
anonyme. Dans ces conditions, l'autorité cantonale ne saurait
|
se voir reprocher d'avoir commis arbitraire, d'autant qu'il
|
n'est pas insoutenable de s'en tenir aux charges effectives.
|
4.- Le recourant s'en prend enfin au calcul des re-
|
venus et des charges de l'intimée. Il soutient que celle-ci
|
serait en mesure d'augmenter son activité lucrative de 20 à
|
50%, compte tenu notamment de sa formation de cafetier-
|
restaurateur. L'appartement dont elle a hérité en Turquie
|
pourrait en outre lui procurer un revenu locatif de 500 fr.
|
par mois. Il critique également le montant du loyer retenu à
|
la charge de l'épouse.
|
Le fondement de l'obligation d'entretien entre les
|
conjoints réside dans l'art. 163 CC, qui impose au mari et à
|
la femme de contribuer, chacun selon ses facultés, à l'entre-
|
tien convenable de la famille. L'épouse séparée qui est libé-
|
rée des tâches du ménage commun doit en principe tirer profit
|
de sa capacité de travail supplémentaire. Si elle ne l'utili-
|
se pas, il convient de fixer la contribution provisoire en
|
prenant en compte les revenus qu'elle serait à même de réali-
|
ser (ATF 127 III 136 consid. 2a p. 139 et les références ci-
|
tées). En l'espèce, l'autorité cantonale a constaté que l'in-
|
timée n'avait pas exercé d'activité professionnelle durant le
|
mariage et qu'elle s'était vouée à l'éducation de ses en-
|
fants. Elle avait suivi l'Ecole des Beaux-Arts en Turquie et
|
avait obtenu une patente de cafetier-restaurateur à Genève,
|
mais elle n'avait jamais mis en pratique cette dernière for-
|
mation et ne possédait aucune expérience dans ce domaine. En
|
1999, elle avait pris un emploi de vendeuse à temps partiel
|
moyennant un salaire mensuel net de 2'700 fr. Après une pé-
|
riode de chômage dû à un licenciement, elle avait retrouvé un
|
travail dans ce secteur à raison de 20%, pour un revenu net
|
de 1'400 fr. par mois. Selon la Cour de justice, on ne pou-
|
vait lui reprocher d'avoir volontairement diminué son revenu
|
puisqu'elle avait au contraire commencé une activité lucrati-
|
ve au moment de la séparation du couple, réduisant d'autant
|
l'obligation d'entretien de son époux. Dès lors qu'elle était
|
âgée de 57 ans et qu'elle n'avait jamais exercé de profession
|
pendant la vie commune, qui avait duré près de 30 ans, on ne
|
pouvait exiger d'elle, dans le cadre de mesures provisoires
|
tout au moins, qu'elle travaillât à plein temps; de même, il
|
paraissait illusoire qu'elle exploitât aujourd'hui sa patente
|
de cafetier-restaurateur puisqu'elle ne possédait aucune ex-
|
périence en la matière. Ces considérations n'apparaissent pas
|
insoutenables. De toute manière, le recourant se contente une
|
fois encore d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantona-
|
le, ce qui est insuffisant au regard des exigences de motiva-
|
tion déduites de l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Il en va de même
|
de l'opinion de l'autorité cantonale selon laquelle on ne
|
pouvait retenir avec suffisamment de vraisemblance que l'ap-
|
partement situé en Turquie, dont l'intimée avait hérité en
|
1999, fût susceptible de produire un revenu locatif de 500
|
fr. par mois. En ce qui concerne le loyer de l'intimée, le
|
recourant se contente d'affirmer que le montant mensuel de
|
1'426 fr. pris en compte par la Cour de justice est excessi-
|
vement élevé pour une personne seule, d'autant qu'en ce qui
|
le concerne, l'autorité cantonale a refusé de retenir une
|
somme de 1'000 fr. par mois. Il y a toutefois lieu de rappe-
|
ler que le recourant vit en concubinage, ce qui diminue dans
|
une certaine mesure ses frais de loyer. Pour le surplus, ses
|
critiques sont purement appellatoires, et par conséquent
|
irrecevables.
|
5.- En conclusion, le recours apparaît mal fondé et
|
doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Le re-
|
courant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art.
|
156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens, des
|
observations n'ayant pas été requises.
|
Par ces motifs,
|
le Tribunal fédéral :
|
1. Rejette le recours dans la mesure où il est
|
recevable.
|
2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
|
ciaire de 2'000 fr.
|
3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
|
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
|
tice du canton de Genève.
|
__________
|
Lausanne, le 14 mars 2002
|
MDO/frs
|
Au nom de la IIe Cour civile
|
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
|
Le Président,
|
La Greffière,
|