Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
1P.320/2002 /svc
Arrêt du 23 septembre 2002
Ire Cour de droit public
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du Tribunal fédéral,
Aeschlimann, Reeb,
greffier Zimmermann.
V.________, recourant, représenté par Me Louis-Marc Perroud, avocat, case postale 538, 1701 Fribourg,
contre
Syndicat d'améliorations foncières de E.________,
par G.________, intimé,
Commission cantonale de recours en matière d'améliorations foncières du canton de Fribourg,
p.a. B.________, Président.
recours de droit public contre la décision de la Commission cantonale de recours en matière d'améliorations foncières du canton de Fribourg du 25 avril 2002
Faits:
A.
Le Syndicat d'améliorations foncières de E.________ (ci-après: le Syndicat) a mis à l'enquête publique, du 22 juin au 23 juillet 2001, un projet de remaniement parcellaire portant notamment sur le nouvel état de propriété, les soultes, les indemnités pour éloignement, les servitudes et charges foncières, les mentions, annotations et sentiers publics, ainsi que les modifications et réadaptations des taxes et des valeurs passagères. Ce projet concernait en particulier F.D.________ et B.D.________, O.________ et V.________, qui exploitent trois domaines agricoles à E.________.
Dans l'ancien état, les frères D.________ étaient propriétaires de cinq parcelles, d'une surface agricole totale de 118'924 m2 et d'une valeur estimative de 9'474'696 points, soit 80 points/m2. O.________ était propriétaire de dix-huit parcelles, d'une surface agricole totale de 215'100 m2, valant 15'441'018 points, soit 72 points/m2. V.________ était propriétaire de dix-sept parcelles, d'une surface agricole totale de 206'667 m2, valant 15'969'862 points, soit 77 points/m2. Les terrains des frères D.________ étaient répartis sur trois sites, au nord, au nord-est et au sud-ouest du village de E.________; ceux de O.________ étaient situés de part et d'autre du centre de ce village, avec un groupe de terrains au sud-est et un autre au sud, au lieu-dit "C.________". Quant à V.________, sous réserve de deux petites parcelles isolées au nord du village de E.________, ses terrains étaient sis principalement au sud de celui-ci. Les trois propriétaires avaient une partie de leurs terrains à l'est de la voie de chemin de fer (ci-après: voie CFF), laquelle traverse le territoire communal selon un axe nord-sud, à l'est du village de E.________, en aval de celui-ci.
Dans le nouvel état, tel que projeté par le Syndicat, les frères D.________ se sont vus attribuer quatre parcelles (nos 10.1 à 10.4 NE), d'une surface agricole totale de 121'543 m2 et d'une valeur estimative de 9'428'153 points, soit 78 points/m2. O.________ a reçu neuf parcelles (nos 14.1 à 14.9 NE), d'une surface agricole totale de 209'733 m2 et d'une valeur estimative de 15'404'321 points, soit 73 points/m2. Quant à V.________, il a reçu sept parcelles (nos 33.1 à 33.7 NE), d'une surface agricole totale de 218'925 m2 et d'une valeur estimative de 15'819'735 points, soit 72 points/m2. Selon le nouvel état, les terres attribuées aux frères D.________ étaient répartis sur trois sites, au sud-ouest (parcelle n° 10.3 NE), au nord (parcelle nos 10.1 et 10.4 NE) et au nord-est (parcelle n° 10.2 NE) du village de E.________; celles de O.________ étaient rassemblées à l'ouest (parcelle n° 14.2 NE), au sud-ouest (parcelle n° 14.7 NE) et à l'est (parcelles nos 14.1, 14.3, 14.4, 14.5, 14.6 et 14.9 NE) du village, avec en sus la parcelle n° 14.8 NE de "C.________". Les terres de V.________ étaient regroupées au sud-ouest, au sud et au sud-est (au lieu-dit "U.________") du village. Tous ces terrains se trouvaient de part et d'autre de la voie CFF. Une indemnité pour éloignement de 5'155 fr. a été mise à la charge du Syndicat, en faveur de V.________.
Le 19 juillet 2001, celui-ci s'est opposé au projet de nouvel état. Il a conclu que la parcelle n° 33 qui lui appartenait dans l'ancien état, formant la partie méridionale de la parcelle n° 14.1 NE, lui soit conservée. Il a revendiqué en outre la parcelle n° 10.3 NE. En échange, V.________ a offert de céder aux autres propriétaires les parcelles nos 33.5 et 33.6 NE, ainsi que toutes les terres qui lui avaient été attribuées à l'est de la voie CFF.
Après avoir tenté vainement une conciliation, la Commission de classification du Syndicat (ci-après: la Commission de classification) a, le 30 août 2001, rejeté l'opposition.
V.________ a recouru auprès de la Commission cantonale de recours en matière d'améliorations foncières du canton de Fribourg (ci-après: la Commission de recours). Il a proposé une nouvelle répartition des terres dans le nouvel état, entre lui-même, les frères D.________ et O.________. Il a requis en outre une soulte pour ses frais de mandataire et de géomètre.
Le 30 janvier 2002, la Commission de recours a procédé à une inspection des lieu et à l'audition des parties. V.________ a présenté une nouvelle conclusion, subsidiaire, selon laquelle la parcelle n° 33 AE lui serait attribuée, sous réserve d'une compensation à accorder à O.________. La Commission de recours a suspendu sa séance afin que la Commission de classification puisse se prononcer sur cette suggestion. Le 20 février 2002, la Commission de classification en a proposé le rejet.
Le 28 février 2002, la Commission de recours a repris son audience. V.________ a retiré sa conclusion subsidiaire présentée le 30 janvier 2002. La Commission de recours a rejeté la requête tendant à la désignation d'un expert.
Le 25 avril 2002, la Commission de recours a rejeté le recours.
B.
Agissant par la voie du recours de droit public, V.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 25 avril 2002. Il invoque les art. 8, 9 et 26 Cst. Il requiert une inspection locale.
La Commission de recours conclut au rejet du recours. Le Syndicat ne s'est pas déterminé.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Compte tenu du pouvoir d'examen du Tribunal fédéral (consid. 3.2 ci-dessous) et du fait que la Commission de classification et la Commission de recours se sont rendues sur place, il n'y a pas lieu de procéder à l'inspection locale requise par le recourant.
2.
La Commission de recours est une autorité spéciale de la juridiction administrative cantonale (art. 3 al. 2 let. b et 117 let. b du Code fribourgeois de procédure et de juridiction administrative (sic) du 23 mai 1991 - CPJA). Le Tribunal administratif ne connaît des recours contre les décisions rendues par les commissions de recours que lorsque la loi le prévoit (art. 114 al. 2 CPJA). Or, en matière d'améliorations foncières, les décisions rendues sur opposition et qui ont fait l'objet d'un recours auprès de la Commission de recours ne sont pas attaquables devant le Tribunal administratif, selon l'art. 208 al. 1 de la loi fribourgeoise sur les améliorations foncières, du 30 mai 1990 (LAF), a contrario. Partant, le recours de droit public formé directement contre la décision rendue par la Commission de recours est recevable au regard de l'art. 86 al. 1 OJ.
3.
Le recourant invoque le droit de propriété garanti par l'art. 26 Cst.
3.1 Les restrictions à la propriété ne sont compatibles avec la Constitution que si elles reposent sur une base légale, sont justifiées par un intérêt public suffisant et respectent le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 126 I 219 consid. 2a et 2c p. 221/222; pour la jurisprudence relative à l'art. 22ter aCst., cf. ATF 121 I 117 consid. 3b p. 120; 120 Ia 126 consid. 5a p. 142, 270 consid. 3 p. 273; 119 Ia 348 consid. 2a p. 353 et les arrêts cités).
3.2 Selon le principe de la compensation réelle - ou de l'équivalence - qui régit la confection du nouvel état de propriété dans les remaniements parcellaires, les propriétaires intéressés à une telle entreprise ont une prétention à recevoir dans la nouvelle répartition des terrains équivalant, en quantité et en qualité, à ceux qu'ils ont cédés, pour autant que le but du remaniement et les nécessités techniques le permettent (ATF 122 I 120 consid. 5 p. 127; 119 Ia 21 consid. 1a p. 24/25 et les arrêts cités). S'agissant d'un remaniement agricole touchant aux bases mêmes de l'existence d'une exploitation, l'autorité doit tenir compte non seulement de l'emplacement des terres, de leur nature et de leur qualité, mais aussi de l'organisation de l'entreprise et de ses particularités (ATF 119 Ia 21 consid. 1a p. 24/25). L'autorité doit rechercher toutes les solutions objectivement concevables pour résoudre les difficultés techniques susceptibles de compromettre la mise en oeuvre du principe de la compensation réelle (ATF 119 Ia 21 consid. 1a p. 24/25). Si elle aboutit à la conclusion que des désavantages sérieux découlent de l'attribution prévue, l'autorité doit examiner s'il est techniquement possible de l'améliorer par des changements appropriés; elle doit aussi considérer la situation des autres membres du syndicat et contrôler que la répartition des avantages et des inconvénients s'est faite de manière équitable (ATF 95 I 522 consid. 4 et 7d p. 523-525). Cette exigence découle aussi du droit à l'égalité de traitement (art. 8 Cst.). Celui-ci, qui n'a en général qu'une portée restreinte en matière d'aménagement du territoire (cf. ATF 118 Ia 151 consid. 6c p. 162; 116 Ia 193 consid. 3b p. 195; 114 Ia 254 consid. 4a p. 257 et les arrêts cités), pèse plus lourd dans le domaine des améliorations foncières, où les investissements des collectivités publiques créent des plus-values substantielles (ATF 119 Ia 21 consid. 1b p. 25/26; 105 Ia 324 consid. 2c p. 326; 95 I 522 consid. 4 p. 524). Le droit à l'égalité est toutefois réduit en tant que, selon le cours ordinaire des choses, il est rarement possible d'assurer à chacun des propriétaires touchés une participation proportionnellement égale à l'enrichissement collectif. Il suffit que les disparités relevées à l'issue de la confection du nouvel état ne soient pas manifestes ou choquantes (ATF 119 Ia 21 consid. 1b p. 25/26; 105 Ia 324 consid. 2c p. 326/327). S'il apparaît que la situation faite à un propriétaire dans le nouvel état n'est pas totalement insoutenable, mais qu'elle est pourtant clairement insatisfaisante, parce que l'autorité a omis des éléments essentiels dans la confection du nouvel état (par exemple, les particularités de l'exploitation) ou parce qu'elle a négligé d'utiliser tous les moyens techniques à disposition pour améliorer cette situation, la décision cantonale doit alors être annulée pour arbitraire (ATF 105 Ia 324 consid. 1b p. 326; dans l'arrêt G., paru aux ATF 119 Ia 21 consid. 1b p. 26, le Tribunal fédéral a évoqué dans ce contexte le déni de justice formel plutôt que matériel; cette distinction est toutefois sans incidence). Le Tribunal fédéral fait preuve de retenue dans l'examen de questions qui relèvent des circonstances locales, voire d'aspects techniques, que les autorités cantonales sont censées mieux connaître que lui (ATF 119 Ia 21 consid. 1c p. 26; 105 Ia 324 consid. 2c p. 327 et les arrêts cités).
L'art. 110 LAF, invoqué par le recourant, n'a pas de portée propre au regard de ces principes. Lorsque, comme en l'espèce, le recourant critique l'application des règles gouvernant le remaniement - notamment celle de la compensation réelle -, le grief tiré de l'art. 26 Cst. se confond avec celui de l'interdiction de l'arbitraire (ATF 119 Ia 21 consid. 1a p. 25 et les arrêts cités). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; à cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 126 I 168 consid. 3a p. 170 et les arrêts cités). Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre interprétation de la loi soit possible, ou même préférable (ATF 124 I 247 consid. 5 p. 250/251; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373; 118 Ia 497 consid. 2a p. 499).
4.
Le recourant soutient que la proposition alternative qu'il a faite dans la procédure cantonale réaliserait au mieux les objectifs du remaniement. Le refus de la Commission de classification, puis de la Commission de recours, de se rallier à ce projet aboutirait à un résultat arbitraire, inéquitable et incompatible avec le principe de la compensation réelle.
4.1 La proposition du recourant tendait à ce que la parcelle n° 10.3 NE (parcelle n° 126 AE, appartenant aux frères D.________ et maintenue dans leur domaine selon le nouvel état proposé par la Commission de classification) lui soit attribuée. Pour compenser la perte subie par les frères D.________ à la suite de cette rocade, le recourant a proposé que ceux-ci reçoivent la partie septentrionale de la parcelle n° 14.4 NE (attribuée à O.________), jouxtant au sud la parcelle n° 10.2 des frères D.________. En échange, le recourant offrait de céder à O.________ la partie méridionale de la parcelle n° 33.5 NE.
La position défendue par le recourant peut paraître paradoxale, car la solution qu'il propose lui est moins favorable que celle retenue dans le nouvel état, tant en ce qui concerne la surface agricole disponible (218'925 m2 dans le nouvel état, 209'648 m2 selon sa proposition) que la valeur estimative (15'819'735 points dans le nouvel état; 15'758'916 points selon sa proposition). A y regarder de plus près, on comprend toutefois que le but recherché par le recourant est de concentrer ses terres à proximité de sa ferme, et, sous réserve de la parcelle n° 33.91 NE, de ne plus en posséder à l'est de la voie CFF. Cela implique, selon son projet, de regrouper les terrains de O.________, hormis les parcelles nos 14.7 et 14.8. NE, aux abords du centre du village et de concentrer celles des frères D.________ dans la partie septentrionale de celui-ci. En outre, le maintien du passage à niveau non gardé traversant la voie CFF à la hauteur de la cote 587, garantirait au recourant une liaison quasi-directe avec le secteur de "U.________". Une telle répartition, assurément idéale pour le recourant, produirait toutefois, par contrecoup, des effets préjudiciables pour les autres propriétaires concernés.
Dans le nouvel état, tel que proposé par le recourant, les frères D.________ ne disposeraient plus que de trois parcelles (nos 10.1, 10.2 et 10.4), d'une surface agricole supérieure à l'ancien état; la valeur de ces terres serait inférieure à celle de l'ancien état, mais dans une moindre mesure que dans le nouvel état proposé par la Commission de classification (cf. le tableau récapitulatif établi par la Commission de classification à l'intention de la Commission de recours). Celle-ci a toutefois tenu compte, dans ses attributions, du fait que les frères D.________ ont pris à bail la parcelle n° 201 AE, propriété d'un dénommé M.________. Ce bien-fonds forme avec la parcelle n° 126 AE (10.3 NE) un ensemble, sis au sud-ouest du village, constituant le coeur de l'exploitation des frères D.________. L'attribution au recourant de la parcelle n° 126 AE (10.3 NE) qu'il revendique, romprait l'équilibre du domaine des frères D.________, de manière inacceptable pour eux et irréalisable pour le Syndicat.
Le recourant fait valoir qu'avec la solution qu'il préconise, les frères D.________ n'auraient plus à traverser le village du nord au sud pour les besoins de l'exploitation de la parcelle n° 126 AE (10.3 NE) si celle-ci leur était retirée. L'argument n'est pas pertinent. Quelle que soit la solution retenue en fin de compte, les frères D.________ continueront d'exploiter la parcelle n° 201 AE qui leur a été remise à bail. Les hypothèses que fait le recourant quant au sort du contrat y relatif, eu égard à l'âge des frères D.________ (soixante-quatre et soixante-dix ans), sont hors de propos du point de vue du remaniement. S'il est probable que les frères D.________ remettront leur domaine dans un futur plus ou moins proche, cela n'exclut pas toutefois qu'un nouvel exploitant leur succède, qui reprenne aussi le bail les liant à M.________.
La proposition du recourant présente pour O.________ l'inconvénient majeur de le priver de l'essentiel de la parcelle n° 14.4 NE et de lui attribuer les nouvelles parcelles nos 14.91 et 14.92 NE. Cette dernière se trouve dans le secteur de "U.________" et son attribution à O.________ aurait pour effet d'accentuer la dispersion de ses terres, le mettant ainsi dans une situation plus défavorable que le recourant et les frères D.________.
4.2 L'exploitation des terres sises à l'est de la voie CFF soulève des difficultés liées au franchissement de cette voie. Dans l'ancien état, tant les frères D.________ (à raison de 29% de la surface totale de leurs terres), que O.________ (à raison de 34% de la surface totale de ses terres) et le recourant (à raison de 31% de la surface totale de ses terres) y étaient confrontés. Dans le nouvel état proposé par la Commission de classification, les frères D.________ bénéficient, de ce point de vue, de la meilleure situation: leur part est quasiment maintenue (28%), alors que celle de O.________ (42%) et du recourant (45%) est sensiblement augmentée. A cet égard, toutefois, la proposition du recourant conduirait à une situation encore plus déséquilibrée, car sa part des terres sises à l'est de la voie CFF serait réduite à 12% de la surface totale, correspondant à 7% de la valeur estimative totale (cf. le tableau comparatif établi par la Commission de classification à l'intention de la Commission de recours). En outre, alors que la part des terres attenantes à la ferme était équivalente dans le nouvel état (18% de la surface totale pour ce qui concerne les frères D.________, 20% pour O.________ et 23% pour le recourant), cette proportion s'élèverait à 55% pour le recourant, selon la variante qu'il préconise. L'ensemble de ces éléments le placerait dans une situation privilégiée par rapport à celle des frères D.________ et de O.________.
4.3 Le remaniement vise notamment à la suppression des passages à niveau non gardés sur la voie CFF, en particulier de celui se trouvant à la hauteur de la cote 587, au sud-est du village (trajet méridional). Cela a pour conséquence que, pour gagner les terrains situés à l'est de la voie, le recourant devra emprunter ou bien le passage sous-voie existant à l'est du centre du village (trajet central), ou bien le passage à niveau gardé situé au nord de celui-ci (trajet septentrional). Dans un cas comme dans l'autre, le recourant sera privé de l'accès le plus court aux terrains en question (trajet méridional). En l'état, les trajets central et septentrional sont dangereux à cause de la sortie des véhicules à la hauteur de la ferme de O.________. Pour pallier ce risque, du moins pour ce qui concerne le trajet central, il est prévu, dans le nouvel état, de créer un nouveau chemin le long du bâtiment n° 158. Cette solution n'est certes pas optimale, car, dans le trajet central, le passage sous-voie existant ne présente qu'une largeur de 3m. Les convois agricoles les plus importants (comme la moissonneuse-batteuse, par exemple) ne pourront ainsi pas l'emprunter et devront faire le détour imposé par le trajet septentrional. Pour les autorités du Syndicat, cet inconvénient - qui ne touche pas le recourant seulement, mais aussi O.________ - devrait cependant demeurer l'exception. Concrètement, l'utilisation du trajet central imposera au recourant de faire parcourir à ses machines et à son bétail une distance totale de 400m environ, le long de terres qu'il ne possède pas et sur un chemin qu'il reste à créer, pour un coût de l'ordre de 50'000 fr. à prendre en charge par le Syndicat.
Il est certain que la suppression du passage à niveau non gardé, combinée avec le regroupement de toutes les terres du recourant en amont de la voie CFF (sous réserve de la parcelle n° 33.91), lui éviterait tous ces obstacles. Cette solution est cependant incompatible avec la nécessité de fermer ces passages dangereux, qui constitue un objectif non négociable du remaniement. Quant au deuxième volet de la proposition du recourant, elle s'oppose, comme on l'a vu (consid. 4.2 ci-dessus), à une répartition équitable des terres de part et d'autre de la voie CFF.
Confrontées à une situation de fait délicate, les autorités du Syndicat ont opté, en fin de compte, pour une solution qui n'est certes pas idéale; les critiques que le recourant leur adresse ne sont pas complètement dénuées de fondement. Cependant, dès l'instant où la Commission de classification s'est rendue à l'évidence qu'elle ne pouvait, sans le favoriser indûment, attribuer à l'un ou l'autre des propriétaires concernés des terres situées exclusivement à l'ouest de la voie CFF, la solution que consacre le nouvel état peut être considérée comme soutenable. Ainsi, au regard du principe de base retenu, la Commission de classification, puis la Commission de recours, pouvaient considérer sans arbitraire qu'admettre la proposition qui leur était soumise avantagerait excessivement le recourant et le placerait dans une situation trop favorable pour que le principe d'égalité soit respecté à l'égard des frères D.________, d'une part, et de O.________, d'autre part.
4.4 Le recourant conteste enfin le calcul de l'indemnité d'éloignement qui lui est attribuée selon le nouvel état.
Dans sa prise de position du 26 mars 2002 adressée à la Commission de recours, la Commission de classification a indiqué s'être fondée, pour la détermination du montant de l'indemnité en question, sur un guide établi par l'Office fédéral de l'agriculture. Pour l'ancien et le nouvel état, elle a mesuré la distance entre le centre de gravité de chaque parcelle et les bâtiments d'exploitation, puis déterminé une déduction exprimée en un pourcentage (7%) de la valeur estimative de la parcelle, qu'elle a ensuite convertie en points. Pour l'ancien état, la déduction a été évaluée à 352'334 points, pour le nouvel état à 455'429 points. A raison de 0,05 fr. par point, la valeur totale atteignait 17'617 fr. pour l'ancien état et 22'771 fr. pour le nouvel état. Le solde, soit 5'155 fr., correspondait au montant de l'indemnité.
Le recourant critique les bases de ce calcul, en faisant valoir que, contrairement à ce qu'il avait réclamé dans la procédure cantonale, il n'avait pas été procédé à un calcul par capitalisation, qui aurait tenu compte de la durée (en années) du préjudice subi. Sur ce point, il ne fait qu'opposer sa méthode à celle retenue par la Commission de classification, qui pouvait se fonder, de manière soutenable, sur la comparaison de l'état d'éloignement des parcelles dans l'ancien et le nouvel état, sans retenir, dans aucun des deux termes mis en présence, un facteur quelconque de capitalisation. Compte tenu du pouvoir d'appréciation laissé à l'autorité cantonale, qui s'est fondée sur un document émanant de services spécialisés, cette solution, sans être indiscutable, ne heurte pas la Constitution.
5.
Le recours doit ainsi être rejeté. Les frais sont mis à la charge du recourant (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Un émolument de 4'000 fr. est mis à la charge du recourant. Il n'est pas alloué de dépens.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Syndicat d'améliorations foncières de E.________ et à la Commission cantonale de recours en matière d'améliorations foncières du canton de Fribourg.
Lausanne, le 23 septembre 2002
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: