Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4C.217/2003 /ech
Arrêt du 29 janvier 2004
Ire Cour civile
Composition
MM. les Juges Corboz, Président, Walter et Favre.
Greffière: Mme Charif Feller.
Parties
X.________,
demandeur et recourant, représenté par Me Thierry Thonney,
contre
A.________ & Cie,
défenderesse et intimée, représentée par Me Benoît Chappuis.
Objet
résiliation d'un contrat de travail; échéance,
recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève du 31 octobre 2002.
Faits:
A.
A.a Le 21 décembre 1994 A.________ & Cie (ci-après: la banque) a engagé X.________ (ci-après: le demandeur) en qualité d'économiste dans son département de gérance privée et d'études financières, afin qu'il s'occupe de certains marchés de l'Europe de l'Est. Le contrat de travail a été conclu pour une durée déterminée de six mois, soit jusqu'au 30 juin 1995.
Le 9 juin 1995 les parties ont signé un nouveau contrat de travail, avec effet au 1er juillet 1995. Celui-ci prévoyait une période d'essai de trois mois avec possibilité pour chacune des parties de se libérer moyennant un préavis de 7 jours, en référence à l'art. 14 de la Convention de travail de la corporation genevoise des banquiers privés ainsi qu'à l'art. 335b al. 1 CO. Le salaire annuel brut du demandeur s'élevait à 120'000 fr. pour les années 1995 et 1996; s'y ajoutait une participation annuelle aux bénéfices (part variable) de 60'000 fr., garantie pour ces deux années.
Le contrat stipulait encore que le demandeur obtiendrait un nombre de parts à fin 1996 pour l'année 1997. Il précisait en outre que le nombre de parts et leur valeur étaient fixés par les associés de la banque à la fin de chaque année et dépendaient non seulement de la marche générale des affaires du groupe, mais aussi d'éléments subjectifs tels que les performances, le nombre d'années de service accomplies et la position du collaborateur au sein de l'entreprise.
Il résulte de la Convention de travail précitée que le demandeur avait droit à 28 jours de vacances par année de service.
A.b Dans le courant de l'année 1996, la banque a mené des négociations avec la banque B.________ (ci-après: B.________) en Pologne, en vue de créer et gérer en commun un fond d'investissements. Celui-ci a été constitué le 21 novembre 1996 sous la raison sociale "C.________" (ci-après: C.________ SA) et a été soumis au droit polonais. Le capital social était divisé en 100 parts détenues à raison de 50 par la banque et de 49 par B.________, la part restante revenant à une société polonaise. Les organes de C.________ SA étaient notamment le conseil de surveillance (supervisory board), dont faisait partie certains cadres de la banque, et le conseil de direction (management board), dont le demandeur était l'un des deux membres.
A.c Le 20 décembre 1996, la banque a créé une société d'investissement à capital variable de droit luxembourgeois, le D.________, pour une durée limitée au 31 décembre 2003, pouvant néanmoins être liquidée de manière anticipée. C.________ SA était chargée de gérer ce fond, sous la responsabilité du conseil d'administration du D.________, dont le demandeur était membre.
A.d Le 5 mars 1997, C.________ SA et le demandeur ont conclu un contrat de gestion de durée "indéterminée", pouvant, après le 30 juin 1999, être résilié par la société moyennant un préavis de six mois. Ce contrat, soumis au droit polonais, stipulait que le demandeur était membre du conseil de direction (managing board) jusqu'à l'assemblée générale de la société au printemps 1999. Il prévoyait en outre que le demandeur serait nommé pour un second mandat, sauf résiliation du contrat moyennant le préavis prévu, et qu'il pouvait être nommé pour un troisième mandat, voire d'autres mandats subséquents. Outre une rémunération de 1'000 US$, le contrat mettait le demandeur au bénéfice de divers avantages, tels le logement familial, les frais d'écolage, les primes d'assurance vie et maladie. En cas de licenciement sans justes motifs avant le 30 juin 1999, le contrat prévoyait le versement d'un montant correspondant à la somme totale de la rémunération du demandeur et des avantages reçus jusqu'à cette date. Si le demandeur n'était pas reconduit dans ses fonctions après le 30 juin 1999 et avant le 30 juin 2002, il aurait droit à un montant correspondant à sa rémunération annuelle la plus récente ainsi qu'à tous les autres avantages. Si le demandeur était licencié moyennant un préavis de six mois, il aurait droit à une indemnité correspondant à 50% de sa rémunération annuelle la plus récente et des avantages découlant du contrat.
Le 1er avril 1997, C.________ SA et le demandeur ont conclu un contrat de travail par lequel celui-ci s'engageait en tant que membre et président du conseil de direction (managing board) à gérer et à représenter la société. Sa rémunération s'élevait à 2'000 US$ par mois, les autres conditions prévues dans le contrat de gestion du 5 mars 1997 demeurant applicables. Le contrat de travail était conclu jusqu'à l'échéance du premier mandat du demandeur en tant que membre du conseil de direction. Il pouvait être prolongé automatiquement pour d'autres mandats, en cas de réélection du demandeur comme membre du conseil de direction. Le contrat de travail prévoyait également une indemnité en cas de licenciement du demandeur avant le 30 juin 1999 ainsi qu'en cas de non-réélection après le 30 juin 1999 et avant le 30 juin 2002.
A.e Dès le 1er avril 1997, la banque a expatrié le demandeur en Pologne où celui-ci a travaillé à temps complet pour C.________ SA, tout en restant employé de la banque. Pour tenir compte du coût de la vie et de l'imposition fiscale à l'étranger, la rémunération du demandeur a été adaptée. Il lui a été alloué une prime d'expatriation (hardship) d'un taux de 45% sur le salaire suisse brut (de base + parts variables + allocations) après déduction de l'impôt suisse.
Le 31 mars 1998 C.________ SA, à travers le demandeur, et la banque E.________ (ci-après: E.________) ont fondé un "limited partnership" appelé D.________-L.P., détenu principalement par E.________. Le 2 avril 1998, D.________-L.P. et D.________ ont signé un accord d'investissement en vue de l'obtention de participations dans des sociétés polonaises non cotées en bourse.
Le 29 septembre 1998, la banque a accordé au demandeur un prêt de 178'000 fr., destiné au rachat d'années d'assurance sur le fond de prévoyance de l'employeur, remboursable immédiatement en cas de cessation des relations avec la banque. Le solde au 3 août 2000 s'élevait à 114'455. 65 fr., montant admis par les parties.
A la suite d'une opération financière effectuée en Pologne début 1999, un des cadres de la banque, membre du conseil de surveillance de C.________ SA, a sollicité des éclaircissements de la part du demandeur, lequel, étant en arrêt de travail en Suisse, n'a pu les fournir. Le 7 mai 1999, le demandeur a été réélu à l'unanimité au poste de président du conseil de direction de C.________ SA, avec décharge. Le 26 mai 1999, il a conclu trois nouveaux contrats - de gestion, de travail et d'interdiction de concurrence - avec cette société. Les deux premiers sont similaires à ceux conclus en mars et avril 1997 et les remplacent. La rémunération mensuelle du demandeur s'y élève respectivement à 7'750 US$ et à 8'750 US$. La durée de ces deux nouveaux contrats est indéterminée, chacune des parties pouvant résilier le contrat de gestion en tout temps, et le contrat de travail moyennant un préavis de six mois.
A.f Il ressort d'une note adressée au demandeur le 20 août 1999 par l'un des cadres de la banque, membre du conseil de surveillance de C.________ SA, que l'assemblée générale de celle-ci a dû être repoussée, en raison de l'absence de précisions au sujet d'une opération financière. Dans une note interne du 23 août 1999, adressée notamment au demandeur, la banque fait état du manque de confiance et des plaintes de E.________ à l'égard de celui-ci.
Le 15 septembre 1999, deux cadres de la banque, membres du conseil de surveillance de C.________ SA, ont signifié au demandeur, dans les locaux de la société, la cessation des rapports de travail. Le président du conseil de surveillance de C.________ SA en a fait de même pour ce qui est de cette société. La banque a confirmé son licenciement le 28 septembre 1999, tout en proposant au demandeur un règlement à l'amiable.
Le 28 février 2000, la banque a vendu à B.________ l'intégralité des actions qu'elle détenait dans C.________ SA. La convention prévoyait que le prix de vente définitif serait fixé ultérieurement, en raison des prétentions du demandeur et de E.________.
Le demandeur ayant été incapable de travailler du 15 septembre 1999 jusqu'à fin février 2000, la banque a reconfirmé, le 23 mars 2000, son licenciement pour le 31 mai 2000.
Le 25 avril 2000, le demandeur et C.________ SA ont signé une convention mettant un terme aux contrats de gestion et de travail du 26 mai 1999. Le demandeur s'est vu attribué notamment une indemnité de 189'452.38 US$ pour la résiliation du contrat de gestion et la somme de 600'000 US$ en vertu d'une clause de non-concurrence en Pologne. La convention stipulait qu'elle ne concernait pas d'éventuels arrangements entre le demandeur et la banque, lesquels devront être réglés séparément.
B.
Par demande en justice déposée le 10 mars 2000, X.________ a assigné la banque en paiement de différents montants, modifiés en cours de procédure, qui se décomposaient le 30 mai 2000 comme suit:
- 84'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 30.09.1999 à titre d'avance sur la part variable 1999;
- 154'500 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 31.12.1999 à titre de solde de la part variable 1999;
- 4'090 US$ plus intérêts à 5% l'an dès le 01.01.2000 à titre de solde de salaire pour le mois de décembre 1999;
- 15'000 US$ plus intérêts à 5% l'an dès le 02.01.2000 à titre de remboursement d'un avis de droit;
- 109'029 US$ plus intérêts à 5% l'an dès le 01.02.2000 à titre d'indemnité vacances représentant 65 jours de vacances non prises en nature;
- 1'526'406 US$ plus intérêts à 5% l'an dès le 01.02.2000 à titre de versement du salaire sur 3 ans et demi, soit jusqu'au 30 juin 2003 (3,5 fois le salaire annuel de 436'116 US$);
- 20'000 US$ à titre de frais de déménagement;
- 180'000 US$ à titre de paiement d'indemnités pour dommages et intérêts, en suite de la résiliation anticipée du contrat de bail en Pologne.
Par la suite, le demandeur a amplifié ses conclusions en réclamant notamment 1'936'988 US$ à titre de salaire allant jusqu'au 31 décembre 2003.
Par jugement du 11 septembre 2001, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a condamné la banque à payer au demandeur:
- la somme brute de 238'500 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er janvier 2000, à titre de parts variables, sous déduction de la somme nette de 114'455.65 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 3 août 2000;
- la somme brute de 4'090 US$ avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er janvier 2000, à titre de solde de salaire pour le mois de décembre 1999;
- la somme brute de 50'805 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 15 mars 2000, à titre d'arriéré de salaire jusqu'au 30 mai 2000;
- la somme brute de 29'434 fr. 40 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er juin 2000, à titre d'indemnité de vacances.
Le Tribunal des prud'hommes a également condamné la banque à diffuser sur sa messagerie interne, dans leur intégralité, les considérants 11A. à 11C. de son jugement.
Le demandeur a appelé de ce jugement. Par arrêt du 31 octobre 2002, la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève a annulé ledit jugement quant à l'indemnité de vacances, qu'elle a fixée à 56'770 fr. au lieu de 29'434 fr. 40, et quant à la publication des considérants sur la messagerie interne de la banque.
C.
Parallèlement à un recours de droit public, qui a été rejeté, dans la mesure où il était recevable, par arrêt séparé de ce jour, le demandeur a déposé un recours en réforme dans lequel il conclut principalement à ce que l'arrêt cantonal soit réformé en ce sens que la défenderesse soit condamnée à lui verser la somme de 109'029 US$ plus intérêts à 5% l'an dès le 01.02.2000 à titre d'indemnité de vacances, la somme de 1'866'577.60 US$ à titre d'indemnité de salaire pour la période du 1er juin 2000 au 31 décembre 2003, y compris le salaire afférent aux vacances, la somme de 135'037.20 US$ à titre de loyers du 1er juin 2000 au 31 décembre 2003. Ces sommes s'ajouteraient aux montants octroyés à titre de parts variables (238'500 fr. sous déduction de 114'455.65 fr.), de solde de salaire pour le mois de décembre 1999 (4'090 US$) et d'arriéré de salaire jusqu'au 30 mai 2000 (50'805 fr.). A titre subsidiaire, le demandeur conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
La défenderesse conclut au rejet du recours.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités).
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 ibidem). Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvert pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid. 3a). Si le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, lesquelles ne peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let. b in fine OJ), il n'est lié ni par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par ceux de la décision cantonale, de sorte qu'il peut apprécier librement la qualification juridique des faits constatés (art. 63 al. 3 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a).
2.
Le litige porte principalement sur la question de la durée du contrat de travail liant les parties.
2.1 Pour le demandeur, l'accord passé avec la défenderesse, lors de son départ à l'étranger en qualité de cadre expatrié, s'accompagnait d'une garantie de durée jusqu'au 31 décembre 2003 à tout le moins. Il en déduit un droit au versement de la totalité de sa rémunération jusqu'à cette date. Tout en reconnaissant l'absence d'un accord écrit sur la durée du contrat, le demandeur reproche à la cour cantonale d'avoir violé les principes régissant l'interprétation des contrats, singulièrement de ne pas avoir appliqué le principe de la confiance. Le demandeur soutient que son statut au sein de la banque a connu une modification substantielle dès le 1er avril 1997, attestée par les circonstances, notamment par l'augmentation de sa rémunération totale annuelle. Dès lors, le contrat du 9 juin 1995 ne serait plus déterminant, s'agissant de la description de sa fonction et de son salaire. Quant à la durée des rapports de travail avec la défenderesse, elle résulterait des contrats de durée minimale, conclus avec C.________ SA, qui contiennent une clause de dédommagement en cas de rupture avant l'expiration de la durée minimale. Ainsi, en vertu du contrat de travail du 26 mai 1999, la résiliation avant le 30 juin 2003 entraînerait l'obligation pour l'employeur de verser une indemnité égale aux salaires cumulés perçus au cours des 12 mois précédant la résiliation, pour l'équivalent de la durée allant au terme du contrat. Compte tenu du délai de résiliation prévu de six mois, le premier terme serait le 31 décembre 2003. De l'avis du demandeur, les contrats conclus avec C.________ SA compléteraient le contrat de travail du 9 juin 1995 et refléteraient la volonté des parties au sujet des conditions d'expatriation, dont la durée de celle-ci.
2.2 Selon la cour cantonale, il ressort du dossier qu'au moment du départ du demandeur à l'étranger, les parties n'avaient pas conclu un accord écrit, conformément à la pratique de la défenderesse à l'égard des collaborateurs expatriés pour lesquels seules les conditions salariales étaient adaptées. La Cour d'appel estime que le demandeur, qui a pris la précaution de négocier avec C.________ SA des contrats précis, mais ne stipulant pas d'échéance au 31 décembre 2003, aurait pour le moins adressé une confirmation écrite à la défenderesse au sujet d'une éventuelle promesse orale portant sur une telle échéance. La cour cantonale constate qu'aucun des témoins n'a confirmé l'existence d'un accord sur l'échéance du contrat, hormis l'épouse du demandeur, qui admet pourtant ne pas avoir discuté avec les représentants de la défenderesse des conditions de départ de son époux. La cour cantonale relève encore que l'employeur a résilié le contrat en prévoyant un délai de deux mois pour la fin d'un mois. Enfin, s'agissant de la durée d'existence du D.________ [prévu initialement jusqu'au 31 décembre 2003], les statuts de ce fonds stipuleraient qu'il pouvait être réduit ou prolongé en tout temps. De l'avis des juges cantonaux, l'ensemble des circonstances ne permettait pas de conclure à l'existence d'un contrat de travail échéant le 31 décembre 2003.
2.3 Si la volonté réelle des parties ne peut être établie ou si elle est divergente, le juge doit interpréter les déclarations faites selon la théorie de la confiance. Il doit donc rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (cf. ATF 126 III 59 consid. 5b, 375 consid. 2e/aa p. 380). Le principe de la confiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 127 III 279 consid. 2c/ee p. 287 et les références doctrinales).
L'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner librement (ATF 129 III 118 consid. 2.5 p. 123, 664 consid. 3.1 p. 667, et les arrêts cités). Pour trancher cette question de droit, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait (ATF 129 III 118 consid. 2.5 p. 123 et les arrêts cités).
2.4 En l'espèce, la cour cantonale a recherché comment les déclarations et les attitudes des parties pouvaient être comprises de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances. On ne saurait donc lui reprocher - du moins en ce qui concerne les liens directs entre le demandeur et la défenderesse, à l'exclusion des contrats conclus avec C.________ SA (cf. consid. 2.5 et 3 ci-après) - de ne pas avoir appliqué le principe de la confiance.
L'interprétation faite est une question de droit que le Tribunal fédéral peut revoir librement. On peut, avec la cour cantonale, déduire de l'attitude des parties que celles-ci auraient rédigé un nouveau contrat ou du moins un avenant au contrat écrit du 9 juin 1995, si elles avaient voulu déroger à la pratique de la défenderesse en la matière, en accordant au demandeur une garantie minimale de durée jusqu'au 31 décembre 2003. L'absence de fixation d'une durée pour l'expatriation peut se comprendre à la lumière de la déclaration d'un témoin, retenue par l'arrêt cantonal et qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme. Selon ce témoin, la pratique de la défenderesse s'explique par le fait qu'il était inutile de poursuivre l'expatriation, si l'expatrié ne se plaisait pas à l'étranger ou s'il n'y donnait pas entière satisfaction.
2.5 Quant aux contrats - soumis au droit polonais - conclus avec C.________ SA, la question de savoir si leur durée était indéterminée, selon l'arrêt cantonal, ou déterminée, comme le soutient le recourant, peut demeurer indécise. En effet, comme il sera démontré ci-après (consid. 3), le fait que ces contrats prévoyaient des indemnités en cas de licenciement du demandeur à certaines périodes, qu'ils étaient donc conditionnels à certains égards (cf. art. 151 al. 1 CO), ne permet pas d'inférer que l'engagement initial du demandeur par la défenderesse aurait été, de ce fait, modifié et prolongé jusqu'au 31 décembre 2003 au minimum.
3.
3.1 Pour étayer sa thèse du caractère opposable à la défenderesse des contrats conclus avec C.________ SA, le demandeur soutient que celle-ci forme une société simple avec la banque. Il s'ensuivrait que les engagements de durée pris par C.________ SA devraient également être assumés par la défenderesse. Le demandeur se réfère dans ce contexte à l'arrêt 4C.41/1999 du 12 juillet 2000.
3.2 La jurisprudence citée pose, en substance, que lorsque deux personnes (ou sociétés) emploient un salarié à plein temps dont elles déterminent l'occupation, en se répartissant, sur la base d'accords internes, leurs droits et obligations envers lui, il convient d'admettre qu'elles sont liées par un contrat de société simple, dont le but est l'utilisation des services du travailleur. Par conséquent, les deux sociétés répondent dans un tel cas solidairement, et non par moitié, des dettes salariales de la société simple envers leur employé.
En l'espèce, il ressort des constatations souveraines de la cour cantonale que, dès le 1er avril 1997, le demandeur, tout en restant employé de la défenderesse, a travaillé, sur la base de contrats séparés de gestion et de travail, à temps complet pour C.________ SA. Les contrats liant le demandeur à la défenderesse, d'une part, et à C.________ SA, d'autre part, ne sauraient être qualifiés de "parallèles", comme dans la jurisprudence mentionnée, puisqu'en l'espèce, aucune des deux sociétés n'a repris le contrat de travail élaboré par l'autre. On ne peut donc transposer la durée - prétendument déterminée - de l'un des contrats à l'autre contrat de durée indéterminée. Au demeurant, il n'est nullement établi que la défenderesse et C.________ SA se soient répartis, selon leurs besoins, sur la base d'accords internes, les prestations du demandeur et, par conséquent, ses charges salariales (cf. consid. 3.4 ci-après). En l'occurrence, la jurisprudence citée par le demandeur ne lui est d'aucun secours.
3.3 La question litigieuse peut encore être examinée sous un autre aspect. Le capital social de C.________ SA était détenu, du moins jusqu'au 28 février 2000, à raison de 50% par la défenderesse. Il n'est donc pas exclu de considérer que ces deux sociétés formaient un groupe (cf. au sujet de la définition du groupe de sociétés, notamment de l'absence d'une notion précise de "direction unique" au sens de l'art. 663e CO: arrêt 4C.158/2002 du 20 août 2002, consid. 3.1.1, et les références doctrinales; cf. également Thomas Geiser/Kai-Peter Uhlig, Arbeitsverhältnisse im Konzern, ZBJV 139/2003 p.757 ss, 759 s., et les références doctrinales; Arthur Meier-Hayoz/Peter Forstmoser, Schweizerisches Gesellschaftsrecht, 9e éd., Berne 2004, § 23 n. 33 et 41).
Certains auteurs (Henry Peter/Francesca Birchler, Les groupes de sociétés sont des sociétés simples, SZW 1988 p. 113 ss.) admettent qu'un groupe de sociétés puisse constituer une société simple, compte tenu du but et des moyens communs des différentes sociétés du groupe, ce qui entraînerait leur responsabilité pour les obligations contractées par l'une des sociétés.
Cette position a été critiquée par la majorité de la doctrine, qui relève que les sociétés d'un groupe ne sont que très rarement liées par un contrat et qu'elles ne poursuivent que rarement un but commun avec des moyens communs. De l'avis de ces auteurs majoritaires, un groupe de sociétés constitue bien plus un édifice organisé de manière hiérarchique, au sein duquel les différentes parties poursuivent différents buts avec différents moyens, qui servent un but commun très général. Les différentes entités n'agissent pas au nom du groupe de sociétés (Geiser/Uhlig, op. cit., p. 780 ch. 3.39 et 3.40; Roland von Büren/Michael Huber, Warum der Konzern keine einfache Gesellschaft ist - eine Replik, SZW 1988 p. 213 ss., 214; Peter Forstmoser, Haftung im Konzern, in: Baer [Hrsg.], Vom Gesellschafts- zum Konzernrecht, Berne/Stuttgart/Vienne 2000, p. 89 ss., 125/126).
Même si l'on ne rejetait pas d'emblée la conception des auteurs minoritaires, l'existence d'une société simple, en l'espèce, serait douteuse. En effet, la défenderesse n'est pas liée à la société en question par un contrat spécifique. Il n'apparaît pas non plus que les deux entités aient mis en commun leurs moyens dans le cadre du but qu'elles poursuivaient, et C.________ SA n'a pas agi au nom d'un groupe.
3.4 Le demandeur fait valoir que ses activités au sein du groupe de sociétés s'étaient substantiellement modifiées après son expatriation. Il faut donc déterminer si un rapport de travail unique régissait l'ensemble de ses activités ou si celles-ci étaient réglées par différents contrats de travail (cf. Geiser/Uhlig, op. cit., p. 764 ch. 2.13 et p. 777 ch. 3.33).
Si plusieurs contrats ont été conclus avec différentes sociétés d'un groupe, il n'y a pas de présomption en faveur d'un lien entre ces contrats. Toutefois une clause allant dans ce sens peut résulter d'actes concluants (cf. Geiser/Uhlig, op. cit., p. 776 ch. 3.28 et la référence citée). En Suisse, les différentes sociétés composant un groupe sont en règle générale réunies sous une direction unique (au sens de l'art. 663e al. 1 CO; cf. Geiser/Uhlig, op. cit., p. 760 ch. 2.4), si bien que des contrats de travail indépendants les uns des autres sont rares, mais pas exclus (Geiser/Uhlig, op. cit., p. 775 ch. 3.25).
En l'espèce, le demandeur était lié, pendant la durée de son expatriation, par un contrat oral avec la défenderesse en Suisse, qui réglait les conditions salariales de son expatriation. Il était également lié, par des contrats écrits de gestion et de travail, avec C.________ SA à l'étranger. Le lien entre ces différents contrats n'est pas présumé et ne découle pas d'une clause explicite. Il ne résulte pas non plus d'actes concluants entre les parties, du moins pas en ce qui concerne la durée contractuelle. Certes, la cour cantonale reprend dans son arrêt la déclaration d'un témoin qui affirme que la rémunération du demandeur par C.________ SA, telle que fixée dans les nouveaux contrats conclus en 1999 et établis par lui, était un fait sans importance, puisque tout ce qui se payait en Pologne était déduit du total de la rémunération globale. Toutefois, ce prétendu lien factuel entre les contrats de travail conclus par le demandeur avec la défenderesse, d'une part, et C.________ SA, d'autre part, se limite à la rémunération. En effet, il résulte des constatations de fait que la défenderesse et C.________ SA ont signifié séparément la résiliation des rapports de travail au demandeur, le 15 septembre 1999. Par la suite, le demandeur et C.________ SA ont conclu séparément la convention du 25 avril 2000 qui réglait les conditions de résiliation du contrat liant le demandeur à cette société uniquement. Cela confirme que la résiliation du contrat conclu avec la défenderesse n'entraînait pas automatiquement celle des contrats conclus avec C.________ SA (cf. Geiser/Uhlig, op. cit., p. 782 ch. 3.44 in fine et p. 788/789 ch. 3.61). Partant, on ne voit pas que la durée contractuelle aurait été identique dans les deux cas. Au demeurant, si l'on devait accorder, suite au témoignage précité, une prépondérance au contrat conclu avec la défenderesse, cela signifierait plutôt l'existence d'une durée indéterminée pour le contrat conclu avec la filiale, puisque celui-ci serait alors, s'agissant de sa durée également, calqué sur le contrat principal conclu avec la maison mère, et non l'inverse, comme le soutient en définitive le demandeur.
Il s'ensuit que le demandeur n'est pas fondé à requérir des prétentions salariales pour la période postérieure à la résiliation de son contrat de travail, soit au 31 mai 2000.
4.
4.1 Le demandeur soutient que la cour cantonale a violé l'art. 329d al. 1 CO, en vertu duquel l'employeur verse au travailleur le salaire total afférent aux vacances et une indemnité équitable en compensation du salaire en nature. Pour le demandeur, c'est à tort que la cour cantonale a limité le salaire afférent aux vacances au salaire de base annuel, auquel elle a ajouté uniquement la prime de hardship, au lieu de considérer la totalité de la rémunération brute versée, étant donné que le droit aux vacances a été exercé après la période de référence.
4.2 Pour la cour cantonale, le salaire dû pendant la durée des vacances est calculé sur la base du salaire mensuel complet. Toutefois, le 13ème salaire - et à plus forte raison les gratifications - ne doivent pas être incluses dans le calcul du salaire mensuel. L'arrêt cantonal a retenu un salaire de base annuel de 121'932 fr. et un hardship de 93'640 fr., soit un total de 215'572 fr. Il a admis que le demandeur pouvait prétendre au paiement d'une indemnité égale à 56 jours de vacances, calculée sur les années 1998 et 1999, soit: 12.07% de 215'572 fr. x 2 = 52'039 fr. A cette somme s'ajoutent 3.88% de 121'932 fr., soit 4'730.95 fr. pour 9 jours de vacances non prises pour 1997.
4.3 Il est établi et incontesté que le demandeur avait droit à 28 jours de vacances par année de service. Les pourcentages (12.07% pour 1998 et 1999; 3.88% pour 1997) ne sont pas non plus contestés.
Selon la doctrine (Rehbinder, Commentaire bernois, n. 2 ad art. 329d CO; Jürg Brühwiler, Kommentar zum Einzelarbeitsvertrag, 2e éd., Berne 1996, n. 1 ad art. 329d CO; Brunner/Bühler/Waeber, Commentaire du contrat de travail, 2e éd., n. 1 ad art. 329d CO, p. 123; Ullin Streiff/Adrian von Kaenel, Leitfaden zum Arbeitsvertragsrecht, 5e éd., Zurich 1992, n. 9 ad art. 324a/b CO en rapport avec n. 3 ad art. 329d CO; Adrian von Kaenel, Arbeitsrecht, in: Staub/Schellenberg [Hrsg.], Managementorientiertes Wirtschaftsrecht, t. 6, Zurich 1999, p. 45 en rapport avec p. 49), le salaire dû pour les vacances est calculé sur la base du salaire mensuel complet, y compris les indemnités permanentes, comme les allocations, et doit englober des indemnités en compensation du salaire en nature.
Lorsque le salaire est variable, le salaire de référence est constitué par la moyenne du salaire de l'année de service considérée. Il en va de même en cas de salaire fondé sur la participation aux résultats. Pour Rémy Wyler (Droit du travail, Berne 2002, p. 260), si le travailleur n'a pas pu bénéficier de ses vacances pendant la période de référence, le salaire afférent aux vacances après la période de référence doit tenir compte du montant du salaire annuel brut, c'est-à-dire y compris le treizième salaire et les commissions. D'autres auteurs ne font pas cette distinction de façon aussi nette; ils excluent simplement la prise en compte du treizième salaire et des gratifications pendant la période de référence (Staehelin, Commentaire zurichois, n. 5 ad art. 329 d CO, cf. toutefois n. 16 ad art. 329 d CO; Brühwiler, op. cit., n. 1 ad art. 329d CO).
4.4 Au vu de ce qui précède, la cour cantonale a considéré à tort que pour calculer le salaire afférent aux vacances, il ne fallait tenir compte que du salaire de base annuel et du hardship. De plus elle a retenu le même chiffre pour le hardship de 1998 et 1999. S'il ressort de l'arrêt cantonal que celui-ci s'élevait à 93'640 fr., en 1998, son montant n'est pas indiqué pour 1999. Quant à l'année 1997, la cour cantonale omet de tenir compte que le demandeur a travaillé dès le 1er avril 1997 à l'étranger et qu'il a, de ce fait, obtenu un hardship s'élevant à 105'373 fr., selon l'arrêt attaqué lui-même.
4.4.1 Pour calculer le salaire afférent aux vacances en l'espèce, il convient d'ajouter au salaire de base et au hardship les parts variables que le demandeur a obtenu à titre de participation aux résultats et non à titre de treizième salaire. Il ressort des faits que le montant des parts variables s'élevait à 210'000 fr. en 1997, à 226'570 fr. en 1998 et à 238'500 fr. en 1999 (cette dernière somme ayant, du reste, été allouée au demandeur par l'arrêt cantonal).
4.4.2 Dans son calcul du salaire afférent aux vacances, la cour cantonale n'a pas tenu compte des "allocations" de 1'680 fr., versées par la défenderesse en 1997, et de l'"ajustement final" de 25'929 fr., versé par la défenderesse en 1998. La nature de ces prestations n'est pas précisée dans l'arrêt cantonal. Si ces versements représentaient des indemnités permanentes (cf. consid. 4.3 ci-avant), ils doivent être pris en considération dans le calcul du salaire déterminant pour l'octroi des indemnités de vacances. Il en va de même pour d'éventuels paiements réguliers que la défenderesse aurait effectués et qui porteraient sur le loyer du logement du demandeur en Pologne ainsi que sur les primes AVS incombant en principe au travailleur.
4.4.3 De même, la cour cantonale n'a pas tenu compte de l'impôt suisse, à déduire du salaire de base selon ses propres constatations de fait (cf. lettre A.e ci-dessus), et dont le taux qu'elle indique est de 29.81% pour 1997.
Par ailleurs, le demandeur a régulièrement prétendu que la rémunération de base comprenait la prise en charge par la défenderesse d'impôts locaux dus à l'étranger. L'arrêt déféré se borne à constater que le salaire de l'employé expatrié tient compte de l'imposition fiscale (cf. lettre A.e ci-dessus) et que le revenu est corrigé avec les impôts locaux, sans revenir, lors du calcul des salaires afférents aux vacances, sur cet aspect soulevé par le demandeur. Il convient de préciser l'éventuel montant alloué régulièrement au demandeur, à titre de remboursement des impôts locaux, et d'en tenir compte pour calculer les indemnités de vacances dues.
4.4.4 En bref, les constatations de fait incomplètes ne permettent pas au Tribunal fédéral de procéder à un calcul précis des montants dus à titre de salaires afférents aux vacances pour les années 1997, 1998 et 1999, de sorte que ce calcul incombera à l'autorité cantonale, après annulation de l'arrêt attaqué et renvoi de l'affaire par application de l'art. 64 al. 1 OJ.
5.
Comme le recours doit être partiellement admis et l'arrêt attaqué annulé, quant à l'indemnité de vacances, fixée à 56'770 fr., pour insuffisance de l'état de fait en application de l'art. 64 al. 1 OJ, le grief relatif à l'inadvertance manifeste n'a plus de portée.
La valeur litigieuse dépassant 30'000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 CO). Le demandeur n'obtient pas gain de cause sur le principe de son action; il se justifie donc de répartir les frais de la présente procédure à raison de trois quarts à sa charge et d'un quart à la charge de la défenderesse (art. 156 al. 3 OJ). S'agissant des dépens, la même clé de répartition sera appliquée, ce qui revient à condamner le demandeur à allouer à la défenderesse des dépens réduits de moitié (art. 159 al. 3 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est partiellement admis.
2. L'arrêt attaqué est annulé dans la mesure où il condamne la défenderesse à payer au demandeur la somme brute de 56'770 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juin 2000. Il est confirmé pour le surplus. La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
3.
Un émolument judiciaire de 16'000 fr. est mis à raison de 12'000 fr. à la charge du demandeur et de 4'000 fr. à la charge de la défenderesse.
4.
Le demandeur versera à la défenderesse une indemnité de 9'000 fr. à titre de dépens réduits.
5.
Le présent arrêt est communiquée en copie aux mandataires des parties et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève.
Lausanne, le 29 janvier 2004
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: